[0001] La présente invention concerne un procédé de fabrication de métaux en poudre par
métallothermie. Elle concerne plus particulièrement un procédé de fabrication par
lithiothermie de métaux des groupes IV B ou V B de la Table périodique des éléments
ou de métaux de la classe des Lanthanides.
[0002] Ce procédé peut être notamment appliqué avantageusement à la fabrication d'un titane
de haute pureté sous forme de poudre.
[0003] On connaît depuis longtemps des procédés de fabrication du titane, du zirconium ou
des terres rares par réduction de leur chlorure par un réducteur puissant tel que
le magnésium, le sodium ou le calcium.
[0004] Dans le cadre du procédé KROLL par exemple, on procéde à une réduction chimique du
tétrachlorure de titane par le magnésium vers 1000 °C selon la réaction :
TiCl₄ (g) + 2 Mg (1) → Ti (s) + 2 Mg Cl₂ (1)
[0005] Cette opération a lieu en discontinu dans un réacteur en acier et sous atmosphère
inerte (hélium ou argon). Le titane métallique est alors libéré sous forme d'éponge
noyée dans MgCl₂ fondu. Cette éponge contient environ 30% de son poids en impuretés,
notamment en magnésium et chlorure de magnésium entrainées lors de la précipitation
de l'éponge. Pour obtenir un métal très pur, on est alors obligé de procéder à une
distillation sous vide très poussée du magnésium et de son chlorure, opération longue,
délicate et coûteuse en énergie. L'éponge purifiée est ensuite séchée puis broyée
pour obtenir une poudre de titane.
[0006] On connaît également un procédé similaire au précédent mais dans lequel on utilise
le sodium à la place du magnésium dans l'étape de réduction chimique de TiCl₄ (Procédé
HUNTER). Dans ce cas, l'éponge de titane se forme au centre du réacteur et la masse
réactionnelle solidifiée est brisée par explosifs, concassée, purifiée puis séchée
sous courant d'azote chaud.
[0007] On a aussi proposé dans le brevet U.S. 2 913 332 d'utiliser le lithium comme agent
réducteur dans le cadre de la fabrication du titane.
[0008] Dans ce procédé, du tétrachlorure de titane liquide est versé sur une nappe de lithium
fondu surnageant sur un bain de sels fondus. L'avantage d'un tel procédé par rapport
à ceux précédemment décrits réside dans le fait que l'on peut travailler dans des
domaines de températures beaucoup mins élevées, de l'ordre de 500°C, ce qui permet
d'une part de minimiser la pollution du métal par les matériaux de réacteur, et d'autre
part d'utiliser une technologie plus simple et donc moins onéreuse.
[0009] Mais le problème est que, dans ce cas encore, le titane obtenu se présente sous forme
d'éponge renfermant des impuretés, telles que le lithium et son chlorure, entraînées
lors de la précipitation des éponges dans le bain de sels fondus.
[0010] Dans tous le cas, on remarque donc que ces procédés présentent de désavantage certain
de produire des éponges métalliques difficiles à purifier. Outre ces opérations coûteuses
et délicates de purification, notamment par distillation sous vide, ces procédés exigent
une étape supplémentaire de broyage pour obtenir les métaux désirés sous forme de
poudre.
[0011] C'est donc l'objet de la présente invention de proposer un procédé de fabrication
directe de métaux essentiellement sous forme de poudre permettant d'une part d'éviter
une étape ultérieure de broyage et d'autre part d'effectuer une purification du métal
obtenu de manière beaucoup plus aisée et économique.
[0012] Un autre objet de l'invention est de proposer un procédé de fabrication continu de
ces métaux, dans lequel les rendements sont améliorés et des économies sont réalisées
notamment grâce à la facilité de purification du produit.
[0013] Dans ce but, la Demanderesse a mis au point un procédé de fabrication d'un métal
appartenent aux groupes IV B ou V B de la Table périodique des éléments ou à la classe
des Lanthanides par réduction d'un sel de ce métal par du lithium qui est caractérisé
en ce que l'on met en contact le sel précité avec un mélange liquide comprenant du
lithium maintenu en dispersion dans un bain de sels fondus.
