[0001] La présente invention a pour objet un procédé de fabrication in situ d'une membrane
routière armée de fils continus et un dispositif utilisable pour ce procédé.
[0002] L'invention vise notamment la réfection des routes et chaussées fissurées, mais s'applique
également à la construction des chaussées neuves.
[0003] Traditionnellement la réfection des routes fissurées ou susceptibles de se fissurer
(chaussées semi-rigides) est réalisée par dépôt d'une couche épaisse d'enrobés à forte
teneur en liant bitumineux. Ces enrobés sont généralement fabriqués en centrale et
appliqués au moyen d'un finisseur.
[0004] Selon une autre technique, on interpose entre la couche fissurée et la couche de
roulement -constituée d'un enrobé ou d'un enduit- un mortier bitumineux composée essentiellement
de sable, d'un liant bitumineux et de fines, sur une épaisseur d'environ 1 à 3 cm.
[0005] Il est également connu d'utiliser une couche de surface ou une couche intermédiaire
constituée d'un liant bitumineux en forte épaisseur et cloutée de granulats (cf. par
exemple FR-A-2 231 815).
[0006] Selon une technique plus récente, on interpose entre la couche fissurée et la couche
de roulement un géotextile préfabriqué en usine, éventuellement avec un liant. Toutefois
ces matériaux présentent de nombreuses difficultés car il n'est pas évident de dérouler
de façon satisfaisante des rouleaux de géotextiles et de poser les lès dont le recouvrement
est délicat à réussir. De plus, ce système s'adapte très mal à la géométrie de la
chaussée et du support ; il se forme des plis dans les courbes et les changements
de dévers, qui nuisent à l'efficacité du complexe.
[0007] On a maintenant trouvé un procédé pour la construction ou la réfection des routes
et chaussées, efficace et utilisable à l'échelle désirée, par création -in situ- d'une
membrane routière armée par mise en place sur la chaussée d'un réseau de fils entrelacés
et intimement liés dans un liant bitumineux.
[0008] L'invention a donc pour but :
a) d'éviter, sur des chaussées fissurées, la remontée des fissures à travers un tapis
de roulement, tout en restant pour ce dernier, dans un complexe d'épaisseur faible;
b) d'augmenter dans tout revêtement routier sa résistance en fatigue face à la répétition
des sollicitations, tout en conservant les niveaux de module (rigidité) les plus
élevés; et
c) d'assurer l'étanchéité d'un ouvrage d'art.
[0009] L'invention concerne un procédé de fabrication in situ d'une membrane routière armée,
comprenant la mise en place d'une couche de liant, éventuellement interposition d'une
couche de base ou de liaison et finalement la mise en place d'une couche de roulement
sous forme d'un tapis d'enrobés ou d'un enduit superficiel, caractérisé en ce que
l'on projette en nappe, sur la couche de liant, un fil ou un ensemble de fils continu(s)
formant l'armature.
[0010] Le cas échéant on recouvre cette nappe de fils d'une couche de granulat ou d'un treillis
préfabriqué, avec éventuellement une couche de liant, avant la mise en place de la
ou des couches suivantes.
[0011] Selon une variante on réalise simultanément la mise en place de la couche de liant
et la projection d'un fils ou d'un ensemble de fils continu(s) sur celle-ci.
[0012] Le liant utilisé pour la première couche est soit un bitume, soit un bitume-polymère,
pouvant être fluxé ou fluidifié, et il peut être appliqué à l'aide de matériels habituels
soit à chaud, soit à froid sous forme d'émulsion, à raison de 0,2 à 4 kg/m², de préférence
0,6 à 1,5 kg/m² de liant résiduel. Les fils projetés sur ce liant s'y trouveront inclus
lors de l'application ultérieure de la couche de roulement (ou le cas échéant de la
couche de base ou de liaison) et formeront l'armature de celui-ci. Le complexe ainsi
obtenu assurera la continuité bitumineuse entre la couche de support et le nouveau
revêtement.
[0013] Les fils utilisés selon l'invention peuvent être des fils naturels ou synthétiques,
traités ou non, notamment en polyester, polyamide, polypropylène ou en dérivés cellulosiques,
ou bien en verre. On préfère les fils polyester ou polyamide. Ils peuvent être utilisés
en bobines ou ensouples de 1 à 1000 fils unitaires multibrins. Leur grade peut varier
dans une large gamme de 80 à 5000 décitex, de préférence de 150 à 400 décitex. On
utilisera selon l'invention de 30 à 400 g/m² de fils, de préférence de 40 à 120 g/m².
Les fils projetés à grande vitesse sur le liant forment avec ce dernier, dans le complexe
routier final, une membrane armée étanche.
[0014] Afin de stabiliser les fils sur le liant, et de pouvoir ensuite circuler sur ceux-ci
pour réaliser la couche de roulement venant recouvrir cette membrane armée, il est
préférable de répandre sur la surface de la nappe de fils une grille claire de granulats.
