[0001] La présente invention concerne une semelle antirecul polyvalente pour ski de fond
et plus spécialement la ou les zones de la semelle auxquelles est rattachée la fonction
antirecul.
[0002] On connaît les nombreux problèmes posés par la réalisation des semelles antirecul
pour ski de fond qui doivent présenter de bonnes propriétés de glissement et ne pas
coller à la neige quelles que soient les caractéristiques de cette dernière.
[0003] On a tout d'abord proposé de résoudre ces problèmes par l'emploi de farts spécifiques
à chaque qualité de neige et nécessitant un renouvellement fréquent du fait de leur
usure rapide.
[0004] On a ensuite muni les semelles de reliefs appropriés (peluches, écailles...), ce
qui ne conduit qu'à des performances moyennes ; ces semelles sont, en outre, bruyantes.
[0005] Certaines semelles antirecul nécessitent enfin, sur certaines neiges, l'application
locale de produits anti-adhésifs (qu'il est nécessaire de renouveler) et qui sont
destinés à empêcher le collage de la neige.
[0006] La Demanderesse a cherché à mettre au point une semelle antirecul pour ski de fond
qui satisfasse à toutes les exigences mentionnées ci-avant sans qu'il soit nécessaire
de lui appliquer sporadiquement des produits spécifiques, et qui puisse présenter
une polyvalence sur toute qualité de neige.
[0007] On sait que le geste classique du pas alternatif se décompose essentiellement en
trois phases correspondant à des sollicitations différentes de la semelle : en phase
d'impulsion, le skieur prend appui sur la neige pour se propulser, en phase intermédiaire
ou d'allègement, la pression sur la neige diminue fortement ; enfin, la dernière
phase correspond au glissement du ski.
[0008] La Demanderesse a tout d'abord étudié le mécanisme de glissement et de retenue des
semelles pour ski de fond, essentiellement conditionné par la nature polyphasique
de la neige et a découvert que trois facteurs concernant la semelle participaient
à ce mécanisme : hydrophobie, comportement rhéologique et topographie de surface.
[0009] L'hydrophobie apparaît comme particulièrement importante dans les phases d'allègement
et de glisse ; dans la phase allègement, elle évite l'adhésion de la neige qui risque
de provoquer le phénomène dit de "bottage" ou de glaçage ; par ailleurs, l'hydrophobie
favorise le glissement, quels que soient la nature de la neige et le mécanisme mis
en jeu.
[0010] Le mécanisme du comportement rhéologique est essentiellement le suivant :
1) Pendant le glissement, la sollicitation de chaque grain de neige est suffisamment courte pour que le matériau ait un comportement essentiellement élastique. Le matériau est peu déformé et reste lisse et glissant ;
2) Pendant la prise d'appui propulsif, la sollicitation de chaque grain de neige est suffisamment longue pour que le matériau ait un comportement essentiellement visqueux. Les grains de neige en pénétrant dans le matériau permettent au skieur de prendre
appui sur la neige ;
3) Lorsque cette sollicitation cesse, le matériau, grâce à sa mémoire élastique, reprend
sa forme initiale. Le ski est donc prêt pour le pas suivant.
[0011] La Demanderesse, au cours des études qu'elle a effectuées sur le mécanisme de glissement
et de retenue des semelles pour ski de fond, a confirmé qu'il existait un comportement
tribologique différent suivant que la semelle était en phase d'impulsion ou en phase
de glisse.
[0012] En effet, en phase d'impulsion impliquant le phénomène de retenue, la surface de
la semelle est essentiellement sollicitée en compression, alors que, dans la phase
de glisse, elle est soumise à une action de cisaillement.
[0013] Par ailleurs, la phase d'impulsion est nettement plus courte que la phase de glisse
0,1 à 0,2 seconde d'une part et 0,5 à 1,5 seconde d'autre part.
[0014] Compte-tenu des exigences de polyvalence, de l'épaisseur de la semelle et de la granulométrie
des différents types de neige, les "vitesses de déformation" durant la brève période
d'impulsion varient entre 0,1 et 10 sec⁻¹ alors que, durant la phase de glisse, lorsque
la vitesse tangentielle est de l'ordre de 1 à 10 m.sec⁻¹, la semelle se trouve en
cisaillement et les "vitesses de déformation" se situent entre 1 et 100 sec⁻¹.
[0015] On a donc estimé qu'il était nécessaire, pour augmenter l'efficacité du mécanisme
d'ancrage par pénétration durant la phase d'impulsion, de diminuer l'élasticité en
compression, l'élasticité en cisaillement restant élevée en phase de glisse.
[0016] La Demanderesse a donc déterminé les caractéristiques à exiger d'un matériau adapté
à la réalisation de semelles correspondant aux spécifications précédentes.
[0017] Selon l'invention, ce matériau présente une hydrophobie élevée, une bonne résistance
à l'abrasion et des propriétés de visco-élasticité très sensibles à la vitesse de
déformation et à la direction de la sollicitation et telles qu'il se produise, durant
la phase d'impulsion, un comportement permettant une certaine pénétration des cristaux
de neige alors que, durant la phase de glisse, ledit matériau présente une élasticité
élevée permettant le dégagement rapide des cristaux de neige quelles que soient la
température ou la nature de ces cristaux, la topographie de la surface de la semelle
étant, par ailleurs, caractérisée par la distribution des hauteurs de profil de sorte
qu'elle soit compatible avec la granulométrie des différents types de neige.
[0018] Les inventeurs ont découvert que, dans la nombreuse famille des élastomères, certains
polyuréthanes constituaient de parfaits exemples du matériau selon l'invention.
