[0001] La présente invention se rapporte au laminage sur cage universelle de poutrelles,
notamment en acier, profilées en "H" ou en "I". Plus précisément, l'invention a trait
à la prévention des défauts de symétrie pouvant apparaître sur ces poutrelles au cours
même du laminage.
[0002] Il est connu que les poutrelles laminées du type considéré sont susceptibles de présenter
des défauts de symétrie dont les plus graves se traduisent par un décalage de la position
de l'âme par rapport aux ailes du profilé pouvant conduire au déclassement. Le document
FR-A-74/39798 montre bien que ce problème est pris en considération depuis longtemps,
mais, malgré les besoins de l'industrie dans ce domaine, il semble qu'aucune solution
rationnelle satisfaisante n'ait été proposée jusqu'ici. Aussi, la pratique habituelle
se limite-t-elle à constater le défaut sur une poutrelle laminée et à tenter d'éviter
qu'il se reproduise sur la poutrelle suivante par une correction "a priori" du positionnement
relatif en hauteur de la table d'entrée de la cage de laminoir avant que l'ébauche
s'y engage.
[0003] La présente invention a pour but une solution préventive permettant d'intervenir
en correction au cours même de l'opération de laminage de la poutrelle.
[0004] A cet effet, l'invention a pour objet un procédé pour prévenir les défauts de symétrie
des poutrelles en cours de laminage sur cage universelle, selon lequel on ajuste la
position relative en hauteur de la table d'entrée de la cage de laminage par rapport
aux cylindres de travail, procédé caractérisé en ce que :
- on effectue une mesure des couples appliqués aux cylindres supérieur et inférieur
de la cage ;
- on calcule, à partir de cette mesure, une valeur représentative de l'écart entre
les deux couples exprimé par un critère de dissymétrie des poutrelles librement choisi
à l'avance ;
- on compare ladite valeur à une valeur de référence prédéterminée définissant un
seuil de tolérance d'écart à ne pas dépasser, représentatif de la valeur maximale
admissible du critère de dissymétrie
- et si la valeur absolue de la valeur calculée est supérieure à la valeur de référence,
on agit sur la position relative en hauteur de la table d'entrée par rapport aux cylindres
de façon à ramener ladite valeur absolue calculée en-dessous de la valeur de référence.
[0005] Conformément à une mise en oeuvre, la valeur calculée d représentative de l'écart
entre les deux couples des cylindres est déterminée en accord avec la relation, exprimée
en pourcentage

où Cs et Ci sont les valeurs mesurées des couples des cylindres supérieur et inférieur
respectivement.
[0006] L'invention a également pour objet un équipement pour la mise en oeuvre du procédé
comprenant :
- des moyens de mesure du couple des cylindres supérieur et inférieur et élaborant
des signaux représentatifs de la mesure de chaque couple ;
- une unité de calcul recevant lesdits signaux et qui élabore un signal représentatif
de la valeur de l'écart entre les deux couples ;
- un comparateur dont une entrée est reliée à la sortie de l'unité de calcul, l'autre
entrée recevant un signal représentatif d'une valeur d'écart de référence à ne pas
dépasser, et dont la sortie est reliée à un moteur commandant la position relative
en hauteur de la table d'entrée de la cage de laminage par rapport aux cylindres.
[0007] Comme on l'aura compris, l'invention repose sur la découverte faite par les inventeurs,
selon laquelle il était parfaitement possible de traduire la dissymétrie des poutrelles,
occasionnée par une disposition défectueuse de l'âme, en termes d'écart entre les
mesures des couples appliqués aux deux cylindres de travail.
[0008] Allant plus loin, les inventeurs ont même pu montré qu'il existait une relation linéaire
entre le critère de dissymétrie des poutrelles habituellement retenu (à savoir le
critère "d" calculé selon

où b1 et b2 représentent les hauteurs des deux demi-ailes complémentaires) et un critère
d'écart des couples sur les cylindres défini par une relation tout à fait analogue
où les hauteurs des demi-ailes seraient remplacées par les valeurs des couples. Cette
relation définissant le critère A d'écart des couples s'écrit A

