[0001] La présente invention se situe dans le domaine militaire, plus particulièrement dans
celui des munitions explosives, telles que les bombes et les obus.
[0002] Elle a plus précisément pour objet un nouveau procédé d'obtention de chargements
explosifs composites à matrice solide polyuréthanne.
[0003] On entend, de façon classique, par explosif composite, une composition pyrotechnique
fonctionnellement détonable, constituée d'une matrice polymérique solide, en général
polyuréthanne, chargée, ladite charge étant pulvérulente et contenant une charge explosive
nitrée organique, par exemple de l'hexogène, de l'octogène, de l'ONTA (oxynitrotriazole),
ou un mélange d'au moins deux de ces composés.
[0004] Les chargements explosifs composites et la façon de les obtenir sont par exemple
décrits par
J. QUINCHON, "Poudres, Propergols et Explosifs, tome 1, Les explosifs, Technique et
Documentation, 1982, pages 190-192". La charge pulvérulente est mélangée dans un malaxeur à une résine polymérisable
liquide, par exemple un prépolymère à terminaisons hydroxyle. On obtient une pâte
que l'on peut couler dans un moule puis faire polymériser par cuisson. Par le choix
et le réglage des agents de réticulation de la résine, des catalyseurs et d'autres
additifs, on peut obtenir des pièces moulées de caractéristiques variées.
[0005] Ce procédé classique de malaxage de tous les constituants qui sont introduits et
mélangés dans un malaxeur selon une séquence définie présente des inconvénients et
limitations.
[0006] Lorsque le mélange est achevé, la pâte doit être utilisée dans un laps de temps assez
bref (vie de pot). L'allongement de la vie de pot par une réduction du taux de catalyseur
de réticulation a comme contrepartie une durée de polymérisation augmentée, la température
étant limitée, entre autres, par la nature pyrotechnique de certains constituants.
[0007] Cette façon d'opérer nécessite donc un compromis technique entre la vie de pot et
la durée de cuisson ainsi qu'un enchaînement obligatoire des séquences de malaxage
et de coulée de la pâte.
[0008] Elle nécessite également un compromis économique entre la taille du malaxeur et la
taille de l'objet moulé.
[0009] En effet, si ce procédé "batch" s'avère assez bien adapté pour fabriquer des gros
objets tels que des mines sous-marines, des torpilles et des bombes, il s'avère par
contre très pénalisant et coûteux pour fabriquer une grande quantité de petits objets
moulés à forte cadence, par exemple pour fabriquer plusieurs centaines d'obus de diamètre
de l'ordre de 50 à 100 mm contenant chacun quelques centaines de grammes à quelques
kilos d'explosif composite à partir d'une malaxée de 1 à 3 t de pâte.
[0010] Il est nécessaire, dans cette situation, d'avoir une vie de pot élevée pour pouvoir
charger de nombreuses munitions avec la même malaxée, ce qui a comme contrepartie
une durée de réticulation de la pâte particulièrement longue et un coût très élevé
du cycle de fabrication à cause de la durée d'immobilisation du matériel et des personnes.
[0011] Si on réduit la taille du malaxeur, on réduit le nombre de munitions à remplir par
malaxée, ce qui est économiquement pénalisant.
[0012] L'homme du métier a cherché à sortir de ce carcan vie de pot/durée de cuisson et
de cet enchaînement obligatoire et précis des opérations de malaxée et coulée
[0014] Ces deux composants pâteux sont ensuite mélangés de façon continue avec un rapport
massique proche de 1.
[0015] Ce procédé bicomposant, s'il permet bien de s'affranchir du compromis vie de pot/durée
de cuisson et rend possible le stockage des deux composants pendant plusieurs semaines,
présente plusieurs inconvénients.
[0016] Un premier inconvénient est qu'il s'avère très délicat de mélanger de façon continue
les deux composants pâteux pour obtenir un produit homogène.
[0017] Un second inconvénient est que les deux composants sont pyrotechniquement actifs
(présence de charges explosives) et qu'ils doivent donc tous les deux être réalisés
puis stockés dans des installations sécurisées.
[0018] Un troisième inconvénient est que la matrice polymérique solide de l'explosif composite
finalement obtenu est différente de celle que l'on obtient, avec les mêmes constituants
dans les mêmes proportions, selon le procédé "batch" classique. En effet, selon J.M.
TAUZIA, le composant isocyanate est polymérique. Le fait de préparer, de façon intermédiaire,
un prépolymère isocyanate à partir du monomère isocyanate de départ a pour conséquence
l'obtention d'une matrice polyuréthanne solide différente de celle obtenue selon le
procédé "batch" en mélangeant directement tout le monomère isocyanate et tout le prépolymère
hydroxyle.