Celle-ci sera généralement formée de gravillons (par exemple 6/10 mm), répandus à
raison de 2 à 10 l/m², par exemple environ 5 l/m², mais d'autres granulom tries et
dosages sont envisageables. Ces granulats n'ont pas besoin d'être cylindrés. On peut
aussi utiliser un treillis préfabriqué, notamment un treillis métallique ou en polypropylène.
Dans certains cas une deuxième couche de liant peut être appliquée.
[0015] La couche de roulement est réalisée de manière habituelle, éventuellement avec interposition
préalable d'une couche de base ou de liaison selon les techniques courantes. L'invention
s'applique aussi bien das le cas d'un tapis d'enrobé à chaud, que dans le cas d'un
enduit superficiel.
[0016] Les exemples suivants illustrent l'invention.
EXEMPLE 1 : Réfection d'une route très fissurée par manque de structure.
[0017] On met en oeuvre à la répandeuse une émulsion de bitume-polymère (latex naturel,
tel que Neoflex
R fabriqué par la société SCREG Sud-Est) à raison de 1,2 kg/m² (soit environ 0,8 kg/m²
de liant résiduel).
[0018] On projette sur la couche de liant des fils polyester (4 fils 167 décitex de 30 brins
chacun, fourni par la société Rhône-Poulenc) à raison de 50 g/m², au moyen d'un pistolet
injecteur à air comprimé, de manière à obtenir une nappe de fils enchevêtrés.
[0019] Ensuite on répand un gravillon 6/10 à raison de 5 l/m².
[0020] Finalement on réalise la couche de roulement par mise en oeuvre d'un enrobé traditionnel
(béton bitumineux 0/10) au finisseur à raison de 80 kg/m².
[0021] A titre de comparaison, sur la même section, il a été répandu un tapis du même enrobé
que ci-dessus, dosé à 120 kg/m². Après la mise en circulation, les fissures du support
ont commencé à réapparaître, contrairement à la planche armée obtenue ci-dessus selon
l'invention.
EXEMPLE 2 : Réfection d'une route faïencée en sortie d'agglomération.
[0022] Après avoir répandu une émulsion de bitume à raison de 1,2 kg/m² (0,8 kg/m² de bitume
résiduel), on projette à l'aide d'un pistolet à air comprimé un fil polyester de 330
décitex et 60 brins (de la société Rhône-Poulenc), à partir d'un ensouple de 80 fils,
à raison de 80 g/m². On recouvre avec 5 l/m² de gravillons 6/10, puis on réalise
la couche de roulement en béton bitumineux (Compoflex
R de la société SCREG Sud-Est), répandu à raison de 80 kg/m².
[0023] Comme selon l'exemple 1, on obtient une chaussée comprenant une membrane routière
armée (liant + fils) et alliant de grandes qualités de solidité et de souplesse.
[0024] L'invention a également pour objet un dispositif utilisable dans la mise en oeuvre
du procédé décrit ci-dessus pour réaliser la projection en nappe d'un fil ou d'un
ensemble de fils, caractérisé en ce qu'il comprend un bâti, de préférence mobile,
sur lequel sont fixés des moyens de stockage des fils, des moyens de guidage des fils
et des moyens d'éjection des fils, en direction du sol.
[0025] Les moyens de stockage des fils sont constitués par au moins un support d'ensouple,
de préférence asservi par un régulateur de vitesse de l'ensouple.
[0026] Les moyens de guidage des fils sont utiles pour acheminer les fils depuis l'ensouple
jusqu'aux moyens d'éjection des fils.
[0027] Les moyens d'éjection des fils sont notamment constitués par des tubes éjecteurs
sensiblement verticaux, fonctionnant à l'aide d'un compresseur d'air. Ces tubes peuvent
être utilement munis de carters de protection. De préférence les tubes éjecteurs sont
disposés par l'intermédiaire d'un support sur une rampe extensible permettant de balayer
une largeur de route désirée.
[0028] Selon un mode de réalisation, la rampe extensible est formée d'un ensemble de biellettes
articulées entre elles, les deux biellettes formant les extrémités de la rampe coopérant
avec un vérin permettant de régler l'écartement de la rampe.
[0029] La description suivante en regard des dessins annexés illustre un mode de réalisation
du dispositif selon l'invention. Sur ces dessins :
- la Fig. 1 est une vue en élévation d'un dispositif selon l'invention pour réaliser
la projection en nappe d'un fil ou d'un ensemble de fils;
- la Fig. 2 est une vue de dessus du dispositif représenté sur la Fig 1.
[0030] Sur ces dessins le dispositif comprend un bâti 1 mobile sur lequel sont fixés des
moyens de stockage des fils constitués par un support d'ensouple 2 asservi par un
régulateur de vitesse 3 de l'ensouple 2′, des moyens de guidage 4 des fils et des
moyens d'éjections des fils, permettant de les projeter en nappe sur la couche de
liant déjà appliqué ou en même temps.
