[0001] L'invention concerne des produits en alliage d'Al contenant du Li utilisables à l'état
recristallisé et un procédé d'obtention de ceux-ci.
[0002] Le problème posé au métallurgiste consiste à trouver les conditions d'obtention d'alliages
Al-Li, contenant éventuellement d'autres éléments durcissants tels que Cu, Mg, Zn,
comme additions majeures, utilisables à l'état recristallisé.
[0003] En effet, la littérature technique relative à ce domaine indique que l'état recristallisé
est néfaste pour les propriétés d'emploi, en particulier en ce qui concerne la ductilité
-voir par exemple le tableau III (tensile properties) de l'article de Starke et Lin
dans Metallurgical Trans. A. vol 13A, Décembre 1982, p. 2259-2269 - ce qui a conduit
:
- au remplacement du Mn par le Zr comme inhibiteur de recristallisation, plus puissant
que le premier - voir les pages 4-7 et 4-8 de l'article de Sanders, Naval Air Development
Centre Contract numero N62269-76-C-0271 for Naval Air Systems Command, Final Report,
14 Juin 1979 ou figure 12 et pages 1037 à 1042 de Starke, dans Strength of metals
and alloys - Ed. R.C. GIFKINS, 1982, Vol. 3, p. 1025-1044,
- à l'utilisation de traitements thermiques spéciaux destinés à inhiber la recristallisation
- voir page 402 de l'article de Lin et Chakrabotty, dans Metallugical Trans. A, vol.
13A, Mars 1982, page 401-410,
- et enfin au développement des produits non recristallisés - voir figure 12, p. 376
et figure 17, p 380 de l'article de PEEL et al. Proceedings of the Al-Li Conference
at Monterey 1983, The Metallurgical Society of AIME.
[0004] L'alliage à base d'Al, selon l'invention, contenant (en poids) de 1 à 3,5 % Li, jusqu'à
4 % de Cu, jusqu'à 5 % de Mg, jusqu'à 3 % de Zn et des additions de Mn, Cr et/ou Zr
est caractérisé par des teneurs en Mn, en Cr et/ou en Zr dans les quantités pondérales
suivantes :
Zr ≦ 0,10 %
Mn ≦ 0,8 %
et Cr ≦ 0,20%
avec %Zr/0,03 + %Mn/0,3 + %Cr/0,07 > 1
et de préférence pour Zr ≦ 0,08 %, %Zr/0,4 + %Mn/0,5 < 1
et pour Zr ≧ 0,08 %, % Zr/0,09 + %Mn/3,6 <1
avec Cr < 0,15 % pour Zr ≦ 0,09 %
et par une structure recristallisée dont la grosseur de grain moyenne est inférieure
ou égale à 200 µm.
[0005] Une méthode d'obtention de l'alliage selon l'invention consiste d'une part à contrôler
la teneur en éléments dispersoïdes (Mn, Zr, Cr) de l'alliage, et d'autre part à pratiquer
un sous-revenu final de celui-ci, les autres conditions de la gamme de fabrication
étant habituelles en ce qui concerne les produits de ce type, en particulier pour
les alliages à durcissement structural utilisés en aéronautique.
[0006] Si les teneurs en dispersoïdes (Mn, Cr, Zr) dépassent les limites fixées ci-dessus,
l'alliage est non recristallisé après transformation à chaud ou à froid dans les conditions
habituelles, et recuit (ou mis en solution).
[0007] Si les teneurs en dispersoïdes sont inférieures aux limites indiquées ci-dessus,
l'alliage recristallise après transformation à chaud ou à froid et recuit (ou mise
en solution) mais possède alors un grain grossier (> 200 µm).
