DOMAINE DE L'INVENTION
[0001] La présente invention se rapporte à un procédé de fabrication d'un matériau constitué
de fibres et conformé en bande.
[0002] Elle concerne aussi une machine de fabrication d'un tel matériau. D'autres aspects
de l'invention se rapportent à un matériau en feuille, c'est-à-dire découpé à partir
de la bande, ainsi qu'à un document de sécurité et/ou de valeur qui le comporte.
ARRIERE-PLAN TECHNOLOGIQUE DE L'INVENTION
[0003] Dans le domaine des documents de sécurité et plus particulièrement des billets de
banque, le support utilisé usuellement est en papier. Il présente de nombreux avantages,
notamment celui de pouvoir intégrer un certain nombre d'éléments de sécurité tels
que, par exemple, un filigrane ou un fil de sécurité.
[0004] Un autre avantage est, entre autres, de pouvoir être imprimé aisément en taille-douce,
c'est-à-dire avec des reliefs détectables facilement au toucher. Ces éléments sont
facilement reconnaissables par le grand public et fournissent un moyen fort d'authentification.
[0005] Afin d'améliorer la résistance physique du support, certaines banques nationales
utilisent un polymère transparent ultérieurement opacifié en blanc et imprimé. En
plus d'être mécaniquement plus résistant, il permet de réaliser une sécurité efficace
de type "fenêtre transparente" permettant de voir au travers du dit support, depuis
l'une ou l'autre de ses faces opposées.
[0006] Cette construction d'un billet, ou plutôt d'une portion de billet "transparente",
a ouvert de nombreuses possibilités en termes de structure et a permis d'apporter
un élément nouveau et facilement reconnaissable par le grand public.
[0007] Il existe bien entendu des techniques dites de "transparentisation" du papier, qui
permettent de créer des zones moins opaques dans la masse de fibres papetières. Toutefois,
il est impossible d'obtenir une zone totalement transparente, à moins de créer physiquement
une ouverture dans le papier du type "fenêtre".
[0008] Des billets de banque avec ce type de perforations en "fenêtres" sont aujourd'hui
de plus en plus en vogue. Bien entendu, les fenêtres qui en résultent sont obturées
avec des films de sécurité transparents pour, d'une part, offrir une résistance physique
à la manipulation en circulation et, d'autre part, servir de "plateforme" (c'est à
dire de support), de manière à y accueillir des éléments de sécurités qui peuvent
être authentifiés depuis l'une et/ou l'autre des faces.
[0009] Ainsi, afin d'obturer les fenêtres, il est nécessaire de sceller un film, par exemple
en plastique, sur la zone du papier immédiatement voisine de la fenêtre. Les procédés
de mise en oeuvre correspondants sont connus de l'homme de l'art sous le terme de
"lamination".
[0010] Ce procédé de lamination se distingue du procédé très répandu de transfert à chaud.
Ainsi, notamment, dans le procédé de lamination, le film porteur des éléments de sécurité
est directement déposé sur le support, par opposition au procédé de transfert à chaud
selon lequel le film porteur est rembobiné après que la fine pellicule contenant les
éléments de sécurité ait été transférée sur le support.
[0011] Ce procédé de lamination souffre cependant de plusieurs inconvénients. Ainsi, le
film présente des propriétés mécaniques, d'absorption d'eau et de contraction/dilatation
différentes de celle du support en papier, de sorte que le film, notamment lorsqu'il
est déposé en bande sur toute la hauteur d'un billet, a tendance à provoquer un effet
de "tuilage" du papier découpé en feuille (ce qui signifie que le papier a tendance
à gondoler localement). En anglais, on parle d'un phénomène de "
curl".
[0012] Ces problèmes sont d'autant plus importants lorsque le film est déposé sur des machines
bobine-bobine avant la découpe du papier pour obtenir des feuilles individuelles.
Le film a pu être étiré lors de son dépôt sur le support et tend à retrouver sa forme
initiale au moment de la découpe, entraînant ainsi la déformation non souhaitée du
papier.
