[0001] La présente invention se rapporte au domaine des produits pyrotechniques composites
et notamment aux poudres propulsives pour armes et à leurs procédés de fabrication.
Plus précisément l'invention concerne un nouveau procédé de fabrication sans solvant
de produits pyrotechniques composites à liant thermodurcissable, c'est-à-dire de produits
pyrotechniques constitués essentiellement par un liant inerte thermodurcissable et
par au moins une charge oxydante pulvérulente. L'invention concerne également les
produits pyrotechniques, notamment les poudres propulsives, obtenus grâce au procédé
selon l'invention.
[0002] On connait les poudres propulsives dites "homogènes" constituées par une ou plusieurs
bases énergétiques gélatinisées présentant, vues en coupe, un aspect homogène, d'où
leur nom. Parmi les poudres propulsives homogènes les plus connues on peut citer les
poudres "sans fumées" à base de nitrocellulose seule ou à base d'un mélange nitrocellulose-nitroglycérine.
En vue d'améliorer les performances balistiques de ces poudres, on a cherché à y incorporer
des charges oxydantes minérales ou organiques pulvérulentes. Ces poudres, vues en
coupe, ne présentent plus un aspect homogène, mais présentent un aspect hétérogène
dans lequel on distingue d'une part le liant énergétique et d'autre part la charge
oxydante, ces poudres sont dites "composites" ou "hétérogènes".
[0003] De telles poudres sont par exemple décrites dans le brevet français 2 488 246.
[0004] .L'emploi de liants énergétiques comme par exemple la nitrocellulose présente cependant
l'inconvénient de rendre les poudres vulnérables. On entend par vulnérabilité le fait
que ces poudres peuvent s'allumer et déflagrer sous l'effet d'un phénomène physique
aléatoire non désiré comme par exemple l'impact d'un projectile. La vulnérabilité
est un défaut majeur pour les poudres destinées à être embarquées à bord des navires,
des avions ou des chars de combat. Le développement des engins modernes de combat
amène donc l'homme de métier à rechercher des poudres propulsives peu vulnérables.
[0005] Les poudres composites à liant inerte constituées principalement par une résine synthétique
et par une charge oxydante minérale ou organique se sont avérées être nettement moins
vulnérables que les poudres homogènes ou composites à liant énergétique. Mais du fait
qu'elles contiennent un liant inerte ces poudres doivent, pour présenter lors de la
mise à feu l'énergie nécessaire, contenir des taux de charges très élevés, souvent
voisins de 80 % du poids total de la poudre. Les poudres composites à liant inerte
présentent ainsi la caractéristique, par rapport aux autres matériaux composites,
de contenir en réalité très peu de liant par rapport à la charge pulvérulente. Néanmoins
ces poudres doivent pouvoir être travaillées dans des conditions assez dures, elles
doivent notamment pouvoir être extrudées à travers une filière de diamètre relativement
petit, comportant le plus souvent des broches destinées à créer les canaux présents
dans le brin de poudre, et conserver ensuite leur forme géométrique dans le temps.
C'est précisément au niveau de la mise en oeuvre des poudres propulsives composites
à liant inerte pour armes que l'homme de métier a rencontré de nombreuses difficultés.
[0006] Les liants inertes d'origine synthétique utilisables dans les produits pyrotechniques
composites peuvent se classer, comme toute résine, en liants thermoplastiques et en
liants thermodurcissables. C'est, bien entendu, d'abord vers l'emploi de liants thermoplastiques
que s'est orienté l'homme de métier, ces liants permettant un travail mécanique en
température du produit pour lui conférer la géométrie voulue.
[0007] La demande de brevet européen 0036481 décrit ainsi un procédé de fabrication d'explosifs
composites à liant thermoplastique. Néanmoins les produits composites à liant thermoplastique
décrits dans ce brevet ne donnent pas entière satisfaction dans la mesure où leur
géométrie est trop sensible aux variations thermiques.
[0008] L'homme de métier s'est alors orienté vers l'emploi de liants inertes thermodurcissables
comme les liants polyuréthannes ou polyesters tridimensionnels, permettant, après
polymérisation complète de la résine, de figer définitivement la géométrie du grain
de poudre. La fabrication à l'échelle industrielle de telles poudres est cependant
très difficile du fait d'une part que les résines thermodurcissables ont une "vie
de pot" limitée (on entend par "vie de pot" la période en cours de polymérisation
de la résine durant laquelle cette dernière peut être travaillée comme une matière
plastique) et d'autre part du fait qu'en raison du taux de charge élevé dans les poudres
composites, le liant doit déjà avoir une bonne tenue mécanique au moment de l'extrusion
pour assurer la cohésion de la pâte propulsive.
