[0001] L'invention porte sur un bain de préparation de surface, c'est-à-dire de dissolution
chimique et/ou de desoxy- sulfuration pour des pièces en alliage résistant à chaud
à base Nickel ou Fer notamment d'alliages à teneur élevée en Molybdène, c'est-à-dire
en comportant de 3,5 % à 10 % environ.
[0002] En cours de fabrication de pièces de turbomachine, avant une opération de soudage
par exemple, il est nécessaire d'enlever la couche superficielle perturbée comportant
des oxydes de métal qui s'est formée pendant les différents traitements thermiques
antérieurs. De même, avant de procéder à la réparation ou à la remise en état de telles
pièces qui ont fonctionné pendant des centaines d'heures et ont été exposées à des
gaz à haute température corrosif, il est nécessaire d'enlever les couches d'oxysulfures
contenant les oxydes des métaux constituant l'alliage et des sulfures d'origine diverse.
[0003] Les procédures usuelles pour éliminer les oxydes formés à chaud comprennent après
un dégraissage alcalin, un décalaminage en milieu alcalin ou acide, suivi d'un conditionnement
d'oxydes en milieu permanganate de potassium plus hydroxyde de potassium ou par passage
en bain de soude fondue. La phase finale de détachement d'oxydes résiduels et de blanchiment
est assurée par immersion dans des bains nitrofluorhydriques.
[0004] Cependant on a constaté que ces bains étaient inefficaces quand il s'agissait de
décaper des pièces constituées en alliage de formule NC22KDA, NC25D ou Z10CNKDW20
et que la gamme opératoire produisait une corrosion intergranulaire lorsqu'on passait
à la phase de blanchiment au bain nitrofluorhydrique, en particulier sur les pièces
à l'état vieilli.
[0005] L'examen de leur composition chimique a révélé que ces alliages contenaient une proportion
plus élevée de Molybdène :
NC22KDA, nom commercial INC0617, comporte 8 à 10 % de Molybdène,
NC25D, nom commercial NIMONIC 86, comporte 10,65 % de Molybdène,
ZIOCNKDW2O, nom commercial, HA556, comporte 2,5 à 4 % de Molybdène,
NK17CDAT, nom ASTROLOY, comporte 4,5 à 5,5 % de Molybdène, NC14K8, nom commercial,
RENE 95, comporte 3,5 % de Molybdène,
cette liste n'étant pas exhaustive.
[0006] L'objet de l'invention est donc de réaliser un bain de décapage chimique c'est-à-dire
de dissolution chimique et/ou de désoxysulfuration comportant des anions en proportion
susceptible de dissoudre les oxydes des métaux constituant les alliages et en particulier
les oxydes de Molybdène.
[0007] L'invention a également pour objet de réaliser un procédé d'utilisation de ce bain
pour le décapage chimique de pièces oxydées en cours de fabrication de façon à obtenir
un état de surface satisfaisant pour les traitements ultérieurs.
[0008] L'invention a également pour objet de réaliser un procédé d'utilisation de ce bain
pour le décapage chimique de pièces recouvertes d'oxysulfures et/ou d'oxydes après
fonctionnement.
[0009] Conformément à l'invention, on a réalisé un bain dont les éléments ont été choisis
pour leur action sur les métaux présents dans les alliages :

[0010] Les différents essais ont conduit à la réalisation d'un premier bain dont la composition
est la suivante :

[0011] Les tolérances indiquées correspondent, par rapport au montage préféré tel qu'indiqué,
aux variations acceptables des concentrations lors des utilisations répétées du bain
et qui n'ont pas d'effet sur son efficacité. Les densités (d) mentionnées correspondent
aux valeurs usuellement rencontrées pour des produits du commerce.
[0012] Le rapport H+/N0
3- a été choisi pour diminuer la passivation du matériau au cours de dissolution chimique.
L'acidité libre est très importante (12,25N) pour activer la surface du matériau.
[0013] On prépare ce bain dans une cuve de préférence à revêtement plastique en introduisant
les composants dans l'ordre de la liste ci-dessus : on met dans la cuve la quantité
d'eau indiquée, on y ajoute le sulfate ferrique lentement jusqu'à dissolution complète,
on verse lentement par petites quantités l'acide chlorhydrique en brassant la solution
au moyen d'un jet d'air comprimé, ensuite on introduit dans l'ordre et de la même
façon les trois autres acides. Lors de cette préparation, il faut surveiller la température
et éviter qu'elle ne dépasse 45°C, surtout lors de l'introduction de l'acide chlorhydrique
afin de prévenir d'éventuelles projections.
