[0001] L'invention est relative aux gaines métalliques destinées à être noyées dans des
ouvrages en béton et à recevoir les câbles de précontrainte de ces ouvrages, câbles
qui sont mis en traction avec prise d'appui sur lesdits ouvrages aux extrémités desdites
gaines.
[0002] Elle vise également les procédés de fabrication de ces gaines.
[0003] Elle se rapporte plus particulièrement au cas où les axes desdites gaines ne sont
pas rectilignes et où les forces de traction exercées sur les câbles sont importantes,
ce qui développe des pressions d'application élevées entre les câbles et les gaines
dans les zones cintrées de ces dernières.
[0004] Pour faciliter les glissements des câbles le long des gaines, c'est-à-dire réduire
leurs frottements mutuels, et accroître ainsi les performances (en réduisant notamment
les forces de traction aux extrémités des câbles ainsi que la section de ces câbles),
il a déjà été proposé de rapporter sur la face intérieure des gaines et/ou sur la
face extérieure des câbles un produit "lubrifiant" approprié, constitué notamment
par une poudre de graphite ou de bisulfure de molybdène.
[0005] Un tel procédé donne généralement satisfaction.
[0006] Mais lorsque les forces de traction exercées sur les câbles de précontrainte, et
donc les pressions locales d'application de ces câbles sur les gaines,sont très élevées,
on observe parfois une destruction et une expulsion de la couche lubrifiante intermédiaire.
[0007] C'est en particulier le cas lorsque les parois des gaines sont ondulées et surtout
que les câbles sont constitués par des torons ou faisceaux de fils torsadés ou enroulés
en hélice.
[0008] Dans ce cas en effet, les zones de contact entre les câbles et les gaines sont réduites
à des surfaces très petites, voire quasiment ponctuelles, et les pressions locales
d'application qui résultent de ces réductions de surface sont accrues d'autant.
[0009] C'est ainsi que, dans certains modes de réalisation récents, il n'est pas rare que
la valeur de ladite pression atteigne ou même dépasse 1.000 bars.
[0010] La demanderesse a observé que, pour résoudre un problème ne présentant aucun rapport
avec celui exposé ci-dessus, savoir pour faciliter les déformations globales de fils
ou éléments continus analogues par tréfilage ou étirage à chaud à travers des filières
appropriées, il a déjà été proposé de chemiser préalablement ces fils ou tubes en
appliquant chimiquement sur leurs surfaces extérieures un revêtement composé d'une
couche de phosphate métallique, elle-même tapissée par un savon gélifié : ce revêtement
est si intimement accroché sur les surfaces des éléments à déformer qu'il n'est pas
arraché par les filières et qu'il assure alors un guidage efficace de la déformation.
[0011] Les traitements préalables de phosphatation et savonnage en question ne sont guère
applicables à des surfaces intérieures de tubes ou gaines.
[0012] Mais il se trouve que, pour fabriquer des gaines de précontrainte se prêtant facilement
au cintrage, il est particulièrement avantageux de procéder par enroulement en hélice
d'un "feuillard" ou bande métallique continue.
[0013] Or, les faces d'un tel feuillard se prêtent parfaitement aux traitements ci-dessus.
[0014] L'invention est essentiellement caractérisée en ce que l'on applique lesdits traitements
de phosphatation et savonnage, connus en soi pour les surfaces extérieures de fils
à tréfiler, à l'une au moins des deux faces d'un tel feuillard, après quoi on enroule
ce feuillard en hélice de façon à former une gaine dont la face traitée ci-dessus
constitue la face intérieure.
[0015] L'expérience montre que les contacts glissants établis localement et à froid entre
les câbles de précontrainte et les surfaces intérieures des gaines ainsi réalisées
sont assurés avec une excellente lubrification, même pour les valeurs les plus élevées
des forces de traction exercées sur ces câbles.
[0016] L'invention comprend, mise à part cette disposition principale, certaines autres
dispositions qui s'utilisent de préférence en même temps et dont il sera plus explicitement
question ci-après.
[0017] Dans ce qui suit, l'on va décrire un mode de réalisation préféré de l'invention en
se référant au dessin ci-annexé,d'une manière bien entendu non limitative.
La figure 1, de ce dessin, montre en coupe axiale une portion coudée d'une gaine de
précontrainte établie conformément à l'invention et contenant un câble tendu.
La figure 2 est une coupe transversale partielle de ladite gaine et dudit câble selon
II-II, figure 1.
[0018] On a recours à un feuillard en acier doux 1 déformé selon des ondulations longitudinales,
c'est-à-dire présentant une section transversale ondulée avec des crêtes 2 et creux
3.
[0019] On fait subir à au moins la face, du feuillard 1, destinée à devenir la face intérieure
de la gaine, un traitement chimique connu en soi conduisant à l'accrochage intime,
sur cette face, d'une couche de phosphate extérieurement revêtue d'un voile de savon
gélifié.
