[0001] La présente invention a pour objet un câble constitué d'un toron de fils de polyamide
aromatique multifilaments du genre "Kevlar" (Marque déposée par DU PONT DE
NEMOURS) ou analogue destiné à constituer un câble de manutention pour grue, pont transporteur
ou engin analogue, dans lesquels il existe de nombreux cheminements de câbles.
[0002] On sait que les câbles de manutention doivent résister en traction et en flexion.
Pour fabriquer un câble très résistant en traction, on utilise des câbles à fils parallèles
longitudinaux. Mais cette structure est incompatible avec les efforts de flexion imposés
aux câbles de manutention.
[0003] Les câbles de manutention sont soumis à un nombre de flexions très important résultant
notamment du fait que ces câbles sont amenés à s'enrouler sur des poulies dont les
diamètres peuvent être relativement petits.
[0004] Les câbles de manutention actuellement en service sont généralement réalisés à partir
de plusieurs torons métalliques. Chaque toron comprenant un nombre déterminé de fils
métalliques est câblé sur des machines appropriées de manière à constituer des couches
superposées. Certains de ces câbles métalliques peuvent avoir une âme centrale textile.
Les câbles métalliques sont généralement multitorons et comprennent par exemple de
trois à trente-quatre torons.
[0005] Le problème propre aux câbles de manutention provient de ce qu'ils doivent présenter
d'une part une bonne résistance en traction pour permettre la manipulation de charges
pouvant être lourdes, et d'autre part, une bonne résistance en flexion. Un renvoi
d'angle créé par une poulie se traduit par un glissement des couches extérieures par
rapport aux couches intérieures, ces glissements provenant de la différence des rayons
de courbure lors d'une flexion. En glissant les unes sur les autres, les couches et
les torons constituant le câble provoquent un échauffement et une abrasion qui vont
dans le sens de la réduction de la durée de vie du câble. Par ailleurs, les allongements
différentiels sont la cause d'une fatigue prématurée du métal cristallin. La solution
traditionnelle pour résoudre ce problème consiste à introduire à l'intérieur du câble
un lubrifiant habituellement liquide mais qui peut être un bitume lourd, mais cette
introduction conduit à des problèmes d'étanchéité afin d'éviter la migration des lubrifiants.
[0006] Dans ces conditions, les câbles d'acier actuellement en utilisation résistent d'une
manière convenable aux efforts de traction et aux efforts de flexion qu'ils subissent.
On connaît sensiblement la durée de vie d'un câble en heures d'utilisation, et l'on
change celui-ci avant toute menace de rupture qui pourrait avoir des conséquences
très dommageables. Mais les câbles d'acier sont lourds et relativement rigides, leur
poids diminuant la charge utile de l'engin.
[0007] On a déjà pensé à utiliser en tant que câbles de manutention, des câbles entièrement
textiles. Cette solution paraissait d'autant plus évidente que certaines fibres textiles,
par exemple en polyamide aromatique, ensimés usine, possèdent des caractéristiques
mécaniques en traction proches, sinon supérieures, à celles de l'acier, tout en présentant
un poids quatre à cinq fois inférieur pour une même résistance traction. Cependant,
ces câbles en polyamide aromatique, en construction acier, s'avèrent particulièrement
fragiles et ne peuvent répondre aux critères exigés, à cause de la friction interne
qui les affaiblit rapidement. On sait que les polyamides aromatiques présentent un
mauvais coefficient de frottement, ce qui se traduit par une usure rapide par auto-abrasion
des torons en l'absence de précautions particulières. Ce frottement générateur de
température provoque la rupture des multifilaments parallèles ou tressés, sommairement
liés et explique l'usure du Kevlar malgré la présence d'une gaine de protection. Afin
d'éviter le frottement des torons et des fils les uns contre les autres, on a également
lubrifié additionnellement des câbles en Keviar ou en Twaron en incorporant à l'intérieur
de ceux-ci un lubrifiant approprié. Les résultats obtenus se sont révélés décevants,
le nombre de flexions admissible par ces câbles étant au mieux cinq fois inférieur
au nombre de flexions admissible par un câble d'acier de même diamètre.
