[0001] La présente invention est relative à la technique de congélation des sols par injection
d'un liquide cryogénique, notamment d'azote liquide, dans au moins une sonde de congélation
enfoncée dans le sol.
[0002] On sait que la consolidation des sols par congélation permet l'ouverture de chantiers
de travaux publics dans des sols humides et instables. Elle est pratiquée par injection
d'un liquide réfrigérant dans des sondes introduites de place en place dans le sol.
Ce refroidissement congèle le sol de proche en proche, jusqu'à former un mur continu
quand les zones de congélation de chaque sonde ont rejoint leurs voisines.
[0003] Il est connu d'injecter dans les sondes un liquide cryogénique tel que l'azote liquide.
Cette injection directe d'azote liquide présente plusieurs inconvénients, notamment
la difficulté de maîtriser les coefficients d'échange thermique avec le sol. En effet,
en cédant du froid, l'azote se vaporise, et les coefficients d'échange entre la sonde
et l'azote liquide pur d'abord, puis les mélanges de liquide et de gaz en proportions
variables, puis le gaz refroidi seul sont très différents. Il en résulte une forte
hétérogénéité de l'épaisseur du sol congelé autour de la sonde et une perte de temps
et d'énergie pour que les zones les moins congelées se rejoignent pour former le mur
consolidé, tandis que les zones les plus congelées sont inutilement sous-refroidies
et sur- dimensionnées. De plus, les sols étant généralement hétérogènes, certaines
parties se congèlent plus vite que d'autres ; cette hétérogénéité du sol augmente
encore l'étendue des zones inutilement congelées et sous-refroidies.
[0004] L'invention a pour but de rendre le procédé plus. économique en assurant un refroidissement
plus homogène du sol.
[0005] A cet effet, l'invention a pour objet un procédé de congélation de sol par injection
d'un liquide cryogénique, notamment d'azote liquide, dans au moins une sonde de congélation
enfoncée dans le sol, caractérise en ce qu'on régule l'injection du liquide cryogénique
de manière à maintenir la temgérature du sol au voisinage de la sonde, sur toute la
longueur de celle-ci, au-dessus d'une valeur limite prédéterminée, cette valeur limite
étant supérieure d'au moins 35°C environ à la température d'ébullition du liquide
cryogénique.
[0006] Ainsi, on garantit que l'écart de température entre la paroi de la sonde et le liquide
cryogénique est suffisant pour provoquer en permanence la caléfaction du liquide cryogénique
au contact de cette paroi. Par suite, l'échange de chaleur entre le liquide et la
paroi de la sonde a toujours lieu par l'intermédiaire d'une couche gazeuse de caléfaction.
On évite ainsi le transfert excessif de froid à la paroi qu'occasionnerait le contact
franc liquide-paroi si la température de la paroi de la sonde descendait trop près
du point d'ébullition du liquide. Ces conditions, que l'on rencontre habituellement
dans les procédés de l'art antérieur, permettent un transfert de froid très rapide
mais que l'on ne peut assurer que sur une hauteur de sonde très limitée.
[0007] En particulier, lorsque le liquide cryogénique est de l'azote liquide, ladite valeur
limite est de préférence comprise entre -140°C et -160°C environ.
[0008] Dans un mode de mise en oeuvre avantageux qui assure une bonne utilisation des frigories
disponibles, on règle le débit de liquide cryogénique, pendant les périodes d'injection,
de manière à obtenir une température du gaz à sa sortie de la sonde voisine d'une
valeur prédéterminée, cette valeur étant de préférence égale à -70°C environ dans
le cas de l'azote liquide.
[0009] L'homogénéité du refroidissement est encore améliorée lorsque, la sonde comportant
un passage central et un passage annulaire, on alterne des périodes d'injection du
liquide cryogénique dans le passage central et des périodes d'injection du liquide
cryogénique dans le passage annulaire.
[0010] L'invention a également pour objet une installation de congélation de sol destinée
à la mise en oeuvre d'un procédé tel que définit ci-dessus. Cette installation, du
type comprenant au moins une sonde de congélation et des moyens d'injection dans cette
sonde d'un liquide cryogénique tel que l'azote liquider est caractérisée en ce que
la sonde comporte au mins un capteur de température sur sa paroi extérieure, au voisinage
d'une de ses extrémités.
