(19)
(11) EP 0 964 071 A1

(12) DEMANDE DE BREVET EUROPEEN

(43) Date de publication:
15.12.1999  Bulletin  1999/50

(21) Numéro de dépôt: 98110813.7

(22) Date de dépôt:  12.06.1998
(51) Int. Cl.6C22C 38/00, C22C 38/04, C22C 38/22, G04B 37/22
(84) Etats contractants désignés:
AT BE CH CY DE DK ES FI FR GB GR IE IT LI LU MC NL PT SE
Etats d'extension désignés:
AL LT LV MK RO SI

(71) Demandeur: ASULAB S.A.
CH-2501 Bienne (CH)

(72) Inventeur:
  • Magnin, Pierre
    1053 Cugy (CH)

(74) Mandataire: Ravenel, Thierry Gérard Louis et al
I C B, Ingénieurs Conseils en Brevets SA, 7, rue des Sors
2074 Marin
2074 Marin (CH)

   


(54) Acier inoxydable ferritique et pièce extérieure d'habillement pour montre réalisée en un tel acier


(57) l'invention concerne un alliage d'acier inoxydable sans nickel présentant une structure ferritique et magnétique, caractérisé en ce qu'il contient au moins 0,4% en poids d'azote, et au plus 0,5% en poids de nickel, le solde étant constitué par du fer et les impuretés inévitables.
L'invention concerne également une pièce extérieure d'habillement pour montre réalisée en un tel alliage d'acier.


Description


[0001] La présente invention concerne un acier inoxydable ferritique sans nickel, ainsi qu'une pièce extérieure d'habillement pour montre.

[0002] Le fer, élément de base de tous les aciers, présente l'inconvénient d'être sensible à la corrosion. Pour remédier à cet inconvénient, on sait depuis longtemps qu'il est possible de le rendre inoxydable en l'alliant avec une certaine quantité de chrome et, le cas échéant, de molybdène, ces éléments formant spontanément un film protecteur d'oxyde à la surface du métal. Les compositions de ce type conduisent à une structure ferritique, identifiable notamment au fait que l'alliage ainsi obtenu est ferromagnétique, c'est-à-dire qu'il est attiré par les aimants. Toutefois, on souhaite, le plus souvent, obtenir une structure austénitique. Cette structure est en effet connue pour avoir de meilleures propriétés que la structure ferritique, notamment en matière de résistance à la corrosion, et être non magnétique. Dans ce but, il est alors nécessaire d'ajouter un élément d'alliage supplémentaire, susceptible de stabiliser l'austénite. Dans la plupart des cas, cet élément est le nickel.

[0003] Néanmoins, lorsque ces alliages sont utilisés pour fabriquer des objets tels que, par exemple, des pièces d'habillement pour montres, qui peuvent être en contact prolongé avec la peau, la présence du nickel pose un problème en raison de ses effets allergènes bien connus. Pour ces applications, on a donc cherché à remplacer le nickel par un autre élément d'alliage également apte à stabiliser l'austénite. Différents auteurs ont proposé de remplacer le nickel par de l'azote. La solubilité de l'azote dans le fer est toutefois insuffisante pour obtenir l'austénisation, c'est-à-dire la stabilisation de l'austénite recherchée. Il est tout de même possible d'augmenter cette solubilité en ajoutant une certaine quantité de manganèse à l'alliage, qui peut alors devenir austénitique.

[0004] A titre d'exemple, on connaît le brevet DE 195 13 407 dans lequel Uggowitzer et al. proposent un alliage inoxydable austénitique, non magnétique, et ne contenant pas de nickel. Cet alliage est basé sur le système Fe-Cr-N-Mn. Un tel alliage ne peut toutefois être obtenu que si l'on effectue un traitement thermique dans un domaine étroit de température. En effet, si la température de traitement est trop faible, des précipités de nitrure de chrome se forment, qui détruisent les propriétés de résistance à la corrosion de l'alliage. Inversement, si la température de traitement est trop élevée, la structure austénitique recherchée ne se forme pas. Cette dernière contrainte est particulièrement gênante lorsque ces alliages sont mis en forme par métallurgie des poudres, technique de plus en plus utilisée pour la fabrication de petites pièces de formes complexes, telles que des boîtes de montre. En effet, cette technique requiert une température de frittage élevée pour conduire à des pièces denses, exemptes de porosité. Or, cette température de frittage est généralement très proche, ou même supérieure, à la température maximale admissible pour obtenir une structure austénitique. Il est ainsi difficile, voire impossible, d'obtenir dans des conditions industrielles, des pièces à la fois peu poreuses et austénitiques après frittage. On pourrait, éventuellement, envisager d'effectuer d'abord un frittage à haute température, pour obtenir des pièces peu poreuses, puis un traitement thermique ultérieur à une température plus faible, pour former la structure austénitique. Néanmoins, outre les coûts supplémentaires qui résulteraient de ce double traitement, l'expérience montre qu'il est très difficile de reformer l'austénite sur une pièce de structure ferritique formée à haute température.