[0019] Il s'agit des polyuréthanes obtenus par polycondensation de polyols présentant une
chaîne hydrocarbonée possèdant 8 à 20 atomes de carbone entre groupements fonctionnels
hydrophiles et de di-isocyanates. Les di-isocyanates ont choisis de préférence parmi
le méthanediphényl-di -isocyanate (MDI), le toluéne-di-isocyanate (IDI) et l'hexaméthylène-di-isocyanate
(HDI) employés seuls ou en mélange.
[0020] Selon un mode de réalisation préféré de l'invention, la quantité de di-isocyanate
utilisée dans la réaction de polycondensation est nettement supérieure à la quantité
stoéchiométrique.
[0021] La quantité de di-isocyanate est, de préférence, de 10 à 30 % supérieure à la quantité
stoéchiométrique.
[0022] Le polyol est avantageusement l'huile de ricin :

[0023] Les compositions de matériau selon l'invention se prêtent bien à l'incorporation
de charges classiques telles que les charges minérales et les polymères fibreux.
[0024] Selon un autre mode de réalisation, le matériau selon l'invention présente une structure
poreuse fermée.
[0025] L'incorporation de ces charges et/ou de ces pores confère aux matériaux selon l'invention
une anisotropie visco-élastique contribuant avantageusement à l'obtention des propriétés
tribologiques et de l'effet de surface recherché.
[0026] Le matériau selon l'invention peut être utilisé selon tout agencement géométrique
convenable de la semelle. Il peut être utilisé seul ou combiné à un ou plusieurs matériaux
du même type.
[0027] La présente invention sera mieux comprise à l'aide de l'exemple qui suit d'un mode
de réalisation du matériau destiné à la réalisation de semelles antirecul polyvalentes
pour ski de fond, étant bien entendu que cet exemple illustre l'invention sans aucunement
la limiter.
[0028] On part de la formulation suivante :
- huile de ricin : 100 parties en poids,
- mélange 50/50 TDI-MDI, 50 parties en poids.
à laquelle on ajoute :
- fibres de nylon (6-7 dtex, longueur 0,5-1 mm) 12 parties en poids,
- charge minérale (CaCO₃, 50 µm) 15 parties en poids.
[0029] On effectue la réticulation à 90°C pendant 48 heures, et on utilise le matériau ainsi
obtenu, de façon classique, comme partie de la semelle destinée à assurer la fonction
antirecul. Le remplacement du carbonate de calcium par de l'aluminosilicate de sodium
ou du talc conduit à l'obtention d'une structure poreuse fermée.
[0030] Les semelles ainsi obtenues présentent un caractère fortement hydrophobe qui lui
est conféré par les chaînes grasses de l'huile de ricin. Ce caractère hydrophobe assure
à la fois, comme on a pu le vérifier, une bonne glisse du matériau et un non collage
de la neige rendant inutile l'application de produits anti-adhésifs comme les huiles
de silicone.
[0031] Dans la zone des températures d'utilisation et pour des vitesses de déformation élevées
(glissement), le module d'élasticité varie de 10⁸ à 10⁹ Newtons/m² ; pour des vitesses
de déformation faibles (retenue), ce module se situe entre 5.10⁶ et 10⁸ Newtons/m².
[0032] Il répond, de ce fait, aux critères de visco-élasticité définis ci-avant : déformation
visqueuse durant la phase d'impulsion ou de déformation statique et élasticité élevée
durant la phase de déformation dynamique (phase de glisse).
1- Semelle antirecul pour ski de fond, caractérisée en ce qu'elle est essentiellement
constituée, dans la ou les zones auxquelles est rattachée la fonction antirecul,
d'un matériau qui présente une hydrophobie élevée, une bonne résistance à l'abrasion
et des propriétés de visco-élasticité très sensibles à la vitesse de déformation
et à la direction de la sollicitation et telles qu'il se produise, durant la phase
d'impulsion, un comportement permettant une certaine pénétration des cristaux de neige
alors que, durant la phase de glisse, ledit matériau présente une élasticité élevée
permettant le dégagement rapide des cristaux de neige quelles que soient la température
ou la nature de ces cristaux, la topographie de la surface de la semelle étant, par
ailleurs, caractérisée par la distribution des hauteurs de profil de sorte qu'elle
soit compatible avec la granulométrie des différents types de neige.
2- Semelle selon la revendication 1, caractérisée en ce que le matériau est choisi
parmi les polyuréthanes obtenus par polycondensation de polyols présentant une chaîne
hydrocarbonée possèdant de 8 à 20 atomes de carbone entre groupements fonctionnels
hydrophiles et de di-isocyanates.
3- Semelle selon la revendication 2, caractérisée en ce que les di-isocyanates sont
choisis parmi le méthane-diphényl-di-isocyanate (MDI), le toluène-di-isocyanate (TDI)
et l'hexaméthyl-di-isocyanate (HDI) employés seuls ou en mélange.
4- Semelle selon la revendication 2 et la revendication 3, caractérisée en ce que
la quantité de di-isocyanate utilisée dans la réaction de polycondensation est supérieure
à la quantité stoéchiométrique.
5- Semelle selon la revendication 4, caractérisée en ce que la quantité de di-isocyanate
est de 10 à 30 % supérieure à la quantité stoéchiométrique.
6- Semelle selon l'une quelconque des revendications 2 à 5, caractérisée en ce que
le polyol est l'huile de ricin.
7- Semelle selon l'une quelconques des revendications 2 à 6, caractérisée en ce que
des charges choisies parmi les charges minérales et les polymères fibreux sont incorporées
au matériau.
8- Semelle selon l'une quelconque des revendications 2 à 7, caractérisée en ce que
le matériau présente une structure poreuse fermée.
9- Semelle selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisée en
ce que le matériau est utilisé seul ou combiné, selon tout agencement géométrique
convenable, avec un ou plusieurs matériaux du même type.