[0001] La présente invention concerne un procédé d'obtention sur continu à filer à anneaux
de fils composites à âme en filés de fibres longues entourée d'une enveloppe extérieure.
[0002] On sait que la fabrication de fils composites à âme entourée d'une enveloppe extérieure,
plus couramment dénommés "Core-spun", peut être réalisée selon trois procédés de filature
:
- le procédé de filature sur continu à filter fibres longues à anneaux,
- le procédé de filature sur continu à filer fibres courtes à anneaux,
- et le procédé de filature à friction.
[0003] Alors que le procédé de filature à friction peut utiliser aussi bien des filaments
continus, multi ou mono-filaments que des filés de fibres et ne communique aucune
torsion au fil d'âme, les procédés sur continu à filer à anneaux, qu'ils utilisent
des fibres longues ou des fibres courtes, ne peuvent utiliser, comme fil constituant
l'âme, que des filaments continus, multifilaments ou monofilaments étirés.
[0004] Il faut, par ailleurs, noter que ces procédés sur continu à filer à anneaux, de par
leur conception même, communiquent au fil d'âme une torsion équivalente à celle que
reçoit l'ensemble du fil composite.
[0005] L'utilisation de filés de fibres comme âme dans les systèmes de réalisation de fils
Core-spun sur continu à filer à anneaux était donc jusqu'à présent totalement exclu,
comme on va le démontrer dans ce qui suit en référence au dessin schématique annexé
dans lequel
Figure 1 représente, de façon très schématique, un fil composite avant que n'ait été
impartie aucune torsion ni à l'âme ni à la couverture ;
Figures 2 et 3 représentent, de façon également très schématique, plusieurs types
de torsion appliqués à un fil composite dont l'âme a reçu une torsion Z.
Figure 4 est une courbe représentant le résistance du filé composite en fonction
du coefficient de torsion du fil d'âme.
[0006] Sur les figures, l'âme est désignée par
2 et la couverture par
3.
[0007] La figure 1 représente un élément de fil composite constitué d'une âme
2 et de fibres de couverture
3, aucun de ces éléments n'ayant reçu de torsion.
[0008] Si l'on applique à l'ensemble du fil une torsion de coefficient α soit T = α √Nm
(T = nombre de tours/mètre ; Nm = numéro métrique), la couverture et l'âme, après
application de la torsion, auront la même torsion T. Or, lorsque l'on tord un fil,
il se produit un effet de raccourt qui est une fonction non linéaire de la torsion.
[0009] Par conséquent, les éléments
2 et
3 de longueur initiale lo, auront une longueur l < lo après application de la torsion.
L'expérience montre que la diminution de largeur a une valeur voisine de 5 % pour
un α= 80. Cette variation est naturellement indépendante du sens de la torsion.
[0010] Prenons le cas (Figure 2) où les fils d'âme
2 sont des filés de fibres (longues ou contonnières), dont la torsion de sens Z a un
coefficient de torsion compris dans l'intervalle 60<α<90.
[0011] Cet intervalle couvre la gamme des coefficients couramment utilisés sur les continus
à filer à anneaux qu'il s'agisse de fibres longues ou de fibres ourtes.
[0012] Si l'on applique à l'ensemble une torsion de même sens que la torsion appliquée au