[0014] Au lieu d'utiliser le fer sous forme de sulfate ferrique, il est possible de choisir
du chlorure ferrique que l'on combine alors avec de l'acide sulfurique pour assurer
la concentration en ion sulfate. La composition du bain sera alors la suivante :

[0015] l'ordre et la température de dissolution étant à respecter pour les mêmes raisons
que précédemment. Chaque fois que cela sera possible, on préférera utiliser le premier
bain, plus commode car ne comprenant pas de manipulation d'acide sulfurique.
[0016] Les conditions d'utilisation et les résultats obtenus avec le premier bain apparaîtront
au cours de l'examen des exemples suivants :
Exemple 1
[0017] On a fait subir à six pièces d'alliages différents : Z10 CNKDW20, NC25D, NK17CDAT,
NC14K8, NC22KDA et NK15CADT recouverts d'une couche d'oxyde, plusieurs cycles de décalaminage.
Chacun de ces cycles comprend :
- un décalaminage des oxydes par immersion pendant une heure dans un bain alcalin,
par exemple le bain connu dans le commerce sous le nom de TURCO 4008-3, dont la température
est maintenue à 121° ± 3°C suivi d'une immersion pendant une heure dans un bain de
conditionnement d'oxydes au permanganate alcalin, destiné à rendre les oxydes plus
solubles par exemple le bain connu dans le commerce sous le nom TURCO 4338-C, dont
la température est régulée à 88° ± 5°C,
- enlèvement des oxydes par immersion dans le bain au sulfate ferrique de l'invention
pendant 10 minutes, la température étant régulée à 30° 1: 5°C.
[0018] L'épaisseur moyenne des oxydes avant le traitement était, suivant les pièces, de
0,010 à 0,030 mm. Après deux cycles complets, la couche d'oxyde pour chacune des pièces
avait été complètement éliminée. Aucune dissolution notable des alliages après enlèvement
des oxydes n'a été constatée.
[0019] Enfin l'examen micrographique a révélé que le bain n'avait provoqué aucune corrosion
intergranulaire.
Exemple 2
[0020] Le bain de l'invention au sulfate ferrique a été utilisé pour la désoxysulfuration
d'aubes de turbine en alliage à base Nickel (NK15CADT) qui après 12000 heures de fonctionnement
étaient recouvertes d'un dépôt important d'oxysulfures.
[0021] Pour ce traitement on a remplacé dans l'étape de conditionnement des oxydes les bains
alcalins par un bain de soude fondue également connu en soi qui a donné des résultats
équivalents. On a également constaté que l'exécution d'un léger sablage sec au Corindon
de granulométrie 160 microns sous une pression de trois bars en interopération entre
le conditionnement et le bain acide final augmentait l'efficacité de ce dernier et
permettait de réduire le nombre de cycles de décalaminage. Les résultats ont été satisfaisants
et il est apparu à l'examen micrographique que ce bain n'avait aucun effet de corrosion
intergranulaire sur un alliage vieilli en service.
Exemple 3
[0022] Des essais d'enlèvement des oxydes et des oxysulfures sur des pièces moteur ayant
fonctionné plusieurs centaines d'heures ont été réalisés. Ces pièces n'avaient subi
aucune protection thermochimique avant fonctionnement ; elles consistaient en aubes
ou secteurs de distributeur, aubes mobiles de turbine ou morceaux de chambre de combustion.
[0023] La gamme opératoine comprenait les séquences suivantes :
- premier cycle, les oxydes ont été décalaminés et conditionnés dans un bain acide
suivi d'un bain au permanganate alcalin. Après ce conditionnement connu en soi, on
a immergé les pièces dans le bain de l'invention pendant 7 minutes, la température
du bain étant maintenue à 30°±2° C On a ensuite soumis les pièces à un sablage à l'alumine
dont la granulomètrie était de 70 microns, sous une pression de 4 bars pendant 1 minute
environ.
