[0001] La présente invention est relative à une nouvelle structure de pont constituée d'un
tablier et de moyens pour supporter ce tablier, et en particulier à une nouvelle structure
de pont haubané de grande portée, ainsi qu'à un procédé de construction d'un tel
pont.
[0002] Dans l'état actuel de la technique, le franchissement de grandes portées fait appel
soit à des ponts suspendus, soit à des ponts haubanés. Les ponts suspendus sont économiquement
justifiés pour les portées exceptionnelles, mais leur souplesse pose des problèmes
pour la circulation, notamment ferroviaire, et pour la stabilité aéroélastique. De
leur côté, les ponts à haubans ne présentent pas la sensibilité au vent des ponts
suspendus, particulièrement si le tablier est construit en béton, matériau qui confère
à la structure un poids suffisant et une grande rigidité. Le poids toutefois limite
les portées, de sorte qu'au-delà du domaine d'application des ponts à haubans en béton,
on a eu recours à des tabliers à structure mixte acier/béton ou à des tabliers entièrement
métalliques.
[0003] Dans l'état actuel de la technique, les tabliers haubanés à structure mixte acier/béton
ont toujours été constitués d'une membrure supérieure en béton formant dalle de chaussée,
portée par des poutres de raidissement transversales et longitudinales destinées
à transférer les charges aux haubans tout en assurant une rigidité suffisante au tablier.
Les réalisations de ce type sont récentes et mettent en évidence les limitations actuelles
des moyens connus, sur les points suivants :
- la cohabitation de la charpente métallique et du béton en ce qui concerne les
effets du retrait et des déformations lentes du béton,
- l'apparition de gradients de température créés par l'exposition au soleil de
surfaces métalliques ayant une faible inertie thermique,
- le risque de flambement d'ensemble de la structure par instabilité de la membrure
inférieure des poutres longitudinales de rigidité, lorsque les contraintes dues aux
charges, cumulées aux effets ci-dessus, s'approchent de la limite élastique en compression
du métal,
- la très faible résistance de ce type de structure vis-à-vis d'efforts accidentels
tels que l'impact d'un camion contre un hauban.
[0004] On peut remédier à plusieurs de ces inconvénients en augmentant la hauteur et l'importance
des poutres longitudinales de rigidité, mais c'est au détriment de la prise au vent
et de l'économie.
[0005] On peut aussi faire appel à des structures en treillis, car elles permettent d'obtenir
économiquement une grande rigidité de flexion et de torsion, tout en assurant une
transparence maximale vis-à-vis du vent. Dans l'état actuel de la technique, de telles
structures en treillis combinent généralement l'acier et le béton, mais malgré d'importantes
recherches dans ce domaine, aucune solution vraiment satisfaisante n'a été trouvée
pour transférer les efforts entre les membrures et les diagonales aux différentes
noeuds du treillis. Le comportement à long terme de telles solutions n'est pas connu
et les prix de revient restent élevés.
[0006] L'objet de l'invention est de pallier tous les inconvénients précédemment rappelés,
en proposant une structure nouvelle à la fois légère, rigide, et facile à réaliser,
donc économique.
[0007] L'invention fournit, pour obtenir ce résultat, un pont constitué d'un tablier, et
de moyens pour supporter ce tablier, le tablier comprenant :
- une membrure supérieure formant dalle de circulation,
- une membrure inférieure formant un élément longitudinal continu,
- des poutres de liaison, dites "diagonales" reliant les membrures supérieure
et inférieure, dirigées obliquement à la fois par rapport à la verticale et par rapport
à la longueur du pont, et formant, avec les membrures, un treillis spatial, ce pont
ayant pour particularité que les axes des diagonales convergent sur l'axe longitudinal
de la membrure inférieure ou le plan médian de la membrure supérieure.
[0008] Par "treillis spatial", on entend une structure constituée d'éléments qu'on peut
assimiler à des parties de plan ou à des segments de droite et reliés entre eux, cette
structure n'étant pas comprise dans un plan. Dans la suite, on appellera "noeuds"
les points de jonction de parties de plan et/ou de segments de droite.
[0009] De préférence, les parties de membrures qui sont soumises à des efforts de traction
importants, et les diagonales qui sont soumises à des efforts de traction importants
sont précontraintes par des moyens qui sont propres à chacune desdites membrures et
à chaque diagonale ou à deux diagonales concourantes.