[0008] La gamme de fabrication habituelle de tels produits comporte :
- l'obtention d'un produit densifié par une technique de coulée semi-continue en lingots,
plaques ou billettes, ou par la technique de métallurgie des poudres,
- une détente éventuelle à des températures comprises enre 200 et 400°C,
- une homogénéisation éventuelle, en-dessous du solidus de l'alliage, à des températures
généralement comprises entre 500 et 555°C, celle-ci pouvant être précédée d'un maintien
à une température inférieure en vue de résorber les phases métastables éventuellement
présentes,
-une déformation à chaud par laminage, forgeage, matriçage, filage ou toute autre
technique, à une température inférieure ou égale à 500°C, de préférence comprise entre
470°C et 200°C, jusqu'à des dimensions finales ou intermédiaires,
-Si le produit obtenu est un produit intermédiaire, les transformations ultérieures
se font à froid avec un ou plusieurs recuits intermédiaires à des températures comprises
entre 200 et 500°C selon le corroyage appliqué et la nature de l'alliage,
-Le produit brut de transformation à chaud ou obtenu après transformation à froid
est alors mis en solution à des températures comprises entre 500 et 550°C environ,
trempé à l'eau froide (ϑ < 30°C) et revenu dans des conditions particulières, objet
de l'invention, après un écrouissage éventuel entre trempe et revenu.
[0009] Les produits recuits ou mis en solution ont une taille moyenne de grain mesurée d'après
la norme NF A 04-503, méthode des intersections, inférieure à 200 µm.
[0010] Le revenu selon l'invention est pratiqué dans les conditions suivantes :
-le revenu est effectué dans le domaine de températures (T) inférieures ou égales
à la température du revenu isotherme conduisant au maximum de durcissement (T
M),
-la durée de maintien t(T) d'un revenu isotherme à la température (T) est inférieure
ou égale à la durée du maintien isotherme tm(T) qui conduit au durcissement maximal
à cette température T.
[0011] La plage préférentielle des revenus est définie par :
T(°C) < T
M(°C) - 15
t(T) < tm(T) / 2.
[0012] L'invention sera mieux comprise à l'aide des exemples suivants illustrés par les
figures 1 à 8.
La figure 1 représente la microstructure d'un alliage non recristallisé (coulée A,
exemple 1).
La figure 2 représente la microstructure d'un alliage recristallisé (coulée B, exemple
1).
La figure 3 représente l'évolution de la dimension d'une fissure de fatigue en fonction
du nombre de cycles pour trois conditions de revenu sur alliage recristallisé.
La figure 4 représente la microstructure d'un alliage non recristallisé (coulée C,
exemple 2).
La figure 5 représente la microstructure d'un alliage recristallisé (coulée D, exemple
2).
La figure 6 représente les microstructures obtenues selon les gammes A et B de l'exemple
3.
La figure 7 représente la microstructure recristallisée d'une tôle relative à l'exemple
4.
La figure 8 représente de façon schématique les courbes de revenu isothermes et la
définition des paramètres : t(T), tm(T), T, TM.
EXEMPLE 1
[0013] Cet exemple concerne des tôles minces en alliage Al-Li-Cu-Mg dont la teneur en Zr
est hors (ou selon) l'invention et le revenu final pratiqué hors (ou selon) les conditions
de l'invention.
[0014] Deux alliages de composition suivante (% en poids) :
A/ Li: 2.5 - Cu: 1.30 - Mg:0,90 - Zr: 0,12 - Fe: 0.05 - Si: 0,04
B/ Li: 2,5 - Cu: 1.35 - Mg:0,90 - Zr: 0,05 - Fe: 0.05 - Fe: 0.05 - Si: 0.05
reste Al,
ont été coulés en semi-continu sous forme de plaques de 800 x 300 mm² de section et
de 1200 kg chacune.
[0015] Les plaques ont été homogénéisées 24 h à 535°C, scalpées à une section de 770 x 270
mm², réchauffées à 470°C pendant 12 heures, laminées à chaud à partir de 460°C jusqu'à
4,6 mm d'épaisseur.