où Cs et Ci sont les valeurs mesurées des couples des cylindres supérieur et inférieur
respectivement. En conséquence, la simple mesure des couples appliqués au cylindre
supérieur et au cylindre inférieur, permet de calculer Δ et de corriger, en cas de
nécessité, la position relative en hauteur de la table d'entrée. En outre, le réglage
peut se faire en continu pendant le laminage.
[0009] D'autres avantages et caractéristiques de l'invention apparaîtront à la lecture de
la description qui va suivre, et en se référant au dessin annexé, sur lequel :
- la figure 1 représente schématiquement le profil en coupe d'une poutrelle ;
- la figure 2 représente schématiquement en vue de côté le positionnement relatif
des cylindres horizontaux de laminage et de la table d'entrée ;
- la figure 3 représente graphiquement la relation linéaire entre la dissymétrie d'une
poutrelle et l'écart entre les couples des cylindres supérieur et inférieur ;
- la figure 4 représente schématiquement, en coupe longitudinale, un mode de mise
en oeuvre de l'invention ;
- la figure 5 représente graphiquement les essais effectués et leurs résultats.
[0010] Suivant l'exemple de la figure 1, la poutrelle 3 profilée en "H" est composée d'une
âme 4 reliant en leur milieu deux ailes 5. Ainsi qu'on l'a vu précédemment, b1 correspond
à la hauteur de la demi-aile supérieure et b2 correspond à la hauteur de la demi-aile
inférieure. Cette poutrelle, qui n'est pas encore finie, est destinée à être laminée
conformément au procédé selon l'invention dans une installation de laminage telle
que partiellement schématisée sur la figure 2. Cette installation comprend deux cylindres
horizontaux 1 et 2, supérieur et inférieur respectivement, qui assurent le laminage
de la poutrelle 3, laquelle est amenée par la table d'entrée à rouleaux porteurs 7
dans l'ouverture 6 de largeur a1 ménagée entre les cylindres 1 et 2.
[0011] La table d'entrée est rendue mobile en translation verticale grâce à l'action de
moyens habituels non représentés. La commande de ce mouvement sera décrite de façon
détaillée dans la suite de la description.
[0012] Compte tenu de ce qui précède et sachant que a0 représente l'épaisseur d'âme 4 initiale
de la poutrelle (i.e. avant l'opération de laminage) et que T désigne la côte de l'extrémité
inférieure des ailes de la poutrelle par rapport à la base de l'ouverture a1, on en
déduit qu'un engagement symétrique de la poutrelle entre les cylindres 1 et 2 correspond
à une côte côte T = T0 avec T0 = b2 + a0 2 - a1 2
[0013] Un simple déréglage de la table 7 modifie cette côte T. Si T est supérieur à T0,
la table est trop basse, et inversement, si T est inférieur à T0, la table est trop
haute. Cela entraîne bien entendu un défaut de symétrie de la poutrelle laminée, se
traduisant par une position de l'âme 4 décalée vers le haut ou vers le bas respectivement
par rapport à la ligne de mi-hauteur des ailes 5.
[0014] Les inventeurs ont mis en évidence une relation linéaire entre le critère de dissymétrie
"d" de la poutrelle habituellement considéré : d % = 100

et un critère d'écart "Δ" des couples des cylindres 1 et 2 exprimé selon :

[0015] Ces deux variables, ainsi qu'on peut le voir, sont exprimées en pourcentage.
[0016] La figure 3 représente cette relation de linéarité de la dissymétrie "d" en fonction
de l'écart de couple "Δ".
[0017] Différents types de profils ont été utilisés pour établir cette relation : le signe
"O" correspond aux poutrelles profilées dont les ailes sont parallèles, i.e. les poutrelles
profilées en "H" et en "I", et le signe"i"correspond aux poutrelles dont les ailes
sont inclinées, i.e. celles qui sont profilées en "". Comme on le constate sur la
figure 3, il existe effectivement une relation de linéarité entre "d" et "Δ". En outre,
on note que la sensibilité de l'écart de couple A au réglage de la position relative
de la table est plus élevée que celle de la dissymétrie d. En effet, sur la figure
3, on constate qu'une dissymétrie de 2 % peut induire un écart de couple de 5 à 15
%.
[0018] On comprend facilement l'intérêt de ces résultats. Tout d'abord, la mesure de l'écart
de couple est simple. En outre, cette mesure peut être faite à tout moment et "en
continu" pendant l'opération de laminage, ce qui permet de remédier immédiatement
aux défauts des poutrelles que pourrait occasionner un mauvais positionnement en hauteur
de la table 7.
[0019] La figure 4 représente un exemple de réalisation pour la mise en oeuvre du procédé
selon l'invention. Les cylindres de laminage 1 et 2 sont classiquement entraînés en
rotation par un moteur réducteur M à l'aide des allonges de transmission 8.
[0020] Conformément à une réalisation de l'invention, chaque allonge est pourvue d'une jauge
de contraintes 9 reliée à une unité de calcul 10 qui commande un moteur réversible
13 d'actionnement des organes (non représentés) de réglage de la position en hauteur
de la table d'entrée. Les jauges 9 délivrent à l'unité 10 des signaux représentatifs
des valeurs de mesure des couples Cs et Ci appliqués aux cylindres 1 et 2. L'unité
10 élabore alors dans un calculateur 11 un signal correspondant à l'écart Δ entre
les deux couples calculé en utilisant la relation