fil d'âme, donc une torsion Z d'un coefficient αʹ, compris dans l'intervalle précédemment
défini, l'âme
2 va se trouver surtordue par rapport à la couverture
3, et la réduction de longueur Δl de l'âme
2 sera supérieure à la réduction de longueur Δʹl de la couverture
3.
[0013] Il y aura donc excès de longueur de la couverture
3 par rapport à l'âme
2 et il apparaîtra ainsi des "zones découvertes".
[0014] Dans la situation représentée à la figure 3, on applique à l'ensemble une torsion
en sens inverse de celle appliquée au fil d'âme, soit une torsion S, d'un coefficient
également compris dans l'intervalle défini ci-avant. On constate alors le phénomène
inverse : en effet, le filé de l'âme
2 se détord, et voit donc sa longueur augmenter. Dans le même temps, la couverture
3 voit sa longueur se réduire sous l'effet da la torsion. Dans cette situation, il
y a excès de longueur de l'âme
2 par rapport à la couverture
3, et apparition de parties découvertes, comme dans le cas précédent.
[0015] Outre le type de défaut décrit ci-avant, on peut estimer que, dans les deux cas la
résistance du fil d'âme
2 se détériorera très rapidement.
[0016] En effet, dans le cas représenté à la figure 3, cette détérioration se produira par
détorsion et passage par le point "0" du fil d'âme. En effet, les fibres discontinues
(longues et à fortiori courtes des cotonniers) sont liées mécaniquement par la cohésion
fibres à fibres donnée par la torsion.
[0017] Ces liaisons sont, en fait, la conséquence des forces de frottement inter-fibres.
La détorsion conduit donc à une dislocation du filé de fibres placé en âme.
[0018] Dans le cas représenté à la figure 2, on constate que la résistance du filé diminue
treès rapidement, lorsque le coefficient de torsion du fil d'âme dépasse la valeur
critique αʺ. Il existe, en effet, une caractéristique propre à chaque famille de
fibre que l'on peut représenter par la courbe de la figure 4, dans laquelle la résistance
en décanewtons est portée en ordonnée, le coefficient de torsion étant porté en abscisse.
L'équation de cette courbe F = f (αʺ) possède un maximum. La valeur αʺ
o correspondant à ce maximum est appelée coefficient critique. Pour toute valeur tell
que αʺ>α
oʺ, on constate une diminution de la résisS tance.
[0019] Il est bien évident que ce coefficient critique dépend du type de fibre et de fil
utilisé et est donc une caractéristique propre à chaque produit textile.
[0020] La Demanderesse, au vu de cette impossiblité pratique de réaliser sur continu à
filer à anneaux des fils "Core-spun" avec âme en filé de fibres, s'est tout d'abord
attaché à déterminer un mode de calcul du coefficient total de torsion du fil d'âme,
de façon à pouvoir optimiser le coefficient de torsion du filé de fibres à utiliser
comme fil d'âme afin d'obtenir une résistance optimum.
[0021] C'est ainsi que si :
αʹ est le coefficient du fil complet,
Nʹm est le titre du fil complet,
Nm est le titre du fil d'âme et
α est le coefficient du fil d'âme,
la torsion du fil d'âme est de :
T = α√Nm (1) (loi de Koechlin)
la torsion du fil complet est de :
Tʹ =αʹ√Nʹm (2)
la torsion totale du fil d'âme est de :
Tʺ = T + Tʹ (3)
Soit, par ailleurs, le pourcentage de l'âme par rapport au fil complet :
k =