[0013] Une solution à ce problème a été apportée par l'application repérée d'un film plastique
au verso du papier ayant au recto le film laminé, ledit film plastique appliqué au
verso étant appelé, en termes du métier, "contre-foil" et permettant de contrebalancer
l'effet de « curl » évoqué ci-avant. Ceci est notamment décrit dans le document
EP 2077190.
[0014] Cette technique répond à la problématique de déformation du papier mais crée un problème
de surépaisseur sur les bobines de papier au niveau du film laminé et du "contre-foil",
en raison de l'épaisseur cumulée à cet endroit du film laminé, du papier et du "contre-foil".
[0015] On décrit dans le document
EP 2860040 un papier formé de deux couches de papier assemblées l'une avec l'autre. Dans chaque
couche est formée une cuvette (c'est-à-dire un évidement qui ne débouche que sur une
seule des deux faces de la couche), les deux cuvettes étant situées en regard l'une
de l'autre.
[0016] Ainsi, on crée localement des zones en dépression dans laquelle l'épaisseur du papier
est réduite et on met à profit la présence des cuvettes pour y loger les "foils" et
"contre-foils" précités. Ainsi, on réduit drastiquement l'épaisseur du produit final
dans cette zone.
[0017] Plusieurs techniques permettant de former ces cuvettes sont évoquées, à savoir la
préparation d'une toile spécifique pour la couche principale et la couche secondaire,
créant ainsi des bandes de papier d'épaisseurs plus faibles, mais aussi le calandrage
localisé, et le retrait localisé de matière dans la couche secondaire.
[0018] Il ressort de ce document que la réduction localisée de l'épaisseur de chaque couche
nécessite des moyens spécifiques additionnels et que, lors de l'assemblage des deux
couches, il est nécessaire de les positionner correctement l'une par rapport à l'autre,
au risque d'avoir des cuvettes qui ne sont pas exactement en registre.
[0019] Un état de la technique supplémentaire en la matière est constitué par les documents
suivants :
WO 2007/042718 décrit un procédé de fabrication d'un matériau en feuille comportant au moins une
fenêtre. Cette fenêtre s'étend transversalement par rapport à la direction de déplacement
du matériau en feuille sur la machine de fabrication ("sens marche"). Lorsque le matériau
est formé de deux couches de papier assemblées, la fenêtre est formée au travers de
l'ensemble des deux couches par projection d'un fluide sous pression. Ce fluide s'étend
sous la forme d'un pinceau dont la largeur correspond à l'étendue longitudinale de
la fenêtre à former.
[0020] Bien que la formation de la fenêtre ait lieu alors que le matériau est encore humide,
on indique dans ce document que la pression du fluide est comprise entre 50 et 4000
bar, par exemple entre 1000 et 2000 bar. On comprend aisément que cette gamme de valeur
est élevée et requiert une quantité importante d'énergie.
[0021] DE 3431577 se rapporte à la formation de filigranes dans l'épaisseur d'un papier en cours de
fabrication, qui fait usage d'un enlèvement partiel de matière à l'aide de jets d'eau,
d'air ou par rayonnement laser.
[0022] US 2001/0004007 s'intéresse à la découpe des bords irréguliers d'un matériau en feuille en cours
de fabrication.
[0023] Il en est de même pour le document
US 2003/01196531 dans lequel on fait usage d'un découpage au jet d'eau. Cette action est réalisée
après que le matériau en feuille a cheminé entre des rouleaux de séchage.
[0024] Par ailleurs :
- US 4 943 093 décrit un matériau papier à deux couches, dont une couche comporte des fenêtres individuelles
notamment visibles aux figures 2, 3a, 3b, 3c, 5a, 5b et 5c ont soit des bords droits,
soit deux bords convergents dans la direction de la deuxième couche de papier. Plus
précisément, sur les figures 2 à 3a seuls les bords orientés dans le "sens travers"
(direction perpendiculaire au "sens marche") présentent des bords convergents ;
- WO 2014/199296 décrit également un matériau à deux couches dont l'une comporte une fenêtre à "bords
droits", c'est à dire non convergents ;
- US 2008/036197 décrit un procédé de fabrication de papier dans lequel des fenêtres sont découpées
après que la masse papetière ait séché ;
- WO 2009/022072 enseigne une technique de fabrication de papier avec formation d'une zone d'épaisseur
nulle par projection d'un jet de fluide sous pression, sans autre précision.