[0019] Cette différence de structure de la matrice solide polyuréthanne entraîne des différences
indésirables de propriétés mécaniques et/ou détoniques, d'où nécessité d'une requalification
très coûteuse et pénalisante du produit final.
[0020] Le procédé bicomposant décrit par J.M. TAUZIA n'est donc pas totalement satisfaisant.
[0021] On connaît par ailleurs des procédés de fabrication de propergols (et non de chargements
explosifs) basés sur l'extrusion. Le procédé selon la demande
FR 2 746 389 comprend une polymérisation en deux étapes:
- une première étape qui fait intervenir une première quantité de l'agent de réticulation
(environ 70 % en poids) pour l'obtention d'un produit viscoélastique,
- une seconde étape qui fait intervenir la quantité complémentaire de l'agent de réticulation
(environ 30 % en poids) pour l'obtention d'un produit caoutchouteux.
[0022] Dans un tel contexte, différent de celui de l'invention (l'homme du métier conçoit
que le malaxeur décrit ne conviendrait pas pour le traitement de molécules explosives),
l'agent de réticulation intervient en deux fois, pour la mise en oeuvre de la polymérisation
en deux étapes. Il intervient en quantité significative pour la mise en oeuvre de
la première desdites deux étapes ; il intervient en plus grande quantité pour la mise
en oeuvre de ladite première desdites deux étapes que pour la mise en oeuvre de la
seconde desdites deux étapes.
[0023] Dans un tel contexte, la Demanderesse a déjà proposé un perfectionnement au procédé
bicomposant ci-dessus. Elle a proposé un procédé semi-continu bicomposant d'obtention
d'un chargement explosif composite à matrice polyuréthanne, ne présentant ni les inconvénients
du procédé "batch" classique, ni les inconvénients précités du procédé semi-continu
bicomposant décrit par J.M. TAUZIA. Ledit procédé a notamment été décrit dans la demande
de brevet
EP-A-1 333 015. Il présente, en combinaison, deux caractéristiques techniques originales, l'une
relative à la répartition des constituants dans les deux composants, l'autre relative
au rapport massique de mélange desdits deux composants.
[0024] Ledit procédé est un procédé semi-continu d'obtention d'un chargement explosif composite
constitué d'une matrice solide polyuréthanne chargée dont la charge est solide, pulvérulente
et comprend au moins un explosif nitré organique, par introduction dans un moule d'une
composition explosive pâteuse puis réticulation thermique de cette composition, ladite
composition étant obtenue par mélange de constituants comprenant essentiellement un
prépolymère polyol, un monomère polyisocyanate, un plastifiant et une charge solide
pulvérulente comprenant au moins un explosif nitré organique. Il est caractérisé en
ce que, pour obtenir la composition explosive pâteuse :
- on réalise tout d'abord, de façon discontinue, à partir de l'ensemble des constituants,
par simple mélange homogène, deux composants :
- un composant A pâteux comprenant la totalité du prépolymère polyol et la totalité
de la charge solide pulvérulente,
- un composant B liquide comprenant la totalité du monomère polyisocyanate,
le plastifiant étant indifféremment réparti entre les deux composants A et B,
- on mélange ensuite, de façon te composant A et le composant B de telle que le rapport
massique composant A/composant B soit constant et compris entre 95/5 et 99,5/0,5.
[0025] Il convient de bien noter les deux caractéristiques techniques de ce procédé :
- le fait que les composants A et B n'ont pas la même viscosité, que l'un est pâteux
et comprend la totalité de la charge et du prépolymère polyol, et que l'autre est
liquide et comprend la totalité du monomère polyisocyanate, tel que, sans modification
chimique, notamment sans prépolymérisation à l'aide d'un polyol ; et
- le rapport massique comprenant A/composant B bien particulier.
[0026] Cette combinaison de caractéristiques techniques distinctives, comparativement au
procédé semi-continu bicomposant selon J.M. TAUZIA, a pour effet technique de supprimer
tous les inconvénients précités, et de rendre le procédé particulièrement simple et
peu coûteux.
[0027] Seul le composant A est pyrotechniquement actif, ce qui limite considérablement les
contraintes de sécurité, et le mélange des composants A et B s'homogénéise facilement.
[0028] Par ailleurs, les propriétés physico-chimiques, mécaniques, détoniques et de vulnérabilité
du produit final sont identiques à celles du produit obtenu selon le procédé "batch"
classique à partir des mêmes constituants dans les mêmes proportions, ce qui évite
une requalification pénalisante du produit.