où A est exprimé en pourcentage. Le signal représentant la valeur calculée Δ est alors
envoyé dans un comparateur 12 qui reçoit sur son autre entrée ( 14) un signal "δ"
représentatif d'une valeur d'écart de référence à ne pas dépasser. En cas de dépassement,
le comparateur envoie un signal de commande au moteur 13 de manière à ramener la valeur
en-deçà du seuil de référence" δ ". L'expérience a montré que de très bons résultats
sont obtenus lorsque la valeur seuil à ne pas dépasser n'excède pas 3 % environ. En
outre, en-deçà de 1,3 %, l'influence sur la symétrie des poutrelles n'est plus sensible.
[0021] Différentes méthodes peuvent être retenues pour assurer le déplacement de la table
dans le sens de la réduction de à en dessous du seuil de référence et qui font partie
des connaissances courantes de l'homme de métier.
[0022] On se limitera à n'en citer brièvement que deux selon que l'on opte pour une prise
en compte de la valeur absolue de Δ (notée Δ | ) ou de sa valeur algébrique.
[0023] Dans le premier cas, un test de variation de | Δ | sera prévu entre deux mesures
successives Δ i et Δ i+1. Si le résultat du test montre que Δ i+1| est plus grand
que | Δ i |, on en déduit que la correction de la position de la table a été faite
dans le mauvais sens et on ordonne alors l'inversion du moteur 13.
[0024] Le dispositif de test peut être simplement un comparateur pourvu d'une mémoire ,
placé avant, ou de préférence après le comparateur 12. Sa mémoire est initialement
mise à zéro et le premier |Δ i | supérieur au seuil de référence est mémorisé puis
remplacé par |Δ i+1 | après avoir comparé |Δ i+1 | à |Δ i| .
[0025] Dans le deuxième cas, si la valeur absolue de à calculée est supérieure au seuil
" δ ", on prend en compte l'identité du cylindre (supérieur ou inférieur) dont la
valeur du couple est déduite de l'autre dans le calculateur 11, et on considère le
signe de Δ pour déterminer si la table doit être montée ou descendue.
[0026] Ainsi, par exemple, si l'on effectue l'opération Cs - Ci et si le résultat Δ, supposé
supérieur au seuil, présente un signe négatif (c'est-à-dire si le couple appliqué
au cylindre supérieur 1 est plus faible que celui appliqué au cylindre inférieur 2),
cela signifie que la table 7 doit être montée. Inversement, si à est positif, la table
d'entrée doit être descendue. A contrario, si l'on effectue Ci - Cs, un signe négatif
pour Δ conduira à une descente de la table et un signe positif conduira à une remontée.
[0027] Au besoin, on adaptera la hauteur de la table de sortie à celle de la table d'entrée
afin de ne pas gêner l'action de cette dernière.
[0028] Comme on peut le voir sur la figure 5, qui représente la relation entre le réglage
de la table (T-TO) et l'écart de couple A en pourcentage dans le cas d'un simulateur
à plasticine d'une cage de laminage universelle, on remarque qu'un mauvais réglage
de la table de 1 mm peut provoquer un écart de couple d'environ 10 %. La sensibilité
est donc suffisamment élevée pour permettre un réglage précis de la position relative
en hauteur de la table d'entrée 7.
[0029] Le tableau I, qui rassemble les résultats de nombreux essais sur le simulateur, met
bien en évidence la sensibilité de la mesure de l'écart de couple Δ.
[0030] Par ailleurs, des essais ont été effectués pour montrer l'évolution de la dissymétrie
d'une poutrelle après plusieurs passes. Pour ce faire, la barre (référencée 8H dans
la première colonne du tableau I) a été utilisée pour subir des traitements de laminage
ultérieurs. Ainsi qu'on peut le voir dans le tableau I, pour cette barre (8H) un écart
de couple Δ de -30 % (5ème colonne) correspond à une dissymétrie d'hauteur d'ailes
"d" de -10 % (colonne 8) avec "b1" égal à 43,5 mm (colonne 6) et "b2" égal à 48 mm
(colonne 7).
[0031] La barre, dont on vient de constater la dissymétrie d'hauteur d'ailes a été soumise
à deux traitements différents de laminage.
[0032] Tout d'abord, on lui a fait subir une passe où l'écart des couples appliqués aux
cylindres est égal à 0. Après cet essai, on constate que la dissymétrie de la barre
(8H) est conservée. Ensuite, la barre (8H) a été soumise à une passe avec un écart
de couple A égal à +43 %, c'est-à-dire un déréglage de 8 mm inverse de celui constaté
dans la passe initiale (colonne 2 du tableau I). Suite à cet essai, on constate que
la dissymétrie a été pratiquement éliminée. En effet, les résultats donnent un critère
de dissymétrie égal à 2 % avec "b1" égal à 48 mm et "b2" égal à 47 mm.
[0033] De ces essais, il découle qu'on pourra corriger un défaut de symétrie d'une poutrelle
apparaissant au cours d'une passe, en effectuant la passe suivante avec un déréglage
dissymétrique inverse de celui qui a généré le défaut de symétrie.
[0034] Comme on le comprend, l'intérêt de l'invention réside dans le fait qu'elle permet
un contrôle en continu de la valeur de l'écart de couple et que par un dispositif
automatique simple il est possible au cours du laminage de corriger immédiatement
les défauts de symétrie des poutrelles.
[0035] Il va de soi que l'invention ne se limite pas à l'exemple décrit mais s'étend à de
multiples variantes en équivalents dans la mesure où sont respectées les caractéristiques
énoncées dans les revendications jointes.
[0036] En particulier, le réglage de la position relative en hauteur de la table est tout
à fait envisageable par la modification de la position en hauteur des cylindres de
travail lorsqu'une telle mobilité est permise par l'installation. Dans ce cas, les
cylindres 1 ou 2 sont montés dans des empoises réglables verticalement et le mouvement
de ces empoises sera commandé par le moteur réversible 13.
[0037] De même, les moyens de mesure des couples des cylindres supérieur 1 et inférieur
2 peuvent être des anneaux magnétiques entourant les allonges 8 d'entraînement des
cylindres en rotation. Bien entendu, d'autres moyens de mesure peuvent également convenir.
[0038] De plus, l'invention s'applique au laminage des poutrelles métalliques de différents
types, notamment celles qui sont profilées en "H" et en "I".