[0025] Partant de cet art antérieur, il est clair qu'il subsiste un besoin de disposer d'une
technique de fabrication d'un matériau constitué de fibres et conformé en bande, dans
lequel est formé au moins une dépression qui soit le plus simple possible à réaliser,
très économe en énergie et qui ne demande, pour son implantation, qu'une modification
minimale des machines de fabrication de papier existantes, avec un minimum d'impact
sur la qualité visuelle des zones frontière de cette dépression.
RESUME DE L'INVENTION
[0026] Ainsi, selon, un premier aspect, la présente invention se rapporte à un procédé de
fabrication d'un matériau constitué de fibres et conformé en bande, par voie papetière
humide, ce matériau étant multicouches et comportant une première couche de fibres
et au moins une deuxième couche de fibres assemblées l'une à l'autre, procédé au cours
duquel chaque couche de fibres est formée individuellement par égouttage sur une toile
de formation dans une section de formation, puis acheminée en bande vers une section
d'assemblage dans laquelle lesdites couches sont assemblées pour former le matériau
multicouches, et ensuite vers une section de déshydratation (plus couramment appelée
pressage) et de séchage,
caractérisé par le fait que l'on procède à l'enlèvement, à l'aide d'un fluide sous
pression, entre lesdites sections de formation et d'assemblage, d'au moins un ruban
longitudinal de matière fibreuse dans l'une seulement desdites couches de manière
à y former une fenêtre longitudinale continue, que l'on fait usage, pour chaque ruban
longitudinal, de deux jets de fluide sous pression, lesquels sont positionnés de manière
à délimiter les bords opposés de ladite fenêtre longitudinale, et que l'on oriente
lesdits jets de façon convergente, à savoir qu'on les oriente vers le centre dudit
ruban longitudinal à retirer, de manière à former avec le plan dans lequel est contenue
ladite bande un angle x° inférieur à 90°, notamment compris entre 45° et 90°, de préférence
compris entre 45° et 85°et plus préférentiellement compris entre 50° et 75°.
[0027] Les bords opposés de ladite fenêtre longitudinale sont les bords orientés dans le
"sens marche", c'est-à-dire parallèlement à la direction de déplacement du matériau
de la section de formation vers la section de déshydratation et de séchage.
[0028] Ainsi, on met à profit, au sein de la machine, une zone où il existe un espace disponible
pour y placer une source de fluide sous pression. De plus, la teneur en humidité de
la bande étant très élevée dans cette zone, une pression relativement basse de fluide
est nécessaire pour dégager la fenêtre, d'où des gains significatifs en énergie. Enfin,
l'orientation particulière des jets se traduit, sur le produit fini, par une excellente
qualité visuelle des zones frontière d'enlèvement du ruban.
[0029] Bien entendu, à des fins de simplification, il n'est pas décrit ici la suite du procédé
en ligne, mais la bande subit d'autres étapes de traitement (encollage ou « sizing
» en anglais, séchage complémentaire, calandrage etc.) avant d'être enroulée sur elle-même
en bobine.
[0030] Selon d'autres caractéristiques non limitatives et avantageuses de ce procédé :
- ledit fluide sous pression est de l'eau ou de l'air ;
- la pression de fluide est inférieure à 10 bar, de préférence comprise entre 5 et 9
bar ;
- la teneur en eau desdites couches de fibres, lorsque l'on procède audit enlèvement,
est supérieure à 70% ;
- ladite section de formation comprend des moyens d'égouttage à travers une toile d'une
forme ronde baignant partiellement dans une suspension aqueuse de fibres ou d'une
table plate alimentée par une suspension aqueuse de fibres, ou par injection et égouttage
de matière fibreuse sur une toile de cylindre rotatif ;
- on oriente les deux jets de fluide sous pression dans le sens de déplacement dudit
matériau en bande, de ladite section de formation vers ladite section d'assemblage,
préférentiellement selon un angle y° inférieur à 90°, préférentiellement compris entre
45° et 90° ;
- on fait usage de jets ayant de zones d'impact ponctuelles ou quasi-ponctuelles ;
- on procède à l'enlèvement dudit ruban longitudinal par le dessous de ladite couche
;
- on insuffle de l'air sur ladite couche, par le dessus de celle-ci, au moins dans une
zone en repérage de celle où lesdits fluides sous pression opèrent, ceci afin de faciliter
l'enlèvement du ruban longitudinal de matière fibreuse.