[0029] Les opérations de préparation des composants A et B sont totalement indépendantes
des opérations de mélange des composants A et B et de coulée et peuvent être réalisées
durant des temps masqués. Ces composants A et B peuvent être stockés si besoin est
durant plusieurs semaines avant d'être mélangés.
[0030] Le procédé selon
EP-A-1 333 015 est de plus totalement indépendant de la vie de pot du fait que l'on mélange rapidement
et de façon continue de petites quantités des composants A et B, ce qui permet d'augmenter
le pourcentage de catalyseur de réticulation et de diminuer en conséquence la durée
de réticulation de la composition explosive pâteuse dans le moule et/ou de réaliser
cette réticulation à une température inférieure.
[0031] Une réticulation à la température ambiante (20°C) est même possible, ce qui peut
être particulièrement avantageux.
[0032] Pour en oeuvre ledit procédé selon
EP-A-1 333 015, on se heurte à une réelle au niveau de l'alimentation du mélangeur (composant A/composant
B, agencé en amont du moule) en le composant A. Ce composant est en effet introduit
dans ledit mélangeur, généralement statique, sous la poussée d'un piston et le niveau
de pression nécessaire pour mettre en mouvement ledit piston est évidemment proportionnel
à la perte de charge, elle-même d'autant plus importante que la viscosité dudit composant
A est élevée. Or ledit composant A présente, dans certains cas, une viscosité élevée,
du fait qu'il renferme peu de liquide.
[0033] En référence à cette difficulté technique, la Demanderesse propose présentement un
perfectionnement audit procédé selon
EP-A-1 333 015. Elle propose, en fait, d'incorporer une faible quantité de monomère polyisocyanate
(composant B) dans le composant A.
[0034] La Demanderesse a, de façon surprenante, montré qu'une telle incorporation - d'une
faible quantité de monomère polyisocyanate (qualifié souvent d'agent de réticulation)
dans le composant A - permet d'abaisser, de façon extrêmement significative, de façon
spectaculaire, la viscosité dudit composant A.
[0035] La faible quantité en cause n'amorce pas la réticulation, est donc sans effet sur
la durée de conservation du composant A, mais exerce, de façon tout à fait inattendue,
un effet, d'une intensité remarquable, sur la viscosité dudit composant A. Cet effet
est beaucoup plus qu'un simple effet de dilution (d'une pâte par un liquide) car il
est d'une intensité beaucoup plus forte que celui (peu significatif) résultant de
l'ajout d'une quantité équivalente d'un autre liquide tel le prépolymère polyol ou
le plastifiant ou que celui résultant, avant tout début de la réticulation, de l'ajout
de la totalité du polymère polyisocyanate liquide. Il semblerait qu'au sein du composant
A, le monomère polyisocyanate ajouté agisse comme un agent tensioactif, qu'il modifie,
de façon spectaculaire, les liaisons entre le liant (la matrice) et la charge...
[0036] On se propose maintenant de décrire le procédé de l'invention, qui constitue donc
un perfectionnement au procédé selon
EP-A-1 333 015, et pour éviter toute confusion, dans la description qui va suivre, on parle de composant
A' (pâteux) et B' (liquide).
[0037] La présente invention concerne donc un procédé semi-continu d'obtention d'un chargement
explosif composite constitué d'une matrice solide polyuréthanne chargée dont la charge
est pulvérulente et comprend au moins un explosif nitré organique ; ledit procédé
comprenant les étapes successives ci-après :
- l'obtention d'une composition explosive pâteuse constituée essentiellement des ingrédients
ci-après :
· un prépolymère polyol,
· un monomère polyisocyanate,
· un plastifiant, et
· une charge solide pulvérulente comprenant au moins un explosif nitré organique,
par mélange en continu d'un composant A' pâteux et d'un composant B' liquide, préparés,
de façon discontinue, à partir desdits ingrédients constitutifs ;
- l'introduction dans un moule de ladite composition explosive pâteuse ; et
- la réticulation thermique de ladite composition dans ledit moule.
En cela, ledit procédé de l'invention est un procédé selon EP-A-1 333 015.
[0038] Dans un tel cadre, de façon caractéristique :
- ledit composant B' liquide comprend 90 à 99 % en poids dudit monomère polyisocyanate
;
- ledit composant A' pâteux comprend la totalité du prépolymère polyol, la totalité
de la charge solide pulvérulente et les 1 à 10 % en poids restants du monomère polyisocyanate
;
le plastifiant étant indifféremment réparti entre lesdits composants A' et B' ; et
le mélange en continu desdits composants A' et B' est mis en oeuvre de sorte que le
rapport massique composant A'/composant B' soit constant (aux sensibilités industrielles
près), compris entre 95,05/4,95 et 99,55/0,45.
