[0001] La présente invention a trait à un procédé de vapocraquage d'hydrocarbures, éventuellement
en présence d'hydrogène. On sait que le vapocraquage des hydrocarbures, ou craquage
en présence de vapeur d'eau, a été utilisé aux ETATS-UNIS entre 1930 et 1940 pour
la production d'éthylène et d'hydrocarbures aromatiques.
[0002] Il s'agissait alors d'un procédé selon lequel la charge à craquer, diluée, circulait
dans des tubes chauffés de l'extérieur. L'évolution de la technologie a permis d'augmenter
les capacités de production et de faire appel à des charges d'hydrocarbures de plus
en plus lourdes.
[0003] On sait que, dans un tel procédé, la vapeur d'eau remplit plusieurs fonctions. Ainsi,
selon B. BLOURI (Etat des connaissances sur le traitement thermique des produits lourds
- Revue de l'Institut Français du Pétrole, Vol. 36 N° 1 - JANVIER-FEVRIER 1981), l'introduction
de vapeur d'eau a trois fonctions principales :
- "elle abaisse la pression partielle de l'hydrocarbure et favorise ainsi un craquage
sélectif en oléfine
- elle réduit la pression partielle des hydrocarbures aromatiques à haut poids moléculaire
et diminue leur tendance à former du coke avec la charge de craquage et à déposer
des résidus lourds sur la surface des échangeurs et des canalisations
- elle a un effet oxydant; -suffisant sur les tubes métalliques afin de diminuer,
d'une façon significative, les effets catalytiques du fer ou du nickel pour la formation
du carbone".
[0004] On trouve aussi un procédé selon lequel on cherche à remplacer la vapeur d'eau par
de l'hydrogène sous pression. L'objectif est d'obtenir une grande proportion d'alcènes
en craquant une charge sans catalyseur, en un temps de séjour très court et à une
température qui, si la charge est du naphta, est de l'ordre de 930° C.
[0005] L'utilisation de l'hydrogène présente deux avantages : la conversion des produits
lourds en produits légers est améliorée et la formation de dépôt est réduite.
[0006] Malheureusement, la présence d'une grande quantité d'hydrogène provoque des réactions
d'hydrogénation qui entrent en compétition avec les réactions de craquage proprement
dites. Il y a alors inhibition de la formation d'alcènes.
[0007] Enfin, quel que soit le cas, les effets parasites des parois apparaissent comme une
contrainte dans les procédés de vapocraquage.
[0008] De manière générale, on a cherché à éviter de faire appel à des réacteurs multi-tubulaires.On
a proposé depuis longtemps de réaliser un craquage par contact direct avec des gaz
de combustion, par exemple au moyen d'un choc thermique comme dans l'US 2 790 838.
On a aussi revendiqué des formes plus élaborées de contact. Ainsi, dans l'US 4 136
015, on introduit la charge sous forme atomisée dans le courant gazeux obtenu par
combustion du produit lourd par un oxydant, dans une zone de brûlage et de mélange,
suivie d'une zone de craquage et d'une zone de trempe.
[0009] Le réacteur présente la forme d'une buse convergente-divergente.
[0010] Toutefois, ce réacteur suppose que l'on sache maîtriser un écoulement complexe des
fluides, ainsi que le fait remarquer Barendregt - Information Chimie, N° 231, Nov.82,
p. 217-221.
[0011] " La condition fondamentale pour tout processus de craquage avec production d'oléfines
est le réglage approprié du rapport temps de séjour/température, réglage qui est possible
dans un réacteur tubulaire. Comme l'évolution récente va vers les très courts temps
de séjour, il sera plus difficile de créer cette condition fondamentale et la mise
au point de nouvelles technologies va s'avérer indispensable. "
[0012] Mais ceci implique que le mélange entre un liquide visqueux au départ et une phase
gazeuse soit réalisé de façon homogène dans un temps nettement inférieur au temps
de séjour, c'est-à-dire que le temps de pulvérisation, vaporisation et mélange soit
le plus court possible.