[0031] Par ailleurs, la présente invention propose une machine de fabrication de papier,
un matériau en feuille et un document de sécurité et/ou de valeur.
[0032] Cette machine de fabrication de papier, qui comporte une section de formation avec
au moins deux postes de formation d'une bande de papier humide au sein duquel sont
formées, de manière individuelle, au moins deux couches de fibres, une section d'assemblage
dans laquelle lesdites couches sont assemblées pour former le matériau multicouches,
ainsi qu'une section de pressage et de séchage, est caractérisée par le fait qu'elle
comporte, entre lesdites section de formation et section d'assemblage, des moyens
d'enlèvement, à l'aide d'un fluide sous pression, d'au moins un ruban longitudinal
de matière fibreuse dans l'une seulement desdites couches de manière à y former une
fenêtre longitudinale continue.
[0033] Ce matériau papier en feuille individuelle, qui comporte une première couche de papier
et au moins une deuxième couche de papier assemblées l'une à l'autre, ladite première
couche étant une couche de surface, est caractérisé par le fait que ladite première
couche de papier comporte au moins une fenêtre longitudinale dont les bords opposés
sont convergents dans la direction opposée à ladite deuxième couche, tandis que ladite
deuxième couche est dépourvue de fenêtre en regard de celle de ladite première couche
et est d'épaisseur constante.
[0034] Les bords opposés de ladite fenêtre longitudinale sont les bords orientés dans le
"sens marche".
[0035] Par l'expression « convergents dans la direction opposée à ladite deuxième couche
» on entend que les lignes formées par lesdits bords convergent vers un point situé
« côté feutre », c'est-à-dire situé, par rapport à la première couche de papier, du
côté opposé à ladite deuxième couche, comme représenté sur la figure 3.
[0036] Le document de sécurité et/ou de valeur est remarquable en ce qu'il est constitué,
au moins en partie, d'un matériau selon la caractéristique précédente.
BREVE DESCRIPTION DES DESSINS
[0037] D'autres caractéristiques et avantages de l'invention apparaîtront à la lecture de
la description suivante d'un mode de réalisation préféré de l'invention. Cette description
est faite en référence aux dessins annexés dans lesquels :
- la figure 1 est une vue schématique et partielle d'une machine de fabrication de papier
conforme à la présente invention ;
- la figure 2 est une coupe transversale d'une couche de fibres formée au sein de la
machine de la figure 1 et de moyens qui permettent d'enlever dans cette couche un
ruban longitudinal de fibres ;
- la figure 3 est une vue partielle en coupe transversale de la couche de la figure
2, ce schéma étant destiné à montrer comment s'opère l'enlèvement de matière du ruban
longitudinal ;
- la figure 4 est une vue partielle en coupe transversale de la couche de la figure
3 et de moyens de soufflage d'air ;
- la figure 5 est une vue en coupe transversale de la couche des figures précédentes
après réalisation d'une fenêtre ;
- enfin, la figure 6 est une vue en coupe transversale partielle de deux couches de
fibres assemblées l'une à l'autre.
DESCRIPTION DETAILLEE DE L'INVENTION
[0038] Comme indiqué précédemment, la présente invention se rapporte à un procédé de fabrication
d'un matériau constitué de fibres et conformé en bande.
[0039] Par l'expression, "conformé en bande", on entend que le matériau est fabriqué en
continu de manière à constituer une seule et unique bande de quelques centaines à
quelques milliers de mètres de long. Bien entendu, au final, cette bande sera découpée
en une série de feuilles individuelles.
[0040] Ce procédé est mis en oeuvre au sein d'une machine de fabrication d'un tel matériau
que l'on qualifiera ci-après de "machine à papier".