[0039] Selon l'invention, de façon caractéristique, le composant pâteux renferme de 1 à
10 % en poids, avantageusement de 3 à 7 % en poids, de la quantité totale d'intervention
du monomère polyisocyanate (agent de réticulation). S'il renferme moins de 1 % en
poids, l'effet sur la viscosité n'est guère sensible, s'il renferme plus de 10 % en
poids, la réticulation est susceptible de s'amorcer en son sein.
[0040] Comme explicité ci-dessus, le procédé de l'invention reproduit les caractéristiques
du procédé selon
EP-A-1 333 015 avec "transfert" d'une faible quantité du monomère polyisocyanate du composant B
(devenu B') vers le composant A (devenu A'). L'impact de ce "transfert" sur la viscosité
dudit composant A' résultant est énorme (voir les exemples ci-après). En terme de
procédé, cela se traduit par un avantage considérable. Cela permet d'accéder à des
débits de coulée largement augmentés pour un même niveau de pression dans l'installation.
L'homme du métier conçoit de manière évidente l'intérêt du perfectionnement selon
l'invention.
[0041] On se propose maintenant de préciser quelque peu, de façon nullement limitative,
le cadre de la présente invention (cadre, qui, on l'a compris, correspond à celui
de l'invention selon
EP-A-1 333 015).
[0042] Lors de la mise en oeuvre du procédé de l'invention, la composition explosive pâteuse
est obtenue à partir des constituants ou ingrédients usuels utilisés selon les procédés
antérieurs et qui sont bien connus de l'homme du métier.
[0043] Ces constituants comprennent essentiellement un prépolymère polyol, un monomère polyisocyanate,
un plastifiant et une charge pulvérulente comprenant au moins un explosif nitré organique.
[0044] Par "essentiellement", il faut comprendre que les constituants ou ingrédients précités
sont toujours présents et représentent globalement plus de 90 % en poids par rapport
au poids total de la composition explosive pâteuse.
[0045] De façon préférée, la somme des teneurs pondérales en prépolymère polyol, monomère
polyisocyanate, plastifiant et charge solide pulvérulente représente entre 98 % et
100 % de l'ensemble des constituants.
[0046] De façon générale, les états physiques, solide, liquide, pâteux, des constituants
et des compositions doivent être compris, dans la présente description, comme étant
les états physiques à la température ambiante (environ 20°C) et à la pression atmosphérique
(environ 0,1 MPa).
[0047] On entend, de façon classique, par "explosif nitré organique", un explosif choisi
dans le groupe constitué par les explosifs nitrés aromatiques (comportant au moins
un groupement C-NO
2, l'atome de carbone faisant partie d'un cycle aromatique), les explosifs esters nitriques
(comportant au moins un groupement C-O-NO
2) et les explosifs nitramines (comportant au moins un groupement C-N-NO
2).
[0048] De façon préférée, l'explosif nitré organique est choisi dans le groupe constitué
par l'hexogène, l'octogène, la pentrite, l'oxynitrotriazole (ONTA), le triaminotrinitrobenzène,
la nitroguanidine et leurs mélanges, c'est-à-dire tous les mélanges d'au moins deux
des composés précités. De façon particulièrement préférée, l'explosif nitré organique
est choisi dans le groupe constitué par l'hexogène, l'octogène, l'ONTA et leurs mélanges.
[0049] Selon une variante préférée, la teneur en explosif nitré organique est comprise entre
15 % et 90 % en poids par rapport à l'explosif composite et la teneur en charge solide
pulvérulente est comprise entre 75 % et 90 % en poids par rapport à l'explosif composite.
[0050] Selon une variante, la charge solide pulvérulente n'est constituée que d'au moins
un explosif nitré organique.
[0051] Selon une autre variante, la charge solide pulvérulente comprend également au moins
un autre composé que le au moins un explosif nitré organique.
[0052] Elle peut par exemple comprendre un métal réducteur, de préférence choisi dans le
groupe constitué par l'aluminium, de zirconium, le magnésium, le tungstène, le bore
et leurs mélanges. De façon particulièrement préférée, le métal réducteur présent
est l'aluminium. La teneur en métal réducteur peut par exemple être comprise entre
2 % et 35 % en poids par rapport à l'explosif composite.