[0009] Pour remédier à ces inconvénients dans le cadre de l'emploi de liants thermodurcissables,
l'homme de métier a cherché à travailler en présence de solvants comme décrit par
exemple dans les brevets français 2 268 770 et 2 488 246. Ces techniques sont cependant
d'une mise en oeuvre complexe et coûteuse qui ne donne pas satisfaction à l'échelle
industrielle.
[0010] Pour opérer sans solvant avec des liants thermodurcissables l'homme de métier a eu
largement recours à la technique dite de "coulée" ou encore "globale" qui consiste
à mélanger simultanément dans un malaxeur les constituants élémentaires liquides de
la résine et la charge oxydante et à couler, avant polymérisation, le mélange ainsi
obtenu dans un moule pour y conduire la polymérisation proprement dite. Cette technique
qui a été largement décrite, par exemple dans les brevets français 2 109 102, 2 196
998, 2 478 623 et 2 491 455, peut convenir à la fabrication de propergols solides
composites pour moteurs de fusées ou de roquettes, ou encore à la fabrication d'explosifs
composites pour les têtes d'engins qui sont le plus souvent utilisés sous forme de
produits de gros diamètre, mais se révèle mal adaptée à la fabrication industrielle
de grosses poudres composites et totalement inadaptée à la fabrication industrielle
de poudres composites de petits diamètres et plus généralement de produits pyrotechniques
composites de petit diamètre.
[0011] Pour fabriquer sans solvant des produits pyrotechniques composites de petit diamètre
à liant inerte thermodurcissable, l'homme de métier ne dispose donc, à l'heure actuelle,
que de la solution qui consiste à mélanger dans un malaxeur les constituants de la
résine avec la charge oxydante, à amorcer la polymérisation de la résine et, en cours
de polymérisation, à effectuer, en un laps de temps très court, l'extrusion du produit
comme décrit par exemple dans les brevets français 1 409 203 et 2 159 826. Cette technique
qui ne permet pas la fabrication simultanée de grandes quantités de produit ne donne
pas satisfaction à l'échelle industrielle, et par ailleurs n'est en pratique utilisable
que pour des extrusions en gros diamètres.
[0012] L'homme de métier est donc à la recherche d'un procédé industriel de fabrication,
sans solvant, de produits pyrotechniques composites de petit diamètre à liant inerte
thermodurcissable.
[0013] L'objet de la présente invention est précisément de proposer un tel procédé.
[0014] D'invention concerne donc un procédé de fabrication de produits pyrotechniques composites,
et notamment de poudres propulsives composites, constitués principalement d'une part
par un liant polyuréthanne obtenu par réaction d'un prépolymère polyhydroxylé avec
un diisocyanate et d'autre part par au moins une charge énergétique minérale ou organique
caractérisé en ce que ledit prépolymère polyhydroxylé a une masse moléculaire moyenne
en nombre comprise entre 2000 et 5000 et une fonctionalité moyenne en groupes hydroxyles
OH supérieure à 2 et inférieure à 3, et en ce que :
- dans une première étape on mélange ledit prépolymère polyhydroxylé avec ladite charge
énergétique et avec une quantité de diisocyanate comprise entre 50 % et 90 % en masse
de la quantité stoechiométrique nécessaire à la polymérisation complète de tous les
groupes hydroxyles OH dudit prépolymère, et on effectue la réaction de condensation
des groupes isocyanates NCO sur les groupes hydroxyles OH de manière à obtenir une
pâte partiellement polymérisée,
- dans une seconde étape on mélange à la pâte partiellement polymérisée ainsi obtenue
le complément de diisocyanate nécessaire pour atteindre ladite quantité stoechiométrique
nécessaire à la polymérisation complète et on extrude le mélange pâteux ainsi obtenu,
- dans une troisième étape on achève par cuisson à chaud la réaction de condensation
des groupes isocyanates NCO rajoutés au cours de la deuxième étape sur les groupes
hydroxyles OH encore libres.
[0015] L'invention concerne également les produits pyrotechniques composites tels que poudres
propulsives pour armes, propergols, explosifs obtenus par le procédé selon l'invention.
L'invention concerne en particulier les poudres dont le liant est obtenu par réaction
d'un polybutadiène hydroxytéléchélique ayant une fonctionalité moyenne en groupes
hydroxyles OH voisine de 2,3 sur un diisocyanate et dont la charge énergétique est
constituée par de l'hexogène.