[0011] Un exemple de réalisation de l'invention va maintenant être décrit en regard des
dessins annexés, sur lesquels :
- la figure 1 est un schéma d'une partie d'une installation de congélation conforme
à l'invention ; et
- la figure 2 est un diagramme qui illustre le fonctionnement de cette installation.
[0012] L'installation de congélation représentée à la figure 1 comprend essentiellement
un réservoir 1 de stockage d'azote liquide et une série de sondes de congélation 2,
dont une seule a été représentée et qui sont toutes identiques.
[0013] La sonde 2, supposée enfoncée verticalement dans le sol, comprend trois tubes concentriques
3 à 5. Le tube extérieur 3 est fermé à son extrémité inférieure par un fond 6 et définit
avec ce dernier la surface d'échange thermique de la sonde avec le sol environnant
7. Les tubes intermédiaire 4 et intérieur 5 s'étendent de l'orifice supérieur de la
sonde jusgu'à une faible distance du fond 6, et ils sont reliés à cet emplacement
par une paroi annulaire horizontale 8.
[0014] Ainsi sont délimités dans la sonde 2 : un passage central 9 défini par le tube intérieur
5 et débouchant sur le fond 6 ; un espace annulaire intermédiaire 10, délimité par
les tubes 4 et 5 et la paroi 8, qui peut être empli d'une matière thermiquement isolante
telle que de la perlite; et un passage annulaire extérieur 11 délimité entre les tubes
3 et 4 et débouchant sur le fond 6.
[0015] L'installation comporte également des moyens pour injecter de l'azote liquide dans
les passages 9 et 11. Ces moyens d'injection comprennent deux conduites 12 et 13 débouchant
respectivement dans ces deux passages, reliées à la partie inférieure du réservoir
1 et équipées de vannes d'arrêt respectives 14 et 15. Une vanne commune 16 d'arrêt
et de réglage de débit est également prévue à la sortie du réservoir.
[0016] L'extrémité supérieure des passages 9 et 11 est munie par ailleurs de moyens d'évacuation
de gaz, schématisés par des conduites respectives 17, 18 équipées de vannes d'arrêt
respectives 19, 20.
[0017] Les vannes 14, 15, 18 et 19 sont munies d'un dispositif d'actionnement simultané
à deux positions (non représenté) Dans une position, les vannes 14 et 20 sont ouvertes
tandis que les vannes 15 et 19 sont fermées ; l'autre position inverse l'état des
quatre vannes. La vanne 16 permet d'interrompre et de rétablir le débit d'azote liquide.
[0018] Sur la face extérieure du tube extérieur 3, la sonde 2 porte trois capteurs de température
21, constitués par exemple par des thermocouples, qui sont adaptés pour mesurer la
température du sol au voisinage immédiat de la sonde, à des profondeurs de 2 m, 10
m et 18 m respectivement (températures T
2, T10 et T
18 respectivement). Il est de plus prévu. un capteur de température 22 relié à chacune
des conduites 17 et 18 et adapté pour mesurer la température T
G de l'azote gazeux sortant de la sonde.
[0019] En fait, l'installation comporte une série de sondes 2 disposée suivant une ligne
qui définit le mur congelé à réaliser. Toutes les sondes qui sont branchées en parallèle
sur le réservoir 1 de la manière décrite ci-dessus, chaque sonde comportant son propre
jeu de vannes 14, 15, 16, 18 et 19.
[0020] Le fonctionnement de cette installation, illustré à la figure
2, est basé sur une double régulation de l'injection d'azote liquide dans les sondes,
chaque sonde étant régulée indépendamment des autres pour tenir compte de l'hétérogénéité
du terrain :
- d'une part, l'admission d'azote liquide est régulée en tout ou rien, au moyen de
la vanne 16, de manière que la température du sol au point le plus froid reste en
permanence comprise entre deux valeurs limites prédéterminées, à partir des indications
fournies par les capteurs de température 21 de la sonde considérée. Comme expliqué
plus haut, la limite inférieure est au moins égale à -160°C afin d'assurer la présence
permanente d'une couche gazeuse de caléfaction entre l'azote liquide et le tube 3,
de sorte que la totalité de l'échange thermique entre l'azote et la sonde est un échange
gaz-métal.
- d'autre part, pendant les périodes d'injection de l'azote liquide, une fois terminée
la phase transitoire de mise en froid, le débit de liquide est réglé, au moyen de
la vanne 16, de manière que le gaz résultant de la vaporisation de l'azote liquide
ait à sa sortie de la sonde une température voisine d'une température de consigne
prédéterminée choisie de manière à optimiser l'utilisation de frigories. Une température
de consigne de l'ordre de -70 °C s'est révélée satisfaisante.