[0053] La charge pulvérulente peut également comprendre, en association ou non avec un métal
réducteur, un oxydant minéral, de préférence choisi dans le groupe constitué par le
perchlorate d'ammonium, qui est particulièrement préféré, le perchlorate de potassium,
le nitrate d'ammonium, le nitrate de sodium et leurs mélanges. La teneur en oxydant
minéral peut par exemple être comprise entre 10 % et 45 % en poids par rapport à l'explosif
composite.
[0054] Lorsque la charge solide pulvérulente comprend au moins un autre composé que l'explosif
nitré organique, cet autre composé est de préférence choisi dans le groupe constitué
par le perchlorate d'ammonium, l'aluminium et leurs mélanges.
[0055] Le prépolymère polyol est un liquide plus ou moins visqueux. Sa masse moléculaire
moyenne en nombre (Mn) est de préférence comprise entre 500 et 10 000 et il est de
préférence choisi dans le groupe constitué par les polyisobutylènes polyols, les polybutadiènes
polyols, les polyéthers polyols, les polyesters polyols et les polysiloxanes polyols.
On utilise de façon particulièrement préférée un polybutadiène à terminaisons hydroxyle.
[0056] Le monomère polyisocyanate est classiquement un liquide, de préférence choisi dans
le groupe constitué par le toluène diisocyanate (TDI), l'isophorone diisocyanate (IPDI),
le dicyclohexylméthylène diisocyanate (MDCI), l'hexaméthylène diisocyanate (HMDI),
le biuret trihexane isocyanate (BTHI), le 3,5,5-triméthyl-1,6-hexaméthyléne diisocyanate
et leurs mélanges. De façon particulièrement préférée, on utilise l'IPDI ou le MDCI.
[0057] Le plastifiant est également un liquide, de préférence un monoester tel que le pélargonate
d'isodécyle (IDP) ou un polyester choisi dans le groupe constitué par les phtalates,
les adipates, les azélates et les acétates. Parmi les polyesters, la triacétine, les
phtalates d'alkyle tels que le phtalate de dioctyle (DOP), les azélates d'alkyle tels
que l'azélate de dioctyle (DOZ) et les adipates d'alkyle tels que l'adipate de dioctyle
(DOA) sont particulièrement préférés.
[0058] Outre les constituants essentiels précités, l'ensemble des constituants peut également
comprendre au moins un additif choisi dans le groupe constitué par les catalyseurs
de réticulation (catalyseurs de la réaction NCO/OH), les agents mouillants, les agents
antioxydants, les agents d'adhésion liant-charge et les composés extenseurs de chaîne.
[0059] Comme catalyseur de réticulation, on utilise de préférence le dibutyldilaurate d'étain
(DBTL), mais on peut aussi utiliser tout autre catalyseur bien connu de l'homme du
métier, notamment d'autres composés organiques de l'étain tels qu'un sel stanneux
d'un acide carboxylique, un oxyde de trialkylétain, un dihalogénure de dialkylétain
ou un oxyde de dialkylétain. On peut citer par exemple le diacétate de dibutylétain,
le diacétate de diéthylétain, le dioxyde de dioctylétain et l'octoate stanneux. On
peut aussi utiliser comme catalyseur une amine tertiaire, notamment une trialkylamine,
ou bien encore un composé organique du bismuth, tel que le triphénylbismuth.
[0060] Comme agent mouillant, on utilise de préférence une lécithine telle que la lécithine
de soja, ou un siloxane.
[0061] Comme agent antioxydant, on utilise de préférence le ditertiobutylparacrésol (DBPC)
ou le 2,2'-méthylènebis-4-méthyl-6-tertiobutylphénol (AO2246).
[0062] Comme agent d'adhésion liant-charge, on utilise de préférence le triéthylène pentamine
acrylonitrile (TEPAN), ou certains composés dérivés de silanols comme l'anhydride
triéthoxysityt-3-propytsuccinique (C
13H
24O
6Si).
[0063] Ledit au moins un additif choisi parmi les catalyseurs de réticulation, les agents
mouillants, les agents antioxydants et les agents d'adhésion liant-charge peut être
indifféremment réparti entre les deux composants A' et B'. De préférence, il est intégralement
compris dans le composant A'.
[0064] Comme composé extenseur de chaîne (présentement chaîne polymérique polyuréthanne),
que l'on qualifie également d'agent pontant, on utilise en général un monomère polyol
de faible masse, inférieure à 300 environ, de préférence un triol tel que le triméthylolpropane
(TMP) ou un diol tel que le dipropylèneglycol. Ledit composé est impérativement en
totalité compris dans le composant A'.
