[0001] La présente invention concerne la protection individuelle des personnes physiques
et plus particulièrement des travailleurs de l'industrie métallurgique contre les
projections de matériaux et notamment de métaux en fusion à haute température.
[0002] Dans le domaine de la protection individuelle des personnes physiques, il est connu
de réaliser des vêtements à partir d'un assemblage de plusieurs couches. C'est par
exemple le cas du vêtement décrit dans le brevet allemand DE-C-927 322 : l'assemblage
consiste en quatre couches superposées, à savoir, de l'intérieur du vêtement vers
l'extérieur, un tissu lisse faisant office de doublure, une mousse de caoutchouc
ou de matière plastique, un tissu et une feuille métallique. Ce vêtement est destiné
à la protection contre le chaud, le froid, le vent, la tempête, en particulier comme
vêtement de sport, pour les expéditions dans les milieux froids, chauds et venteux.
Le tissu correspondant à la troisième couche ne sert que de support à la feuille
métallique et n'a pas de caractéristique particulière.
[0003] Un autre assemblage est connu par le brevet américain US-A-4,255,817 , qui décrit
trois couches, à savoir, de l'intérieur vers l'extérieur, un tissu réalisé en fibres
thermostables, une deuxième couche plus volumineuse à partir des mêmes fibres et
une troisième couche consistant en une enduction d'un matériau résistant au feu tel
qu'un néoprène ou un caoutchouc. Cet assemblage est mis en oeuvre dans la partie basse
d'un vêtement ou d'un tablier de protection contre les projections de graisses ou
d'huiles chaudes.
[0004] Ces deux types d'assemblage ne donnent pas satisfaction dans le domaine particulier
des projections de métaux en fusion à haute température, par exemple de la fonte
dont la température de fusion est de l'ordre de 1.300°C. Pour assurer la protection
des travailleurs de l'industrie métallurgique, on utilise habituellement des vêtements
spéciaux, prenant la forme de manteaux ou de combinaisons, dont la face extérieure
présente souvent un revêtement métallique obtenu par une aluminisation. Le travailleur
exposé qui accomplit une tâche dans la zone à risque de projection, revêt alors ce
vêtement spécial au-dessus de son vêtement de travail habituel (coton ignifugé ou
autre). La protection est assurée par l'ensemble de ces vêtements qui repré sentent
un poids important, de l'ordre du kilo par mètre carré et quelquefois plus. Le poids
de ces vêtements et la rigidité due au matériau aluminisé rendent la tâche du travailleur
d'autant plus inconfortable. Les performances obtenues par cet ensemble de vêtements
ne sont pas satisfaisantes, les vêtements étant détruits et des brûlures graves étant
constatées, en particulier lorsque les projections interviennent sur des vêtements
usagés et dont le revêtement extérieur a été altéré par le porter, mais aussi sur
les vêtements neufs. Enfin des projections accidentelles peuvent se produire sur des
personnes n'ayant pas à travailler de façon permanente dans la zone à risque, mais
ne faisant qu'y passer, ou lors d'évènements accidentels imprévisibles ; dans ce
cas, les accidents sont très graves voire mortels, car les travailleurs en question
ne portent que le vêtement de travail habituel, souvent ignifugé mais qui n'assure
aucune protection efficace contre les grosses projections de métaux ou de matériaux
en fusion.
[0005] Or on a trouvé, et c'est ce qui fait l'objet de l'invention, un matériau complexe
pour vêtement de protection qui ne présente pas les inconvénients constatés, et qui
a d'excellentes performances vis-à-vis des projections de métaux en fusion, à haute
température même après usage. Ce matériau complexe consiste de manière connue en un
assemblage de trois couches superposées, la troisième couche, destinée à constituer
la partie intérieure du vêtement est peu épaisse et légère, la deuxième couche, intermédiaire,
est volumineuse et de structure aérée et de manière caractéristique la première couche,
destinée à constituer la partie extérieure du vêtement, a un état de surface relativement
lisse et comprend au moins un tissu, composé majoritairement de fibres thermostables
ou ignifugées, ayant un facteur de couverture élevé.
[0006] La première couche a un double rôle : elle protège contre le double impact, mécanique
et thermique, du métal en fusion. Cette double protection est assurée par la combinaison
de l'état de surface (le métal a tendance à glisser sur la surface), la composition
de la couche (les fibres thermostables ou ignifugées ont une bonne résistance aux
fortes élévations de température) et son facteur de couverture (il n'y a pas de passage
préférentiel de la chaleur radiante incidente).