[0016] L'invention permet ainsi à l'homme de métier de disposer d'un procédé industriel
de fabrication sans solvant de produits pyrotechniques composites et notamment de
poudres propulsives composites, ayant un liant inerte thermodurcissable. Le choix
de la fonctionalité du prépolymère polyhydroxylé confère en effet au polyuréthanne
résultant le caractère thermodurcissable. Le mode opératoire particulier retenu dans
le cadre de l'invention permet, à l'issue de la première étape, de disposer d'une
pâte partiellement polymérisée possédant à ce stade certaines propriétés plastiques
la rendant extrudable y compris en petits diamètres, notamment après adjonction de
la quantité complémentaire de diisocyanate. Il a en effet été observé par la demanderesse
que le mélange pâteux obtenu à l'issue de la seconde étape est quasiment non réactif
à température ambiante ou légèrement .supérieure à la température ambiante et peut
être travaillé sans précipitation et sans crainte d'une prise en masse irréversible.
Ce n'est que par la cuisson à chaud prévue à la troisième étape que le produit extrudé
est figé dans sa structure chimique. Le procédé selon l'invention permettant de préparer
sans solvant des grandes quantités de pâte extrudable en petit diamètre et pouvant
se conserver dans le temps rend ainsi possible la fabrication à l'échelle réellement
industrielle de brins de produits pyrotechniques composites à liant thermodurcissable
de petit diamètre. Ce procédé convient très bien à la fabrication de poudres propulsives
composites.
[0017] On donne ci-après une description détaillée de la mise en oeuvre de l'invention.
[0018] L'invention concerne donc un procédé de fabrication de produits pyrotechniques composites,
et notamment de poudres propulsives composites, constitués principalement d'une part
par un liant inerte thermodurcissable et d'autre part par au moins une charge énergétique
organique ou minérale. Le liant inerte thermodurcissable utilisable dans le cadre
de la présente invention est un liant polyuréthanne obtenu par réaction d'un prépolymère
polyhydroxylé avec un diisocyanate. Le prépolymère polyhydroxylé, de préférence liquide,
possède, et il s'agit là d'une caractéristique essentielle de l'invention, une fonctionalité
moyenne en groupes hydroxyles OH supérieure à 2 et inférieure à 3, préférentiellement
voisine de 2,3. Un tel prépolymère doit être constitué par un mélange de prépolymères
polyfonc- tionnels hydroxytéléchéliques, mais la fonctionalité finale du prépolymère
ne doit pas être obtenue par adjonction à un prépolymère essentiellement difonctionnel
de polyols courts tri ou tétrafonc- tionnels de masse molaire inférieure à 400 comme
par exemple le triméthylol éthane, le triméthylol propane, ou le tétraméthylol méthane,
contrairement à ce qui est souvent pratiqué dans l'industrie des résines polyuréthannes
thermodurcissables. Ledit prépolymère polyhydroxylé doit par ailleurs avoir une masse
moléculaire moyenne en poids comprise entre 2000 et 5000 et préférentiellement voisine
de 4000. Les prépolymères polyhydroxylés préférés dans le cadre de la présente invention
sont les mélanges essentiellement constitués par des polybutadiènes polyhydroxylés.
[0019] Ledit liant polyuréthanne est obtenu par réaction dudit prépolymère polyhydroxylé
avec un diisocyanate. Il s'agit là d'une autre caractéristique essentielle de l'invention,
à savoir que le réseau tridimensionnel du polyuréthanne thermodurcissable est obtenu
par réaction d'un prépolymère polyhydroxylé de fonctionalité supérieure à 2 avec un
diisocyanate, à l'exclusion de tout polyisocyanate dont la fonctionalité serait supérieure
à 2. La demanderesse expliquera plus loin dans la description l'importance fondamentale
de cette condition dans la mise en oeuvre du procédé selon l'invention. Comme diisocyanate
il est possible d'utiliser les diisocyanates aliphatiques, cycloaliphatiques ou aromatiques
habituellement utilisés dans la fabrication des compositions pyrotechniques faisant
appel à un liant polyuréthanne. On peut ainsi citer le toluène-2,4 diisocyanate, le
toluène-2,6 diisocyanate, le méthyl-1 cyclohexane-2,6 diisocyanate, le dicyclohexyl
méthane-4,4' diisocyanate, l'isophorone diisocyanate, le méthylène diisocyanate, 1'hexane-1,6
diisocyanate, le triméthyl-2,2,4 hexane-1,6 diisocyanate, le benzène-1,3 diisocyanate,
le benzène-1,4 diisocyanate, le diphényl-4,4' diisocyanate, le diphény- lméthane-4,4'
diisocyanate, le diméthoxy-3,3' diphényl-4,4' diisocyanate.