- cycles suivants ; seules les immersions dans le bain acide de l'invention pendant
7 minutes à 30° r 2°C et le sablage ont été effectués. En effet, l'efficacité du sablage pour fracturer
la couche d'oxydes et faciliter l'action du bain acide a rendu inutile l'étape de
décalaminage des oxydes par immersion dans les bains alcalin ou acide et le conditionnement
au permanganate pour ces deux cycles.
[0024] Entre chaque cycle, on a évalué les éventuelles dissolutions par mesure des variations
de masse ; et, un examen micrographique a été réalisé sur les pièces désoxydées, pour
vérifier qu'il n'y avait pas de corrosion intergranulaire.
[0025] Les résultats ont montré pour les pièces en NK15CADT (Nom commercial IN100), NK10CAD
(nom commercial 81900) et NC13A (nom commercial INC0713) une épaisseur de dissolution
des oxydes et des oxysulfures de 0,010 à 0,040 mm après le premier cycle et de 0,010
à 0,020 mm après le deuxième cycle. La désoxydation et l'enlèvement des oxysulfures
étaient complets après ce deuxième cycle.
[0026] Il apparaît donc que le nombre de cycles avec sablage et immersion dans le bain de
l'invention après le premier cycle dépendra de l'épaisseur de la couche d'oxysulfures.
En appliquant le bain de l'invention à des pièces témoins entièrement désoxydées,
on a pu déterminer une vitesse de dissolution des alliages base Nickel de l'ordre
de 0,0013 à 0,0017 mm par minute à la température de 30°C. Cette vitesse augmente
sensiblement lorsque la température du bain est à 35°C, pour devenir 0,0024 à 0,0035
mm par minute. Cette dissolution des alliages à base Nickel conduit à prévoir un masquage
des zones à tolérances serrées comme les pieds d'aubes, de même à limiter la durée
et le nombre des immersions pour des pièces à parois minces et, à maintenir la température
du bain de préférence en-dessous de 30°C.
Exemple 4
[0027] Des essais de décalaminage et de désoxysulfuration ont été réalisés sur des pièces
fissurées après fonctionnement, notamment des aubes de distributeur en NW11AC (nom
commercial PD21). L'objet du traitement dans ce cas est de préparer les pièces en
vue d'une réparation des fissures par brasage diffusion.
[0028] La gamme opératoire mise au point consiste en :
a) - décalaminage d'oxyde en bain alcalin à 120°C pendant une heure puis un conditionnement
en bain au permanganate alcalin à 87°C pendant une heure comme dans l'exemple 1,
b) - projection de grenaille métallique (à base nickel) dont la granulométrie est
comprise entre 60 et 120 microns sous une pression de 6 bars pendant une minute. On
a choisi pour la grenaille un métal dont la base est la même que celle de la pièce
à traiter, afin de ne pas nuire au procédé ultérieur de brasage- diffusion.
c) - désoxydation chimique dans le bain de l'invention à une température de 23°C pendant
3 minutes, la température et la durée ont été choisies en fonction de l'épaisseur
de la paroi des pièces. Dans le cas présent, la paroi étant mince, on a limité l'action
du bain. Il est préférable de ne pas descendre en-dessous de la température ambiante,
soit 20°C.
d) - rinçage à l'eau avec application d'une agitation ultrasonore pendant 3 minutes,
e) - blanchiment dans un bain d'acide phosphorique contenant des inhibiteurs, à une
température de 40°C pendant 20 minutes, pour éliminer les oxydes résiduels,
f) - rinçage à l'eau avec application d'une agitation ultrasonore pendant 3 minutes.
[0029] Les opérations de b à f sont répétées deux fois avant le séchage. Les résultats ont
montré que les épaisseurs dissoutes étaient de l'ordre de 0,030 mm et que l'état de
surface hors-fissures était très bon. La pollution rapide des bains de rinçage par
les produits oxydes a montré l'efficacité de l'agitation ultrasonore pour éliminer
les produits du bain dans les fissures. Enfin, l'examen micrographique a montré que
cette gamme opératoire n'engendrait pas non plu de corrosion intergranulaire.
