[0001] La présente invention a pour objet un procédé permettant de fixer la contamination
radioactive sur des matériaux ou des déchets pollués ainsi que son application.
[0002] La manipulation et le conditionnement des déchets radioactifs posent de nombreux
problèmes de sécurité. Il est connu de conditionner les déchets radioactifs, en vue
de leur stockage, dans des résines thermodurcissables en enrobant lesdits déchets
dans des résines polyesters ou époxydiques. Ces procédés s'appliquent aussi bien aux
poudres, aux liquides organiques, aux résines échangeuses d'ions qu'aux objets de
dimensions importantes. Les brevets français et les certificats d'addition 2.129.836,73/17974
, 2.251.081, 2.273.350, 2.361.725, 2.361.724 au nom du demandeur décrivent ces techniques.
[0003] Néanmoins, dans le cas des objets de très grandes dimensions, comme cela se produit
lors du démantèlement des installations nucléaires, c'est-à-dire lors du démontage,
en vue de leur stockage, des parties d'installations nucléaires contaminées, des précautions
très importantes doivent être prises afin de fixer la contamination sur les pièces
pour éviter de contaminer les locaux successifs où ces pièces séjourneront durant
les diverses phases du processus de conditionnement.
[0004] La présente invention apporte une solution à ce problème de transfert et de manipulation
d'objets contaminés. Le procédé, objet de l'invention, est d'une mise en oeuvre aisée,
d'un prix de revient peu élevé et apporte une très grande sûreté.
[0005] Plus précisément l'invention a pour objet un procédé de fixation de la contamination
radioactive de matériaux contaminés, caractérisé en ce que l'on projette, à l'aide
d'un pistolet électrostatique, au moins une couche de résine polymérisable à la température
ambiante sur les matériaux contaminés.
[0006] L'application du pistolet électrostatique, qui crée un champ électrique entre la
buse portée à un potentiel élevé et le matériau porté à la masse, permet à ce dernier
d'attirer les particules de résine chargées électriquement et d'enrober totalement
ledit matériau. L'utilisation du champ électrique créé présente un triple avantage
:
a) économie de matière ;
b) les pièces à revêtir sont souvent télémanipulées. Le fait que les particules de
résine suivent les lignes de champ,diminue beaucoup le nombre de télémanipulations,
ce qui conduit à une exploitation plus simple que dans le cas d'une projection classique
;
c) les pertes en matière étant minimes, les filtres en exploitation dans les cellules
de démantèlement où on utilise ce procédé,se colmateront plus lentement que dans le
cas d'une projection classique.
[0007] En ce qui concerne l'équipement mis en oeuvre (alimentation THT, pistolet ...) les
éléments concourant à la sécurité d'utilisation sont les suivants :
- La THT (60 à 90 Kv) a un débit limité à une valeur très faible (60 à 150 µA suivant
les types de pistolet) ; l'énergie contenue dans l'étincelle qui se produirait entre
buse et masse est de ce fait très faible.
[0008] Seule la buse est portée à la THT, le corps du pistolet étant lui-même à la masse.
L'expérience montre d'ailleurs que le contact direct de la buse par un opérateur ne
présente aucun danger.
- Le matériau ou déchet est mis à la masse par contact avec son support, lui-même
à la masse ; les charges électriques portées par la résine s'écoulent ainsi à la masse,
évitant tout risque de création d'une charge électrostatique qui pourrait amorcer
une étincelle. Il a été vérifié que, même si le support est superficiellement recouvert
d'une couche correspondant à trente pulvérisations, la qualité de la mise à la masse
du déchet n'est pas compromise.
[0009] Parmi les résines utilisables on peut envisager les résines époxydiques, les résines
polyesters, les résines vinyliques, les mélanges de résines thermodurcissables et
thermoplastiques.
[0010] A titre d'exemple, on peut citer la peinture époxyde commercialisée sous la marque
"RIVEPOX ELECTROSTATIQUE 80088" associée à son "Durcisseur 80057".
[0011] Des diluants, pour ajuster la viscosité, peuvent être additionnés aux résines. Selon
les conditions opératoires, plein air ou locaux fermés, ces diluants seront choisis
inflammables ou pas.
[0012] A titre d'exemple de diluants, on peut citer le mélange de 1.1.2 trichloro, 1.2.2
trifluoroéthane et de 1.1.1 trichloroétha- ne, les dérivés cétoniques et les diluants
E 3 et SC 1 commercialisés par la Société BLANCOMME. Ces diluants sont choisis en
fonction de leurs propriétés, en particulier de leur point éclair, de leur viscosité
et de leur résistivité pour obtenir un mélange susceptible d'être projeté par un pistolet
électrostatique.