[0020] Les diisocyanates préférés dans le cadre de la présente invention sont choisis dans
le groupe constitué par le toluène-2,4 diisocyanate, le toluène-2,6 diisocyanate,
le méthyl-1 cyclohexane-2,4 diisocyanate, le méthyl-1 cyclohexane-2,6 diisocyanate,
le dicyclohexylméthane-4,4' diisocyanate, l'isophorone diisocyanate, l'hexane-1,6
diisocyanate, le triméthyr2,2,4hexane-1,6 diisocyanate. Pour obtenir des compo - sitions
pyrotechniques dégageant très peu de fumées lors de leur combustion on choisira de
préférence, dans la liste précitée, les diisocyanates aliphatiques ou cycloaliphatiques.
[0021] Le prépolymère polyhydroxylé et le diisocyanate doivent posséder des propriétés rhéologiques
permettant une mise en oeuvre sans solvant. Préférentiellement ils sont liquides.
[0022] Audit liant polyuréthanne est mélangée au moins une charge énergétique organique
ou minérale. Comme charge énergétique minérale on peut utiliser les charges choisies
dans le groupe constitué par le nitrate d'ammonium, le perchlorate d'ammonium, les
nitrates alcalins, les nitrates alcalino-terreux, les perchlorates alcalins, les perchlorates
alcalino-terreux. Comme charge énergétique organique on peut utiliser les composés
organiques nitrés connus comme composés énergétiques et notamment le cyclotriméthylène
trinitramine (hexogène), le cyclotétraméthylène tétranitramine (octogène), le tétra-
nitrate de pentaérithritol (pentrite), le nitrate de triaminoguanidine.
[0023] Dans le cadre de la présente invention, le rapport entre le poids de charge énergétique
par rapport au poids de liant polyuréthanne est préférentiellement voisin de 4.
[0024] A côté du liant et de la charge les produits pyrotechniques selon l'invention contiennent
en général les additifs usuels connus de l'homme de métier et spécifiques de l'application
finale à laquelle sont destinées lesdits produits, tels que notamment des plastifiants,
des agents mouillant, des agents anti-oxydant, des agents anti-lueur, des agents anti-errosifs,
des catalyseurs de combustion, etc...
[0025] Le procédé de fabrication des produits pyrotechniques composites selon l'invention
se caractérise d'autre part par le fait que l'on opère en trois étapes distinctes.
[0026] Dans une première étape on mélange, de préférence dans un malaxeur, ledit polymère
polyhydroxylé avec ladite charge énergétique en présence des additifs désirés tels
que décrits ci-dessus et avec une quantité de diisocyanate comprise entre 50 % et
90 % en poids de la quantité stoechiométrique nécessaire à la polymérisation complète
de tous les groupes hydroxyles OH dudit prépolymère polyhydroxylé. Après obtention
d'un mélange homogène, on effectue la réaction de condensation des groupes isocyanates
NCO sur les groupes hydroxyles OH de manière à obtenir une pâte partiellement polymérisée.
C'est au niveau de cette première étape que se situe l'importance des conditions de
fonctionalité énoncées précédement au sujet du prépolymère polyhydroxylé et du diisocyanate.
Il a en effet été constaté par la demanderesse que les prépolymères polyhydroxylés
présentant une fonctionalité en groupes hydroxyles OH comprise entre 2 et 3 obtenue
par mélange de prépolymères di fonctionnels et de prépolymères trifonc- tionnels à
l'exclusion de tout polyol court tri ou tétrafonctionnel, possèdent statistiquement
deux groupes hydroxyles OH plus réactifs que le troisième groupe servant à assurer
le complément de fonctionalité. En ajoutant dans la première étape une quantité de
diisocyanate représentant seulement 50 % à 90 % en poids de la quantité stoechiométrique
totale de diisocyanate nécessaire à la polymérisation complète de tous les groupes
hydroxyles OH dudit prépolymère, le diisocyanate va réagir préférentiellement avec
les deux groupes OH les plus réactifs du prépolymère selon une polymérisation essentiellement
linéaire. On obtient ainsi, à l'issue de la première étape, une pâte partiellement
polymérisée, possédant encore certaines propriétés plastiques et pouvant se conserver
dans le temps. Ce résultat ne pourrait pas être obtenu en présence de polyols courts
ou de polyisocyanates comportant plus de 2 groupes NCO. Selon un mode de réalisation
préféré de la première étape la quantité de diisocyanate introduite est comprise entre
70 % et 80 % en poids de ladite quantité stoechiométrique et la réaction de condensation
des groupes isocyanates NCO sur les groupes hydroxyles OH est effectuée à une température
comprise entre 50 et 80°C.