[0013] A ces problèmes, il convient d'ajouter ceux posés par la nécessité des changements
de charge, dans la mesure où l'on fait appel à des charges allant des plus légères
aux plus lourdes et où l'on désire contrôler le procédé, en fonction du produit final
que l'on veut privilégier : éthylène ou autre.
[0014] Ainsi, en dépit d'efforts réitérés et de nombreuses solutions proposées depuis une
cinquantaine d'années, les problèmes de base du vapocraquage restent sans solution
satisfaisante.
[0015] Or, et c'est ce qui fait l'objet de la présente invention, la demanderesse a trouvé
que l'on pouvait pallier ces inconvénients dans un procédé de contact direct, non
tubulaire.
[0016] Selon l'invention, le gaz de combustion est formé in situ et contient de la vapeur
d'eau. De plus, il sert à apporter l'énergie mécanique nécessaire à réaliser, in situ,
la surface de transfert ainsi que l'énergie thermique nécessaire au craquage; on réalise
donc un transfert thermique sans l'inconvénient d'une surface d'échange tubulaire
et on mélange intensément le gaz de combustion et la charge.
[0017] Selon le procédé de l'invention, dans une première zone 1, on introduit des réactifs
gazeux, de manière à ce que la phase gazeuse résultante présente la forme d'un écoulement
hélicoidal symétrique, lesdits réactifs réagissant dans cette zone, de manière à produire
un gaz contenant de la vapeurd'eau surchauffée qui s'évacue sous forme d'un écoulement
puits-tourbillon dans une zone 2 d'isorépar- tition dans laquelle est introduite la
charge d'hydrocarbure à craquer, au niveau de la zone en dépression relative générée
par l'écoulement puits-tourbillon, la quantité de mouvement du gaz de combustion contenant
la vapeur surchauffée étant suffisante par rapport à celle de la charge liquide pour
provoquer la rupture de ladite charge liquide, sa pulvérisation et la prise en charge
de chaque goutte formée par un élément de volume gazeux associé, la quantité de chaleur
apportée par le gaz de combustion étant suffisante pour permettre la vaporisation
de cette charge , sa surchauffe et son craquage à la température désirée.
[0018] Pratiquement, la quantité de mouvement des éléments de volume de la phase gazeuse
issue de la zone 1 est d'au moins 100 fois et de préférence entre 1 000 et 10 000
fois celle des éléments de volume associés de la phase liquide.
[0019] Contrairement à ce qui se passe pour les procédés classiques d'atomisation à distribution
de type aléatoire des éléments de volume de la phase liquide, les transferts de chaleur
peuvent être réalisés dans un temps très bref dans une zone d'isorépartition, en raison
de la qualité de contact entre les deux phases (effet dit isoflash).
[0020] Il suffit de choisir, dans ce cas, des pressions sur les gaz, faibles par rapport
à la pression dans la zone de contact.
[0021] La vitesse d'introduction du liquide, lequel peut être éventuellement prédispersé,
est généralement faible, inférieure à 10 m/s et de préférence inférieure à 5 m/s.
[0022] Selon le procédé de l'invention, la phase gazeuse puits-tourbillon est obtenue, in
situ, au moyen des gaz servant à générer le gaz de combustion contenant la vapeur
d'eau du procédé de vapocraquage.
[0023] La température de ce gaz de combustion va dépendre notamment de la nature de la charge
à craquer et des produits finals que l'on veut privilégier, mais elle doit être en
tout état de cause suffisante pour provoquer le craquage de la charge, en tout cas
supérieure aux températures de craquage dans des réacteurs tubulaires . qui sont de
de l'ordre de 800°- 900°C.
