[0001] L'invention concerne un cyclotron à système de focalisation- défocalisation permettant
d'augmenter sensiblement la limite de 'puissance admissible lorsque l'on place la
cible à l'intérieur de la structure accélératrice.
[0002] Un cyclotron isochrone est un accélérateur de particules chargées (généralement des
protons) qui se compose d'un électroaimant comprenant deux pièces polaires occupant
les deux faces axiales, c'est-à-dire perpendiculaires à l'axe, d'une cavité accélératrice,
cylindrique et relativement plate. Une source de particules chargées est disposée
au centre de cette cavité de sorte que le champ magnétique perpendiculaire à la trajectoire
du faisceau de particules donne à celui-ci une trajectoire circulaire. Un système
d'accélération classique comporte deux électrodes plates constituées chacune de deux
plaques parallèles en forme de portion de disque. Ces électrodes sont portées à une
haute tension alternative, permettant d'appliquer aux particules quatre accélérations
successives par tour. Dans ces conditions, l'énergie des particules augmente et la
trajectoire du faisceau n'est plus un cercle mais une spirale divergente qui amène
les particules jusqu'à la périphérie de la cavité accélératrice. Dans le cas où on
désire faire sortir le faisceau de la cavité accélératrice (par exemple pour bombarder
une cible de façon à créer un isotope radioactif) on utilise un canal électro-statique
courbe porté à une haute tension pour arracher le faisceau de l'attraction du champ
magnétique et l'extraire tangentiellement de la cavité. Cet organe est l'un des plus
exposés du cyclotron et nécessite d'être particulièrement bien positionné par rapport
au faisceau incident pour avoir le meilleur rendement d'extraction possible et aussi
pour éviter qu'il ne soit bombardé par une fraction trop importante du faisceau incident.
Ceci nécessite une très grande finesse du faisceau, autrement dit une bonne focalisation
dans toutes les directions. On caractérise le faisceau par sa focalisation horizontale
(ou radiale) dans le plan de la spirale et par sa focalisation verticale dans la direction
perpendiculaire aux pièces polaires. On sait que la focalisation horizontale peut
être obtenue en augmentant la valeur du champ magnétique en fonction du rayon. Ce
gradient de champ dans la cavité permet aussi de compenser l'effet de l'augmentation
de la masse de la particule au cours de son accélération (effet relativiste). En revanche,
ce gradient est nuisible pour la focalisation verticale. On a résolu ce problème en
soumettant la particule, à chaque tour, à une succession alternée de champs forts
et de champs faibles. Ceci est obtenu grâce à des pièces polaires comprenant une succession
de secteurs épais, espacés et répartis circonférentiellement pour définir dans la
cavité une succession alternée de zones à entrefer large et de zones à entrefer étroit.
Cet agencement assure, sous certaines conditions, la focalisation verticale. La puissance
du faisceau extrait est définie par un rendement d'extraction qui dépend pour beaucoup
des limites de dissipation thermique du canal électro-statique d'extraction précité
et plus particulièrement d'une fine bande de cuivre de celui-ci, connue dans la technique
sous le nom "septum".
[0003] Cependant, de nombreux utilisateurs de cyclotron, notamment pour la production de
certains radioisotopes, désirent obtenir un faisceau le plus puissant possible. On
a alors proposé de placer la cible à l'intérieur de la cavité accélératrice, sensiblement
à la même distance du centre que le canal électro-statique d'extraction, ce dernier
étant provisoirement retiré de la cavité. Dans ce nouveau mode d'utilisation du cyclotron,
la focalisation poussée du faisceau, nécessaire pour l'extraction, devient un inconvénient
car la cible ne peut assurer une dissipation thermique pour une zone d'impact aussi
localisée et risque donc d'être endommagée. Par conséquent, la puissance du faisceau
doit être limitée dans ce mode d'utilisation à cible interne et il n'est pas possible
d'utiliser le cyclotron à sa puissance nominale de sorte que le gain de puissance
est inférieur à ce qui pouvait être attendu d'une utilisation avec cible interne.
L'invention vise à résoudre cet inconvient ; son principe de base consiste à jouer
localement sur la focalisation verticale précitée.