[0008] Dans les câbles textiles, comme dans les cas des câbles métalliques, une construction
en spires superposées implique en flexion alternée des allongements interne et externe
différents et un frottement longitudinal des spires superposées.
[0009] Le brevet US-A-4 095 404 (BABAYAN) a déjà proposé d'utiliser pour des câbles électriques
des fils de renforcement destinés à soutenir des fils métalliques transportant des
courants forts de puissance ou des courants faibles de télécommunication. Dans ce
brevet, l'armature de renforcement est constituée par des fils aramides enrobés par
une résine polyuréthane. Ainsi, les fils ne viennent pas frotter l'un sur l'autre,
ce qui évite leur destruction par auto-abrasion. A cet effet, les fils aramides sont
protégés par une laque de polyuréthane dans une proportion de 15 à 40% en poids, séchés
puis retordus et ensuite chauffés à la température de fusion de la résine polyuréthane.
On obtient ainsi un câble mixte, métal-aramide qui présente une résistance en flexion
supérieure à celle de l'acier haute résistance. Mais, ce câble ne peut constituer
un bon câble de manutention amené à subir un grand nombre de flexions, parce que l'imprégnation
est superficielle et présente une résistance au frottement nettement inférieure à
celle d'un matériau composite homogène.
[0010] La présente invention a pour objet un câble à hautes performances, notamment vis-à-vis
de la fatigue en flexion. Selon la présente invention, le câble en polyamide aromatique
est caractérisé en ce qu'il est câblé selon le procédé de câblage des câbles métalliques,
les fibres ou filaments d'aramide étant imprégnés à coeur par un liant présentant
une excellente résistance à l'abrasion, un bon coefficient de frottement sur lui-même
et un allongement supérieur à celui de l'aramide. Chaque élément constituant le câble
selon la présente invention est un fil composite, homogène, solide, le polyamide aromatique
et le liant étant intimement amalgamés, tel que défini précédemment, de section bien
déterminée suivant la construction retenue.
[0011] Ainsi, on diminue l'effet de frottement des filaments les uns sur les autres d'une
part, et des fils les uns sur les autres d'autre part.
[0012] Les produits d'imprégnation ont pour but de constituer en quelque sorte des lubrifiants
solides qui ont l'avantage, après une flexion, de retrouver par élasticité leur état
d'origine.
[0013] Selon une autre caractéristique de l'invention, le coefficient d'allongement à la
rupture des liants d'imprégnation est supérieur à celui de l'aramide. Le câblage confère
à l'aramide un effet de spire permettant d'obtenir les flexions désirées par déformation
des spires, bien que l'allongement à la rupture de l'aramide soit compris entre 2
et 4%.
[0014] Selon une autre caractéristique de l'invention, la résistance à l'abrasion du liant
est exceptionnelle et les fils aramide imprégnés à coeur de ce liant possèdent un
bon coefficient de glissement. Une âme centrale élastique radialement constitue un
guide pour les enroulements ultérieurs sans intervenir en traction. Par sa capacité
de compression élastique, l'âme centrale permet de limiter les contraintes subies
par les fils externes puisque les fils internes peuvent partiellement s'insérer dans
l'âme élastique. De préférence, l'âme centrale est constituée par un crin de polyuréthane
de dureté Shore voisin de 95 A.
[0015] D'autres caractéristiques et avantages de la présente invention apparaîtront au cours
de la description qui va suivre d'un mode particulier de réalisation, donné uniquement
à titre d'exemple non limitatif, en regard des figures qui représentent :
- la figure 1, une vue en perspective d'un câble textile selon l'invention câblé selon
la technique métallique,
- les figures 2 et 3, des vues en coupe verticale et en perspective d'un câble selon
l'invention câblé selon la technique métallique ;
- la figure 4, une vue en coupe d'un fil imprégné à coeur à échelle agrandie.