[0024] La température de cette phase gazeuse puits-tourbillon sera donc avantageusement
la plus élevée possible, compte-tenu des possibilités de l'appareillage, c'est-à-dire
pratiquement entre 1 000 et 2 500
0 C.
[0025] Ce gaz de combustion contenant de la vapeur d'eau surchauffée peut être obtenu par
combustion d'un hydrocarbure.
[0026] La vapeur d'eau surchauffée produite dans la zone 1 peut aussi être obtenue par combustion
directe d'hydrogène et d'oxygène, l'un au moins de ces réactifs étant introduit selon
un écoulement hélicoïdal symétrique dans ladite zone.
[0027] On peut aussi introduire de l'hydrogène en excès. Cet hydrogène peut remplir plusieurs
fonctions comme diluant thermique dans la zone 1 mais aussi comme participant chimique
au craquage dans la zone 2.
[0028] On peut également utiliser une source d'oxygène non pure.
[0029] Eventuellement, on peut introduire une source d'oxygène en très faible proportion
dans la zone 2 de contact et d'isorépartition.
[0030] De manière surprenante, l'on s'est aperçu que cette vapeur d'eau surchauffée, produite
immédiatement avant la zone d'isorépartition dans laquelle se produit le craquage
(au moins partiellement), permet de pallier les inconvénients de l'art antérieur.
[0031] Bien que l'on ne soit pas en état d'expliquer de manière certaine l'action de la
vapeur d'eau dans les conditions de l'invention, on pense que l'état physico-chimique
dans lequel la vapeur d'eau s'y trouve n'est pas indifférent.
[0032] Comme dit précédemment, le procédé selon l'invention présente une grande souplesse
par rapport à la charge introduite.
[0033] Il peut être mis en oeuvre dans un dispositif qui comprend :
- une chambre amont (1), à l'intérieur de laquelle a lieu la combustion nécessaire
à la production de vapeur d'eau surchauffée
- une chambre aval (2) dans laquelle a lieu la réaction de craquage
- des moyens d'injection tangentiels et de répartition symétrique d'au moins une source
gazeuse du groupe de l'hydrogène, des hydrocarbures et de l'oxygène
- un passage restreint aval, de manière à conférer au flux gazeux l'allure d'un écoulement
puits-tourbillon symétrique
- au moins un moyen d'introduction axiale de la charge d'hydrocarbure à l'entrée de
la chambre de craquage. Eventuellement, la charge peut être prédispersée afin de favoriser
sa pulvérisation par l'écoulement puits-tourbillon issu de la chambre de combustion
(1)
- des moyens pour effectuer une trempe sur les produits issus de la réaction.
[0034] Mais la présente invention sera plus aisément comprise à l'aide des exemples suivants,
donnés à titre illustratif, réalisés à l'aide du dispositif illustré à la figure ci-annexée,
avec le couple H
Z/0
2 servant à former la vapeur d'eau surchauffée.
[0035] Celui-ci comprend une chambre de combustion (1) qui présente une enveloppe (3), fermée
à sa partie aval par un passage restreint (4), un conduit (5) d'amenée tangentielle
d'hydrogène, un conduit d'amenée (6) d'oxygène. L'enveloppe (3) se termine en aval
par un convergent (7) dans lequel aboutit, selon l'axe de symétrie de rotation de
la chambre (1) un dispositif d'injection (8) de la charge d'hydrocarbure, sensiblement
au niveau du passage restreint (4), une chambre (2) de mise en contact prolongeant
en aval la chambre (1) selon le même axe de symétrie. Par ailleurs, la chambre (1)
présente un moyen d'allumage (9), un espace annulaire de refroidissement (10) autour
du dispositif d'injection (8) et un autre circuit de refroidissement (11) autour de
ladite chambre (1). Enfin, un dispositif de trempe (12) est ménagé à la sortie de
la chambre de contact (2).
EXEMPLES
[0036] La charge d'hydrocarbures est constituée par un carburant liquide hydrocarboné (fuel-oil
domestique selon les normes françaises, de type 2 selon la norme ASTM).