[0041] De manière générale, les figures qui accompagnent le présent texte n'ont qu'une vocation
illustrative. Cela signifie que les dimensions, notamment les épaisseurs, les écartements
et les angles sont exagérés à des fins de simplification et de lisibilité et ne reflètent
pas fidèlement la réalité.
[0042] Cette machine à papier M est représentée partiellement et symboliquement à la figure
1. Seules sont visibles les sections de cette machine qui présentent de l'intérêt
par rapport à l'objet de l'invention. Il s'agit tout particulièrement d'une section
de formation 1 et d'une section d'assemblage 2.
[0043] Toutefois, une telle machine comporte avantageusement un ensemble de presses, un
ensemble de sècherie et un ensemble presse-encolleuse non représentés ici. Au final,
le matériau fabriqué au sein de cette machine est destiné à être enroulé sur lui-même.
[0044] De façon connue en soi, la section de formation 1 comporte deux postes de formation
10 et 11 sensiblement identiques. Ainsi, le poste 10 comporte une cuve 100 contenant
une suspension de fibres S qui peuvent être des fibres de cellulose, plus particulièrement
de coton, des fibres synthétiques, des fibres naturelles reconstituées avec ou sans
greffage chimique additionnel ou un mélange quelconque d'au moins deux de ces différentes
fibres.
[0045] Dans cette cuve est partiellement immergé un cylindre rotatif 101 en toile qui définit,
lorsqu'il est animé d'un mouvement de rotation dans le sens antihoraire de la flèche
f, une surface périphérique au contact de laquelle se forme en continu une couche
4 de fibres.
[0046] De manière analogue, le deuxième poste de formation 11 comporte une cuve 110 dans
laquelle est contenue une suspension S identique ou différente en composition de la
première évoquée ci-avant et où baigne un cylindre 111 analogue au cylindre 101 et
de même sens de rotation f. Ce deuxième poste permet de former une deuxième couche
5 de fibres. Ces fibres sont de même nature ou de nature différente de celle de la
couche 4.
[0047] Bien entendu, la vitesse de rotation des cylindres 101 et 111 est un des paramètres
qui conditionne l'épaisseur des couches 4 et 5.
[0048] Dans un mode de réalisation non représenté, les deux cylindres précités baignent
dans une seule et même cuve.
[0049] Par rapport au sens d'avancée des couches 4 et 5 ainsi créées, qualifié de sens machine
ou sens marche S
M, le poste 10 est situé en amont par rapport au poste 11.
[0050] Lorsque les couches 4 et 5 se forment, elles se trouvent plaquées et guidées dans
le sens machine contre un feutre 3 qui est conçu pour avoir une bonne rétention des
fibres fines et charges contenues dans la couche de fibres mais qui reste suffisamment
perméable pour laisser passer l'air et l'eau.
[0051] Volontairement, à la figure 1, le feutre 3 est représenté légèrement écarté de la
couche 4, mais uniquement afin de bien le distinguer de cette couche.
[0052] Il s'agit par exemple d'une toile tissée en polyester et en polyamide ayant une perméabilité
de l'ordre de 350 CFM (
Cubic Feet per square feets of sample per Minute). Une telle toile est qualifiée de toile SSB (
Sheet Support Binder) qui qualifie une toile multicouches dont les fils de liaison font partie de la structure,
ce qui permet de lier la face papier à la face machine tout en servant de support
à la bande en cours de constitution.
[0053] Au sein de cette architecture relativement traditionnelle de machine à papier M,
il existe entre les deux postes 10 et 11 un intervalle I qui est, conformément à l'invention,
mis à profit pour procéder à ce niveau, c'est à dire entre les sections de formation
1 et d'assemblage 2, à l'enlèvement à l'aide d'un fluide sous pression, d'au moins
un ruban longitudinal R de matière fibreuse dans la seule couche 4 formée au sein
du poste 10. Bien entendu, on entend par "ruban longitudinal", un ruban qui s'étend
dans le sens de la bande en cours de constitution, en l'occurrence dans le sens machine
S
M.
