[0001] La présente invention, qui résulte de travaux effectués dans les laboratoires de
l'Ecole Nationale Supérieure d'Electrochimie et d'Electrométallurgie de Grenoble,
est relative à un procédé de contrôle en continu de la teneur en métal de transition
dissous dans un bain de sels fondus et à son application à l'alimentation continue
d'une cellule d'électrolyse en sels dudit métal.
[0002] L'homme de l'art sait qu'on peut obtenir de façon industrielle, les métaux de transition
par électrolyse en continu dans une cellule d'un au moins de leurs chlorures préalablement
dissous dans un bain de sels fondus constitués par des chlorures alcalins et/ou alcalino-terreux.
[0003] On entend ici par métal de transition, tout métal appartenant aux colonnes IVb, Vb,
VIb de la classification spécifique de Mendeleev et notamment le titane, le zirconium,
le hafnium, le tantale, le niobium et le vanadium.
[0004] On entend également par électrolyse en continu, un procédé dans lequel le dépôt et
l'extraction du métal à la cathode et le dégagement de chlore à l'anode sont en permanence
compensés par un apport de chlorure frais; cet apport étant destiné à maintenir la
teneur en métal à produire dissous dans le bain à une valeur relativement constante
et de préférence optimale, c'est-à-dire la plus favorable à un bon fonctionnement
de la cellule.
[0005] Dans un tel procédé, si l'on veut effectivement maintenir la teneur en métal dissous
à une valeur constante, il faut alimenter la cellule avec une quantité de chlorures
frais correspondant exactement à la quantité consommée par la cellule.
[0006] Théoriquement, cette quantité étant proportionnelle à la quantité de métal déposé
à la cathode et donc à la quantité de courant électrique passant dans la cellule,
il semble à première vue logique de se servir des mesures de l'intensité du courant
d'électrolyse et du temps qui s'est écoulé pour déterminer la quantité de chlorures
à alimenter. En réalité, du fait de fluctuations inévitables du courant, de l'alimentation
en chlorure du métal et du rendement, on constate qu'une telle méthode conduit à des
dérives de la teneur en métal dissous par rapport à la teneur optimale, d'autant plus
importantes que le temps de fonctionnement de la cellule est long. C'est pourquoi
il s'avère nécessaire de recourir à d'autres moyens pour contrôler de manière efficace
la teneur du bain en métal dissous.
[0007] La solution généralement adoptée consiste à effectuer périodiquement des prélèvements
de bain, à les analyser et à ajuster en conséquence les quantités de chlorure du métal
à alimenter. Mais cette opération n'est pas simple et surtout sa réponse n'est pas
immédiate, de sorte que si les dérives sont plus ou moins réduites périodiquement,
la teneur en chlorure du métal dissous dans le bain est rarement égale à la teneur
optimale.
[0008] Une solution plus intéressante dans le sens qu'elle permet un contrôle continu de
la composition du bain et donc une forte atténuation des dérives a été également proposée.
Elle consiste à utiliser des électrodes indicatrices du métal dissous constituées
par une tige du métal à déposer et plongées dans le bain de sels. Ces électrodes en
effet prennent normalement un potentiel qui est fonction de la teneur du bain en métal
dissous. Il suffit alors de mesurer ce potentiel par rapport à une électrode de référence
pour connaître la teneur que l'on cherche à contrôler. Malheureusement, on constate
que pour une variation d'un facteur 10 de la teneur en métal dissous, la variation
du potentiel ne dépasse pas quelques dizaines de mV, ce qui est très insuffisant pour
permettre un contrôle précis.
[0009] La demanderesse ayant cherché à améliorer la sensibilité d'un tel procédé a trouvé
que dans la gamme des teneurs en métal de transition dissous généralement mis en oeuvre
dans les bains d'électrolyse, c'est-à-dire enre 1 et 10 % en poids, la variation de
ce potentiel pouvait être fortement amplifiée par l'ajout dans le bain de quantités
relativement faibles de certains ions.
[0010] C'est ainsi qu'elle a mis au point un procédé caractérisé en ce que l'on introduit
dans le bain une quantité de fluorures alcalins et/ou alcaline-terreux telle que le
rapport molaire du fluor contenu à la quantité de métal de transition dissous dans
le bain soit compris entre 2,5 et 15. Toutefois, les valeurs comprises entre 4 et
8 conduisent à des sensibilités beaucoup plus grandes. Une telle addition permet d'obtenir
une variation de potentiel de plusieurs centaines de millivolts pour une variation
de + ou - 2,5 % de la teneur en métal dissous, ce qui permet un contrôle précis de
cette teneur.