[0020] Ce traitement comprend la suite des opérations suivantes, lesquelles sont toutes
effectuées dans un four tunnel chauffé à une température de l'ordre de 70 à 80°C à
l'intérieur duquel on fait défiler à vitesse constante ledit feuillard :
- décapage à l'acide sulfurique (ou chlorhydrique) dilué, durant 10 secondes environ,
- deux rinçages successifs à l'eau durant environ 3 secondés chacun, séparés par un
brossage mécanique,
- application par vaporisation, durant 70 secondes environ,d'un bain de phosphatation
composé de phosphate mixte de zinc et de fer, d'oxydants (chlorates, nitrites, ...)
et d'additifs appropriés,
- nouveau rinçage à l'eau,
- application par vaporisation,durant 5 à 6 secondes, d'un savon constitué par une
solution aqueuse de stéarate de sodium et de palmitate de sodium,
- et enfin séchage.
[0021] A titre purement indicatif, on indique que le bain de phosphatation ci-dessus pourrait
être une solution aqueuse à 6% en volume du liquide diffusé par la Compagnie Française
de Produits Industriels (CFPI) sous la dénomination THERMOGRANODINE 63, le savon étant
alors lui-même constitué par une solution aqueuse de la poudre diffusée par ladite
Société CFPI sous l'appellation PROLUB.
[0022] Le traitement ci-dessus a pour effet de rapporter successivement,sur la face traitée
du feuillard 1 :
- une couche cristalline présentant une épaisseur de l'ordre de 0,5 micron composée
de cristaux de phosphate qui présentent la forme générale de feuilles de palmier et
sont imbriqués dans les cristaux superficiels du métal constitutif du feuillard,
- puis une couche superficielle dé savon dont l'épaisseur peut être de l'ordre de
100 microns: la plus grande partie de cette couche de savon peut être arrachée par
frottement,mais non sa base,laquelle est constituée par un voile très mince, d'épaisseur
environ 1/100 de micron, se présentant sous la forme d'un velours dont les poils sont
plantés sur la couche cristalline sous-jacente.
[0023] On a schématisé en 4 sur la figure 2 le revêtement à propriété "lubrifiante" ainsi
appliqué de façon très intime sur la face traitée du feuillard 1 et tapissant cette
face.
[0024] Ce revêtement 4 est reconnaissable à son état mat, à sa couleur gris clair et à son
toucher onctueux, rappelant celui du savon de Marseille.
[0025] On enroule ensuite ce feuillard selon une hélice de façon à former une gaine tubulaire
5 dont ladite face traitée constitue la face interne.
[0026] Cet enroulement est exécuté avec chevauchement latéral des spires contiguës de l'hélice
de façon telle que les crêtes 2 forment des nervures hélicoïdales extérieures et les
creux 3, des gorges hélicoïdales reliant chacune deux de ces nervures.
[0027] Puis on agrafe l'un sur l'autre les bords des spires qui se chevauchent en rabattant
mutuellement ceux-ci les uns sur les autres à la façon d'un sertissage (en 10).
[0028] La gaine 5 ainsi obtenue est facile à cintrer en fonction des besoins de la précontrainte.
[0029] On voit, sur la figure 1, l'ouvrage en béton 6 dans lequel a été noyée une telle
gaine 5 cintrée, ainsi que l'un des câbles de précontrainte'7 mis en place dans cette
gaine 5, câble soumis à une force de traction F exercée entre ses deux extrémités.
[0030] Ce câble 7 est constitué de préférence, comme illustré, par une pluralité de fils
ou torons 8 enroulés en hélice autour d'un autre fil 9 constituant une âme centrale.
[0031] Théoriquement la surface d'application d'un tel câble 7 contre la gaine 5 se réduit
à une succession de points ou zones ponctuelles M (figure 2) lesquels, pour chaque
toron, sont écartés longitudinalement les uns des autres d'une distance égale au pas
de l'hélice d'enroulement des torons, pas généralement de l'ordre de 20 cm.
[0032] En outre, le fait que le contact entre chaque câble et la gaine ne puisse être établi
qu'au niveau des fonds des gorges hélicoïdales de la gaine correspondant aux creux
3 ci-dessus réduit encore d'autant la surface d'application possible entre câble et
gaine.
[0033] Cette double circonstance, combinée aux valeurs très élevées données à la force F,
conduit au développement de pressions locales P, elles-mêmes extrêmement élevées,
au niveau des points de contact M.
[0034] Malgré ces pressions énormes, la mise en traction des câbles se traduit par l'établissement
de contacts glissants parfaitement "lubrifiés" entre ces câbles et la surface intérieure
de la gaine, c'est-à-dire n'entraînant aucun arrachement de la couche phosphatée intermédiaire
au niveau des petites zones de contact M.
[0035] Bien entendu, après cette mise en traction, le volume compris à l'intérieur de la
gaine entre les câbles et la surface intérieure de cette gaine est rempli d'un coulis
injecté ou d'une graisse de protection (non représenté) de la manière usuelle.
[0036] En suite de quoi, et quel que soit le mode de réalisation adopté, on dispose finalement
d'une gaine de précontrainte dont la constitution et les avantages, en particulier
la possibilité de recevoir, avec des contacts glissants parfaitement lubrifiés, des
câbles soumis à des forces de traction extrêmement élevées, résultent suffisamment
de ce qui précède.
[0037] Comme il va de soi, et comme il résulte d'ailleurs déjà de ce qui précède, l'invention
ne se limite nullement à ceux de ses modes d'application et de réalisation qui ont
été plus spécialement envisagés ; elle en embrasse, au contraire, toutes les variantes.