[0027] Dans une seconde étape on mélange, préférentiellement dans un malaxeur-extrudeur,
ou dans une boudineuse bi-vis, à la pâte partiellement polymérisée obtenue à l'issue
de la première étape le complément de diisocyanate nécessaire pour atteindre ladite
quantité stoechiométrique nécessaire à la polymérisation complète de tous les groupes
hydroxyles OH dudit prépolymère, après homogénéisation on extrude à la géométrie désirée
le mélange pâteux ainsi obtenu. Comme il a déjà été dit plus haut, un des avantages
majeurs du procédé selon l'invention réside dans le fait que le mélange pâteux obtenu
dans cette deuxième étape tout en étant de nature thermodurcissable est quasiment
non réactif à température ambiante ou même à température légèrement supérieure à la
température ambiante. Il est donc possible de travailler ce mélange pâteux sans précipitation
et sans crainte d'une prise en masse irréversible du moment que l'on opère en pratique
à une température inférieure à 40°C. Par ailleurs, et c'est là un autre avantage du
procédé selon l'invention, ce mélange pâteux possède à la fois encore suffisament
de propriétés plastiques pour pouvoir être extrudé, même en petit diamètre, à travers
des filières comportant des broches et déjà suffisamment de tenue mécanique pour conserver,
après extrusion, sa forme dans l'attente de la réticulation finale à chaud qui constitue
la troisième étape du procédé selon l'invention.
[0028] Dans une troisième étape on achève donc par cuisson à chaud la réaction de condensation
des groupes isocyanates NCO rajoutés au cours de la deuxième étape sur les groupes
hydroxyles OH encore libres du prépolymère. Cette cuisson qui est effectuée de préférence
à une température comprise entre 50°C et 80°C, permet d'achever la réticulation tridimensionnelle
du liant thermodurcissable et de figer définitivement la structure chimique du produit
pyrotechnique obtenu.
[0029] A l'issue de la troisième étape, le produit obtenu peut subir les traitements de
finition usuels nécessités en vue de son application finale après avoir éventuellement
été mis sous sa forme définitive par usinage ou découpage.
[0030] Le procédé selon l'invention permet ainsi d'obtenir des produits pyrotechniques composites
à liant thermodurcissable sans utilisation de solvant et en étant affranchi des inconvénients
présentés par les procédés antérieurs utilisant des mélanges ayant une vie de pot
limitée.
[0031] Le procédé selon l'invention est en particulier bien adapté à l'obtention de poudres
propulsives composites à liant thermodurcissable pour armes, et notamment pour armes
de petit calibre. Le procédé selon l'invention permet notamment l'obtention aisée
de poudres propulsives composites cylindriques présentant les géométries classiques
à un trou, à sept trous ou à dix-neuf trous utilisées dans les armes de petit et moyen
calibre. Dans ce cadre, des poudres préférées sont les poudres obtenues en utilisant
comme prépolymère un polybutadiène polyhydroxylé ayant une fonctionalité moyenne en
groupes hydroxyles OH voisine de 2,3 et en utilisant comme charge de l'hexogène. Des
poudres particulièrement préférées sont celles obtenues en utilisant en plus comme
diisocyanate un diisocyanate choisi dans le groupe constitué par les diisocyanates
aromatiques et notamment le toluène diisocyanate.
[0032] Mais le procédé selon l'invention est aussi applicable à l'obtention de propergols
composites à liant thermodurcissable ou d'explosifs composites à liant thermodurcissable.
Le recours au procédé selon l'invention, dans ce cadre, est particulièrement avantageux
dans les cas où l'on veut obtenir des propergols composites ou des explosifs composites
extrudés de petit diamètre.
[0033] Les exemples qui suivent illustrent, de manière non limitative, certaines possibilités
de mise en oeuvre de l'invention.
Exemple 1
[0034] On a fabriqué une poudre granulaire en géométrie cylindrique avec 7 canaux selon
le procédé objet de la présente invention.
[0035] La composition de la poudre est la suivante :

Le polybutadiène utilisé a une masse molaire moyenne en poids de 4000 et une fonctionalité
moyenne en groupes hydroxyles OH de 2,3 tandis que le polyéther utilisé a une masse
molaire moyenne en poids de 2000 et une fonctionalité moyenne en groupes hydroxyles
OH de 3.
[0036] Le procédé utilisé pour la fabrication de la poudre est le suivant :
Première étape : homogénéisation sous vide à 60°C des divers ingrédients de la composition
excepté le réticulant, ceci dans un malaxeur. Après deux heures d'homogénéisation,
addition d'une fraction du réticulant de telle façon à obtenir un rapport NCO/OH =
0,78. Après homogénéisation, la pâte ainsi obtenue est préréticulée 5 jours à 60°C
en étuve.
[0037] Deuxième étape : la pâte préréticulée, découpée sous forme parallélépipédique est
introduite dans la cuve d'un malaxeur-extrudeur. Après 10 mn de malaxage le complément
de réticulant est réalisé puis homogénéisé à 30°C.