[0007] La deuxième couche joue le rôle d'isolant thermique vis-à-vis de la chaleur émise
au travers de la première couche. La troisième couche complète l'isolation thermique
de la deuxième couche et confère au matériau complexe des propriétés de confort au
porter. L'état de surface relativement lisse de la première couche peut être obtenu
soit par un traitement adapté du tissu, soit par la contexture de celui-ci combinée
aux fibres qui le composent. Le traitement adapté consiste préférentiellement dans
le dépôt à la surface extérieure du tissu d'une fine couche métallique : il s'agit
par exemple d'une technique spécifique d'aluminisation, déjà employée pour la réalisation
de vêtement de protection. Mais l'état de surface recherché peut être obtenu sans
traitement particulier, uniquement grâce à la contexture serrée du tissu et aux caractéristiques
des fibres qui le composent. En particulier, on a constaté qu'un tissu de coton ignifugé,
dont l'armure est un satin, et ayant une contexture serrée présente un état de surface
tel que les projections de fonte par exemple glissent et ne sont pas accrochées par
le tissu.
[0008] Parmi les fibres pouvant entrer dans la composition de la première couche, on retient
plus particulièrement, en pur, le coton ignifugé, et en mélange intime des fibres
cellulosiques ignifugées comme la viscose ou des fibres thermostables comme les fibres
préoxydées, de type polyacrylonitrile mélangées avec des fibres telles que des aramides,
du polyester, de la laine.
[0009] Le facteur de couverture élevé signifie que la première couche est constituée d'un
matériau régulièrement réparti et homogène, tel qu'elle forme un écran sans passage
préférentiel. Ce facteur de couverture est obtenu pour un tissu par une contexture
serrée, c'est-à-dire, pour des fils d'un titrage donné, par un nombre de fils en chaîne
et en trame suffisant pour qu'un fil donné soit en contact étroit avec les fils qui
lui sont adjacents. Ceci est obtenu pour un tissu d'armure satin, sergé ou dérivé,
qui comporte en chaîne entre 24 et 41 fils par centimètres et en trame entre 17 et
26 fils par centimètres, chaque fil ayant un diamètre apparent compris entre 0,2 et
0,6 millimètre. Bien sûr, plus le diamètre apparent des fils choisis sera faible et
plus le serrage de la contexture devra être important pour obtenir un facteur de couverture
élevé.
[0010] La deuxième couche doit être volumineuse et présenter une structure aérée. L'isolation
thermique procurée par cette couche est le fait principalement de l'air contenu dans
le matériau constitutif de cette couche. On choisit donc un produit peu dense, présentant
une "voluminosité" (ou volume spécifique apparent) importante, par exemple un non-tissé,
un tricot molletonné gratté, un tricot très peu serré. La troisième couche doit être
de faible épaisseur et légère ; ce sera par exemple un tissu type doublure en polyester
ou un non-tissé solide utilisable comme doublure, par exemple non-tissé en polyéthylène
connu sous la dénomination TYVEK.
[0011] L'assemblage des trois couches constituant le matériau selon l'invention est obtenu
par tout moyen d'assemblage habituel : couture, collage ... De façon préférentielle
on assemble d'abord les deuxième et troisième couches par couture, puis on assemble
la première couche avec les deux autres ainsi assemblées lors de la confection du
vêtement de protection, les coutures nécessaires à la constitution du vêtement étant
les seuls liens d'assemblage entre la première couche et les deux autres.
[0012] Le vêtement de protection mettant en oeuvre le matériau selon l'invention est suffisamment
performant vis-à-vis des projections de matières en fusion pour être utilisé seul
comme vêtement de travail permanent sans obliger le porteur à revêtir une superprotection.
Son confort au porter est accru par le fait de son faible poids. Ainsi préférentiellement
le poids total du matériau est au plus de 750 grammes au mètre carré, et la répartition
entre les trois couches est la suivante : 300 à 500 grammes au mètre carré pour la
première couche, 100 à 400 grammes pour la deuxième, 20 à 100 grammes pour la troisième.
[0013] L'invention sera mieux comprise grâce à la description qui va être faite de plusieurs
exemples de matériaux complexes à trois couches conformes aux caractéristiques précitées,
et sélectionnés parmi des centaines d'essais.