[0011] De façon pratique, le procédé consiste donc, connaissant la teneur optimale en métal
pour assurer un bon fonctionnement de la cellule, à calculer à partir de cette teneur
et du rapport molaire revendiqué la quantité de fluorures à ajouter. Ce fluorure est
introduit dans le bain au moment de sa constitution.
[0012] La cellule étant équipée d'une électrode indicatrice et d'une électrode de référence,
on charge la quantité optimale de chlorure du métal de transition à déposer et après
un temps suffisant pour permettre la dissolution on mesure le potentiel avant de démarrer
l'électrolyse proprement dite. La teneur en métal dissous peut être confirmée par
une analyse du bain.
[0013] La cellule est alors mise en service et un fonctionnement régulier peut être réalisé
en l'alimentant en chlorures du métal de manière telle que le potentiel mesuré reste
constant. On conçoit aisément l'application qui peut être faite de cette mesure à
l'alimentation continue de la cellule. n suffit en effet de comparer le potentiel
mesuré à chaque instant au potentiel de consigne correspondant à la teneur optimale
du bain et de commander en conséquence l'alimentation en chlorures. De cette manière,
on peut régler très finement le débit de chlorures du métal et avoir une teneur en
métal dissous extrêmement précise tout au long de l'électrolyse.
[0014] Il se peut qu'il ne soit pas aisé d'incorporer dans une cellule une électrode indicatrice
et une électrode de référence, c'est pourquoi la demanderesse a cherché à utiliser
les moyens existant dans les cellules classiques.
[0015] Dans le cas où la paroi interne de la cellule est métallique, on a trouvé qu'on pouvait
l'utiliser comme électrode indicatrice. En effet, sachant que celle-ci doit être constituée
par le métal à déposer, on a essayé au cours d'une préélectrolyse en présence du chlorure
du métal à déposer, de faire passer un courant continu entre l'anode de la cellule
et la paroi de la cuve. Dans ces conditions, on a constaté que le dépôt de métal obtenu
sur la cuve peut jouer parfaitement par la suite le rôle d'électrode indicatrice.
Si nécessaire, ce dépôt sur la paroi peut être périodiquement reconstitué au cours
de l'électrolyse ou même créé en permanence par polarisation cathodique de la cuve.
[0016] De plus, la demanderesse a également cherché à supprimer l'installation d'une électrode
de référence; elle y est parvenue en lui substituant l'anode de la cellule. Toutefois,
dans ce cas, il s'établit alors dans le circuit de contrôle du potentiel une chute
ohmique due au courant d'électrolyse I qui traverse l'anode. Ceci perturbe la mesure
et donne une indication erronée sur la teneur réelle du bain en chlorures dissous.
C'est pourquoi la demanderesse incorpore entre l'électrode indicatrice et l'anode
un correcteur de chute ohmique dont la constitution est décrite ci-après.
[0017] L'invention sera mieux comprise à l'aide des dessins joints qui représentent :
- figure 1 : un schéma montrant une cellule d'électrolyse utilisée pour l'élaboration
du hafnium avec son système d'alimentation en chlorures dans laquelle le procédé selon
l'invention est mis en oeuvre au moyen d'une électrode indicatrice constituée par
la cuve d'électrolyse et d'une électrode de référence constituée par l'anode et d'un
correcteur de chute ohmique.
- figure 2 : un schéma du correcteur.
- figure 3 : une courbe de variation du potentiel E de la cuve (électrode indicatrice)
par rapport à la référence (anode + correcteur) en fonction de la teneur en hafnium
dissous dans le bain.
[0018] Sur la figure 1, on distingue :
1. une cellule d'électrolyse formée d'une cuve métallique (1) fermée par un couvercle
étanche (2) sur lequel sont fixées une anode (3) munie d'une cloche (4) de récupération
du chlore dégagé, une cathode (5) et une tuyauterie (6) d'alimentation en chlorures
de hafnium gazeux; chacun de ces éléments plongent dans le bain de sels constitués
par un mélange de chlorures de potassium et de sodium.
2. un système d'alimentation comprenant un récipient (8) fermé renfermant le chlorure
de hafnium en poudre (9) et muni à sa base d'une tubulure communiquant avec une vis
sans fin (10) mue par un moteur (11) qui transporte le chlorure du récipient (8) vers
un vaporiseur (12) communiquant avec la tuyauterie (6).