[0038] L'extrusion de la pâte est réalisée après 20 mn de malaxage, au travers de trois
filières qui présentent la géométrie finale de la poudre.
[0039] Troisième étape : une post cuisson en étuve est effectuée sur les brins longs extrudés,
durant deux jours à 60°C.
[0040] La découpe en grain est ensuite réalisée permettant de disposer d'une poudre en vrac
directement utilisable.
[0041] Les caractéristiques de la poudre obtenue sont les suivantes :
géométrie cylindrique à 7 trous
D = 5,4 mm (diamètre du grain)
d : 0,6 mm (diamètre d'un trou)
web : 0,9 mm
longueur du grain L = 8,1 mm
force : 1,06 MJ/kg
température de flamme : 2429 K
masse volumique : 1,59 g/cm3
vitesse de combustion à 100 MPa : 45 mm/s
Exemple 2
[0042] On a fabriqué des brins de poudre propulsive de même composition et selon le même
procédé qu'à l'exemple 1, dans des géométries calculées à priori pour une munition
de moyen calibre de 30 mm.
[0043] Deux géométries ont été réalisées :
- poudre cylindrique monotubulaire :
D = 1,20 mm (diamètre du grain)
d = 0,4 mm (diamètre du trou central)
web = 0,4 mm
L = 1,80 mm (longueur du grain)
- poudre cylindrique heptatubulaire :
D = 2,3 mm (diamètre du grain)
d = 0,3 mm (diamètre d'un trou)
web = 0,35 mm
L = 3,45 mm (longueur du grain)
[0044] Ces poudres ont donné les résultats balistiques suivants dans une munition utilisant
un obus de 245 g :
- poudre monotubulaire :
- charge de poudre : 51,5 g
- pression maximale dans l'arme : 300 MPa (crusher)
- vitesse initiale de l'obus : 850 m/s
- poudre heptatubulaire :
- charge de poudre : 55 g
- pression maximale dans l'arme : 300 MPa (crusher)
- vitesse initiale de l'obus : 890 m/s
Exemple 3
[0045] On a fabriqué une poudre granulaire en géométrie cylindrique avec 7 canaux selon
le procédé objet de la présente invention. La composition est la même que dans l'exemple
1 excepté la nature de la nitramine, l'hexogène étant remplacé par de l'octogène (0-100µ).
[0046] Le procédé utilisé est le même que celui de l'exemple 1 excepté dans la première
étape du procédé où la préréticulation du liant est assurée pour un rapport NCO/OH
= 0,72. Les caractéristiques de la poudre obtenue sont les suivantes :
géométrie cylindrique 7 trous : D : 5,4 mm d = 0,6 mm web = 0,9 mm longueur du grain : L = 8,1 mm
force : 1,064 MJ/kg
température de flamme : 2439 K
masse volumique : 1,61 g/cm3
vitesse de combustion à 100 MPa = 45 mm/s
Exemple 4
[0047] On a fabriqué une poudre en grains de géométrie cylindrique comportant 7 canaux selon
le procédé objet de la présente invention.
[0048] La composition de la poudre est la suivante :

Le polybutadiène et le polyéther sont ceux utilisés dans l'exemple 1. Le procédé utilisé
pour la mise en oeuvre de cette composition est le même que celui décrit dans l'exemple
1 excepté dans la première étape où le rapport NCO/OH a été égal à 0,75.
[0049] On a ainsi obtenu une poudre présentant les caractéristiques suivantes :
- même géométrie que la poudre décrite à l'exemple 1
- force = 1,06 MJ/kg
- température de flamme : 2429 K
- masse volumique = 1,59 g/cm3
- vitesse de combustion à 100 MPa = 55 mm/s
Exemple 5
[0050] On a fabriqué une poudre en grains de géométrie cylindrique comportant 7 canaux selon
le procédé objet de la présente invention.
[0051] La composition de la poudre est la suivante :

[0052] Le polybutadiène et le polyéther sont ceux utilisés dans l'exemple 1. Le procédé
utilisé pour la mise en oeuvre de cette composition est le même que celui décrit dans
l'exemple 1 excepté dans la première étape où le rapport NCO/OH a été égal à 0,70.
[0053] On a ainsi obtenu une poudre présentant les caractéristiques suivantes :
- même géométrie que la poudre décrite à l'exemple 1
- force : 1,024 MJ/kg
- température de flamme : 2250 K
- masse volumique : 1,51 g/cm3
- vitesse de combustion à 100 MPa : 65 mm/s
Exemple 6
[0054] On a fabriqué une poudre en grains de géométrie cylindrique comportant 7 canaux selon
le procédé objet de la présente invention.