Exemple 5
[0030] L'emploi de ce bain peut être étendu à la préparation de surface avant soudage de
pièces à base Nickel. Actuellement, avant l'assemblage de certaines pièces de turbomachines
telles que les carters, la préparation des surfaces pour l'opération de soudage consiste
en un enlèvement superficiel de matière par traitement mécanique. Ce mode de préparation
est long et onéreux. L'utilisation du bain selon l'invention pour l'élimination de
la couche perturbée dans une opération d'usinage chimique permet d'envisager la réduction
des coûts de fabrication.
[0031] La gamme opératoire comprend un dégraissage alcalin de la surface (ou équivalent)
suivi d'une dépassivation en milieu Hcl enfin l'immersion directe dans le bain de
l'invention pendant une durée de 7 minutes à une température de 30°C. Les pièces sont
ensuite rincées à l'eau et blanchies dans un bain nitrofluorhydrique pendant 3 minutes
à température ambiante. Pour cette température et cette durée d'immersion dans le
bain de décapage chimique l'épaisseur dissoute était de 0,010mm. On a pu observer
que, même après un oubli de la pièce dans le bain et une immersion prolongée de 25
minutes oi la dissolution était de 0,048 mm, le substrat n'avait sul aucune corrosion
intergranulaire.
1) Bain de décapage chimique de pièces en alliage résistant à chaud à base Nickel
ou Fer notamment en alliage dont la teneur en Molybdène est au moins de 3,5 % caractérisé
en ce qu'il comprend un mélange d'acide chlorhydrique, d'acide nitrique, d'acide acétique,
d'acide phosphorique en milieu aqueux et qu'il contient également un sel ferrique.
2) Bain de décapage chimique selon la revendication 1, caractérisé en ce que le sel
est du sulfate ferrique.
3) Bain de décapage chimique selon la revendication précédente, caractérisé en ce
que la composition est la suivante :
4) Bain de décapage chimique selon la revendication 1, caractérisé en ce que le sel
est du chlorure ferrique.
5) Bain de décapagechimique selon la revendication 4, caractérisé en ce qu'il comprend
également de l'acide sulfurique.
6) Bain de décapage chimique selon la revendication 5, caractérisé en ce que sa composition
est la suivante :
7) Procédé de décapage chimique de pièces en alliage résistant à chaud à base Nickel
ou Fer notamment en alliage dont la teneur en Molybdène est au moins de 3,5% comprenant
l'immersion dans un bain selon l'une des revendications précédentes caractérisé en
ce que la température du bain est comprise entre 20 et 35°C.
8) Procédé de décapage chimique selon la revendication précédente caractérisé le temps
d'immersion est compris entre 3 et 10 minutes.
9) Procédé selon l'une des revendications 7 et 8 caractérisé en ce que ladite pièce
est soumise à un prétraitement en vue de favoriser l'action du bain de décapage.
10)Procédé selon la revendication précédente caractérisé en ce que ledit prétraitement
consiste à décalaminer les oxydes de la couche superficielle dans un bain alcalin
ou acide suivi d'un conditionnement dans un bain au permanganate alcalin, lesdits
bains étant connus en soi.
ll)Procédé selon la revendication précédente caractérisé en ce que le conditionnement
des oxydes est effectué dans un bain de soude fondue.
12)Procédé selon la revendication 9, 10 ou 11 caractérisé en ce que le prétraitement
comprend une projection de poudre dont la granulométrie est comprise entre 60 et 120
microns.
13.Procédé selon la revendication précédente, caractérisé en ce que la poudre est
un métal correspondant au constituant de base de l'alliage de la pièce à traitée.
l4.Procédé selon la revendication 9 caractérisé en ce que le prétraitement comprend
un dégraissage de la surface.
15.Procédé selon la revendication précédente caractérisé en ce que ce dégraissage
étant alcalin, il est suivi d'une dépassivation acide.
16.Procédé selon l'une des revendications 7 à 15 caractérisé en ce que la pièce est
soumise à un blanchiment dans un bain nitrofluoré ou phosphorique inhibé après le
traitement dans ledit bain de décapage.
17.Procédé selon l'une des revendications 7 à 16 caractérisé en ce qu'il comprend
des immersions dans des bains de rinçage à l'eau.
18.Procédé selon la revendication 17 caractérisé en ce qu'au moins l'un des bains
de rinçage dans lequel la pièce est immergée est soumis à une agitation ultrasonore.