[0013] Des adjuvants peuvent aussi être incorporés aux résines. A titre d'adjuvants, on
peut utiliser des métaux en poudre, par exemple, de la poudre d'aluminium, de la poudre
de zinc, etc., des oxydes métalliques tels que les oxydes de zinc, de fer, d'aluminium,
de titane etc., des sels comme le carbonate de calcium, des fibres par exemple des
fibres de verre, de carbone, de bore etc.... et des billes minérales par exemple des
billes de verre ou de silice.
[0014] Dans tous les cas, on sélectionne les additifs utilisés et on règle leur quantité
de façon que le mélange de résine qui sera projeté par le pistolet électrostatique,
présente :
- une viscosité convenable , par exemple de l'ordre de 30 s à 20°C lorsqu'on la mesure
par écoulement en coupe Ford n° 4 ;
- une constante diélectrique qui permette la charge des particules;
- une résistivité appropriée qui dépend du type de pistolet utilisé, par exemple une
résistivité de 1 à 100MΩ cm. ;
- une volatilité compatible avec un temps de séchage et de polymérisation de l'ordre
de 60 min à la température ambiante ;
- un point éclair supérieur à 21 °C ; et
- une bonne compatibilité (corrosion) avec les matériaux contaminés à traiter.
[0015] Toute peinture électrostatique présentant les caractéris-B. 7484.3 MDT tiques précitées
peut être utilisée dans le procédé de l'invention, par exemple des résines époxy -
phénoliques et époxy - aminoplastes, des esters de résines époxydes et d'acides gras
et des résines époxydes modifiées par des polyamines ou par des diisocyanates.
[0016] Les peintures peuvent être projetées sous forme liquide dans un solvant ou sous la
forme de poudre.
[0017] Selon une première application du procédé de l'invention, la fixation de la contamination
a lieu uniquement pour assurer un transfert des matériaux en toute sécurité.
[0018] Dans ce cas, on dépose en une ou plusieurs passes une couche fine de résine sur le
matériau. Ce dépôt peut avoir lieu en cellule blindée ou à l'air libre selon l'activité.
Après dépôt, le matériau est transporté et conditionné par tous moyens connus, comme
par exemple celui décrit dans le brevet français pour "Procédé de stockage de déchets
radioactifs solides de grandes dimensions".
[0019] Selon une deuxième application de l'invention, utilisable notamment pour des pièces
de faible activité, la fixation de la contamination sert en même temps de conditionnement
définitif. Dans ce cas, il convient de prévoir un nombre convenable de passes afin
d'assurer un revêtement de résine suffisamment épais. La résine est appliquée pure
ou mélangée à une charge inerte.
[0020] Les propriétés de fixation de la contamination ont été déterminées par comparaison
de frottis effectués sur des surfaces témoins souillées par une contamination labile,
avant et après projection.
[0021] La ou les couches adhèrent parfaitement après polymérisation à la surface du déchet,
ne cassent ni se s'écaillent si le déchet subit une déformation mécanique après revêtement,
et résistent à la chute.
[0022] Généralement, l'équipement de projection électrostatique est composé d'un pistolet
dont la buse de projection est alimentée :
- en THT (60 à 90 Kv) à très faible débit (60 à 150 µA suivant le type de pistolet),
et
- en mélange à projeter, à partir d'un réservoir, maintenu à une pression d'air de
0,5 à 6 bars, suivant le type de pistolet.
[0023] D'autres caractéristiques et avantages de l'invention apparaitront mieux à la lecture
de la description qui suit, donnée bien entendu à titre illustratif et non limitatif,
en référence au dessin annexé qui représente une installation pour la mise en oeuvre
du procédé de l'invention.
[0024] Sur cette figure, on voit que l'installation comprend une enceinte fermée 1 constituée
par une sorbonne à l'intérieur de laquelle on peut introduire un pistolet de projection
électrostatique 3, par exemple un pistolet de type Stataire commercialisé par la Société
SAMES, sous la référence MRV 96.
[0025] La buse du pistolet électrostatique 3 est alimentée en courant électrique par un
générateur 5 qui fournit par le conducteur 7 une haute tension (90k-volt) avec un
courant d'environ 0,1 milliampère, et qui est relié au secteur par le conducteur 9.
[0026] Le pistolet 3 est alimenté par ailleurs en air comprimé par la conduite 11 munie
d'un manomètre détendeur réglable 13, et en résine par la conduite 15 reliée à un
réservoir de résine 17 lui-même alimenté en air comprimé par la conduite 19. Des manomètres
21 permettent de contrôler la pression dans les divers circuits de l'installation.
A l'intérieur de la sorbonne 1, on peut disposer la pièce 3 de matériau contaminé
sur un support et la relier à la masse par 25. Un récipient 27 est disposé en dessous
de la pièce 23 pour recueillir les gouttes de résine en excès susceptibles de s'écouler
de la pièce 23 lors de l'opération de projection. A sa partie supérieure, la sorbonne
1 est reliée à un conduit 29 muni d'une grille 31 afin d'assurer la ventilation à
l'intérieur de la sorbonne 1 et renouveler l'air.