[0004] Plus précisément, l'invention concerne donc un cyclotron comprenant deux pièces polaires
occupant les deux faces axiales d'une cavité accélératrice cylindrique et relativement
plate, au centre de laquelle est placée une source de particules chargées et comportant
des moyens de positionnement d'une cible à l'intérieur de la dite cavité, du type
dans lequel lesdites pièces polaires comprennent une succession de secteurs épais
espacés et régulièrement répartis circonférentiellement pour définir dans ladite cavité
une succession alternée de zones à entrefer étroit et de zones à entrefer large pour
assurer la focalisation dite verticale, caractérisé en ce qu'il com porte en outre
un agencement de bobines allongées disposées circulairement au voisinage de la périphérie
de ladite cavité et des moyens d'alimentation électrique de celles-ci, pour faire
varier les conditions de focalisation verticale au voisinage d'un trajet circulaire
correspondant au positionnement radial de la cible précitée.
[0005] L'invention sera mieux comprise et d'autres avantages de celle-ci apparaitront mieux
à la lumière de la description qui va suivre de deux modes de réalisation possibles
d'un cyclotron selon l'invention, donnée uniquement à titre d'exemple et faite en
référence au dessin annexé dans lequel :
- la figure 1 est une vue schématique en plan des parties essentielles d'un cyclotron
selon l'invention ;
- la figure 2 est une section II - II de la figure 1 ; et
- la figure 3 est une vue analogue à la figure 2, illustrant une variante de l'invention.
[0006] En se reportant aux figures 1 et 2, la partie principale du cyclotron Il comporte
des moyens pour générer un puissant champ magnétique dans une cavité accélératrice
12 cylindrique et de forme relativement plate. Ces moyens se composent d'une carcasse
métallique externe (non représentée) et de deux bobines (non représentées) alimentées
en courant continu et situées au voisinage de deux pièces polaires 13, 14 espacées
en regard l'une de l'autre pour définir un entrefer. Comme les deux pièces polaires
occupent les deux faces axiales de la cavité 12 celle-ci coïncide avec l'entrefer.
En fonctionnement, on fait le vide dans la cavité 12. En outre , cette dernière abrite
des électrodes accélératrices, non représentées pour plus de clarté dans le dessin
mais dont la structure à deux plaques parallèles en forme de portion de disque et
bien connue de l'homme du métier. Comme mentionné précédemment, la source de particules
16 est placée au centre de la cavité 12. Lorsque l'on désire extraire le faisceau
tangentiellement (voir trajectoire 18 sur la figure 1) on place un canal électro-statique
d'extraction 19, courbe, à la partie périphérique de la cavité 12. Celui-ci est composé
d'une électrode courbe 20 portée à une haute tension continue et d'une électrode parallèle
21 au potentiel de la masse. Cette électrode appelée "septum" doit être très efficacement
refroidie par conduction au moyen de blocs de cuivre disposés en contact thermique
avec elle. L'ensemble est monté sur un support mobile radialement, schématisé par
un vérin 22, pour pouvoir retirer le canal d'extraction de la cavité 12 et y placer
une cible 23, à un autre endroit mais sensiblement à la même distance radiale par
rapport à la source 16. Comme mentionné précédemment, la hauteur de l'entrefer n'est
pas constante circonférentiellement, ceci est dû à la présence de quatre secteurs
épais 24 sur chaque pièce polaire 13, 14, espacés et régulièrement répartis circonférentiellement
pour définir dans la cavité 12 une succession alternée de zones à entrefer étroit
25 et de zones à entrefer large 26. Pour ce faire, les secteurs 24 appartenant respectivement
aux pôles 13 et 14 sont disposés deux à deux en regard l'un de l'autre de façon à
être exactement superposés dans la direction de l'axe de la cavité 12. Les particules
chargées, en tournant dans le plan de la figure 1 rencontrent donc successivement
des champs faibles (entrefer large) et forts (entrefer étroit) ce qui est la condition
d'un bonne focalisation verticale. De façon connue, les bords des secteurs sont spiralés
et les particules tournent dans le sens des aiguilles d'une montre en regardant la
figure 1, c'est-à-dire de façon à rencontrer un profil de transition concave entre
deux zones 25 et 26 voisines.