[0021] Cette manière de procéder améliore nettement l'homogénéité du refroidissement du
sol par rapport au cas où, suivant la technique antérieure, on se contente de régler
le débit d'azote liquide en fonction de la température du gaz sortant de la sonde.
Toutefois, on ne peut éviter par les seules régulations ci-dessus d'obtenir un fort
gradient de température entre le bas et le haut des sondes. Pour supprimer en grande
partie cette hétérogénéité, on inverse périodiquement les vannes 14, 15, 19 et 20
de toutes les sondes.
[0022] Ainsi, en supposant que l'on a commencé par injecter pendant quelques heures l'azote
liquide par le passage central 9. en évacuant l'azote gazeux par le passage périphérique
11, l'inversion a pour résultat que l'azote liquide est injecté dans le passage 11
tandis que l'azote gazeux est évacué par le passage central 9.
[0023] On atteint de cette façon au bout de quelques heures un nouvel équilibre inversé
dans lequel le point le plus froid, régulé entre les deux températures limites précitées,
est situé en haut de la sonde et le point le moins froid en bas. On comprend qu'en
inversant périodiquement les courants d'azote, on obtient une bonne homogénéité thermique
dans le sol.
[0024] L'exemple numérique suivant illustrera le procédé décrit ci-dessus :
On désire consolider le plus rapidement possible par congélation un mur de 1 m d'épaisseur
dans un sol sableux humide sur une profondeur de 20 m et une largeur de 50 m. Pour
cela, on enfonce dans le sol cinquante sondes 2 espacées de 1 m les unes des autres.
[0025] Chaque sonde a un diamètre extérieur de 150 mm et est composée de trois tubes concentriques
3 à 5 de diamètres respectifs 150, 128 et 68 mm. L'espace annulaire central entre
le tube 4 de 128 mm et le tube 5 de 68 nm est rempli de perlite. Les diamètres sont
choisis de façon que la section libre du passage central 9 et celle du passage annulaire
extérieur 11 soient égales.
[0026] La congélation commence par l'injection d'azote liquide dans les tubes centraux 5.
Les températures au voisinage des sondes sont toutes initialement de l'ordre de 14°C.
Dans chaque sonde, l'azote se vaporise en cédant du froid au sol et en remontant par
le passage annulaire extérieur. Le débit d'azote liquide D par sonde est le débit
maximal de 15 1/mn (soit 750 1/mn pour. les cinquantes sondes) , réglé au moyen des
-vannes 16.
[0027] Dans la suite, on décrira à titre d'exemple numérique, en regard de la figure 2,
le comportement d'une seule sonde, étant entendu que chacune des sondes est régulée
indépendamment des autres. Les valeurs limites de la température la plus froide du
sol sont choisies à -145°C et -138°C, et la valeur de consigne de sortie de l'azote
gazeux à -70°C.
[0028] La température de l'azote gazeux en sortie de sonde s'abaisse durant la première
heure de -10°C à -70°C. Pendant ce temps, les températures externes atteignent -140°C
à 18 m, -100°C à 10 m et -62°C à 2 m de profondeur. Comme les phénomènes transitoires
de mise en froid se font encore sentir, on poursuit l'injection d'azote liquide avec
le même débit pendant 10 mn supplémentaires, durant lesquelles la tenpérature de sortie
de l'azote gazeux atteint -78°C et la température extérieure à 18 m atteint -145°C.
[0029] On coupe alors l'injection d'azote liquide. En 10 mn, la température extérieure à
18 m remonte à -138°C. On rétablit un débit de 1
0 1/mn d'azote liquide. Ce débit est plus faible que précédemment puisque la température
froide de -145°C n'avait été atteinte que pour une température trop basse de l'azote
gazeux sortant de la sonde.
[0030] En 20 mn, la température extérieure à 18 m s'abaisse de nouveau à -145°C et la température
de sortie des gaz à -75°C. On coupe de nouveau le débit d'azote, puis on le rétablit
à 8 1/nn - (pour la même raison que ci-dessus) quand la température à 18 m remonte
à -138°
C.
[0031] On poursuit cette alternance d'injections et d'arrêts en réduisant le débit tant
que la température des gaz descend au-dessous de -70°C. Le débit est gardé constant
quand cette température se stabilise dans une fourchette de -68°C à -72°C. il est
augmenté si cette température remonte au-dessus de -68°C, et diminué si elle redescend
au-dessous de -72°C.