[0027] La buse du pistolet 3 est choisie en fonction de la forme des pièces de matériau
contaminé à traiter et elle peut projeter soit un jet arrondi 4 qui est approprié
pour le traitement de pièces de forme complexe, soit un jet plat pour les pièces de
grande surface.
[0028] Pour mettre en oeuvre le procédé de l'invention, on dispose la pièce 23 de matériau
contaminé à traiter dans la sorbonne 1 et on alimente le pistolet électrostatique
3, d'une part, en courant électrique et, d'autre part, en résine en maintenant dans
le réservoir 17 une pression d'air de 0,5 à 6 bars. Ainsi, on projette la résine sur
la surface externe de la pièce 23 et les gouttes de résine en excès sont récupérées
dans le récipient 27.
[0029] Les exemples suivants illustrent le procédé de l'invention.
Exemple 1. -
[0030] Cet exemple est destiné à déterminer le rendement de la fixation de la résine.
[0031] Il a été réalisé dans une hotte pourvue d'une ventilation (1.500 m
3/heure, dépression 45
m/m), le générateur très haute tension (THT) fonctionne sous 90 Kv et fournit un courant
de 0,10 mA.
a) Sur une pièce de grande surface (2 m2) on projette 49 g de résine époxydique "03FTI" commercialisée par la Société BLANCOMME.
On recueille sur le filtre 0,96 g de résine. Pour cette géométrie de pièce 98 % de
la résine projetée est donc fixée sur la pièce qui est revêtue d'une couche de résine
d'environ 24 pm d'épaisseur.
b) Sur des pièces de formes diverses (grilles, tubes, plaques etc....) on projette
56 g de résine et on recueille sur le filtre 3,1 g. Pour cette géométrie de pièces
le rendement est de 94,5 %.
Exemple 2. -
[0032] Cet exemple est destiné à montrer l'efficacité du procédé.
[0033] On prépare trois plaques d'acier oxydé sur lesquelles on dépose des solutions identiques
contenant chacune 240 µCi de 137Cs.
[0034] Après séchage,on laisse intacte la première plaque qui servira de témoin.
[0035] Sur la deuxième plaque on dépose une couche de résine (25 à 30 um environ).
[0036] Sur la troisième plaque on fixe deux couches de résine (50 à 60 µm environ).
[0037] Après séchage on fait un frottis humide sur les trois plaques. Les résultats obtenus
figurent dans le tableau ci-après.

Exemple 3. -
[0038] Cet exemple montre l'efficacité du procédé lorsqu'on dépose la peinture en couche
épaisse.
[0039] On prépare trois plaques d'acier dégraissé et l'on recouvre la première plaque d'une
couche de peinture en poudre projetée électrostatiquement qui est constituée par la
peinture époxydique commercialisée par la Société BLANCOMME sous la référence 95 KT
17 Blancopou- dre brun-rouge.
[0040] On poursuit la projection pendant 20 secondes et on effectue le durcissement à chaud
à une température de 180°C. On obtient ainsi une couche dont l'épaisseur est de 700
microns.
[0041] On dépose sur la deuxième plaque deux couches de peinture en réalisant deux projections
successives, ce qui permet d'obtenir une épaisseur totale de 1 mm.
[0042] Sur la troisième plaque, on projette successivement trois couches de peinture et
l'on obtient ainsi une épaisseur totale de 1,5 mm.
[0043] On précise que l'opération de dégraissage des plaques a pour but de faciliter l'accrochage
de la couche épaisse de peinture. Cependant, on pourrait remplacer cette opération
de dégraissage par le dépôt sur les plaques d'une couche de peinture primaire, ce
qui permet également d'assurer l'accrochage de la peinture déposée ensuite en couche
épaisse.
1. Procédé de fixation de la contamination radioactive, caractérisé en ce que l'on
projette, à l'aide d'un pistolet électrostatique, au moins une couche d'une résine
polymérisable à la température ambiante sur les matériaux contaminés.
2. Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que les résines polymérisables
à la température ambiante sont choisies dans le groupe constitué des résines époxydiques,
des résines polyesters, des résines vinyliques, des mélanges de résines thermodurcissables
et thermoplastiques.
3. Procédé selon les revendications 1 et 2, caractérisé en ce qu'au moins un diluant
est ajouté à la résine polymérisable.
4. Procédé selon les revendications 1, 2 et 3, caractérisé en ce qu'au moins un adjuvant
est ajouté à la résine.
5. Procédé selon la revendication 4, caractérisé en ce que l'adjuvant est l'oxyde
de fer ou l'oxyde de zinc.
6. Application du procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 5 à la fixation
de la contamination pour assurer le transport des matériaux contaminés.
7. Application du procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 5 à la fixation
de la 'contamination pour en assurer le conditionnement et le stockage.