[0007] Selon un aspect essentiel de l'invention, le cyclotron comporte en outre un agencement
de bobines allongées 28, 29 disposées circulairement au voisinage de la périphérie
de la cavité 12 ainsi que des moyens d'alimentation électrique desdites bobines (non
représentés puisqu'il ne s'agit que d'une ou plusieurs sources de courant continu)
pour faire varier les conditions de focalisation verticale au voisinage d'un trajet
circulaire 30 correspondant au positionnement radial de la cible 23. Dans l'exemple,
le trajet circulaire 30 est celui qui correspond aux rayons d'extraction (c'est-à-dire
la distance radiale ou l'on place le canal électro-statique 19) lequel trajet est
celui des particules effectuant leur dernier tour dans la cavité et ayant par conséquent
atteint une énergie maximum. Les bobines 28 sont disposées sur les secteurs 24, c'est-à-dire
dans les zones à entrefer étroit et se font face deux à deux. Par ailleurs, les bobines
29 sont disposées dans les zones à entrefer large et se font également face deux à
deux. Chaque bobine 28 et 29 est constituée de plusieurs spires étroites parallèles
aux pièces polaires et ces spires sont courbées pour épouser au plus près le trajet
circulaire 30. Chaque pièce polaire comporte une bobine 28 ou 29 par zone à entrefer
étroit ou large, respectivement. Les bobines 29 sont connectées aux moyens d'alimentation
avec un sens tendant à renforcer le champ magnétique localement dans les zones à entrefer
large tandis que les bobines 28 sont connectées aux moyens d'alimentation avec un
sens tendant à diminuer le champ magnétique localement dans les zones à entrefer étroit.
[0008] Le développement mathématique qui suit permet de mieux comprendre l'action de ce
jeu de bobines sur la focalisation verticale du faisceau.
[0009] L'effet de focalisation verticale obtenue par les pièces polaires définies ci-dessus
s'exprime par un coefficient v z tel que :

uz represente le nombre de "noeuds" de focalisation du faisceau par tour (dans la
pratique on recherche uz = 0,4, par exemple) et dans la formule ci-dessus :
- N est le nombre de secteurs 24 (quatre dans l'exemple)
- a est un coefficient lié à la géométrie (spiralisation) des secteurs.
- k =


, caractérise le gradient de focalisation horizontale, R étant le rayon d'une orbite
considérée et B la valeur du champ magnétique au voisinage de ce rayon

représente une sorte d'écart-type de variation de champ magnétique sur une orbite
donnée.
[0010] Or, pour que la focalisation verticale soit effective, il faut que uz soit positif,
une valeur de uz négative signifiant physiquement une défocalisation c'est-à-dire
un élargissement du faisceau. C'est précisément ce que réalise l'invention et ceci
en réduisant l'écart-type 2
2 puisqu'on ne peut modifier ni le nombre de secteurs, ni leur forme, ni la focalisation
horizontale. Cette défocalisation doit s'opérer pendant que les particules effectuent
les quelques tours qui précédent le trajet circulaire 30 défini plus haut, c'est pourquoi
les bobines 28 et 29 sont disposées pour venir sensiblement tangenter l'intérieur
d'une surface cyclindrique fictive passant par ledit trajet circulaire 30.
[0011] Dans la pratique, plusieurs types de branchement sont possibles. On peut par exemple
faire en sorte que toutes les bobines soient reliées (par exemple en série) à une
unique source d'alimentation électrique réglable, le sens d'enroulement des bobines
29 situées dans les zones à entrefer large étant inverse du sens d'enroulement des
bobines 28 situées dans les zones à entrefer étroit. Dans ce cas particulièrement
(mais non exclusivement), le nombre d'ampère-tours des bobines 29 situées dans les
zones à entrefer large est plus grand que le nombre d'ampère-tours des bobines 28
situées dans les zones à entrefer étroit puisque la correction de champ magnétique
dans ces zones doit être effectuée sur une distance d'entrefer plus faible.
[0012] On peut aussi prévoir que toutes les bobines 29 situées dans les zones à entrefer
large soient reliées à une première source d'alimentation électrique réglable tandis
que toutes les bobines 28 situées dans les zones à entrefer étroit soient reliées
à une seconde source d'alimentation électrique réglable avec un sens de branchement
inversé. Cette variante fait appel à une alimentation supplémentaire mais est d'une
utilisation plus souple dans la mesure où les corrections de champ dans les zones
25 et 26 peuvent être réglées indépendamment.