[0005] La présente invention a pour but de remédier aux problèmes et inconvénients ci-dessus, en proposant un acier ne présentant aucun caractère allergène, résistant bien à la corrosion, et pouvant être avantageusement mis en forme par métallurgie des poudres.

[0006] A cet effet, la présente invention concerne un alliage d'acier inoxydable présentant une structure ferritique et magnétique, caractérisé en ce qu'il contient au moins 0,4% en poids d'azote, et au plus 0,5% en poids de nickel, le solde étant constitué par du fer et les impuretés inévitables.

[0007] Avantageusement, les alliages d'acier choisis auront une composition comprise dans les limites suivantes :
  • entre 10 et 35% en poids pour le total de chrome et de molybdène, et
  • entre 5 et 20% en poids de manganèse.


[0008] L'invention a aussi pour objet un tel alliage d'acier réalisé par métallurgie des poudres.

[0009] L'invention a enfin pour objet une pièce extérieure d'habillement pour montre réalisée en un tel alliage d' acier.

[0010] Pour bien comprendre les caractéristiques de la présente invention, il faut rappeler les conditions qui ont présidées à sa mise en oeuvre. En effet, au lieu de partir d'un acier inoxydable austénitique résistant bien à la corrosion, et de remplacer le nickel par un autre élément stabilisant l'austénite, la présente invention propose de partir d'une structure ferritique exempte de nickel, dont la résistance à la corrosion est connue pour être moins bonne, et d'améliorer cette résistance à la corrosion de manière tout à fait originale, en ajoutant de nouveaux éléments d'alliage et en conservant la structure ferritique.

[0011] Il est connu qu'il n'est guère possible d'augmenter la résistance à la corrosion d'une structure ferritique simplement en augmentant le pourcentage de chrome et de molybdène dans l'alliage. En effet, des taux plus élevés que ceux utilisés habituellement (plus de 25% en poids de chrome ou plus de 10% en poids de molybdène) conduisent rapidement à la formation de phases intermétalliques qui produisent des alliages aux propriétés mécaniques et à l'usinabilité extrêmement mauvaises.

[0012] Parmi les éléments susceptibles d'améliorer la résistance des alliages ferritiques à la corrosion, le demandeur a constaté qu'un élément efficace pour atteindre ce but était l'azote.

[0013] Ainsi, l'alliage objet de la présente invention est un alliage ferritique à base de fer, de chrome, de manganèse et d'azote. On remarquera que si la composition de l'alliage selon l'invention est semblable à certaines compositions de l'art antérieur, sa structure ferritique et magnétique est totalement différente, et se traduit par des propriétés nouvelles extrêmement avantageuses. En particulier, on constate que, contrairement aux alliages austénitiques de l'art antérieur, l'alliage selon l'invention est magnétique, c'est-à-dire qu'il est attiré par les aimants. Cette propriété est particulièrement intéressante lorsque l'invention est appliquée aux boîtes de montre. En effet, les mouvements d'horlogerie mécaniques sont particulièrement sensibles aux champs magnétiques, et un boîtier réalisé dans un alliage magnétique peut constituer un blindage contre les champs magnétiques extérieurs. Il est toutefois impératif que ce magnétisme soit totalement doux, ce qui signifie qu'aucune aimantation résiduelle ne doit persister dans l'alliage lorsqu'il n'est plus soumis à un champ magnétique extérieur. On a vérifié que l'alliage selon l'invention ne présente aucune aimantation résiduelle, même après avoir été soumis de nombreuses fois à un champ magnétique de cinq Tesla, mille fois plus puissant que les champs magnétiques utilisés d'ordinaire pour tester les mouvements d'horlogerie. Contrairement aux autres alliages magnétiques susceptibles de présenter une légère aimantation résiduelle et qui, pour cette raison, ne sont pas utilisés en horlogerie, le caractère magnétique de l'alliage selon l'invention constitue donc un avantage pour les applications horlogères.

[0014] Un autre avantage de l'alliage selon l'invention réside dans la suppression de la contrainte de température de traitement maximale imposée aux alliages de l'art antérieur, en particulier lorsque la métallurgie des poudres est utilisée. En effet, conformément à l'invention, pour atteindre la structure ferritique recherchée, il faut une température élevée, parfaitement compatible avec la température de frittage nécessaire pour obtenir des pièces denses, exemptes de porosité.