[0010] Suivant des modalités préférées :
- les moyens de précontrainte des diagonales comprennent des armatures de précontrainte
ancrées à leurs deux extrémités aux points de jonction de ces diagonales avec la membrure
supérieure et dessinant un V dont le milieu est au point de jonction desdites diagonales
avec la membrure inférieure,
- la membrure inférieure est formée de tronçons successifs assemblés et est pourvue
d'armatures longitudinales de précontrainte qui mettent en compression, chacune, plusieurs
tronçons assemblés,
- les moyens de mise en précontrainte de la membrure supérieure sont constitués
par des armatures de précontrainte reliant entre eux les noeuds du treillis spatial
constitués par les points de jonction des diagonales avec ladite membrure supérieure.
[0011] La combinaison de ces trois dernières modalités aboutit à une structure particulièrement
intéressante, car toutes les parties fortement tendues de la structure du tablier
forment un réseau d'éléments précontraints.
[0012] Le tablier qu'on vient de décrire peut être intégré dans les ponts de conceptions
diverses.
[0013] Pour des ouvrages de grande ou moyenne portée, on préfère un pont haubané, et dans
ce cas on prévoit que les moyens pour supporter le tablier sont constitués par des
haubans reliant des mâts de support à des noeuds du treillis spatial constitués par
les points de jonction des diagonales avec la membrure supérieure. Dans cette hypothèse,
pour des moyennes portées, on peut prévoir que le pont comprend au moins deux membrures
inférieures continues, et un nombre égal de treillis spatiaux comprenant des diagonales
dont les axes convergent sur l'axe d'une membrure inférieure, lesdites membrures
étant reliées entre-elles par un contreventement, ces treillis spatiaux incluant
chacun une partie de la membrure supérieure, et avantageusement, que ce pont comprend
deux membrures inférieures et deux treillis spatiaux et en ce que les moyens pour
supporter le tablier sont constitués par des haubans reliant les noeuds des treillis
spatiaux qui sont situés dans le plan axial du pont à des mâts de support.
[0014] Suivant une variante, également à portée moyenne, les moyens pour supporter le tablier
sont constitués par des haubans reliant des mâts de support à des noeuds du treillis
spatial constitués par les points de jonction des diagonales avec la membrure inférieure.
[0015] L'invention peut également être appliquée à des ponts de portées beaucoup plus faibles,
et non haubanés. Dans de tels ponts où le tablier est construit de la manière conforme
à l'invention indiquée plus haut, les moyens pour supporter le tablier sont constitués
par des appuis transversaux sur lesquels repose la membrure supérieure, et il est
prévu des armatures de précontrainte supplémentaires qui suivent un tracé polygonal
reliant deux appuis transversaux successifs en passant par des points de renvoi situés
sur la membrure inférieure, et, avantageusement, lesdites armatures de précontrainte
supplémentaires ne sont pas dans le plan axial du pont.
[0016] Les moyens de jonction des diagonales aux membrures sont un élément très important
pour la mise en oeuvre de l'invention. Suivant une modalité préférée, pour assurer
la jonction entre les diagonales et la membrure inférieure, il est prévu des goussets
en tôle pliée, comportant deux ailes qui sont chacune dans un plan longitudinal contenant
l'axe de diagonales qui sont fixées sur lui, le gousset étant fixé sur la membrure
inférieure de telle façon que l'axe de pliure des ailes du gousset coïncide avec l'axe
longitudinal de la membrure inférieure. Avantageusement, on prévoit aussi que la
membrure inférieure est formée de tronçons successifs assemblés, et au moins certains
des goussets sont fixés aux points d'assemblages de tronçons successifs.
[0017] Suivant une autre modalité préférée, qui se combine avantageusement avec la précédente,
pour assurer la jonction entre les diagonales et la membrure supérieure, il est prévu
des goussets comportant une aile inférieure située dans un plan longitudinal contenant
l'axe des diagonales qui sont fixées sur lui, et une aile supérieure qui est fixée
sur la membrure supérieure, de telle façon que l'axe de pliure des ailes du gousset
se trouve dans le plan médian de la membrure supérieure.
[0018] Dans ce cas, suivant des modes de réalisation intéressants :
- le gousset porte des points d'ancrage pour des armatures de précontrainte des
diagonales et des points d'ancrage pour des armatures de précontrainte de la membrure
supérieure,
- la liaison entre le gousset et la membrure supérieure est une liaison béton-acier,
- l'aile supérieure du gousset a son plan médian situé dans un plan longitudinal
contenant l'axe de haubans supportant le point, ces haubans étant fixés sur ledit
gousset. On peut prévoir aussi que l'aile supérieure est dédoublée en deux ailes parallèles
entre lesquelles est fixé le hauban , l'axe de pliure étant dans ce cas constitué
par l'intersection des plans médians des ailes supérieure et inférieure.