[0014] De façon surprenante, ce procédé permet d'obtenir avec un bon rendement un métal
directement et essentiellement sous forme de poudre, cette poudre se révélant facile
à purifier.
[0015] La présente invention et les avantages qu'elle procure seront mieux compris à la
lecture de la description qui va suivre et d'exemples concrets, mais non limitatifs,
de mise en oeuvre du procédé.
[0016] Dans la suite de l'exposé, les expressions "métal à obtenir" ou "metal à réduire"
devront s'entendre comme se rapportant à un métal quelconque choisi dans le groupe
IVB on VB de la Table périodique ou dans le groupe des Lanthanides.
[0017] Le procédé de l'invention s'applique particulièrement bien au cas du titane.
[0018] Le métal à obtenir se présente donc au départ sous la forme d'un de ses sels.
[0019] Dans la pratique, on travaillera à partir d'un halogénure, bien que tout autre sel
envisageable pour l'homme de l'art puisse convenir dans le présent procédé. Dans le
cas particulier du titane, on pourra notamment travailler directement avec du tétrachlorure
ou du tétrabromure de titane, obtenus respectivement par carbochloruration et carbobromuration
vers 1000°C du rutile TiO₂. On préférera toutefois opérer avec le tétrachlorure de
titane TiCl₄.
[0020] De même, pour le néodyme, on pourra avantageusement travailler avec du trichlorure
de néodyme.
[0021] D'une manière plus générale, pour tous les métaux concernés, un mode préféré de réalisation
de l'invention consistera à opérer avec les chlorures de ces métaux.
[0022] Les bains de sels fondus utilisés dans la présente invention consistent de préférence
en des mélanges d'halogénures choisis parmi le groupe des halogènures de métaux alcalins
ou de métaux alcalino-terreux. Il pourra s'agir de mélanges binaires ou de mélanges
ternaires. Comme mélanges binaires utilisables, on peut citer LiCl et KCl, LiCl et
CsCl, LiCl et RbCl, LiBr et KBr, LiBr et CsBr, LiBr et NaBr, LiBr et SrBr₂, LiI et
CsI.
[0023] Comme mélanges ternaires utilisables, on peut citer les mélanges contenant, en plus
du chlorure de lithium ou du chlorure de potassium, un chlorure choisi parmi les chlorures
de sodium, de rubidium, de strontium, de magnésium, de calcium et de baryum. On peut
enfin citer les ternaires LiCl-NaCl-CsCl, LiCl-NaCl-RbCl et LiCl-KCl-KF.
[0024] Selon un mode préféré de réalisation de l'invention, on travaillera avec la composition
eutectique du mélange, ceci afin de diminuer au maximum la température de fusion du
bain. Encore plus préférentiellement, on prendra le mélange eutectique LiCl - KCl.
[0025] De préférence on choisira des bains et des conditions opératoires tels que la température
du bain de sels sera comprise entre 400 et 550°C, de préférence voisine de 500°C.
[0026] Le lithium fondu nécessaire à la réduction du sel métallique pourra notamment être
avantageusement fabriqué selon le procédé tel que décrit dans la demande française
FR 2560 221. Ce procédé présente en effet l'avantage d'opérer en continu l'électrolyse
du chlorure de lithium dans un mélange de sels fondus, par exemple le binaire KCl-LiCl,
ce par quoi on obtient de manière continue une nappe liquide de lithium fondu surnageant
sur ledit bain de sels.
[0027] Conformément à la présente invention, il est nécessaire d'utiliser un mélange dans
lequel le lithium sera maintenu en dispersion dans le bain de sels fondus du réacteur.
[0028] Dans ce but, tout moyen mécanique procurant une agitation suffisamment importante
peut convenir, notamment un agitateur à pâles par exemple à pâles droites et inclinées
et un système de contrepâles fixées sur la cuve du réacteur.
[0029] Avantageusement, les contrepâles auront une largeur égale environ au dixième du diamètre
de la cuve du réacteur. La vitesse d'agitation variera évidemment selon la taille
de ladite cuve. A titre d'exemple on peut mentionner des vitesses de rotation périphérique
de l'agitateur à pâles supérieures à 1,3 m/s et plus particulièrement supérieures
à 1,9 m/s.