[0013] La figure 3 illustre une variante dans laquelle les zones à entrefer large 26 sont
munies de portions circulaires saillantes 32 (appelés "shims") réduisant localement
l'entrefer au voisinage du trajet circulaire 30 et/où les zones à entrefer étroit
sont pourvues de rainures 34 augmentant localement l'entrefer au voisinage de ce même
trajet. Dans ces conditions on a modifié les caractéristiques dimensionnelles des
pièces pour placer le cyclotron à la limite inférieure d'une focalisation verticale
correcte et il suffit d'intercaler des moyens d'inversion de polarité entre les bobines
28, 29 et les moyens d'alimentation correspondants pour que les champs développés
par lesdites bobines viennent, dans un cas, augmenter l'écart-type γ- et donc renforcer
la focalisation pour permettre une extraction correcte du faisceau et, dans l'autre
cas, diminuer ce même écart-type pour assurer la défocalisation verticale et permettre
le fonctionnement avec cible interne. Avec cette variante, la puissance électrique
consommée par les bobines 28, 29 est environ la moitié de celle qui est nécessaire
avec le mode de réalisation précédent. En outre, les rainures 34 peuvent être mises
à profit pour l'intégration des bobines dans les zones à entrefer étroit où la place
pour les loger est la plus restreinte.
[0014] Bien entendu l'invention n'est pas limitée aux modes de réalisation qui viennent
d'être décrits, elle comprend tous les équivalents techniques des moyens mis en jeu
si ceux-ci le sont dans le cadre des revendications qui suivent.
1. Cyclotron comprenant deux pièces polaires (13, 14) occupant les deux faces axiales
d'une cavité accélératrice (I2) cylindrique et de forme relativement plate au centre
de laquelle est placée une source (16) de particules chargées et comportant des moyens
de positionnement d'une cible (23) à l'intérieur de la cavité, du type dans lequel
lesdites pièces polaires comprennent une succession de secteur épais (24) espacés
et régulièrement répartis circonférentiellement pour définir dans ladite cavité une
succession alternée de zones à entrefer étroit (25) et de zones à entrefer large (26)
pour assurer la focalisation verticale, caractérisé en ce qu'il comporte en outre
un agencement de bobines allongées (28, 29) disposées circulairement au voisinage
de la périphérie de ladite cavité et des moyens d'alimentation électrique de celles-ci
pour faire varier les conditions de focalisation verticale au voisinage d'un trajet
circulaire (30) correspondant au positionnement radial de ladite cible (23).
2. Cyclotron selon la revendication 1, caractérisé en ce que chaque pièce polaire
comporte une bobine (28 ou 29) par zone à entrefer étroit ou large.
3. Cyclotron selon la revendication 2, caractérisé en ce que les bobines (29) situées
dans une zone à entrefer large (26) sont connectées aux moyens d'alimentation avec
un sens tendant à renforcer le champ magnétique localement dans cette zone et en ce
que les bobines (28) situées dans une zone à entrefer étroit (25) sont connectées
auxdits moyens d'alimentation avec un sens tendant à diminuer localement le champ
magnétique dans cette zone.
4. Cyclotron selon la revendication 3, caractérisé en ce que les bobines précitées
sont toutes reliées à une unique source d'alimentation électrique réglable, le sens
d'enroulement des bobines situées dans les zones à entrefer large étant inverse du
sens d'enroulement des bobines situées dans les zones à entrefer étroit.
5. Cyclotron selon la revendication 3, caractérisé en ce que toutes les bobines situées
dans les zones à entrefer large sont reliées à une première source d'alimentation
électrique réglable tandis que toutes les bobines situées dans les zones à entrefer
étroit sont reliées à une seconde source d'alimentation électrique réglable.
6. Cyclotron selon l'une des revendications 4 ou 5, caractérisé en ce que le nombre
d'ampère-tours des bobines situées dans les zones à entrefer large (26) est plus grand
que le nombre d'ampère- tours des bobines situées dans les zones à entrefer étroit
(25).
7. Cyclotron selon l'une des revendications précédentes, caractérisé en ce que lesdites
zones à entrefer large (26) sont munies de portions circulaires saillantes (32) réduisant
localement l'entrefer au voisinage du trajet circulaire (30) précité et/où que lesdites
zones à entrefer étroit (25) sont pourvues de rainures (34) augmentant localement
l'entrefer au voisinage du même trajet circulaire (30).