[0019] Pour obtenir une plus grande légéreté, dans les ponts à très grande portée, on peut
prévoir en outre que la membrure supérieure constitue une dalle de béton renforcée
par des profilés métalliques continus et des armatures de précontrainte disposées
perpendiculairement à ces profilés métalliques.
[0020] Selon l'invention, la membrure supérieure de l'ouvrage formant dalle de chaussée
ou portant la circulation ferroviaire, est réalisée en béton armé ou précontraint;
la membrure inférieure peut être soit en béton armé ou précontraint, soit en structure
mixte acier/béton, soit entièrement métallique. On peut utiliser avantageusement un
tube métallique rempli de béton dont les caractéristiques sont décrites plus avant.
Dans la forme la plus simple de l'invention, les membrures inférieure et supérieure
sont reliées entre elles par une série de diagonales situées dans deux plans obliques
formant un triangle isocèle dans la section transversale.
[0021] Dans le cas d'un ouvrage haubané les deux rives de la dalle supérieure comportent
à intervalles réguliers les ancrages des haubans de suspension, au point de concours
des diagonales précédemment citées.
[0022] Les avantages de cette disposition résident dans l'alliance de la rigidité de torsion
et de flexion de la section avec le minimum de poids et de prise au vent, autorisant
d'importantes économies par rapport aux procédés de réalisation actuellement connus.
[0023] L'invention fournit en outre un procédé de construction original, adapté à la structure
de pont qu'on vient de décrire.
[0024] Ce procédé comprend les étapes suivantes :
- placer, sur une partie de tablier déjà montée, deux poutres longitudinales de
bordure provisoire, de part et d'autre de la membrure supérieure, en porte-à-faux
d'une longueur au moins égale à la dimension longitudinale d'une maille du treillis
spatial, chaque poutre étant maintenue par deux noeuds successifs du treillis spatial
déjà monté,
- amener une nouvelle maille de treillis spatial, cette maille comprenant au moins
un noeud situé sur la membrure inférieure, deux noeuds situés sur la membrure supérieure,
et les diagonales correspondant à ces noeuds,
- solidariser cette nouvelle maille et la partie de tablier déjà montée, en soutenant
la nouvelle maille à l'aide des poutres de bordure provisoire,
- recommencer les opérations en faisant avancer les poutres de bordure provisoire
le long de la maille qu'on vient de fixer.
[0025] Dans le cas d'un pont haubané, de préférence, lors de la solidarisation de la nouvelle
maille avec la partie de tablier déjà montée, on fixe également un hauban de suspension
sur ladite nouvelle maille.
[0026] Avantageusement, que le pont soit haubané ou non, on utilise des poutres de bordure
provisoire pourvues de moyens tels que des plots pour les immobiliser en position
correcte par rapport aux mailles du treillis spatial déjà monté.
[0027] L'invention va maintenant être décrite de façon plus détaillée, à l'aide d'exemples
pratiques, non limitatifs, illustrés à l'aide des dessins, parmi lesquels :
La figure 1 est une élévation longitudinale d'un pont haubané conformé à l'invention.
La figure 2 est la vue en plan du même ouvrage.
La figure 3 est une coupe transversale courante d'un tablier haubané montrant la membrure
supérieure en béton formant dalle de chaussée, les diagonales dans les plans obliques
et la membrure inférieure tubulaire.
La figure 4 est une vue en plan de l'ossature du tablier.
Les figures 5a et 5b sont des vues axonométriques partielles du tablier montrant
les mêmes éléments composants que sur la figure 4, pour un pont haubané ou non haubané.
Les figures 6 à 9 incluses montrent le détail d'un tronçon élémentaire de la membrure
inférieure, sa cons itution, le noeud de raccordement avec les diagonales et d'assemblage
avec les tronçons adjacents et enfin le détail du joint entre deux tronçons.
Les figures 10 à 13 montrent le détail du noeud d'assemblage supérieur selon les trois
vues (coupe transversale, élévation longitudinale et vue en plan) ainsi qu'une variante
de réalisation de l'attache des haubans.
Les figures 14 à 17 montrent les éléments structuraux complémentaires nécessaires
à la réalisation de l'invention selon l'intensité des charges supportées par le tablier
et les dimensions géométriques de celui-ci.