[0031] Les moyens d'éjection 5 des fils sont constitués par un ensemble de tubes éjecteurs
6 sensiblement verticaux, reliés à un compresseur d'air 7, et sont munis de carters
de protection 8 (Fig. 1). Ces tubes éjecteurs 6 sont disposés par l'intermédiaire
de leur support 9 (Fig. 1) sur une rampe extensible formée d'un ensemble de biellettes
10 articulées entre elles, les biellettes des extrémités de la rampe coopérant avec
un vérin 11 permettant de régler l'écartement de la rampe selon la largeur de la
route en réfection.
[0032] Le dispositif selon l'invention peut être disposé sur un bâti tracté ou automoteur.
Dans le cas où le bâti est tracté, ce bâti pourra être équipé d'une rampe à liant
intégrée évitant ainsi à l'ensemble de rouler sur la couche de liant.
[0033] Bien entendu, dans le cas où le bâti ne comporte pas de rampe intégrée, on utilise
une rampe, par exemple d'une répandeuse tractant ce bâti.
[0034] Dans le cas où le bâti est automoteur, celui-ci comporte une rampe à liant intégrée
de même qu'une réserve à liant.
[0035] A titre d'exemple, la chaîne cinématique embarquée sur le bâti comporte :
- une source d'énergie constituée par exemple par un moteur thermique produisant
une énergie, permettant l'alimentation hydraulique des dévidoirs, l'alimentation pneumatique
des éjecteurs et également l'alimentation électrique nécessaire aux dispositifs de
contrôles et d'asservissements associés ;
- des moyens de stockage de fils se présentant sous la forme de bobines ou d'ensouples
de 15 kg à 2 tonnes de fils de largeurs variables de 0,15 à 3,7 m et comprenant un
faisceau de fils à brins ramifiés bobiné à l'unité en multi-fils pouvant dépasser
les 1000 unités. Ces bobines ou ensouples de stockage sont freinées progressivement
en cours de travail en fonction de leur poids ;
- un système de dévidoirs permet le déroulement régulier des fils en fonction du
dosage souhaité, et
- une série d'éjecteurs à air avalant les fils en sortie des dévidoirs pour les projeter
sur la chaussée.
[0036] Eventuellement, les éjecteurs sont munis de déflecteurs permettant de dévier les
fils, pour améliorer la répartition de ceux-ci sur la chaussée.
1. Procédé de fabrication in situ d'une membrane routière armée, comprenant la mise
en place d'une couche de liant, éventuellement avec interposition d'une couche de
base ou de liaison et finalement la mise en place d'une couche de roulement sous
forme d'un tapis d'enrobés ou d'un enduit superficiel, caractérisé en ce que l'on
projette en nappe, sur la couche de liant, un fil ou un ensemble de fils continu(s)
formant l'armature.
2. Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que l'on recouvre la nappe
de fils d'une couche de granulats ou d'un treillis.
3. Procédé selon la revendication 2, caractérisé en ce que la couche de granulats
est répandue à raison de 2 à 10 l/m².
4. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que
l'on réalise simultanément la mise en place de la couche de liant et la projection
en nappe du fil ou de l'ensemble de fils continu(s).
5. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que
le liant est appliqué à raison de 0,2 à 4 kg/m².
6. Procédé selon la revendication 5, caractérisé en ce que le liant est appliqué
à raison de 0,6 à 1,5 kg/m² de liant résiduel.
7. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 6, caractérisé en ce que
les fils sont en polyester ou polyamide.
8. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 7, caractérisé en ce que
l'on utilise de 30 à 400 g/m² de fils.
9. Procédé selon la revendication 8, carac térisé en ce que l'on utilise de 40 à
120 g/m² de fils.
10. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 9, caractérisé en ce que
les fils ont un grade de 80 à 5000 décitex.
11. Dispositif utilisable dans la mise en oeuvre du procédé selon l'une quelconque
des revendications 1 à 10 pour réaliser la projection en nappe d'un fil ou d'un ensemble
de fils, caractérisé en ce qu'il comprend un bâti (1), de préférence mobile, sur lequel
sont fixés des moyens de stockage (2) des fils, des moyens de guidage (4) des fils
et des moyens d'éjection (5) des fils, en direction du sol.
12. Dispositif selon la revendication 11, caractérisé en ce que les moyens de stockage
des fils sont constitués par au moins un support d'ensouple (2), asservi par un régulateur
de vitesse (3) de l'ensouple.
13. Dispositif selon la revendication 11 ou 12, caractérisé en ce que les moyens d'éjection
des fils sont constitués par des tubes éjecteurs (6) sensiblement verticaux, fonctionnant
à l'aide d'un compresseur d'air (7).
14. Dispositif selon l'une quelconque des revendications 11 à 13, caractérisé en ce
que les tubes éjecteurs (6) sont disposés sur une rampe extensible formée d'un ensemble
de biellettes (10) articulées.
15. Dispositif selon la revendication 14, caractérisé en ce que les deux biellettes
formant les extrémités de la rampe coopèrent avec un vérin (11) permettant de régler
l'écartement de la rampe.