[0037] Dans les exemples on fait varier le couple température/temps de séjour avec un dispositif
de 20 cm de dimension hors-tout.

[0038] Les exemples 1 et 2 sont réalisés avec une chambre 2 en forme de bicône comme sur
la figure.
[0039] A l'exemple 3 on remplace le bicôue par un tube.

[0040] Sur ces exemples on observe :
- que le taux de transformation de la charge en moins de C5 est supérieur à 80 X, c'est-à-dire qu'il est excellent, aussi bon que pour un naphta
plus léger, par un procédé conventionnel (réacteur tubulaire), ce qui correspond à
une meilleure performance.
que le rendement en C2H2 + C2H4 + C3H6 est bon, de l'ordre de 50 %,
- que l'on peut faire varier simplement la sélectivité notamment en acétylène.
que ces résultats sont obtenus avec un dispositif de faible dimension eu égard à l'encombrement
de la chambre de réaction.
[0041] On a vérifié sur un hydrocarbure lourd (fuel-oil lourd selon les normes françaises
de type 6 selon la norme ASTM) que le mélange constitué des hydrocarbures légers suivants
(CH
4-C
2H
2- C
2H
4-C
3H
6), dans les mêmes conditions qu'à l'essai 3, a une composition similiaire à celle
obtenue à partir de l'hydrocarbure léger précédent, ainsi que l'indique le tableau
III.

1) Procédé de vapocraquage d'hydrocarbures par contact direct non tubulaire, avec
formation in situ du gaz de combustion contenant de la vapeur d'eau, caractérisé par
le fait que le gaz de combustion sert à apporter l'énergie mécanique et thermique
nécessaire d'une part à réaliser, in situ, la surface de transfert et d'autre part
à assurer le craquage.
2) Procédé selon la revendication 1, caractérisé par le fait que dans une première
zone 1, on introduit des réactifs gazeux de manière à ce que la phase gazeuse en résultant
présente la forme d'un écoulement hélicoidal symétrique, lesdits réactifs réagissant
dans cette zone, de sorte à produire un gaz de combustion contenant de la vapeur d'eau
surchauffée qui s'évacue sous forme d'un écoulement puits-tourbillon dans une zone
2 d'isorépartition dans laquelle est introduite la charge d'hydrocarbure à craquer,
au niveau de la zone en dépression relative générée par l'écoulement puits-tourbillon,
la quantité de mouvement du gaz de combustion contenant de la vapeur surchauffée étant
suffisante par rapport à celle de la charge liquide pour provoquer la rupture de ladite
charge liquide, sa pulvérisation et la prise en charge de chaque goutte formée par
un élément de volume gazeux associé, la quantité de chaleur apportée par ledit gaz
de combustion étant suffisante pour permettre la vaporisation de cette charge, sa
surchauffe et son craquage à la température désirée.
3) Procédé selon la revendication 2, caractérisé par le fait que la quantité de mouvement
des éléments de la phase gazeuse est d'au moins 100 fois et de préférence de 1.000
à 10.000 fois celle des éléments de volume de la phase liquide.
4) Procédé selon l'une des revendications 1 à 3, caractérisé par le fait que la température
du gaz de combustion est supérieure à 800°C, avantageusement comprise entre 1.000
et 2.500° C.
5) Procédé selon l'une des revendications 1 à 4, caractérisé par le fait que le gaz
de combustion contenant de la vapeur d'eau surchauffée est obtenu par combustion d'un
hydrocarbure.
6) Procédé selon l'une des revendications 1 à 4, caractérisé par le fait que la vapeur
d'eau surchauffée est obtenue par combustion directe d'hydrogène et d'oxygène, l'un
au moins de ces réactifs étant introduit selon un écoulement hélicoidal symétrique.
7) Procédé selon l'une des revendications 1 à 6, caractérisé par le fait que l'on
introduit de l'hydrogène en excès.