Les figures 18 et 19 montrent deux autres modes particuliers de réalisation de l'invention
selon lesquels une suspension haubanée unique est disposée au centre de l'ouvrage.
Les figures 20 et 21 sont des coupes, respectivement transversale et longitudinale,
partielles, illustrant un mode alternatif de réalisation de la dalle supérieure selon
lequel des profilés métalliques sont noyés dans la dalle en béton, de préférence dans
le sens longitudinal de l'ouvrage pour coopérer avec le béton à la résistance vis-à-vis
de l'effort axial dans le tablier, le solidarisation entre le béton de la dalle et
les profilés métalliques étant assurée par une précontrainte orthogonale à la direction
des profilés.
Les figures 22 et 23 sont une vue longitudinale et une coupe transversale montrant
l'application de l'invention à la réalisation de travées non haubanées, par exemple
les travées d'accès situées de part et d'autre d'une travée centrale haubanée.
Les figures 24 à 27 montrent les phases constructives successives du tablier conforme
à l'invention et les moyens particuliers nécessaires à cette construction.
[0028] Dans la réalisation des figures 1 et 2, le pont conforme à l'invention comprend un
tablier 1 constitué d'une série d'éléments spaciaux triangulés suspendus à des haubans
2, en des points régulièrement espacés. Ces haubans sont fixés vers le sommet des
mâts de support 3. Par souci de clarté, la travée centrale est représentée avec huit
éléments seulement suspendus par trois haubans de part et d'autre de la clef. Dans
le ponts de grande portée, l'espacement des haubans est variable de 10 à 20 m et le
nombre de haubans dans la demi-travée centrale peut atteindre 20 à 25.
[0029] Sous sa forme la plus simple, la section transversale du tablier 1 représentée sur
la figure 3 est un triangle isocèle constitué par une dalle (ou membrure) supérieure
4, une membrure inférieure 5 et des diagonales 6, sans appuis intermédiaires de la
dalle supérieure 4 entre les deux rives du pont. La vue en plan de la figure 4 montre,
en outre, que les plans des diagonales sont découpés en triangles tous identiques
dont les sommets sont alternativement situés sur les rives de la dalle supérieure
4 et sur la membrure centrale inférieure 5.
[0030] La membrure inférieure 5, dont le détail est donné sur la figure 6, est décomposée,
pour la réalisation de l'ouvrage, en tronçons de longueur égale séparés par des joints
permettant un assemblage rapide lors de la construction.
[0031] La membrure inférieure 5 est, dans l'exemple décrit, un tube métallique 7 rempli
ou non de béton, selon l'emplacement sur la longueur du pont et la nature des contraintes
que la sollicitent. Suivant les nécessités du projet et notamment l'intensité et le
sens des efforts appliqués à cette membrure dans l'ouvrage, il peut étre nécessaire
et avantageux de prévoir séparément ou simultanément les armatures ordinaires ou armatures
de précontrainte suivantes :
- des armatures passives noyées dans la béton dans les zones où l'effort de compression
est important pour réduire la contrainte dans les matériaux,
- des armatures de précontrainte prétendues mises en tension avant coulage du
béton et ancrées sur les brides d'extrémité de chaque tronçon de tube, destinées
à placer le tube métallique sous une compression longitudinale permanente,
- des armatures de précontrainte post-tendues, placées sous gaine 8 à l'intérieur
du béton de remplissage et destinées à mettre l'ensemble du tube métallique et du
béton de remplissage sous une compression longitudinale permanente,
- des armatures de précontrainte post-tendues 9 placées à l'extérieur du tube
et tendues dans l'ouvrage sur plusieurs tronçons après assemblage de ceux-ci.
[0032] L'assemblage entre tronçons successifs de la membrure inférieure se fait par des
brides 10 placées en regard l'une de l'autre et réunies longitudinalement par des
boulons haute résistance 11. Les brides d'extrémité de chaque tronçon comportent en
outre un gousset 12 plié selon le plan des diagonales obliques permettant un assemblage
par soudure de celles-ci avec la membrure principale inférieure. Les brides comportent
enfin et en tant que de besoin les ancrages de la précontrainte extérieure de la membrure
inférieure. L'axe de pliage du gousset 12 coïncide avec l'axe du tube 7.