[0054] Ainsi, dans le mode de réalisation représenté sur les figures, on utilise de préférence
de l'eau sous pression et pour ce faire on emploie des paires de buses 7 qui dirigent
des jets de fluide de manière à avoir des zones d'impact ponctuelles ou quasi-ponctuelles
sur la couche de fibres 4. Ceci est notamment représenté à la figure 2 où les jets
J permettent de réaliser ainsi des découpes très fines D au sein de la couche 4.
[0055] Dans cet intervalle I, la teneur en eau des couches de fibres 4 et 5 est supérieure
à 50 % et avantageusement supérieure à 70, voire 80 %. De ce fait, la pression de
fluide qu'il est nécessaire d'utiliser pour procéder à l'enlèvement du ruban R est
relativement basse et avantageusement comprise entre 5 et 9 bars, en raison du peu
de tenue mécanique de la couche de fibres à ce stade. Ceci n'a rien de comparable
aux fortes pressions utilisées dans l'état de la technique, pressions qui peuvent
être de l'ordre de 1000 bar, voire supérieures.
[0056] Comme également visible à la figure 2, on oriente les jets J de façon convergente,
à savoir qu'on les oriente vers le centre du ruban longitudinal R à retirer, de manière
à former avec le plan dans lequel est contenue la couche 4 un angle x° aigu compris
entre 45 et 90° et ceci afin de procéder à une découpe franche sans bourrelet sur
les bords de la couche 4 destinée à être rapportée sur la couche 5.
[0057] Le fait de recourir à des jets J avec des zones d'impact ponctuelles ou quasi-ponctuelles,
lesquels jets sont inclinés selon l'angle x° précité, présente de nombreux avantages.
Parmi ceux-ci, on note tout particulièrement le fait qu'un jet ponctuel nécessite
moins de pression d'eau qu'une buse qui fournirait un jet sous la forme d'un pinceau
large et plat.
[0058] De plus, comme le montre la figure 3, l'inclinaison relative des jets J va faire
que les fibres de la couche 4 frappées par les jets sont dégagées vers le centre de
la fenêtre ou tombent par gravité comme le montrent les flèches g de la figure 3.
Ce dégagement vers le centre de la fenêtre ou cette chute par gravité est facilité
par la forme que confèrent, notamment du fait de l'inclinaison relative des jets J,
les découpes D au ruban R.
[0059] Ainsi, on obtient en définitive une couche 4, dans laquelle on vient de pratiquer
des découpes dont les bords longitudinaux 40 sont en théorie de la forme indiquée
à la figure 3.
[0060] Afin de parachever l'enlèvement du ruban longitudinal R, il est possible d'insuffler
de l'air sur la couche 4 par le dessus de celle-ci, et dans une zone en repérage avec
celle où les jets J opèrent, ceci afin de faciliter l'enlèvement du ruban R de matière
fibreuse. Ceci est représenté aux figures 1 et 4 dans lesquelles la source d'air comprimé
est référencée 8, tandis que le jet d'air projeté contre la couche 4 porte la référence
P (figure 4).
[0061] Sur la figure 1, on note que les moyens 7 de projection de fluide sous pression et
les moyens 8 de projection d'air sous pression dirigent des jets qui sont inclinés
dans le sens longitudinal selon des angles y°, respectivement z°.
[0062] L'inclinaison selon l'angle y° permet de réaliser une découpe dans la couche de fibres
dans le sens d'avancée (sens machine s
M) de la bande de papier, ce qui permet de réaliser une coupe nette. Cet angle peut
bien entendu être ajusté suivant la vitesse de fonctionnement de la machine à papier.
[0063] L'angle z° (orienté à l'inverse de l'angle y° mais sans que les valeurs absolues
de ces angles soient obligatoirement égales) et la distance des buses d'air 8 par
rapport à la toile 3 peuvent être réglés pour avoir un décollement parfait du ruban
de papier découpé par les jets d'eau. De plus, ces buses d'air doivent être positionnées
selon un repérage soigné vis-à-vis de la zone dans laquelle agissent les buses d'eau.