Exemple 1 :
[0014] Le matériau complexe pour vêtement de protection consiste dans l'assemblage d'un
tissu de coton ignifugé, d'un non-tissé aiguilleté à base de fibres de type polyacrylate
et d'un tissu en poly ester type doublure. Le tissu de coton qui constitue la couche
extérieure, destinée à être en contact avec les projections de matière en fusion,
pèse 350 grammes au mètre carré ; il est composé de fils de diamètre apparent 0,28
mm en chaîne et 0,33 mm en trame, et il a une contexture de 46 x 21 ; il a subi un
traitement d'ignifugation couramment dénommé PROBAN, mettant en oeuvre des polymères
phosphoreux au sein de la structure cellulosique. Le non-tissé qui constitue la couche
intermédiaire pèse 210 grammes au mètre carré et présente une épaisseur d'environ
3 millimètres (selon NF G 07 153). Le tissu doublure qui constitue la couche destinée
à être en contact avec l'individu pèse 50 grammes au mètre carré ; il s'agit d'un
tissu de polyester d'armure taffetas ayant une contexture de 42 x 16, les diamètres
apparents étant de 0,14 mm pour les fils en chaîne et de 0,33 mm pour les fils en
trame. Les trois couches ont été assemblées par couture, et constituent un matériau
complexe pesant 610 grammes au mètre carré. Le matériau assemblé a été testé selon
les indications de la norme NF S74-107. Trois cents grammes de fonte en fusion (1300°C)
sont déversés sur une éprouvette du matériau, inclinée à 15° par rapport au plan horizontal.
Des sondes thermiques sont placées au contact de la troisième couche du matériau et
permettent de mesurer l'élévation de la température de cette zone due à l'impact du
métal en fusion. Dans ce cas, l'élévation maximale de température a été de 22°C, ce
qui, même dans le cas d'un vêtement porté à même la peau, ne provoque pas de brûlures.
La fonte en fusion a glissé sur la surface du matériau sans qu'il y ait d'accrochage,
c'est-à-dire sans que des gouttes de fonte restent accrochées sur la surface. La même
constatation a été faite sur le même matériau usagé, après qu'il ait été froissé et
abrasé.
Exemple 2 :
[0015] Le tissu coton ignifugé de l'exemple 1 a été préalablement aluminisé, avec le dépôt
suivant une technique particulière d'une fine couche d'aluminium pesant 60 grammes
au mètre carré. Ensuite, le même complexe que ci-dessus a été assemblé ; il pèse
donc 670 grammes au mètre carré.
[0016] L'élévation de température constatée au niveau de la troisième couche est de 13°C,
inférieure à celle du premier exemple et donnant donc une protection plus favorable.
Là encore, aucun accrochage ne s'est produit, même à l'état usagé.
Exemple 3 :
[0017] La meilleure performance pour le poids le plus faible a été obtenue avec un matériau
complexe pesant 580 grammes au mètre carré. Il est composé pour la couche extérieure
d'un tissu aluminisé pesant 300 grammes au mètre carré, constitué de fils à base d'un
mélange intime 30 % de fibres aramides de type "paraaramide" et de 70 % de fibres
de polyacrylonitrile préoxydées ; pour la couche intermédiaire d'un non-tissé aiguilleté
en fibres de polyacrylate pesant 210 grammes au mètre carré, d'épaisseur 3 millimètres
(selon la norme NF G 07153) ; pour la couche intérieure d'un non-tissé perforé en
polyéthylène utilisé pour la doublure, dénommé TYVEK, pesant 40 grammes au mètre
carré.
[0018] Il n'a été constaté aucun accrochage, même à l'état usagé, et l'élévation de température
a été de 12°C.
[0019] Comparativement aux exemples ci-dessus, afin d'apprécier les progrès apportés par
l'invention des tests ont été réalisés à partir des matériaux couramment utilisés
dans la confection des vêtements habituels de protection. Pour ces tests on a pris
en compte la superposition du matériau en question et du vêtement de travail traditionnel,
à savoir un tissu de coton ignifugé. Ainsi la superposition d'un tissu amiante aluminisé
(vêtement de protection) et d'un tissu coton ignifugé (vêtement de travail), l'ensemble
pesant 1.190 grammes au mètre carré, a fait apparaître des accrochages de fonte sur
la surface du vêtement de protection et une élévation de température, génératrice
de brûlures graves. Ainsi la superposition d'un tissu aluminisé à base de fibres
aramides dénommées KEVLAR (vêtement de protection) et du même tissu coton ignifugé
(vêtement de travail), l'ensemble pesant 810 grammes au mètre carré, a donné de bons
résultats à l'état neuf : pas d'accrochage, pas de brûlures, mais de mauvais résultats
à l'état usagé : des accrochages de gouttes de fonte entraînant une élévation de température
génératrice de brûlures graves.