[0065] Selon une variante avantageuse, outre les ingrédients principaux (le prépolymère
polyol, le monomère polyisocyanate, le plastifiant et la charge solide pulvérulente),
la composition explosive pâteuse ne renferme qu'au moins un ingrédient constitutif
additionnel choisi parmi les additifs listés ci-dessus.
[0066] Dans le cadre de variantes de réalisation préférées :
- le composant A' comprend la totalité du plastifiant ; et/ou
- le composant B' est uniquement constitué des 90 à 99 % en poids de monomère polyisocyanate
intervenant.
[0067] Les composants A' et B' sont indépendamment réalisés, de façon discontinue, par simple
mélange homogène, par exemple dans un malaxeur, et sont chimiquement stables, c'est-à-dire
qu'il n'y a aucune réaction chimique entre les constituants mélangés de chaque composant,
et que tous les constituants conservent leur identité structurelle, aussi bien lors
du mélange que lors du stockage ultérieur et indépendamment des composants A' et B'.
[0068] Selon la présente invention, pour une composition explosive on mélange ensuite, de
façon continue, le composant A' et le composant B' de telle sorte que le rapport massique
composant A'/composant B' soit constant (aux sensibilités industrielles près) et compris
entre 95,05/4,95 et 99,55/0,45, de préférence compris entre 97/3 et 99/1, par exemple
égal à ou voisin de 98/2. On vise ainsi à optimiser la constitution de la matrice
polyuréthanne.
[0069] Ce mélange continu entre le composant A' et le composant B' est par exemple et de
préférence réalisé dans un mélangeur statique, mélangeur bien connu de l'homme du
métier, en forme de conduite contenant des croisillons obligeant le produit qui y
passe à se séparer puis à se remélanger.
[0070] A la sortie du mélangeur, mélangeur statique ou autre mélangeur à faible sollicitation
mécanique, générant en particulier un faible taux de cisaillement, on obtient généralement
la composition explosive pâteuse avec un débit volumique compris entre 0,1 l/min et
5 l/min, mieux encore compris entre 0,3 l/min et 1 l/min, par exemple voisin de ou
égal à 0,5 l/min.
[0071] En référence au dispositif, avantageusement utilisé pour la mise en oeuvre du procédé
de l'invention, on peut préciser, de façon nullement limitative, ce qui suit.
[0072] Selon une variante préférée, les composants A' et B' sont chacun contenus dans un
pot équipé d'un piston dont la mise en mouvement, à l'aide d'un moteur, permet l'alimentation
en composants A' et B' d'un convergent situé en amont d'un mélangeur statique, de
sorte que le contenu du convergent se déverse dans ledit mélangeur statique.
[0073] La pression sur le mélange des composants A' et B' dans le convergent est de préférence
comprise entre 1 MPa et 10 MPa. Les deux pistons sont de préférence mus par le même
moteur.
[0074] Compte tenu du rapport massique composant A'/composé B' élevé, il est intéressant
de souligner qu'un tel équipement offre la possibilité d'enchaîner plusieurs pots
du composant A' pour le même pot de composant B', sans rupture du procédé continu.
[0075] Le mélangeur statique est de préférence de plusieurs éléments montés en série, en
forme de conduite, ayant un diamètre de préférence compris entre 15 mm et 60 mm. On
utilise par exemple entre 6 et 15 éléments de mélange, tels que ceux vendus dans le
commerce et bien connus de l'homme du métier.
[0076] La variante préférée précitée selon laquelle les composants A' et B' sont chacun
contenus dans un pot équipé d'un piston permet des dosages très précis et une alimentation
très régulière, mais on peut aussi, par exemple, alimenter le mélangeur statique à
l'aide de pompes doseuses reliées aux bacs de stockage des composants A' et B'.
[0077] Le mélangeur statique est en général muni d'une double enveloppe afin de permettre
un ajustement de la température.
[0078] Les pots ou les bacs contenant les composants A' et B' peuvent également être munis
d'un système de chauffage.
[0079] Selon une variante préférée, le composant A' et le composant B' sont mélangés à une
température comprise entre 40°C et 80°C.
[0080] La composition explosive pâteuse obtenue après mélange des composants A' et B' est
introduite dans un moule dans lequel elle subit ensuite une réticulation thermique,
dans un four par exemple.
[0081] Cette réticulation résulte de la formation de ponts uréthanne du fait de la réaction
des fonctions hydroxyle du prépolymère polyol et éventuellement du composé extenseur
de chaîne avec les fonctions isocyanate du monomère polyisocyanate. La vitesse de
réticulation augmente avec la température et la teneur en catalyseur.