[0030] Généralement en cas d'agitation insuffisante on obtient un mélange de poudre et d'éponge,
la proportion d'éponge étant d'autant plus importante que la vitesse d'agitation est
faible.
[0031] Le mélange intime du lithium avec le bain de sels fondus étant ainsi obtenu et maintenu,
le sel du métal à réduire est alors mis en contact avec ledit mélange intime.
[0032] Le sel métallique pourra être introduit sous forme solide, liquide ou gazeuse.
[0033] Toutefois, dans le cas du titane on préférera opérer avec le sel sous forme de liquide.
[0034] Quant à la mise en contact, elle pourra se faire à la surface où à l'intérieur même
du mélange intime lithium-sels fondus.
[0035] Elle se fera également de préférence sous atmosphère inerte, par exemple sous balayage
d'argon.
[0036] La quantité de lithium présente dans le mélange doit correspondre au moins à l'égalité
stoechiométrique par rapport au sel métallique à réduire. La réaction qui est alors
mise en jeu peut s'écrire de manière générale :
MCl
n + n Li → M + n LiCl
[0037] Le métal ainsi obtenu se présente essentiellement sous forme de poudre. Le rendement
de la réduction lithiothermique est aussi amélioré, puisque généralement au moins
70 % du métal à réduire introduit sous forme de sel se retrouve après la réaction
à l'état métallique.
[0038] Le métal ainsi fabriqué étant solide dans cette zone de températures, il peut être
séparé facilement du milieu réactionnel, enrichi en chlorure de lithium dissous provenant
de la réaction, qui reste à l'état fondu. Ainsi, après réaction, le métal réduit peut
être séparé du bain par tout moyen connu, notamment par filtration, ce par quoi l'on
obtient d'une part le métal désiré extrait sous forme de fines particules et d'autre
part le mélange de sels fondus, LiCl-KCl par exemple.
[0039] Pour le métal et dans le cas du titane au moins 70 % des particules ont une taille
comprise entre 100 µm et 1 mm.
[0040] Dans le cas où l'on utilise le procédé décrit dans la demande FR 2560221, le mélange
LiCl-KCl peut alors être recyclé en tête à l'électrolyse qui régénère le lithium à
l'état métallique. Le lithium ainsi régénéré est réutilisé à la réduction du sel du
métal que l'on désire obtenir. Le bouclage de cette opération permet bien évidemment
de réduire les coûts dûs au réducteur ; en effet, aux pertes près, la quantité de
lithium contenu sous forme Li ou LiCl est constante, ce qui diminue en partie les
problèmes d'approvisionnement en sels de lithium.
[0041] Les particules métalliques recueillies peuvent ensuite subir une opération de purification.
Mais contrairement aux autres procédés classiques de fabrication de ces métaux décrits
plus haut, qui nécessitent une purification par distillation longue et coûteuse, une
simple purification par lavage acide suffit ici. L'avantage en est un processus peu
consommateur d'énergie.
[0042] Ce lavage acide pourra se faire avec de l'acide nitrique ou de l'acide chlorhydrique.
Préférentiellement on travaillera avec une eau acidulée à pH d'au moins 1,5.
[0043] Le métal ainsi purifié par lavage est ensuite séché, ce par quoi l'on obtient, en
économisant donc une étape de broyage supplémentaire, une poudre métallique de haute
pureté constituant la production. Cette poudre présente généralement une teneur en
métal d'au moins 80 % et dans le cas du titane généralement d'au moins 99 %.
[0044] Un exemple concret, mais non limitatif, de mise en oeuvre de l'invention va maintenant
être donné.
Exemple
[0045] On utilise un creuset inox 316 L de diamètre intérieur de 70 mm. On utilise comme
système d'agitation une turbine de diamètre 24 mm à 6 pâles droites. Le creuset est
muni de 4 contre-pâles de 5 mm.
[0046] Le bain est un mélange LiCl-KCl.
[0047] On fait 4 essais. Les essais 1 et 2 concernent la préparation du niobium et du néodyme.
