[0001] L'invention concerne la réparation du revêtement réfractaire d'un récipient métallurgique
(notamment un convertisseur d'aciérie ou une poche de transfert et/ou de traitement)
par projection à travers une flamme d'un matériau de gunitage.
[0002] On sait que le matériau de projection à travers une flamme doit contenir au moins
deux types de constituants : un premier - le granulat principal, de même nature que
celle du matériau composant le revêtement à réparer - qui demeure solide en traversant
la flamme et qui constitue l'armature du produit projeté, et un second - le liant
: ajout volontaire ou impuretés présentes dans le produit - qui sert de ciment au
granulat principal. Le matériau est délivré sous forme de poudre à un brûleur, qui
est avantageusement un brûleur "multidard" tel que décrit dans la demande de brevet
français n° 8215461 au nom du Demandeur.
[0003] On rappelle que le granulat principal est classiquement un matériau magnésien (à
base de MgO et CaO) ou alumineux (à . base d'alumine A1
20
3).Le liant, dans le premier cas, est généralement à base de phosphates ou de silicates
de sodium ou de calcium, alors que dans le cas d'un granulat alumineux, on emploie
habituellement un liant à base d'aluminates de calcium. On sait également qu'un liant
constitué par du laitier de convertisseur à l'oxygène (LD, OLP ...) peut convenir
à la fois à un granulat magnésien et à un granulat alumineux.
[0004] Il a été observé que le comportement des couches projetées de manière classique n'est
souvent pas satisfaisant lors de la remise en service du récipient suivant la projection
: dans certains cas, le produit projeté se détache de la paroi, dans d'autres cas,
il subit une forte corrosion chimique et une érosion mécanique de la part du bain
métallique en fusion contenu dans le récipient.
[0005] Le but de l'invention est de trouver un remède à la mauvaise tenue des couches projetées
de manière classique.
[0006] Ce but est atteint selon l'invention par le fait que l'on met en place, par projection
d'une matière réfractaire de gunitage à travers une flamme, deux couches superposées
de la même matière, la première couche ayant, d'une part, une porosité totale de 15
à 25 % afin de favoriser son adhérence au revêtement par imprégnation par le laitier
présent à la surface de ce revêtement, et d'autre part, une épaisseur suffisante pour
pouvoir être imprégnée par la totalité de ce laitier, la seconde couche ayant une
densité apparente d'au moins 3,1 kg/dm
3 afin de favoriser la résistance de la matière projetée aux agressions chimiques et
mécaniques du bain en fusion que va contenir le récipient métallurgique.
[0007] Les inventeurs ont en effet découvert que la qualité de la couche projetée dépend
étroitement de sa densité (et donc inversement, de sa porosité). Ils ont pu parvenir
à montrer que lorsque la couche projetée est très dense, il n'y a pas de réaction
entre le produit projeté et la couche de laitier subsistant sur le revêtement à réparer.
Il s'ensuit que lors de l'opération métallurgique (affinage ou traitement en poche)
suivant la projection, la couche intermédiaire de laitier fond et entraîne le détachement
de la couche projetée.
[0008] Lorsqu'au contraire la couche projetée est poreuse, il y a réaction et interdiffusion
entre le laitier et la couche projetée, ce qui assure à celle-ci une bonne adhérence
par imprégnation par le laitier. Malheureusement, la porosité de la couche rend celle-ci
vulnérable à la corrosion chimique et à l'érosion mécanique.
[0009] Selon l'invention, on obtient un excellent comportement du produit projeté en commençant
par projeter une couche poreuse, destinée à assurer l'adhérence par imprégnation par
le laitier, puis par dessus, une couche dense, destinée à assurer la résistance élevée
à la corrosion et à l'érosion ultérieures par le bain de métal en fusion.
[0010] Pour une bonne compréhension de l'invention, on rappelle qu'on désigne, par "porosité
totale," le rapport du volume des pores (ouverts et fermés) au volume apparent total
(i.e. matière + pores). Ce rapport est habituellement multiplié par 100 afin de pouvoir
exprimer la porosité totale en pourcentages. Pour les produits de gunitage à la flamme,
la porosité est presque exclusivement ouverte. La "densité apparente" est le rapport
de la masse du corps à son volume apparent. Pour un même matériau, densité apparente
et porosité sont liées par la relation suivante : la densité apparente est égale au
produit de la densité absolue par la différence 1-porosité.
[0011] La porosité est une caractéristique géométrique indépendante de la nature du matériau,
au contraire de la densité. En toute rigueur, il faut donc comparer les porosités
et non les densités de divers produits. Toutefois, dans la suite de ce mémoire, compte
tenu du fait que les produits étudiés possèdent des densités absolues voisines, on
recourra indifféremment à l'une ou l'autre notion.