[0033] Au moins certains des tronçons du tube sont remplis de béton. Le béton de remplissage
du tube, s'il existe, peut être mis en oeuvre avant ou après assemblage de la membrure
dans l'ouvrage. Dans les deux cas, il est avantageux de mettre en compression le béton
de remplissage à l'intérieur de son enveloppe métallique pour combattre les effets
ultérieurs du retrait et améliorer l'adhérence relative des deux matériaux. Contrairement
aux ouvrages faisant appel à une membrure composite tube métallique/béton de remplissage
où les variations d'effort et par conséquent les contraintes d'adhérence se produisent
de façon continue le long de la membrure, dans l'ouvrage objet de l'invention, de
telles variations d'effort n'apparaissent qu'au droit des noeuds de liaison avec les
diagonales, dans une zone où les dispositions utilisées rendent impossible tout glissement
relatif du béton et du tube. A cet effet, des raidisseurs ou connecteurs 13 sont prévus
au voisinage de la bride.
[0034] Du point de vue constructif, le remplissage en béton du tube et sa mise en compression
se fait aisément avec la coopération d'un ou de deux obturateurs provisoires placés
aux extrémités du tube et fixés aux brides d'extrémité par une série de boulons provisoires.
[0035] Dans le cas où le béton est mis en oeuvre avant assemblage de la membrure dans l'ouvrage,
il est prévu un dispositif d'injection 14 dans le joint entre deux tronçons successifs,
pour assurer une parfaite transmission des efforts longitudinaux dans le béton de
remplissage.
[0036] Le noeud supérieur sur les rives de l'ouvrage assure la transmission des efforts
des diagonales obliques à la dalle supérieure en même temps que la suspension aux
haubans. Selon le mode de réalisation de l'invention représenté sur les figures 10,
11 et 12, dont sont données respectivement une coupe transversale, une vue longitudinale
et une vue horizontale du noeud, l'élément essentiel de l'assemblage est un gousset
15 en tôle pliée dont la partie supérieure est confondue avec le plan de suspension
des haubans 2, et la partie inférieure est située dans le plan des diagonales obliques
6. Le hauban y est fixé par des moyens connus tels que chapes 16 et axe 17 ou, selon
la variante représentée sur la figure 13, par un dédoublement du gousset permettant
la fixation de l'ancrage inférieur du hauban. Les diagonales sont aisément liées au
gousset par soudure le long d'une fente pratiquée dans le tube. Pour assurer la décomposition
des efforts selon les lois de la statique, l'arête de pliure 18 du gousset est située
dans le plan moyen 19 de la dalle de chaussée. Le gousset porte en outre les ancrages
20, 21 des armatures 22, 23 de la diagonale 6 et de la dalle supérieure 4. Selon l'invention,
la transmission de tous les efforts se fait ainsi selon un cheminement direct en éliminant
toute soudure ou tout assemblage travaillant à l'arrachement qui présente toujours
un risque potentiel. Dans tous les noeuds inférieur et supérieur de la structure,
les goussets continus prévus assurent une interpénétration des membrures et des diagonales
pour réaliser le cheminement direct des efforts mentionné ci-dessus.
[0037] Dans l'équilibre général de l'ouvrage et au voisinage de la partie centrale de la
travée principale, des efforts de traction importants apparaissent, soit sous l'effet
de diffusion des forces concentrées des haubans, soit sous l'application des surcharges,
dans le trois éléments suivants du treillis :
- la membrure supérieure entre les points d'attache des haubans,
- les diagonales orientées dans le prolongement des haubans,
- la membrure inférieure entre les noeuds d'attaches des diagonales ci-dessus.
[0038] Ces éléments sont signalés par des tirets à la figure 1.
[0039] Pour assurer l'équilibre du pont sous ces efforts de traction, il est prévu selon
l'invention de mettre en oeuvre les trois familles d'armatures de précontrainte suivantes
:
- des armatures longitudinales supérieures 23 ancrées dans les goussets supérieurs
d'attache des haubans,
- des armatures obliques en V 22 placées à l'intérieur des diagonales tendues;
les armatures sont déviées à la partie basse dans la bride de la membrure inférieure
et ancrées à la partie supérieure dans le même gousset d'assemblage que ci-dessus,
- des armatures longitudinales inférieures 9 extérieures à la membrure inférieure
et précédemment décrites.
[0040] Les dispositions proposées assurent un transfert direct de toutes les charges et
une continuité complète de tous les efforts des haubans, des deux membrures et des
diagonales.
[0041] Lorsque les dimensions transversales du pont l'exige, on peut être amené à incorporer
des éléments de structures complémentaires figurant sur les figures 14 à 17 :
- des poteaux intermédiaires 24 permettent de réduire les portées de la chaussée,
donc son épaisseur, son poids et ses armatures,
- des pièces de pont transversales 25 réunissant par exemple les deux goussets
de raccordement sur les rives pour diviser la dalle de chaussée en panneaux travaillant
dans les deux sens longitudinal et transversal.