1) Procédé pour prévenir les défauts de symétrie des poutrelles en cours de laminage
sur cage universelle, selon lequel on ajuste la position relative en hauteur de la
table d'entrée de la cage de laminage par rapport aux cylindres de travail, procédé
caractérisé en ce que :
- on effectue une mesure des couples appliqués aux cylindres supérieur (1) et inférieur
(2) de la cage ;
- on calcule, à partir de cette mesure, une valeur représentative de l'écart entre
les deux couples exprimé par un critère de dissymétrie des poutrelles librement choisi
à l'avance ;
- on compare ladite valeur à une valeur de référence "o " prédéterminée définissant
un seuil de tolérance d'écart à ne pas dépasser, représentatif de la valeur maximale
admissible du critère de dissymétrie ;
- et si la valeur calculée est supérieure en valeur absolue à la valeur de référence
" δ ", on agit sur la position relative en hauteur de la table d'entrée (7) par rapport
aux cylindres de façon à ramener ladite valeur calculée en-dessous de la valeur de
référence.
2) Procédé selon la revendication 1 caractérisé en ce que la valeur calculée (1) représentative
de l'écart entre les deux couples des cylindres est déterminée en accord avec la relation,
exprimée en pourcentage

où Cs et Ci sont les valeurs mesurées des couples des cylindres supérieur et inférieur
respectivement,
3) Procédé selon les revendications 1 et 2 caractérisé en ce que le seuil de tolérance
est choisi entre 1.5 et 3.0 % environ.
4) Dispositif pour la mise en oeuvre du procédé selon la revendication 1 caractérisé
en ce qu'il comprend :
- des moyens (9) de mesure en continu du couple des cylindres supérieur (1) et inférieur
(2) et élaborant deux signaux représentatifs de la mesure de chaque couple ;
- une unité de calcul (11) recevant lesdits signaux et qui élabore un signal représentatif
de la valeur de l'écart entre les deux couples ;
- un comparateur (12) dont une entrée est reliée à la sortie de l'unité de calcul,
l'autre entrée (14) recevant un signal " δ " représentatif d'une valeur d'écart de
référence à ne pas dépasser, et dont la sortie est reliée à un moteur réversible (13)
commandant la position relative en hauteur de la table d'entrée (7) de la cage de
laminage par rapport aux cylindres (1, 2).
5) Dispositif selon la revendication 4 caractérisé en ce que la table d'entrée (7)
est montée mobile en translation verticale et en ce que le moteur réversible (13)
commande le réglagle de sa position en hauteur.
6) Dispositif selon la revendication 4 caractérisé en ce que au moins un cylindre
(1, 2) est monté dans des empoises réglables verticalement et en ce que le moteur
réversible (13) commande le réglage de la position en hauteur de ces empoises.
7) Dispositif selon la revendication 4 caractérisé en ce que les moyens pour la mesure
des couples des cylindres supérieur (1) et inférieur (2) sont des jauges de contrainte (9) placées sur les allonges (8)
d'entraînement des cylindres en rotation.
8) )ispositif selon la revendication 4 caractérisé en ce que les moyens pour la mesure
des couples des cylindres supérieur () et inférieur (2) sont des anneaux magnétiques
entourant las allonges (8) d'entraînement des cylindres en rotation.