Si elles sont mal positionnées, elles vont décoller les bords de la couche 4 qui doivent
rester sur la toile 3 pour rejoindre la seconde couche 5, générant ainsi des défauts
sur l'assemblage final. La largeur du jet d'air sous pression doit être au maximum
égale à la largeur du ruban R de papier découpé. Dans un réglage optimisé, elle peut
être moins large pour plus de souplesse de positionnement.
[0064] En effet, si l'angle x° est bien réglé, les bords du ruban R de papier découpé auront
tendance à se décoller d'eux-mêmes. Grâce au soufflage au centre du ruban de papier,
celui-ci va se décoller de la toile 3.
[0065] Ces buses 8 sont positionnées de telle sorte que le ruban R de papier retombe dans
une cuve de pâte et soit ensuite recyclé.
[0066] Comme indiqué précédemment, la fenêtre F qui est formée dans la couche 4 présente
des bords longitudinaux 40 qui sont globalement inclinés. Ceci a une importance toute
particulière dans l'assemblage 6 des couches qui est formé au final. Ainsi, si l'angle
x° des buses d'air est trop élevé, c'est-à-dire trop proche de 90°, alors la découpe
est trop franche et pratiquement perpendiculaire aux bords de la couche 4 de fibres
restant sur le tapis et se trouve ensuite visible sur le papier final. En effet, la
frontière délimitant la fenêtre F est alors nette avec une différence d'épaisseur
marquée générant une ligne noire visible. De plus, avec un tel angle trop grand, des
talus se forment à gauche et à droite du ruban découpé R sur la couche 4, de sorte
qu'ils sont également visibles sur la feuille finale.
[0067] Au contraire, avec un angle trop faible, les buses générant les jets J sont trop
proches du papier et l'encombrement occasionné est important avec moins de flexibilité
pour les déplacer.
[0068] L'angle x° est donc notamment compris entre 45° et 90°, de préférence compris entre
45° et 85°et plus préférentiellement compris entre 50° et 75°.
[0069] On génère grâce au procédé de l'invention un matériau papier qui comporte une première
couche 4 ajourée ainsi qu'une deuxième couche 5 d'épaisseur constante. Habituellement,
la fenêtre réalisée n'est pas détectable à l'œil nu mais par des systèmes de vision,
généralement installés en fin de machine à papier. La zone où est présente la fenêtre
est donc contrôlée en ligne et, si des dérives apparaissent, les paramètres de réglage
des buses d'eau et d'air peuvent être ajustés pendant la production.
[0070] A titre purement indicatif, on peut retirer selon la présente invention, un ruban
de 20 millimètres de large et d'une épaisseur de 12 micromètres avec les paramètres
suivants :
Paramètre |
Valeur |
Angle x° |
60° |
Angle y° |
65° |
Angle z° |
90° |
Pression des jets (J) de fluide sous pression (eau) |
7 bars |
Pression de l'air inssuflé |
2 bars |
Couche de fibres (4) |
15 g/m2 |
Couche de fibres (5) |
70 g/m2 |
[0071] Les buses 7 et 8 peuvent être réglées facilement si elles sont montées sur un rail
gradué.
[0072] Selon l'invention, on arrive donc à retirer un ruban de fibres à un stade où la couche
de fibres a très peu de résistance mécanique et ce sans impacter la qualité visuelle
des zones frontière d'enlèvement du ruban.
1. Procédé de fabrication d'un matériau (6) constitué de fibres et conformé en bande,
par voie papetière humide, ce matériau (6) étant multicouches et comportant une première
couche (4) de fibres et au moins une deuxième couche (5) de fibres assemblées l'une
à l'autre, procédé au cours duquel chaque couche de fibres (4, 5) est formée individuellement
par égouttage sur une toile de formation (3) dans une section de formation (1), puis
acheminée en bande vers une section d'assemblage (2) dans laquelle lesdites couches
(4, 5) sont assemblées pour former le matériau multicouches (6), et ensuite vers une
section de pressage et de séchage,
caractérisé par le fait que l'on procède à l'enlèvement, à l'aide d'un fluide sous pression, entre lesdites sections
de formation (1) et d'assemblage (2), d'au moins un ruban longitudinal (R) de matière
fibreuse dans l'une (4) seulement desdites couches (4, 5) de manière à y former une
fenêtre longitudinale continue (F), que l'on fait usage, pour chaque ruban longitudinal,
de deux jets (J) de fluide sous pression, lesquels sont positionnés de manière à délimiter
les bords opposés (40) de ladite fenêtre longitudinale (F), et que l'on oriente lesdits
jets (J) de façon convergente, à savoir qu'on les oriente vers le centre dudit ruban
longitudinal (R) à retirer, de manière à former avec le plan dans lequel est contenue
ladite bande un angle x° inférieur à 90°, notamment compris entre 45° et 90°, de préférence
compris entre 45° et 85° et plus préférentiellement compris entre 50° et 75°.