[0012] D'autres avantages et caractéristiques apparaîtront à la lecture de l'exposé qui
va suivre, où il sera fait référence aux graphiques annexés qui représentent :
- en figure 1, l'influence de la teneur en liant présent dans le produit projeté sur
sa porosité ;
- en figure 2, le rôle de la puissance spécifique sur la densité apparente et la porosité
totale des couches projetées ;
- en figure 3, l'influence de la teneur en liant sur la densité apparente des produits
projetés ;
- en figure 4, la puissance nécessaire pour obtenir une densité apparente donnée en
fonction d'une teneur en liant.
[0013] Les inventeurs ont établi en figure 1 un graphique portant en ordonnée la porosité
du produit projeté (granulat magnésien MgO-CaO) exprimée en %, et en abscisse la teneur
en liant (phosphate de calcium) exprimée en % par rapport au poids de granulat. L'expérience
a été menée avec une puissance spécifique de gunitage constante à 2,5 kW/kg. Le graphique
montre qu'il existe une relation directe de proportionnalité inverse entre la teneur
en liant et la porosité,
[0014] Des expériences réalisées en four expérimental, ainsi qu'en poche à acier et en convertisseur,
ont permis de déterminer la relation entre la puissance spécifique (quantité de chaleur
fournie par le brûleur par kilogramme de poudre de matériau de gunitage) et la densité
ou, inversement, la porosité de la couche projetée.
[0015] Le graphique de la figure 2 a été obtenu pour un produit à base de MgO, CaO -µ-contenant
7,5 % de liant f constitué par du phosphate de calcium.
[0016] Lorsque la puissance spécifique est voisine de 0, la densité apparente est celle
du produit projeté à froid ; sa valeur est proche de celle du produit en vrac (densité
= 1,50 soit environ 60 % de porosité). Lorsque la puissance spécifique croit, la densité
apparente augmente linéairement jusqu'à un maximum de 3,30 (soit environ 7 % de porosité)
pour une puissance de 6 kW/kg, puis se stabilise à cette valeur lorsque la puissance
spécifique croît encore.
[0017] Cette valeur de 3,30 représente en fait la valeur maximale possible que peut atteindre
la densité qui est mesurée à froid ; l'écart entre cette valeur et la densité théorique
(3,55) du produit semble correspondre au retrait dû à la contraction volumique du
produit lors de son refroidissement.
[0018] Ainsi, pour ce type de matériau, il est inutile d'opérer avec une puissance spécifique
supérieure à 6 kW/kg.
[0019] La relation linéaire existant entre densité apparente et puissance spécifique traduit
le fait que lorsque cette dernière augmente (et que donc la concentration en particules
dans la flamme diminue), le nombre de particules de liant atteignant leur température
de fusion augmente en raison d'un meilleur échange thermique dans la flamme (convection)
et entre particules (rayonnement).
[0020] Pour accroître la densité, tout en réduisant la consommation en énergie, des essais
ont été réalisés sur des produits possédant des teneurs variées en éléments de liaison.
La figure 3 donne les résultats obtenus sur des produits contenant 2,5-7,5-12 - 15
et 20 % de liant.
[0021] On constate, lorsque la teneur en liant croît, un décalage des maxima admissibles
de puissance spécifique vers les faibles valeurs : pour une densité de 3,30, le maximum
est voisin de 7,3 kW/kg pour une teneur en liant de 2,5 %, et n'est plus que de 3
kW/kg pour 20 % de liant. En combinant ces données, il est possible de définir, pour
un type de produit et en fonction de sa composition, la puissance spécifique nécessaire
pour atteindre la valeur de densité d souhaitée (fig. 4).
[0022] Il ressort clairement de la figure 4 que pour de faibles valeurs de puissance spécifique,
il suffit d'une faible variation de puissance (par variation du débit de poudre par
exemple), pour entraîner une variation importante de densité, alors que pour des puissances
plus élevées, une variation identique a des effets moins marqués sur la densité.
[0023] Une première conclusion est qu'accroître la puissance spécifique est un bon moyen
pour améliorer l'homogénéité des couches projetées, mais il se solde également par
une augmentation du coût énergétique.
[0024] Une seconde conclusion est qu'il est possible de procéder à la déposition, conformément
à l'invention, en faisant varier la puissance spécifique du brûleur et notamment en
faisant varier le débit de poudre.
[0025] Ainsi, dans sa forme de réalisation la plus avantageuse, le procédé de l'invention
comprend les étapes suivantes :
- avant projection, réchauffage de la paroi à réparer à l'aide du brûleur pour en
éliminer le laitier superflu (si l'épaisseur de laitier est supérieure à quelques
millimètres) ;
- en début de projection, mise en place d'une couche de quelques millimètres (avantageusement
5 mm, épaisseur optimale pour permettre, par diffusion, une imprégnation de toute
la couche par du laitier sans compromettre la résistance de l'ensemble) de produit
à porosité comprise entre 15 et 25 % (un écart avec cette gamme conduit, soit à des
risques de décollement en-deçà de 15 %, soit à une usure plus rapide et à des écaillages
au-delà de 25 %) ;
- ensuite, projection d'un produit très dense (3,1 à 3,3 kg/dm'), la différence de
densité étant obtenue en faisant varier le débit de poudre dans le brûleur. L'épaisseur
de cette deuxième couche est de 1 à 2 cm en projection classique mais peut atteindre,
si on le souhaite, des valeurs supérieures sans inconvénient pour l'invention.