[0055] La composition de la poudre est la suivante :

[0056] Le polyéther hydroxytéléchélique a une masse molaire moyenne en poids de 2800 et
une fonctionalité en groupes hydroxyles OH voisine de 2, le polyéther triol a une
masse molaire moyenne en poids de 2000 et une fonctionalité en groupes hydroxyles
OH égale à 3.
[0057] Le procédé utilisé pour la mise en oeuvre de cette composition est le même que celui
décrit dans l'exemple 1 excepté dans la première étape où le rapport NCO/OH a été
égal à 0,69.
[0058] On a ainsi obtenu une poudre présentant les caractéristiques suivantes :
- même géométrie que la poudre décrite à l'exemple 1
- force : 1,09 MJ/kg
- température de flamme : 2500 K
- masse volumique : 1,63 g/cm3
- vitesse de combustion à 100 MPa : 40 mm/s
Exemple 7
[0059] On a fabriqué une poudre en grains de géométrie cylindrique comportant 7 canaux selon
le procédé objet de la présente invention.
[0060] La composition de la poudre est la suivante :

[0061] Le polyester hydroxytéléchélique a une masse molaire moyenne en poids de 3200 et
une fonctionalité en groupes hydroxyles OH égale à 2,4, le polyéther triol est le
même que celui utilisé dans l'exemple 6.
[0062] Le procédé utilisé pour la mise en oeuvre de cette composition est le même que celui
décrit dans l'exemple 1 excepté dans la première étape où le rapport NCO/OH a été
égal à 0,84.
[0063] On a ainsi obtenu une poudre présentant les caractéristiques suivantes :
- même géométrie que la poudre décrite à l'exemple 1
- force : 1,16 MJ/kg
- température de flamme : 2861 K
- masse volumique : 1,72 g/cm3
- vitesse de combustion à 100 MPa : 38 mm/s
Exemple 8
[0064] On a fabriqué une poudre en grains de géométrie cylindrique comportant sept canaux
selon le procédé objet de la présente invention.
[0065] La composition de la poudre est la suivante :

[0066] Le polycarbonate hydroxytéléchélique a une masse molaire moyenne en poids de 3000
et une fonctionalité en groupes hydroxyles OH voisine de 2,7.
[0067] Le procédé utilisé pour la mise en oeuvre de cette composition est en tout point
identique à celui décrit dans l'exemple 1.
[0068] On a ainsi obtenu une poudre présentant les caractéristiques suivantes :
- même géométrie que la poudre décrite à l'exemple 1
- force : 1,17 MJ/kg
- température de flamme : 2671 K
- masse volumique : 1,67 g/cm3
- vitesse de combustion à 100 MPa : 30 mm/s
Exemple 9
[0069] On a fabriqué des brins creux en propergol composite pour la réalisation de chargements
à très courte durée de combustion selon le procédé de la présente invention.
[0070] La composition du propergol est la suivante :

[0071] Le polybutadiène hydroxytéléchélique est le même que celui utilisé à l'exemple 1.
[0072] Le procédé de fabrication employé est le même que celui décrit dans l'exemple 1 excepté
dans la première étape où le rapport NCO/OH a été égal à 0,75.
[0073] Les caractéristiques des brins obtenus sont les suivantes :
diamètre extérieur : 10,2 mm
diamètre du canal central : 6 mm
longueur d'un brin : 137 mm
[0074] Le chargement est formé de 31 brins identiques qui sont encastrés dans une semelle
inerte.
[0075] Les performances de ce chargement sont les suivantes :
- pression : 44 MPa-à + 20°C
- vitesse de combustion : 106 mm/s
- coefficient d'autoserrage : 0,56
diamètre du col de la tuyère : 43,1 mm
- impulsion de poussée palier : 664 newton X seconde
Exemple 10
[0076] On a fabriqué des cylindres d'explosif composite selon le procédé de la présente
invention.
[0077] La composition de cet explosif est la suivante :

[0078] Le polyester et le polyéther sont les mêmes que ceux utilisés dans l'exemple 7. Le
procédé utilisé pour la mise en oeuvre de cette composition est le même que celui
décrit dans l'exemple 1, excepté dans la première étape où le rapport NCO/OH a été
égal à 0,84.