[0082] Selon une variante préférée, le moule est constitué par l'enveloppe, en général métallique,
d'une munition, par exemple d'un obus.
[0083] De façon préférée, et notamment lorsqu'on utilise un mélangeur statique pour mélanger
de façon continue les composants A' et B', la composition explosive pâteuse issue
du mélangeur est introduite de façon automatisée dans une grande série de moules,
par exemple plusieurs centaines d'enveloppes d'obus.
[0084] Selon une variante préférée de l'invention, la température de réticulation de la
composition explosive pâteuse introduite dans les moules est comprise entre 15°C et
80°C.
[0085] On peut notamment opérer à la température ambiante (environ 20°C), ce qui peut être
particulièrement avantageux.
[0086] Selon une variante préférée, la température de réticulation est identique ou voisine
de celle à laquelle le composant A' et le composant B' sont mélangés.
[0087] On se propose maintenant d'illustrer l'invention et de démontrer son grand intérêt,
[0088] On se situe dans le contexte de la fabrication d'un explosif composite, présentant
la composition pondérale ci-aprés :
6,4538 % |
de prépolymère polyol (PBHT : polybutadiène hydroxy téléchélique) |
0,7988 % |
de monomère polyisocyanate, réticulant (IPDI : isophorone diisocyanate) |
4,3901 % |
de plastifiant (DOA : adipate de dioctyle) |
0,0645 % |
d'agent pontant (TMP : triméthylolpropane) |
0,1171 % |
d'agent antioxydant (AO2246 : 2,2'-méthylénebis-4-méthyl-6-tertio-butylphénol) |
0,1171 % |
d'agent mouillant (lécithine de soja) |
0,0585 % |
d'agent d'adhésion liant-charge ou AALC (TEPAN : tri-éthylène pentamine acrylonitrile) |
0,0001 % |
de catalyseur (DBTL : dibutyldilaurate d'étain) |
88 % |
de charge pulvérulente (HX : hexogène). |
[0089] On opère successivement selon la technique bicomposante de
EP-A-1 333 015 et celle de l'invention avec des rapports massiques (A/B, A'/B') de 98/2.
[0090] L'installation de la Demanderesse en service à Sorgues comporte deux pots d'alimentation
(respectivement en A ou A' et B ou B') équipés chacun d'un piston, alimentant (respectivement
en A ou A' et B ou B') un convergent débouchant dans un mélangeur statique. A la sortie
dudit mélangeur statique, la composition pâteuse (A+B ou A'+B') est déversée dans
un moule (qui peut être constitué directement de l'objet à charger).
[0091] · Selon la technique de
EP-A-1 333 015, les deux composants, A et B, présentent les compositions respectives ci-après :
COMPOSANT A |
COMPOSANT B |
Prépolymère |
PBHT |
6,4538 % |
|
|
|
Pontant |
TMP |
0,0645 % |
|
|
|
|
|
|
Réticulant |
IPDI |
0,7988 % |
Plastifiant |
DOA |
3,9372 % |
Plastifiant |
DOA |
0,4529 % |
Antioxydant |
AO2246 |
0,1171 % |
|
|
|
Mouillant |
Lécithine |
0,1171 % |
|
|
|
AALC |
TEPAN |
0,0585 % |
|
|
|
Catalyseur |
DBTL |
0,0001 % |
|
|
|
Charge |
Hexogène |
88,0000 % |
|
|
|
[0092] Le composant A présente alors une viscosité entre 2 et 2,5 x 10
3 Pa.s (entre 20 000 et 25 000 poises).
[0093] Dans l'installation, il faut monter entre 2 et 3 x 10
6 Pa (entre 20 et 30 bar) de pression sur les pistons pour atteindre des débits de
l'ordre de 21 x 10
-3 m
3/s (350 cm
3/min).
[0094] · Selon la technique de l'invention, les deux composants, A' et B', présentent les
compositions massiques respectives ci-après :
COMPOSANT A' |
COMPOSANT B' |
Prépolymère |
PBHT |
6,4538 % |
|
|
|
Pontant |
TMP |
0,0645 % |
|
|
|
Réticulant |
IPDI |
0,0400 % |
Réticulant |
IPDI |
0,7588 % |
Plastifiant |
DOA |
3,9372 % |
Plastifiant |
DOA |
0,4529 % |
Antioxydant |
A02246 |
0,1171 % |
|
|
|
Mouillant |
Lécithine |
0,1171 % |
|
|
|
AALC |
TEPAN |
0,0585 % |
|
|
|
Catalyseur |
DBTL |
0,0001 % |
|
|
|
Charge |
Hexogène |
88,0000 % |
|
|
|
[0095] Le composant A' renferme 5 % de la quantité totale de monomère polyisocyanate. La
viscosité dudit composant A' est alors comprise entre 250 et 300 Pa.s (entre 2 500
et 3 000 poises).