[0042] Dans certains ouvrages de portée moyenne (200 à 400 m par exemple), on peut envisager
de n'utiliser qu'un seul plan de suspension, tous les haubans étant disposés dans
le plan de symétrie du pont. Les figures 18 et 19 donnent deux dispositions possibles,
toutes deux faisant partie de l'invention.
[0043] Dans la disposition de la figure 18, les haubans 2 traversent la membrure supérieure
4 à travers des guides 26 conçus pour amortir les vibrations du système, et viennent
s'ancrer dans la membrure inférieure, à l'endroit des noeuds du treillis spatial constitués
par le jonction des diagonales avec la membrure inférieure.
[0044] Dans la disposition de la figure 19, il y a deux membrures inférieures 5 parallèles,
et deux treillis spatiaux constitués chacun d'une membrure inférieure, d'une moitié
de la membrure supérieure 4 qui est au-dessus de cette membrure inférieure, et de
diagonales 6 qui relient chaque membrure inférieure à la moitié de membrure supérieure
qui lui correspond. Un contreventement 27 relie les deux membrures inférieures 5 et
rigidifie l'ensemble en assurant la continuité du contour extérieur et la stabilité
de la section transversale, et la rigidité en torsion du tablier.
[0045] Enfin, dans les ouvrages de très grande portée (600 à 900 m par exemple), il est
vital de réduire le poids du tablier autant que faire se peut. Dans ce but, la dalle
de chaussée est elle-même constituée d'une structure mixte comprenant des profilés
métalliques continus et du béton disposé entre ceux-ci, la solidarisation des matériaux
étant réalisée par une précontrainte orthogonale à la direction des profilés. Le confinement
conféré au béton de la dalle par les profilés métalliques permet de réduire à 0,10
m l'épaisseur minimale de la dalle sans risque de poinçonnement sous les charges
concentrées des véhicules. Aux figures 20 et 21 on peut voir des profilés métalliques
28, disposés dans le sens longitudinal, et des armatures de précontrainte 29 disposées
transversalement, ces profilés et armatures étant placés dans l'épaisseur de la chaussée.
Il est clair qu'on peut aussi disposer différemment les profilés et armatures.
[0046] Conçu essentiellement pour la réalisation de ponts haubannés de grande portée, le
procédé conforme à l'invention peut être étendu à la réalisation de portées non haubanées.
Le cas se présente lorsqu'une grande travée à réaliser au-dessus d'une brèche ou d'un
chenal de navigation est encadrée de viaducs d'accès qui peuvent être avantageusement
construits selon les mêmes procédés que l'ouvrage principal.
[0047] Les figures 22 et 23 décrivent la constitution d'une travée type en élévation et
en coupe transversale respectivement.
[0048] La résistance de flexion longitudinale est conférée dans les membrures par des armatures
de précontrainte telles que 23 dans la membrure supérieure et 9 dans la membrure
inférieure, complétées en tant que de besoin par des armatures de précontrainte extérieure
30 à tracé polygonal et se recouvrant au droit des appuis constitués par des traverses
31 portées par des piles 32 et adjacentes à des jonctions de diagonales 6 à la membrure
supérieure 4. Ces armatures de précontrainte extérieure 30 relient des points 33 situés
sur les traverses 31 à proximité de leurs extrémités, c'est-à-dire à proximité de
noeuds du treillis spatial constitués par la jonction des diagonales à la membrure
supérieure, en passant par des points de déviation 34 qui sont d'autres noeuds du
treillis spatial, constitués par la jonction des diagonales à la membrure inférieure.
[0049] La résistance aux efforts tranchants est complétée par une précontrainte des diagonales
telle que 22, selon un mode de réalisation identique à celui qui a été décrit pour
une structure haubanée.
[0050] Du point de vue constructif, les dispositifs de l'invention permettent une réalisation
remarquablement simple exposée schématiquement sur les figures 24 à 27.