[0026] On signale que l'épaisseur préconisée de 5 mm environ pour la première couche se
situe au milieu de la gamme de valeurs déterminées allant de 3 à 8 mm. En-deçà de
3 mm en effet, la couche peut être insuffisamment épaisse pour incorporer, par diffusion,
la totalité du laitier, de sorte que des décollements sont à craindre suite à une
fusion du laitier résiduel à l'interface entre le revêtement réfractaire pré-existant
et la couche projetée. Au-delà de 8 mm, au contraire, le laitier peut être en quantité
insuffisante pour imprégner la couche dans toute son épaisseur, ce qui peut conduire
à des décollements en raison de la mauvaise résistance mécanique de la partie superficielle
non imprégnée de la couche projetée.
[0027] Pour ce qui concerne la gamme de densité préconisée pour la deuxième couche (entre
3,1 et 3,3 kg/dm
3), on indique que :
- dans le cas des poches de transfert ou de traitement, le facteur prépondérant étant
les chocs thermiques répétitifs dus à la fréquence relativement élevée des opérations
de remplissage et de vidange, on choisira de préférence des valeurs de densité moins
élevées, i.e. de 3,1 à 3,2 kg/dm' ;
- à l'inverse, pour les convertisseurs d'affinage, le facteur d'usure prépondérant
étant l'érosion à la fois chimique et mécanique de la part du bain en fusion, on optera
pour les densités les plus élevées, i.e. supérieures à 3,2 kg/dm3.
[0028] Quant aux épaisseurs préconisées pour cette deuxième couche, elles sont dictées de
façon non limitative uniquement par les impératifs de production. En-deçà de 1 cm
d'épaisseur, les réparations répétitives risquent de devenir trop fréquentes par rapport
à la pratique habituelle qui est d'environ une réparation toutes les 8 h. Au-delà
de 2 cm, compte tenu des limites en débit de poudre, le temps de réparation risque
de dépasser les 10 à 15 minutes généralement disponibles dans le cycle de production
à l'aciérie.
[0029] Enfin, pour atteindre à coup sûr les puissances spécifiques élevées nécessaires à
l'explication de cette seconde couche à haute densité, il est vivement conseillé d'utiliser
le canon de gunitage décrit dans la demande de brevet français n° 82/15261 déjà citée
et constitue schématiquement par un faisceau de nombreux tubes accolés de petit diamètre
agissant comme autant de petits brûleurs et recevant chacun à leur extrémité de sortie
une fraction égale du débit total de poudre.
1) Procédé de réparation du revêtement réfractaire d'un récipient métallurgique, à
travers une flamme, d'une matière réfractaire de gunitage, caractérisé en ce que l'on
met en place deux couches superposées de la même matière, la première couche ayant,
d'une part, une porosité totale de 15 à 25 % de manière à favoriser son adhérence
au revêtement par imprégnation par le laitier présent à la surface dudit revêtement,
et d'autre part, une épaisseur suffisante pour pouvoir être imprégnée par la totalité
dudit laitier, la seconde couche ayant une densité apparente d'au moins 3,1 kg/dm3 afin de favoriser la résistance de la matière projetée aux agressions chimiques et
mécaniques du bain en fusion que l'on va par la suite former dans ledit récipient.
2) Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que l'épaisseur de ladite première
couche est comprise entre 3 et 8 mm environ.
3) Procédé selon la revendication 2, caractérisé en ce que ladite épaisseur est égale
à 5 mm environ.
4) Procédé selon la revendication 1 pour la réparation du revêtement réfractaire d'une
poche métallurgique de transfert ou de traitement, caractérisé en ce que la densité
apparente de la seconde couche n'excède pas 3,2 kg/dm3 environ.
5) Procédé selon la revendication 1 pour la réparation du revêtement réfractaire d'un
convertisseur d'aciérie, caractérisé en ce que la densité apparente de la seconde
couche est au moins égale à 3,2 kg/dm3 environ.
6) Procédé selon la revendication 1, 2 ou 3, caractérisé en ce que l'épaisseur de
la seconde couche est comprise entre 1 et 2 cm environ.
7) Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que l'on met en place lesdites
deux couches superposées à l'aide d'un canon de gunitage constitué par un faisceau
de tubes accolés recevant chacun à leur extrémité de sortie une fraction égale du
débit total de matière de gunitage sous forme de poudre, tel que décrit dans le document
FR-A-82/15261.
8) Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que l'on fait varier la densité
des couches superposées en modulant la puissance spécifique de gunitage.
9) Procédé selon la revendication 8, caractérisé en ce que l'on module la puissance
spécifique de gunitage en faisant varier le débit de matière de gunitage.