3. le système d'alimentation électrique de la cellule, de contrôle du potentiel et
de commande d'alimentation de la cellule en chlorures comprenant :
- une source de courant continu (13) dont le pôle positif est relié à l'anode et le
pôle négatif à la cathode de la cellule respectivement par les conducteurs (14) et
(15);
- un correcteur (16) de chute ohmique relié d'une part au conducteur (14) par l'intermédiaire
des bornes A et B d'un shunt (17), d'autre part à un conducteur (18) en liaison avec
la cuve (1) par l'intermédiaire de la borne C;
- les bornes A et D du dispositif (16) sont reliées à un comparateur (19) du potentiel
mesuré au potentiel de référence qui envoie un signal par l'intermédiaire du conducteur
(20) au moteur (11) dans le cas où le potentiel mesuré est en valeur absolue supérieur
à la valeur absolue du potentiel de référence.
[0019] Sur la figure 2 est représenté le correcteur de chute ohmique comprenant un amplificateur
opérationnel noté AOP, deux résistances de même valeur R1, une résistance variable
et réglable Rv.
[0020] Entre l'anode et l'électrode indicatrice (cuve de la cellule), bornes A et C est
mesurée une tension - U qui comprend le potentiel E que l'on désire connaître, plus
un terme de chute ohmique R.I. Cette tension s'écrit : U - E + RI. R est une résistance
constante qui ne dépend que de la géométrie, de la nature et de la température du
bain fondu.
[0021] Pour soustraire le terme RI quelle que soit d'ailleurs la valeur de I, nous mesurons
par l'intermédiaire d'un shunt r, figure 1 repère (17) une tension proportionnelle
à I de valeur rI.
[0022] Les lois des mailles et des noeuds appliquées au circuit figure 2 donnent pour résultat
de la tension de sortie S :

soit

[0023] Au départ de l'opération, un étalonnage est effectué qui consiste à régler la valeur
de Rv de manière à obtenir :

[0024] A ce moment, on a alors S - E qui est indépendant de la valeur de I et donc de ses
fluctuations et qui ne dépend que de la teneur en métal dissous comme il est représenté
figure 3.
[0025] Ce signal S est envoyé au comparateur (19).
[0026] Sur la figure 3, on voit une courbe qui représente les variations de potentiel E
ou S en volts de la cuve (électrode indicatrice en hafnium) par rapport à l'anode
corrigée de la chute ohmique (référence normale à chlore) en fonction de la teneur
en % d'Hf dissous dans le bain et du rapport molaire R de la quantité de fluor à la
quantité de hafnium. Cette courbe a été établie avec un bain équimoléculaire KCI,
NaCI (56 % KCI. 44 % NaCl en poids) fondu à 750°C auquel on avait ajouté 1,1 % de
fluor sous forme de NaF (2,5 % en poids). On constate une variation de potentiel de
750 mV quand la teneur en hafnium dissous dans le bain passe de 0,5 à 5 % en poids.
[0027] D'autres courbes non représentées ici montrent qu'avec une addition de 4,1 % de fluor,
on obtient la même variation de potentiel pour une variation de poids de hafnium de
1 à 8 %.
[0028] Plus généralement, les maxima de variation et donc de précision sont obtenus pour
un rapport molaire fluor/métal dissous compris entre 4 et 8 mais des résultats encore
fort acceptables peuvent être obtenus avec des rapports compris entre 2,5 et 15.
[0029] L'invention trouve son application dans tous les cas où on désire fabriquer des métaux
de transition par électrolyse en continu de leurs chlorures dans les bains fondus
de chlorures alcalins ou alcalino-terreux.
1. Procédé de contrôle en continu de la teneur en métal de transition dissous dans
un bain de chlorures fondus placé dans une cellule d'électrolyse et destiné à l'obtention
dudit métal, à partir d'un au moins de ses chlorures, dans lequel on mesure le potentiel
d'une électrode indicatrice du métal de transition plongeant dans le bain par rapport
à une électrode de référence, caractérisé en ce que l'on introduit dans le bain une
quantité de fluorures alcalins et/ou alcalinoterreux telle que le rapport molaire
du fluor contenu à la quantité de métal de transition dissous est compris entre 2,5
et 15.
2. Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que le rapport molaire est
compris entre 4 et 8.
3. Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que l'électrode indicatrice
est constituée par la paroi métallique de la cellule sur laquelle a été déposé du
métal de transition.
4. Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que l'électrode de référence
est constituée par l'anode de la cellule d'électrolyse munie d'un correcteur de chute
ohmique.
5. Application du procédé de la revendication 1 à l'alimentation continue de la cellule
en chlorure du métal de transition, caractérisé en ce que l'on compare le potentiel
mesuré à un potentiel de consigne correspondant à la teneur optimale du bain en chlorure
du métal de transition et commande l'alimentation tant que le potentiel mesuré reste
en valeur absolue supérieur à la valeur absolue du potentiel de consigne.