[0015] Un autre avantage de l'alliage selon l'invention réside dans le fait que la quantité d'azote et de manganèse ajoutée peut être réduite au minimum nécessaire pour obtenir une résistance à la corrosion suffisante pour l'application considérée, alors qu'une concentration élevée est indispensable pour obtenir des alliages présentant une structure austénitique. Il est ainsi possible de réaliser des alliages présentant une usinabilité bien meilleure que celle des alliages à haute teneur en azote et en manganèse, éléments qui sont connus pour augmenter considérablement la dureté, la résistance, et la ténacité de l'alliage.

[0016] Si la quantité d'azote que l'alliage est susceptible de contenir en solution est trop faible pour améliorer suffisamment la résistance à la corrosion, on peut l'augmenter en ajoutant du manganèse qui, comme dans le cas des structures austénitiques, permet également d'améliorer la solubilité de l'azote dans la structure ferritique de l'alliage recherché.

[0017] Un exemple d'alliage selon l'invention et de son mode de réalisation va maintenant être décrit en référence à une fine poudre constituée de 16,91% en poids de chrome, 3,61% en poids de molybdène, 11,92% en poids de manganèse, 0,37% en poids de silicium, 0,03% en poids de nickel et la balance de fer.

[0018] Cette poudre est mélangée à un liant organique à raison de 60% en volume de poudre pour 40% en volume de liant, et injectée selon le procédé dit "MIM" (Metal Injection Moulding). Les pièces ainsi obtenues sont débarrassées de leur liant par un procédé thermochimique dit de décirage, et frittées dans une atmosphère de formiergaz comprenant 8% d'hydrogène et 92% d'azote, à une température de 1350°C pendant une heure. Au cours du frittage, l'azote diffuse rapidement dans l'alliage, jusqu'à ce que sa concentration atteigne environ 1% en poids, ce que confirment les analyses chimiques effectuées par la suite sur les échantillons ainsi réalisés. Les pièces obtenues sont denses (seulement environ 0,1% de porosités) et magnétiques, indiquant que leur structure est ferritique. Pour réaliser une structure austénitique, non magnétique, avec la même composition, il faudrait utiliser une température de frittage de 1275°C au maximum. Dans ces conditions, la porosité des pièces obtenues est de 1%, et même de 4% pour une température de frittage de 1265°C. Cette porosité serait inacceptable pour la réalisation d'une boîte de montre, et une telle sensibilité à la température de frittage serait difficilement compatible avec des conditions de production industrielles.

[0019] Les pièces ferritiques obtenues au moyen de l'alliage selon l'invention ont été soumises à un test de corrosion consistant à les plonger pendant soixante-douze heures en contact avec un brouillard réalisé à partir d'eau salée, puis en les mettant pendant soixante-douze heures dans une solution de sueur synthétique. Après le test, les pièces ne présentent pas la moindre trace de corrosion, indiquant que, contrairement à la plupart des autres aciers ferritiques, leur résistance à la corrosion est au moins aussi bonne que celle d'un bon alliage inoxydable austénitique. Ceci est dû à la présence d'azote et de manganèse qui améliorent les propriétés de la phase ferritique.

[0020] Un mouvement d'horlogerie mécanique a été monté dans une boîte de montre réalisée au moyen de l'alliage selon l'invention. Les test horlogers standards de résistance aux champs magnétiques ont montré un effet de blindage bénéfique pour le mouvement en présence d'un champ magnétique extérieur. Aucune influence néfaste de l'alliage magnétique sur la marche du mouvement mécanique n'a été observée, même après avoir soumis la boîte à des champs de cinq Tesla, mille fois plus puissants que les champs magnétiques utilisés normalement.

[0021] Il va de soi que diverses variantes et modifications simples entrent dans le cadre de la présente invention.


Revendications

1. Alliage d'acier inoxydable présentant une structure ferritique et magnétique, caractérisé en ce qu'il contient au moins 0,4% en poids d'azote, et au plus 0,5% en poids de nickel, le solde étant constitué par du fer et les impuretés inévitables.
 
2. Alliage d'acier selon la revendication 1, caractérisé en ce qu'il contient entre 10 et 35% en poids pour le total de chrome et de molybdène.
 
3. Alliage d'acier selon l'une quelconque des revendications 1 ou 2, caractérisé en ce qu'il contient entre 5 et 20% en poids de manganèse.
 
4. Alliage selon l'une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisé en ce qu'il est réalisé par métallurgie des poudres.
 
5. Pièce extérieure d'habillement pour montre réalisée en un alliage d'acier selon l'une quelconque des revendications précédentes.
 





Rapport de recherche