[0016] Les bandes brutes de laminage à chaud ont été recuites en bobines avec un maintien
de 1 h à 450°C (montée et descente en température de l'ordre de 25°C/h), laminées
à froid jusqu'à 3,2 mm d'épaisseur, recuites à mouveau (comme précédemment) et relaminées
à froid jusqu'à 2,3 mm d'épaisseur.
[0017] Les tôles ainsi obtenues ont été mises en solution dans un four à air : 20 mn à 533°C,
trempées à l'eau froide (ϑ < 20°C), planées et tractionnées jusqu'à 2 % d'allongement,
avant de subir divers revenus, comme reportés dans le tableau 1.
[0018] Les caractéristiques mécaniques de traction, dans diverses directions et les résultats
d'essais de pliage et d'emboutissage (essai Erichsen) sont reportés au tableau 1.
[0019] La figure 3 représente l'évolution de la longueur d'une fissure de fatique de l'alliage
B sous contrainte sinusoïdale avec contrainte maximale de 130 MPa, contrainte minimale
de 50 MPa, à la fréquence de 30 Hz, sur une éprouvette à fissure centrale de 160 mm
de large et de 2,3 mm d'épaisseur, dans 3 états de revenu : A : 12 h à 210°C - B :
24 h à 190°C - C : 24 h à 150°C. Cet exemple montre que seule la conjonction d'une
teneur en Zr faible (0,05 %) et d'un sous-revenu (24 h à 150°C) permet d'obtenir un
produit recristallisé possédant une bonne ductilité et relativement isotrope (A %
> 10 %, rayon de pliage ≃ 3e et flèche Erichsen > 3 mm).
EXEMPLE 2
[0020] Cet exemple concerne un tube étiré à froid avec zirconium élevé (hors l'invention)
et un zirconium faible (selon l'invention).
[0021] Deux alliages de composition suivante (% en poids) :
C/ Li: 2,60 - Cu: 1,30 - Mg: 1,05 - Zr: 0,13 - Fe: 0,04 - Si: 0,02
D/ Li: 2,65 - Cu: 1,35 - Mg: 1,00 - Zr 0,08 - Fe: 0,04 - Si: 0,03
reste Al
ont été coulés en semi-continu sous forme de billettes ⌀ 200 mm. de 150 kg chacune.
Les lopins de filage ont été écroûtés à ⌀ 138 mm, filés à 400°C en ébauche de tube
⌀ 50/40 mm, recuits à 450°C-1 h, refroidis à l'air calme, étirés à froid de 100 %,
mis en solution à 535°C pendant 1h30 mn, trempés à l'eau froide et revenus soit 24
h à 190°C (coulée C, revenu hors l'invention), soit 24 h à 170°C (coulée D, revenu
selon l'invention).
[0022] Les caractéristiques mécaniques en long obtenues sur le tube de 3 mm d'épaisseur
ainsi obtenu sont les suivantes :

EXEMPLE 3 (selon l'invention)
[0023] Un alliage contenant (en poids) 2,00 % Li - 2,05 % Cu - 1,45 % Mg - 0,08 % Zr - 0,06
% Fe - 0,03 % Si, reste Al, a été coulé en semi-continu en plateau de section 800
x 300 mm² d'un poids de 1200 kg, homogénéisé 24 h à 525°C, découpé, scalpé à 770 x
270 mm² de section, réchauffé 12 h à 470°C, laminé à chaud jusqu'à 3,8 mm (à partir
de 460°C), recuit 1 h à 450°C avec montée et descente en température à +- 25°C/h (gamme
A) ou recuit 1 h à 450°C suivi d'une trempe à l'eau froide (gamme B), laminé à froid
jusqu'à 1,6 mm, mis en solution 20 mn à 528°C, trempé à l'eau froide, plané, tractionné
de 2 % et revenu 12h à 170°C.
[0024] Les résultats d'essais de traction dans les sens long et travers long sont reportés
ci-après :

[0025] Les structures obtenues sont recristallisées, la taille de grain étant de l'ordre
de 40µm pour la gamme A et de 80 µm pour la gamme B (voir fig. 6).