[0016] Sur la figure 1, le câble représenté est un câble textile du type câblé métallique.
Il comporte une âme centrale 1, une première couche de fils aramide 2 multifilaments,
chaque filament étant enrobé, une deuxième couche 3 de fils aramide concentriques
à la seconde couche, une troisième couche 4 de fils aramide concentrique aux précédentes,
l'ensemble étant conformé dans une gaine ou couverture extérieure 5. Un câble de 12mm
de diamètre est constitué par une âme unifilaire 1 par une couche 2 de 6 fils aramides
imprégnés d'une couche 3 de 12 fils aramides et d'une couche 4 de 18 fils aramides.
Chaque fil est constitué de 1000 multifilaments moulinés par multiples suivant besoins,
les fils étant câblés à pas égaux ou angle égal. De préférence, un film de polyuréthane
6 est incorporé entre la couche externe 4 et la couverture 5. Outre qu'il assure l'étanchéité
de l'intérieur du câble, ce film permet d'éviter le glissement de la couverture par
rapport au reste du câble et par suite des boursoufflures ou analogues. La couverture
5 est, par exemple réalisée par tressage de polyester.
[0017] Conformément à l'invention, les fils d'aramide 2, 3 et 4 sont fabriqués à partir
de multifilaments d'aramide imprégnés à coeur par le procédé décrit dans le brevet
n° 80 20663 (FR-A-2 491 098). La figure 4 montre en coupe à échelle agrandie un fil
constitué de multifilaments 7 enrobés et imprégnés par un liant 8.
[0018] Dans ce premier mode de réalisation, les filaments d'aramide sont imprégnés par une
solution de polyuréthane dans une proportion de 40 à 60% en poids. Chacun des multifilaments
étant enduit de polyuréthane, il est susceptible de subir un pliage et de revenir
à sa position initiale sous l'action élastique du retour résultant du polyuréthane.
Lorsque les fibres multifilaments sont groupées pour constituer un fil, le polyuréthane
appliqué en solution liquide se répand d'une part entre les multifilaments, et d'autre
part à l'extérieur du fil auquel il est possible de donner une section régulière par
l'intermédiaire d'une filière.
[0019] Dans le câble représenté sur la figure 1, l'âme centrale joue un rôle essentiel.
En effet, dans la technique antérieure, cette âme n'était destinée qu'à constituer
un guide pour le toronnage des fils extérieurs. Tel n'est pas le cas dans la présente
application où l'âme textile centrale réalisée par exemple également en polyuréthane
a pour objet de compenser certaines variations du diamètre intérieur de la couche
2 en se déformant radialement par exemple au moment de la flexion, et en reprenant
sa géométrie habituelle dès relâchement de l'effort dû à ladite flexion.
[0020] Le tableau suivant reprend des résultats obtenus sur une machine travaillant en flexions
alternées. Les essais ont été réalisés avec des câbles d'aramide lubrifiés, respectivement
en Twaron de type D 1000 ( taux d'ensimage 3%), en Twaron de type D 1020 (taux d'ensimage
9%), en Kevlar de type T 960 (taux d'ensimage 9%), et en Kevlar de type T 961 (taux
d'ensimage 3%). Comme précédemment, le diamètre de ces câbles est de 12mm, l'âme ,
câblée suivant la technique acier, étant constituée de fils 15.000 deniers : 18 fils
pour la couche extérieure, 12 fils pour la couche médiane, 6 fils pour la couche inférieure,
câblés au même pas, l'âme centrale étant un câblé textile en polyamide multifilaments
fixé de composition 1680 deniers 4x3, un tressage polyester sur film polyuréthane
achevant la structure du câble. La résistance nominale de rupture est de 8000 Dan,
l'effort sur un brin étant de 1600 Dan.