Les essais 3 et 4 sont relatifs à la préparation du titane. Ils sont conduits avec
des vitesses d'agitation différentes.
[0048] Après séparation du bain les poudres obtenues sont lavées à l'eau acidulée par HCl
1N à pH 1,5. Les résultats sont rassemblés dans le tableau ci-après.

[0049] Pour l'essai n
o 3 on obtient le titane à 100 % sous la forme de poudre. Pour l'essai n
o 4 le titane se présente sous la forme de poudre et d'éponge dans les proportions
respectives en poids de 64 % et 36 %.
[0050] Le poudre de titane présente la granulométrie suivante : 83 % des particules ont
une taille comprise entre 100 µm et 1 mm, 14 % sont de taille inférieure à 100 µm
et 3 % de taille supérieure à 1 mm.
1 - Procédé de fabrication d'un métal des groupes IV B ou V B de la Table périodique
des éléments ou d'un métal de la classe des Lanthanides par réduction d'un sel de
ce métal par du lithium, caractérisé en ce que l'on met en contact le sel précité
avec un mélange liquide comprenant du lithium maintenu en dispersion dans un bain
de sels fondus.
2 - Procédé selon la revendication 1 caractérisé en ce que l'on maintient la dispersion
du lithium dans le bain de sels fondus par agitation mécanique, notamment à l'aide
d'un agitateur à pâles et d'un système de contre-pâles.
3 - Procédé selon l'une quelconque des revendications précédentes caractérisé en ce
que, après la mise en contact des espèces précitées, on sépare du bain le métal réduit,
on procède à un lavage acide dudit métal séparé puis à son séchage, ce par quoi l'on
obtient une poudre métallique de haute pureté constituant la production.
4 - Procédé selon l'une quelconque des revendications précédentes caractérisé en ce
que l'on procéde à une régénération électrochimique du lithium oxydé.
5 - Procédé selon la revendication 4 caractérisé en ce que l'on utilise le lithium
régénéré à la réduction du sel du métal précité.
6 - Procédé selon l'une quelconque des revendications précédentes caractérisé en ce
que l'on introduit le sel du métal à réduire sous forme liquide dans le bain de sels
fondus.
7 - Procédé selon l'une quelconques des revendications 1 à 5 caractérisé en ce qu'on
introduit le sel du métal à réduire sous forme gazeuse dans le bain de sels fondus.
8 - Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 5 caractérisé en ce que
l'on introduit le sel du métal à réduire sous forme solide dans le bain de sels fondus.
9 - Procédé selon l'une quelconque des revendications précédentes caractérisé en ce
que l'on introduit le lithium en quantité stoechiométrique par rapport au sel du métal
à réduire.
10 - Procédé selon l'une quelconque des revendications précédentes caractérisé en
ce que le sel du métal à réduire est un halogènure.
11 Procédé selon la revendication 10 caractérisé en ce que le sel du métal à réduire
est un chlorure.
12 - Procédé selon la revendication 11 caractérisé en ce que le sel du métal à réduire
est du tétrachlorure de titane.
13 - Procédé selon la revendication 11 caractérisé en ce que le sel du métal à réduire
est du trichlorure de néodyme.
14 - Procédé selon la revendication 11 caractérisé en ce que le sel du métal à réduire
est du chlorure de niobium.
15 - Procédé selon l'une quelconque des revendications précédentes caractérisé en
ce que le bain de sels fondus comprend un mélange d'halogénures choisis parmi le groupe
des halogénures de métaux alcalins ou de métaux alcalino-terreux.
16 - Procédé selon la revendication 15 caractérisé en ce que le bain de sels fondus
correspond à un mélange eutectique.
17 - Procédé selon la revendication 15 ou 16 caractérisé en ce que le bain de sels
fondus est un mélange eutectique de chlorure de lithium et de chlorure de potassium.
18 - Procédé selon l'une quelconque des revendications précédentes caractérisé en
ce que la température du bain de sels fondus est comprise entre 400 et 550°C.
19 - Procédé selon la revendication 18 caractérisé en ce que la température est de
500°C.
20 - Poudre métallique obtenue par la mise en oeuvre du procédé défini selon l'une
quelconque des revendications précédentes.