[0051] Supposant le tablier construit jusqu'à la configuration représentée sur la figure
24 les étapes ci-après permettent la réalisation de la phase suivante;
- Avancement longitudinal de deux poutres de bordure provisoires 35 situées en
rive immédiatement au-dessous des noeuds supérieures d'assemblage. Ces poutres présentent
la résistance suffisante pour supporter en porte-à-faux le poids propre d'un nouveau
tronçon de charpente sur la distance séparant deux haubans successifs. Chaque poutre
présente une longueur un peu supérieure à deux fois la distance ci-dessus. Au centre,
la poutre est immobilisée par un pion de centrage 36 et des barres de suspension au
droit du dernier hauban posé (figure 24). A l'arrière, la poutre trouve son appui
au droit du hauban précédent. On transporte et place par des moyens connus le nouveau
tronçon de charpente (membrure supérieure, quatre diagonales et deux goussets supérieurs
réunis provisoirement par un palonnier transversal assurant la rigidité spatiale de
l'élément) qui repose à sa position définitive sur l'extrémité des deux poutres longitudinales
provisoires. On peut accoster la membrure inférieure et solidariser les brides. On
immobilise ensuite les goussets supérieurs sur les poutres par des pions (permettant
en même temps le réglage du profil en long de l'ouvrage) et des barres de suspension,
puis on met en place un nouveau hauban.
- Il est désormais possible de couler le béton de la dalle supérieure dont le
poids est porté à l'arrière par la partie déjà construite du tablier et à l'avant
par le nouveau hauban dont la tension peut être réglée pour réaliser le profil en
long souhaité de l'ouvrage.
[0052] Bien entendu, l'invention n'est pas limitée aux exemples de réalisation décrits ci-dessus
et il est possible d'apporter à ceux-ci des modifications sans sortir du cadre de
l'invention.
1. Pont constitué d'un tablier (1) et de moyens (2, 3; 31, 32) pour supporter ce tablier,
le tablier comprenant :
- une membrure supérieure (4) formant dalle de circulation,
- une membrure inférieure (5) formant un élément longitudinal continu,
- des poutres de liaison, dites "diagonales" (6) reliant les membrures supérieure
et inférieure, dirigées obliquement à la fois par rapport à la verticale et par rapport
à la longueur du pont, et formant avec les membrures,un treillis spatial,
caractérisé en ce que les axes des diagonales convergent sur l'axe longitudinal
de la membrure inférieure ou le plan médian de la membrure supérieure.
2. Pont selon la revendication 1, caractérisé en ce que les parties des membrures
(4,5) qui sont soumises à des efforts de traction importants, et les diagonales (6)
qui sont soumises à des efforts de traction importants sont précontraintes par des
moyens (9, 23, 22) qui sont propres à chacune desdites membrures et à chaque diagonale
ou à deux diagonales concourantes.
3. Pont selon la revendication 1 ou 2, caractérisé en ce que les moyens de précontrainte
des diagonales comprennent des armatures de précontrainte (22) ancrées à leurs deux
extrémitées aux points de jonction de ces diagonales avec la membrure supérieure et
dessinant un V dont le milieu est au point de jonction desdites diagonales avec la
membrure inférieure.
4. Pont selon l'une des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que la membrure inférieure
(5) est formée de tronçons successifs assemblés et est pourvue d'armatures longitudinales
de précontrainte (9) qui mettent en compression, chacune, plusieurs tronçons assemblés.
5. Pont selon l'une des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que les moyens de
mise en précontrainte de la membrure supérieure sont constitués par des armatures
de précontrainte (23) reliant entre eux les noeuds du treillis spatial constitués
par les points de jonction des diagonales (6) avec ladite membrure supérieure.
6. Pont selon l'une des revendications 1 à 5, caractérisé en ce que les moyens pour
supporter le tablier sont constitués par des haubans (2) reliant des mâts de support
à des noeuds du treillis spatial constitués par les points de jonction des diagonales
(6) avec la membrure supérieure (4).
7. Pont selon la revendication 6, caractérisé en ce qu'il comprend au moins deux membrures
inférieures continues (5), et un nombre égal de treillis spatiaux comprenant des diagonales
(6) dont les axes convergent sur l'axe d'une membrure inférieure (5), lesdites membrures
étant reliées entre-elles par un contreventement (27), ces treillis spatiaux incluant
chacun une partie de la membrure supérieure.
8. Pont selon la revendication 7, caractérisé en ce qu'il comprend deux membrures
inférieures (5) et deux treillis spatiaux et en ce que les moyens pour supporter le
tablier sont constitués par des haubans reliant les noeuds des treillis spatiaux qui
sont situés dans le plan axial du pont à des mâts de support.