[0021] Dans le tableau, tous les câbles textiles présentent la même structure, les nombres
indiqués représentent le nombre de flexions alternées complètes réalisées avant rupture.
Comme il ressort clairement de celui-ci, les câbles en aramide se rompent après un
nombre de flexions alternées maximum qui est de l'ordre de 40 000. Par contre, pour
un câble métallique de même dimension, le nombre de flexions alternées est de l'ordre
de 45 000 à 150 000 selon la construction et dans un câble fabriqué selon la présente
invention, le nombre de flexions alternées pouvant être supportées est supérieur à
300 000 et peut atteindre 1.500.000. Les essais ont été effectués sur une machine
permettant, les câbles étant sous tension, de leur faire subir des flexions alternées.
[0022] Dans le second mode de réalisation représenté sur les figures 2 et 3 sur lesquelles
les mêmes références ont été conservées, le câble est un câble mono-toron à fils parallèles
du type WARRINGTON-SEALE. L'avantage de ce câble est qu'il permet d'utiliser des fils
de diamètres différents, ce qui se traduit par un meilleur remplissage du câble par
les fils et par suite l'augmentation de la résistance de celui-ci avec réduction corrélative
des interstices. Un autre avantage de ce type de câblage réside en ce que la longueur
des fils constitutifs du câblage est beaucoup mieux maîtrisée que dans le cas des
câbles textiles dans lesquels l'élasticité de la matière conduit à une sorte d'autorégulation.
Dans ce second mode de réalisation, les multifilaments d'aramide étant totalement
imprégnés et torsadés sont revêtus par un liant faisant l'objet du brevet précité.
Le coefficient de ce liant sur lui-même est minimum aux températures atteintes lors
des essais en flexions alternées. En effet, plus ce coefficient de frottement est
faible, moins les températures sont élevées et le choix du liant est donc lié à sa
résistance en température. Le polyuréthane décrit précédemment peut être remplacé
par divers liants présentant les caractéristiques fondamentales précitées : tenue
à l'abrasion, coefficient de glissement, souplesse, compatibles avec le procédé décrit
dans le brevet 80 20663 (FR-A-2 491 098) : imprégnation interfilaments, calibrage-lissage.
C'est ainsi que le polyuréthane peut être remplacé par un copolymère de polyfluorure
de vinylidène extrudable, à 400% d'allongement (type 10010 SOLEF). En tout état de
cause, le taux d'imprégnation excède 30% en poids.
[0023] Il est possible de prévoir entre chaque couche de fils un enrubanage par un film
à bon coefficient de frottement, les vides existants entre chacun des fils pouvant
être remplis par une graisse ou un produit lubrifiant.
[0024] Il va de soi que de nombreuses variantes peuvent être introduites, notamment par
substitution de moyens techniquement équivalents sans sortir pour celà du cadre de
l'invention.

1. Câble aramide à haute résistance en flexion, comprenant une âme autour de laquelle
sont toronnés des fils synthétiques, revêtus par une gaine, caractérisé en ce que
les fils synthétiques (2, 3, 4) sont des fils aramide imprégnés à coeur par une résine
(8) à haute résistance à l'abrasion et faible coefficient de frottement.
2. Câble selon la revendication 1, caractérisé en ce que les fils textiles sont câblés
en un câble monotoron selon la technique de câblage des câbles métalliques.
3. Câble selon la revendication 1, caractérisé en ce que chaque élément constituant
le câble est un fil composite, homogène, solide, de section déterminée.
4. Câble selon la revendication 1, caractérisé en ce que le coefficient d'allongement
à la rupture des produits d'imprégnation (8) est supérieur à celui des fils aramides
(2, 3, 4).
5. Câble selon l'une quelconque des revendications 1 ou 2, caractérisé en ce que l'âme
(1) est élastique en compression, ce qui permet de limiter les contraintes subies
par les fils externes.
6. Câble selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisé en ce
qu'un enrubanage (6) est prévu entre chaque couche de fils.