2. Procédé selon la revendication 1, caractérisé par le fait que ledit fluide sous pression est de l'eau ou de l'air.
3. Procédé selon l'une des revendications 1 ou 2, caractérisé par le fait que la pression de fluide est inférieure à 10 bar, de préférence comprise entre 5 et
9 bar.
4. Procédé selon la revendication 1 à 3, caractérisé par le fait que la teneur en eau desdites couches (4, 5) de fibres, lorsque l'on procède au dit enlèvement,
est supérieure à 70 %.
5. Procédé selon l'une des revendications 1 à 4, caractérisé par le fait que ladite section de formation (1) comprend des moyens d'égouttage à travers une toile
d'une forme ronde baignant partiellement dans une suspension (S) aqueuse de fibres
ou d'une table plate alimentée par une suspension aqueuse de fibres, ou par injection
et égouttage de matière fibreuse sur une toile de cylindre rotatif.
6. Procédé selon l'une des revendications1 à 5, caractérisé par le fait que l'on oriente lesdits deux jets sous pression (J) dans le sens de déplacement dudit
matériau en bande, de ladite section de formation (1) vers ladite section d'assemblage
(2), préférentiellement selon un angle y° inférieur à 90°, préférentiellement compris
entre 45° et 90°.
7. Procédé selon l'une des revendications 1 à 6, caractérisé par le fait que l'on fait usage de jets (J) ayant de zones d'impact ponctuelles ou quasi-ponctuelles.
8. Procédé selon l'une des revendications 1 à 7, caractérisé par le fait que l'on procède à l'enlèvement dudit ruban longitudinal par le dessous de ladite couche
(4).
9. Procédé selon la revendication 8, caractérisé par le fait que l'on insuffle de l'air sur ladite couche (4), par le dessus de celle-ci, au moins
dans une zone en repérage de celle où lesdits fluides sous pression opèrent, ceci
afin de faciliter l'enlèvement du ruban longitudinal de matière fibreuse.
10. Machine (M) de fabrication de papier, qui comporte une section (1) de formation avec
au moins deux postes de formation (10, 11) d'une bande de papier humide au sein duquel
sont formées, de manière individuelle, au moins deux couches (4, 5) de fibres, une
section d'assemblage (2) dans laquelle lesdites couches sont assemblées pour former
un matériau multicouches (6), ainsi qu'une section d'égouttage et de séchage, caractérisée par le fait qu'elle comporte, entre lesdites section de formation (1) et section (2) d'assemblage,
des moyens d'enlèvement (7), à l'aide d'un fluide sous pression, d'au moins un ruban
(R) longitudinal de matière fibreuse dans l'une (4) seulement desdites couches de
manière à y former une fenêtre longitudinale continue (F).
11. Matériau papier en feuille individuelle, qui comporte une première couche (4) de papier
et au moins une deuxième couche (5) de papier assemblées l'une à l'autre, ladite première
couche (4) étant une couche de surface, caractérisé par le fait que ladite première couche (4) de papier comporte au moins une fenêtre longitudinale
(F) dont les bords opposés (40) sont convergents dans la direction opposée à ladite
deuxième couche, tandis que ladite deuxième couche (5) est dépourvue de fenêtre en
regard de celle de ladite première couche (4) et est d'épaisseur constante.
12. Document de sécurité et/ou de valeur constitué, au moins en partie, d'un matériau
selon la revendication 11.