9. Pont selon l'une des revendications 1 à 5, caractérisé en ce que les moyens pour
supporter le tablier sont constitués par des haubans (2) reliant des mâts de support
à des noeuds du treillis spatial constitués par les points de jonction des diagonales
(6) avec la membrure inférieure (5)
10. Pont selon l'une des revendications 1 à 5, caractérisé en ce que les moyens pour
supporter le tablier sont constitués par des appuis transversaux (31) sur lesquels
repose la membrure supérieure, et il est prévu des armatures de précontrainte (30)
supplémentaires qui suivent un tracé polygonal reliant deux appuis transversaux successifs
en passant par des points de renvoi (34) situés sur la membrure inférieure.
11. Pont selon la revendication 10, caractérisé en ce que lesdites armatures de précontrainte
supplémentaires (30) ne sont pas dans le plan axial du pont.
12. Pont selon l'une des revendications 1 à 11, caractérisé en ce que, pour assurer
la jonction entre les diagonales et la membrure inférieure, il est prévu des goussets
(12) en tôle pliée, comportant deux ailes qui sont chacune dans un plan longitudinal
contenant l'axe de diagonales (6) qui sont fixées sur lui, le gousset étant fixé sur
la membrure inférieure de telle façon que l'axe de pliure des ailes du gousset coïncide
avec l'axe longitudinal de la membrure inférieure.
13. Pont selon la revendication 12, caractérisé en ce que la membrure inférieure (5)
est formée de tronçons successifs assemblés, et au moins certains des goussets (12)
sont fixés aux points d'assemblages de tronçons successifs.
14. Pont selon l'une des revendications 1 à 13, caractérisé en ce que, pour assurer
la jonction entre les diagonales (6) et la membrure supérieure (4), il est prévu des
goussets (15) comportant une aile inférieure située dans un plan longitudinal contenant
l'axe des diagonales qui sont fixée sur lui, et une aile supérieure qui est fixée
sur la membrure supérieure, de telle façon que l'axe de pliure des ailes du gousset
se trouve dans le plan médian de la membrure supérieure (4).
15. Pont selon la revendication 14, caractérisé en ce que le gousset (15) porte des
points d'ancrage (20) pour des armatures (22) de précontrainte des diagonales (6)
et des points d'ancrage (21) pour des armatures (23) de précontrainte de la membrure
supérieure (4).
16. Pont selon la revendication 14 ou 15, caractérisé en ce que la liaison entre le
gousset (15) et la membrure supérieure (4) est une liaison béton-acier.
17. Pont selon l'une des revendications 14 à 16, caractérisé en ce que l'aile supérieure
du gousset (15) a son plan médian situé dans un plan longitudinal contenant l'axe
de hauban (2) supportant le pont, ces haubans étant fixés sur ledit gousset.
18. Pont selon la revendication 17, caractérisé en ce que l'aile supérieure est dédoublée
en deux ailes parallèles entre lesquelles est fixé le hauban (2), l'axe de pliure
étant dans ce cas constitué par l'intersection des plans médians des ailes supérieure
et inférieure.
19. Pont selon l'une des revendications 1 à 18, caractérisé en ce que la membrure
supérieure constitue une dalle de béton renforcée par des profilés métalliques (28)
continus et des armatures de précontrainte (29) disposées perpendiculairement à ces
profilés métalliques.
20. Procédé de construction d'un pont selon l'une des revendications 1 à 19, caractérisé
en ce qu'il comprend les étapes suivantes :
- placer, sur une partie de tablier (1) déjà montée, deux poutres (35) longitudinales
de bordure provisoire, de part et d'autre de la membrure supérieure, en porte-à-faux
d'une longueur au moins égale à la dimension longitudinale d'une maille du treillis
spatial, chaque poutre étant maintenue par deux noeuds successifs du treillis spatial
déjà monté,
- amener une nouvelle maille du treillis spatial, cette maille comprenant au
moins un noeud situé sur la membrure inférieure (5), deux noeuds situés sur la membrure
supérieure (4), et les diagonales (6) correspondant à ces noeuds.
- solidariser cette nouvelle maille et la partie de tablier déjà montée, en
soutenant la nouvelle maille à l'aide des poutres de bordure provisoire,
- recommencer les opérations en faisant avancer les poutres de bordure provisoire
le long de la maille qu'on vient de fixer.
21. Procédé selon la revendication 20, caractérisé en ce que, lors de la solidarisation
de la nouvelle maille avec la partie de tablier déjà montée, on fixe également un
hauban de suspension sur ladite nouvelle maille.
22. Procédé selon la revendication 20 ou 21, caractérisé en ce qu'on utilise des poutres
de bordure provisoire pourvues de moyens tels que des plots (36) pour les immobiliser
en position correcte par rapport aux mailles du treillis spatial déjà monté.