EXEMPLE 4 (selon l'invention)
[0026] Un alliage contenant (en poids) 2,5 % Li - 1,45 % Cu - 1 % Mg - 0,05 % Fe - 0,03
% Si - 0,05 % Zr - 0,20 % Mn a été coulé en semi-continu sous forme d'un plateau de
300 x 100 mm² scalpé à 270 x 70 mm² de section, réchauffé 6 h à 470°C, laminé entre
460°C et 300°C jusqu'à 3,2 mm, recuit 1 h à 450°C (refroidissement air calme), laminé
à froid jusqu'à 1,6 mm, mis en solution 20 minutes à 536°C, trempé à l'eau froide,
tractionné de 2 %, revenu 12 h à 150°C.
[0027] Les résultats d'essais de traction dans les sens long (L), travers long (TL), et
à 60° de la direction de laminage, sont reportés ci-après :

[0028] La structure obtenue est recristallisée avec une grosseur de grain voisine de 60
µm (voir fig. 7).

1. Produit à base d'Al contenant (en poids) de 1 à 3,5 % Li, jusqu'à 4 % de Cu, jusqu'à
5 % de Mg, jusqu'à 3 % de Zn et des additions de Mn, Cr et/ou Zr caractérisé en ce
qu'il contient jusqu'à 0,10 % Zr, jusqu'à 0,8 % Mn, jusqu'à 0,2 % Cr avec %Zr/0,03
+ %Mn/0,3 + %Cr/0,07 > 1, et en ce que sa structure est recristallisée avec une grosseur
moyenne de grain inférieure ou égale à 200 µm.
2. Produit selon la revendication 1, caractérisé en ce que:
pour Zr ≦ 0,08 % on a %Zr/0,4 + %Mn/0,5 < 1
pour Zr ≧ 0,08 % on a %Zr/0,09 + %Mn/3,6 <1
et pour Zr ≦ 0,09 % on a Cr < 0,15 %.
3. Méthode d'obtention d'un alliage recristallisé à base d'Al, selon l'une des revendications
1 ou 2 contenant (en poids) de 1 à 3,5 % Li, jusqu'à 4 % de Cu, jusqu'à 5 % de Mg,
jusqu'à 3 % de Zn et des additions de Mn, Cr, et/ou Zr comprenant la coulée, une densification
éventuelle, une détente éventuelle, une homogénéisation éventuelle, une transformation
à chaud et éventuellement à froid avec recuits intermédiaires si nécessaire, une mise
en solution, une trempe, un écrouissage à froid éventuel, et un revenu, caractérisée
en ce que les teneurs en Zr, Mn et Cr sont comprises dans les limites suivantes :
Zr ≦ 0,10 %
Mn ≦ 0,8 %
Cr ≦ 0,20 %
avec %Zr/0,03 + %Mn/0,3 + %Cr/0,07 > 1,
et en ce que le revenu est effectué dans un domaine de températures (T) inférieures
ou égales à la température de revenu isotherme (TM) conduisant au maximum de dureté, la durée du maintien isotherme t(T) à (T) étant
inférieure ou égale à la durée du maintien isotherme tm(T) qui conduit à la dureté
maximale à cette température (T).
4. Méthode selon la revendication 3, caractérisée en ce que :
pour Zr ≦ 0,08 % on a %Zr/0,4 + %Mn/0,5 < 1
pour Zr ≧ 0,08 % on a % Zr/0,09 + %Mn/3,6 <1
et pour Zr ≦ 0,09 on a Cr < 0,15 %.
5. Méthode selon l'une des revendications 3 ou 4 caractérisée en ce que les températures
de revenu sont inférieures ou égales à TM-15°C.
6. Méthode selon l'une des revendication 3 à 5 caractérisée en ce que la durée t(T)
de maintien lors du revenu à la température T est inférieure ou égale à tm(T)/2.