[0020] Les matériaux aluminisés selon les exemples 2 et 3 ci-dessus ne présentent pas d'accrochage
même à l'état usagé. Cela ne signifie pas que la pellicule d'aluminium déposée à la
surface extérieure du tissu ne subit aucune altération. Mais les altérations provoquées
par l'usure n'entraînent pas de points d'accrochage avec la fonte du fait du tissu
qui forme la base de la première couche : la combinaison des fibres thermostables
ou ignifugées et de la contexture favorise le glissement de la fonte malgré les altérations
du revêtement aluminisé.
[0021] Les exemples ci-dessus ne sont pas limitatifs de l'invention, en particulier on peut
mettre en oeuvre de nombreux composants répondant aux caractéristiques retenues pour
chacune des couches du matériau complexe. On a obtenu des résultats similaires à ceux
de l'exemple 1 en remplaçant la couche intermédiaire soit par un tricot molletonné
gratté à base de fibres aramides dénommées KERMEL (pesant 350 grammes au mètre carré)
soit par un tricot de laine à mailles relativement lâches pesant 325 grammes au mètre
carré. On a obtenu des résultats similaires à ceux de l'exemple 3 en remplaçant la
première couche par un tissu aluminisé de 360 grammes au mètre carré à base de fibres
dénommé PYROVICEL qui sont un mélange intime de viscose ignifugée, de fibres préoxydées,
de polyester et de laine. Ce tissu est à base d'une armure sergé, de contexture 27
x 21, les diamètres apparents étant de 0,43 mm pour les fils de chaîne et de 0,39
mm pour les fils de trame.
1. Matériau complexe pour vêtement de protection contre les projections de matières
et métaux en fusion à haute température du type consistant en un assemblage de trois
couches superposées, la troisième couche, destinée à constituer la partie intérieure
du vêtement étant peu épaisse et légère, la deuxième couche, intermédiaire, étant
volumineuse et de structure aérée, caractérisé en ce que la première couche, destinée
à constituer la partie extérieure du vêtement, a un état de surface relativement lisse
et comprend au moins un tissu, composé majoritairement de fibres thermostables ou
ignifugées, ayant un facteur de couverture élevé.
2. Matériaux complexe selon la revendication 1 caractérisé en ce que le tissu de la
première couche a une armure de type satin, sergé ou dérivées et qu'il comporte en
chaîne entre 24 et 41 fils par centimètres et en trame entre 17 et 26 fils par centimètre,
chaque fil ayant un diamètre apparent compris entre 0,2 et 0,6 mm.
3. Matériau selon la revendication 2 caractérisé en ce que le tissu est en coton,
a une armure du type satin et une contexture de 41 fils par centimètre en chaîne et
de 26 fils par centimètre en trame, pour des fils ayant un diamètre apparent respectivement
de 0,28 millimètre en chaîne et 0,33 millimètre en trame.
4. Matériau selon la revendication 1 caractérisé en ce que le tissu de la première
couche est composé d'un mélange intime comportant majoritairement des fibres cellulosiques
ignifugées ou des fibres de polyacrylonitrile préoxydées.
5. Matériau selon l'une des revendications 2 à 4 caractérisé en ce que la face extérieure
du tissu de la première couche est aluminisée.
6. Matériau selon la revendication 1 caractérisé en ce que la deuxième couche consiste
en un non-tissé, un tricot molletonné gratté ou un tricot très peu serré.
7. Matériau selon la revendication 1 caractérisé en ce que la troisième couche consiste
en un tissu ou un non-tissé type doublure.
8. Matériau selon l'une des revendications 1 à 7 caractérisé en ce que, son poids
total étant au plus de 750 grammes au mètre carré, la répartition entre les trois
couches est la suivante : 300 à 500 grammes au m² pour la première couche, 100 à 400
grammes pour la deuxième, 20 à 100 grammes pour la troisième.
9. Vêtement de protection contre les projections de métaux en fusion réalisé à partir
du matériau selon l'une des revendications 1 à 8.