[0096] Dans l'installation, il suffit alors d'environ 8 x 10
5 Pa (8 bar) de pression sur les pistons pour atteindre des débits de l'ordre de 2
x 10
-2 m
3/s (350 cm
3/min). Des débits d'environ 5 x 10
-2 m
3/s (850 cm
3/min) sont accessibles avec une pression de seulement 2 x 10
4 Pa (20 bar).
[0097] A la considération de ces chiffres, on saisit tout l'intérêt de la présente invention.
1. Procédé semi-continu d'obtention d'un chargement explosif composite constitué d'une
matrice solide polyuréthanne chargée dont la charge est pulvérulente et comprend au
moins un explosif nitré organique ; ledit procédé comprenant les étapes successives
ci-après :
- l'obtention d'une composition explosive pâteuse constituée essentiellement des ingrédients
ci-après :
· un prépolymère polyol,
· un monomère polyisocyanate,
· un plastifiant, et
· une charge solide pulvérulente comprenant au moins un explosif nitré organique,
par mélange en continu d'un composant A' pâteux et d'un composant B' liquide, préparés,
de façon discontinue, à partir desdits ingrédients constitutifs ;
- l'introduction dans un moule de ladite composition explosive pâteuse ; et
- la réticulation thermique de ladite composition dans ledit moule ; et
étant
caractérisé en ce que :
- ledit composant B' liquide comprend 90 à 99 % en poids dudit monomère polyisocyanate
;
- ledit composant A' pâteux comprend la totalité du prépolymère polyol, la totalité
de la charge solide pulvérulente et les 1 à 10 % en poids restants du monomère polyisocyanate
;
le plastifiant étant indifféremment réparti entre lesdits composants A' et B' ; et
en ce que le mélange en continu desdits composants A' et B' est mis en oeuvre de sorte que
le rapport massique composant A'/composant B' soit constant, compris entre 95,05/4,95
et 99,55,/0,45.
2. Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que la somme des teneurs pondérales en prépolymère polyol, monomère polyisocyanate, plastifiant
et charge solide pulvérulente représente entre 98 % et 100 % de l'ensemble des ingrédients.
3. Procédé selon la revendication 1 ou 2, caractérisé en ce que le prépolymère polyol a une masse moléculaire en nombre (Mn) comprise entre 500 et
10 000 et est choisi dans le groupe constitué par les polyisobutylènes polyols, les
polybutadiènes polyols, les polyéthers polyols, les polyesters polyols et les polysiloxanes
polyols.
4. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que le monomère polyisocyanate est choisi dans le groupe constitué par le toluène diisocyanate,
l'isophorone diisocyanate, le dicyclohexylméthylène diisocyanate, l'hexaméthylène
diisocyanate, le biuret trihexane isocyanate, le 3,5,5-triméthyl-1,6-hexaméthylène
diisocyanate et leurs mélanges.
5. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que ladite composition explosive pâteuse comprend également au moins un additif choisi
dans le groupe constitué par les catalyseurs de réticulation, les agents mouillants,
les agents antioxydants, les agents d'adhésion liant-charge et les composés extenseurs
de chaîne ; ledit au moins un composé extenseur de chaîne présent étant en totalité
compris dans le composant A' et ledit au moins un additif présent autre qu'un composé
extenseur de chaîne étant indifféremment réparti entre les deux composants A' et B'.
6. Procédé selon la revendication 5, caractérisé en ce que ledit au moins un additif est en totalité compris dans le composant A'.
7. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 6, caractérisé en ce que le composant B' est uniquement constitué du monomère polyisocyanate.
8. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 7, caractérisé en ce que le mélange entre le composant A' et le composant B' est réalisé dans un mélangeur
statique.
9. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 8, caractérisé en ce que la température de réticulation de la composition explosive pâteuse est comprise entre
15°C et 80°C.
10. Procédé selon la revendication 9, caractérisé en ce que la température de de la composition explosive pâteuse est la température ambiante.
11. Procédé selon la revendication 9 ou 10, en ce que la température de réticulation de
la composition explosive pâteuse est identique ou voisine de celle à laquelle le composant
A' et le composant B' sont mélangés.