[0032] Au bout de 5 heures de congélation, on inverse les débits de toutes les sondes en
injectant l'azote liquide par le passage annulaire extérieur 11, le gaz ressortant
par le passage central 9.
[0033] Le débit est alors fixé à 8 1/mn. Le gaz ressort initialement très froid à -120°C
; c'est un régime transitoire qui provient du passage de l'azote à contre-courant
de la température du sol. Au bout de 10 mn, la température de sortie du gaz remonte
à -70°C et les températures externes s'établissent à : -100°C à 2 m, -100°C à 10 m,
-65°C à 18 m ; 20 mn plus tard, la température externe à 2 m se trouve à -145°C et
le gaz sort à -75
0C.
[0034] On coupe le débit d'azote, et on le rétablit à 7 1/nn quand la température à 2 m
remonte à -138°C, ce qui se produit au bout de 5 mn environ.
[0035] On poursuit cette succession d'injections et d'arrêts pendant 5 heures, en modifiant
éventuellement le débit d'azote liquide de la manière indiquée plus haut. On inverse
de nouveau les débits à l'issue de cette période.
[0036] On poursuit la régulation ainsi définie en inversant les débits toutes les 5 heures.
Le sol est consolidé par congélation sur une épaisseur de 1 m en 50 heures environ,
avec une homogénéité de température très satisfaisante.
1. Procédé de congélation de sol par injection d'un liquide cryogénique, notamment
d'azote liquide, dans au moins une sonde de congélation (2) enfoncée dans le sol,
caractérisé en ce qu'on régule l'injection du liquide cryogénique de manière à maintenir
la température du sol au voisinage de la sonde, sur toute la longueur de celle-ci,
au-dessus d'une valeur limite prédéterminée, cette valeur limite étant supérieure
d'au moins 35°C environ à la température d'ébullition du liquide cryogénique.
2. Procédé suivant la revendication 1, dans leguel le liquide cryogénique est de l'azote
liquide, caractérisé en ce que ladite valeur limite est comprise entre -140°C et -160°C
environ.
3. Procédé suivant l'une des revendications 1 et 2, caractérisé en ce qu'on interrompt
l'injection de liquide cryogénique lorsque ladite valeur limite est atteinte, et on
la rétablit lorsque la température du sol au point le plus froid est remontée jusqu'à
une seconde valeur limite.
4. Procédé suivant l'une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisé en ce qu'on
règle le débit de liquide cryogénique, pendant les périodes d'injection, de manière
à obtenir une température du gaz (TG) à sa sortie de la sonde voisine d'une valeur prédéterminée.
5. Procédé suivant la revendication 4, dans leauel le liquide cryogénique est de l'azote
liquide, caractérisé en ce que ladite valeur prédéterminée est égale à -70°C environ.
6. Procédé suivant l'une quelconque des revendications 1 à 5, dans lequel on utilise
une sonde (2) comportant un passage central et un passage annulaire, caractérisé en
ce qu'on alterne des périodes d'injection du liquide cryogénique dans le passage central
(9) et des périodes d'injection du liquide cryogénique dans le passage annulaire (11).
7. Installation de congélation de sol, du type comprenant au moins une sonde de congélation
(2) et des moyens (12 à 15) d'injection dans cette sonde d'un liquide cryogénique
tel que l'azote liquide, caractérisée en ce que la sonde (2) comporte au mins un capteur
de température (21) sur sa paroi extérieure (3), au voisinage d'une de ses extrémités.
8. Installation suivant la revendication 7, caractérisée en ce que la sonde (2) comprend
également un capteur (22) de la température (TG) du gaz sortant de la sonde.
9. Installation suivant l'une des revendications 7 et 8, dans laquelle la sonde comporte
un passage central et un passage annulaire, caractérisée en ce que lesdits moyens
d'injection (12 à 15) sont adaptés pour injecter le liquide cryogénique soit dans
le passage central (9), soit dans le passage annulaire (11) de la sonde.
10. Installation suivant la revendication 9, caractérisée en ce que la sonde (2) porte
sur sa paroi extérieure (3) au moins un capteur de température (21) à chaque extrémité.
11. Installation suivant l'une des revendications 9 et 10, caractérisée en ce que
la sonde (2) comprend des moyens d'isolation thermique (10) interposés entre le passage
central (9) et le passage annulaire (11).