x 100 (4)
Nm :

x 100 (4)
en posant

= h, le titre du fil d'âme devient :
Nm =

(5)
La torsion du fil d'âme, en fonction de Nʹm et de h est de :
T = α

(6)
et la torsion totale du fil d'âme de :

[0022] On peut alors calculer comme suit le coefficient total α ʺ du fil d'âme :

Or, d'après l'équation (5) :
Nm =
[0023] Si l'on porte cette valeur dans l'équation (8), on a :

[0024] On constate donc que αʺ est fonction de trois variables : α, αʹ et h, et est indépendant
du numéro métrique des filés.
[0025] On a vu plus haut que le coefficient de torsion au-dessus duquel on constate une
diminution de la résistance doit être tel que :
α ≦ αʹ
o
[0026] Si l'on se place à la limite, et en fixant les valeurs de h et de αʹ, (qui peuvent
être prédéterminées), il est possible de calculer la valeur de α, c'est-à-dire du
coefficient de torsion du filé de fibres à utiliser pour obtenir la résistance optimum.
Cette valeur est donnée par l'équation (10) :

[0027] On sait, par ailleurs, et par expérience que pour avoir une couverture totale de
l'âme, il faut avoir:


[0028] Par exemple, si l'on choisit 90 comme valeur de αʹ (il s'agit d'une valeur courante
en filature pour obtenir du fil à structure fermée) ; on aura :
α = 80 - 90 √0,3 = 30,7
[0029] En filature classique fibres courtes, un tel fil est irréalisable, car les fibres
très peu liées ont une résistance extrêmement faible, incompatible avec toute manipulation
ultérieure.
[0030] Par contre, en technique fibres longues craquées, un tel fil est tout à fait réalisable,
et apte à entrer comme fil d'âme dans un fil composite Core-spun.
[0031] L'invention concerne donc un procédé d'obtention d'un fil composite à âme entourée
d'une enveloppe extérieure qui est caractérisé en ce que l'âme réalisée, en filé de
fibres longues, est montée en torsion pendant l'opération même de filature réalisée
sur continu à filer à anneaux sans que soit atteint son coefficient de torsion critique,
la couverture de ladite âme étant réalisée en fibres longues ou en fibres courtes.
[0032] Selon un mode de réalisation de l'invention, le coefficient de torsion du fil d'âme
se situe entre 20 et 85.
[0033] On peut noter que, avec le fil "Core-spun" ainsi obtenu, les inconvénients précités
: excès de longueur de l'âme par rapport à la couverture, ou excès de longueur de
la couverture par rapport à l'âme, disparaissent avec la possibilité de réaliser par
exemple un fil dont le coefficient de torsion est voisin de 30, donc à fibres très
peu inclinées par rapport à l'âme du fil.
[0034] La présente invention sera mieux comprise et ses avantages ressortiront bien de l'exemple
qui suit qui l'illustre sans nullement la limiter.
[0035] Le matériau prévu pour constituer l'âme est constitué d'un filé de fibres longues
en aramide haut module, Nm 90.
[0036] Le coefficient de torsion critique pour ce matériau est de : αʺ
o = 80
la valeur h étant de 0,3 on a k = 30 %.
[0037] Le numéro métrique (Nʹm) de la couverture constituée d'un mélange de fibres courtes
de coton et de viscose ignifugée, qui représente 70 % de l'ensemble du filé "Core-spun"
est de Nʹm = 27.
[0038] Le coefficient de torsion αʹ déterminé sur le fil complet et nécessaire en filature
fibres courtes est de 90.
[0039] Le calcul du coefficient α du fil d'âme (équation 10) donne
α = αʺ - α √h ; α = 80 - 90 √0,3 = 30,7
Le fil d'âme aura donc pour torsion :
T = α √Nm ; T = 30,7 √90 = 291 t/m sens Z
Le fil complet aura pour torsion
Tʹ = αʹ √Nʹm ; Tʹ = 90 √27 = 467 t/m sens Z
La torsion totale du fil d'âme sera de
Tʺ = T + Tʹ ; Tʺ = 291 + 467 = 758 t/m
Le fil d'âme après remontée de la torsion a donc un coefficient

et l'on retrouve donc le coefficient critique αʺ
o = 80 précédemment déterminé.
[0040] On peut, par ailleurs, déterminer la résistance tout à fait remarquable des fils
"Core-Spun" ainsi obtenus.
[0041] La résistance d'un fil composite couverture fibres courtes n'est fonction que de
la résistance du fil d'âme.
[0042] Si :
RʹKm est la résistance kilométrique du fil complet en Km,
RKm est la résistance kilométrique du fil d'âme,
Fʹ est la résistance de rupture du fil complet,
et F la résistance de rupture du fil d'âme,

[0043] Le fil d'âme après remontée en torsion a une RKm = 120, donc

[0044] Cette résistance est tout à fait remarquable pour un fil dont la couverture fibres
courtes en fibres cellulosiques représente 70 % Un tel fil réalisé en 100 % fibres
courtes aurait une RKm de l'ordre de 18 Km.
[0045] En couverture fibres longues, on obtient un léger dopage de la résistance totale
du fil.
[0046] On conçoit tout l'intérêt du procédé selon l'invention qui permet d'obtenir, sur
matériel de filature à anneaux classique des fils composites Core-spun dont l'âme
est réalisée en filés de fibres synthétiques longues de toutes provenances et dont
la couverture peut être réalisée en toute fibre, synthétique, artificielle ou naturelle
connue, que ce soit en système fibres courtes ou en système fibres longues. On ne
constate aucune partie découverte.
[0047] Les fils ainsi obtenus, qui peuvent être obtenus dans un plate de numéros métriques
entre 1 et 100 présentent, par ailleurs, et comme dit plus haut, une résistance tout
à fait remarquable.