[0079] Les caractéristiques mesurées sur ce produit sont :
- masse volumique : 1,67 g/cm3
- vitesse de détonation : 7915 m/s
- propriétés mécaniques à 20°C
- en compression (lmm/min)
. Sm = 2,8 MPa (contrainte maximale à la rupture)
. E = 29 MPa (module d'élasticité)
. em = 17,3 % (écrasement maximum avant rupture)
- en traction (10 mm/min)
. Sm = 0,8 MPa
Exemple 11
[0080] On a fabriqué un explosif composite de composition identique à celle de la poudre
citée en exemple 8 et déterminé quelques une de ses caractéristiques
- masse volumique : 1,67 g/cm3
- vitesse de détonation : 8060 m/s
- propriétés mécaniques à 20°C en compression :
Sm = 5,9 MPa
E = 55,9 MPa
em = 15,6 %
1- Procédé de fabrication de produits pyrotechniques composites constitués principalement
d'une part par un liant polyuréthanne obtenu par réaction d'un prépolymère polyhydroxylé
avec un diisocyanate et d'autre part par au moins une charge énergétique minérale
ou organique, ledit prépolymère polyhydroxylé ayant une masse moléculaire moyenne
en poids comprise entre 2000 et 5000 et une fonctionalité moyenne en groupes hydroxyles
OH supérieure à 2 et inférieure à 3 caractérisé en ce que :
- dans une première étape on mélange ledit prépolymère polyhydroxylé avec ladite charge
énergétique et avec une quantité de diisocyanate comprise entre 50 % et 90 % en poids
de la quantité stoechiométrique nécessaire à la polymérisation complète de tous les
groupes hydroxyles OH dudit prépolymère, et on effectue la réaction de condensation
des groupes isocyanates NCO sur les groupes hydroxyles OH de manière à obtenir une
pâte partiellement polymérisée,
- dans une seconde étape on mélange à la pâte partiellement polymérisée ainsi obtenue
le complément de diisocyanate nécessaire pour atteindre ladite quantité stoechiométrique
nécessaire à la polymérisation complète et, on extrude le mélange pâteux ainsi obtenu,
- dans une troisième étape on achève par cuisson à chaud la réaction de condensation
des groupes isocyanates NCO rajoutés au cours de la deuxième étape sur les groupes
hydroxyles encore libres.
2- Procédé selon la revendication 1 caractérisé en ce que ledit prépolymère polyhydroxylé
a une fonctionalité moyenne en groupes hydroxyles OH voisine de 2,3.
3- Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 ou 2 caractérisé en ce que
ledit prépolymère polyhydroxylé a une masse moléculaire moyenne en poids voisine de
4000.
4- Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 3 caractérisé en ce que ledit
prépolymère polyhydroxylé est un polybutadiène polyhydroxylé.
5- Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 4 caractérisé en ce que ledit
diisocyanate est choisi dans le groupe constitué par le toluène-2,4 diisocyanate,
le toluène-2,6 diisocyanate, le méthyl-1 cyclohexane-2,4 diisocyanate, le méthyl-1
cyclohexane-2,6 diisocyanate, le dicyclohexyl méthane-4,4' diisocyanate, l'isophorone
diisocyanate, le méthylène diisocyanate, l'hexane-1,6 diisocyanate, le triméthyl-2,2,4
hexane-1,6 diisocyanate.
6- Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 5 caractérisé en ce que ladite
charge énergétique minérale est choisie dans le groupe constitué par le nitrate d'ammonium,
le perchlorate d'ammonium, les nitrates alcalins, les nitrates alcalino-terreux, les
perchlorates alcalins, les perchlorates alcalino-terreux.
7- Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 6 caractérisé en ce que ladite
charge énergétique organique est choisie dans le groupe constitué par l'hexogène,
l'octogène, la pentrite, le nitrate de triaminoguanidine.
8- Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 7 caractérisé en ce que le
rapport entre le poids de charge énergétique par rapport au poids de liant polyuréthanne
est voisin de 4.
9- Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 8 caractérisé en ce que la
quantité de diisocyanate introduite dans la première étape est comprise entre 70 %
et 80 % en poids de ladite quantité stoechiométrique.
10- Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 9 caractérisé en ce que
dans la première étape la réaction de condensation des groupes isocyanates sur les
groupes hydroxyles est effectuée à une température comprise entre 50°C et 80°C.
11- Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 10 caractérisé en ce que
dans la troisième étape la cuisson est effectuée à une température comprise entre
50°C et 80°C.
12- Poudres propulsives composites caractérisées en ce qu'elles sont obtenues par
le procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 11.
13- Poudres selon la revendication 12 caractérisées en ce que ledit prépolymère polyhydroxylé
est un polybutadiène polyhydroxylé ayant une fonctionalité moyenne en groupes hydroxyles
OH voisine de 2,3 et en ce que ladite charge énergétique est de l'hexogène.
14- Poudres selon la revendication 13 caractérisées en ce que ledit diisocyanate est
choisi dans le groupe constitué par les diisocyanates aromatiques.
15- Propergols composites caractérisés en ce qu'ils sont obtenus par le procédé selon
l'une quelconque des revendications 1 à 11.
16- Explosifs composites caractérisés en ce qu'ils sont obtenus par le procédé selon
l'une quelconque des revendications 1 à 11.