[0001] Les alliages Al-Li-X actuellement développés présentent des compromis de propriétés
attrayants qui les placent au niveau des objectifs de remplacement d'alliages conventionnels
des séries 2000 et 7000 utilisés en aéronautique, avec des gains de densité de l'ordre
de 8 à 12 % par rapport à ces derniers (voir notamment P.MEYER, B.DUBOST : "Production
of aluminium-lithium alloys with hight specific properties" : Proceedings of the third
Al-Li Conference : Oxford 1985 - The Institute of Metals ou G. Le ROY : "Les alliages
Aluminium-Lithium" : Matériaux & Techniques n° 5-6, 1986 - numéro spécial).
[0002] Cependant, la transformation des alliages Al-Li-X fait apparaître des difficultés
inhabituelles pour les alliages d'aluminium. En particulier, en cours de traitements
thermiques à haute température, dans des fours à air industriels, les alliages contenant
du lithium ont tendance à subir une piqûration importante. Celle-ci est souvent associée
à l'apparition d'une couche de porosités située dans la zone appauvrie en lithium
et particulièrement à sa limite interne. Cette zone appauvrie, bien connue dans les
alliages aluminium-lithium, n'est pas en soi un handicap à la production de demi-produits
en alliage d'aluminium-lithium, tant qu'elle résulte d'une oxydation généralisée et
uniforme de la surface.
Par contre, les porosités et surtout les piqûres débouchantes apparaissant au cours
des traitements à haute température peuvent induire le rebut de productions industrielles.
[0003] On sait, d'après EP-A 123453 qu'une atmosphère de CO₂ humide pouvant contenir jusqu'à
1 % au plus d'oxygène et d'azote, peut garantir les alliages d'Al contentant du Li
contre l'oxydation à haute température; cette limitation est justifiée par le fait
que l'azote est très nocif (voir fig. 1) et, de ce fait, les essais ont été effectués
dans des atmosphères synthétiques : O₂ + argon, ne contenant pas d'azote; cet enseignement
est contraire à l'objet de la présente invention.
[0004] La demanderesse a tenté de résoudre ce problème par modification de composition (réduction
de la teneur en lithium ou ajout de beryllium), mais ces voies ne sont pas satisfaisantes
: la piqûration superficielle demeure importante.
[0005] Le traitement en bain de sel apporte une solution efficace. Par contre, ce traitement
exige une infrastructure dont ne sont pas équipés tous les ateliers des producteurs
et des utilisateurs.
[0006] La demanderesse a porté remède à ce phénomène en contrôlant l'atmosphère du four
à air utilisé pour le traitement thermique.
Le procédé selon l'invention consiste à effectuer les traitements thermiques à haute
température (notamment ceux dont la température dépasse 300°C) tels que l'homogénéisation
et/ou la mise en solution, dans une atmosphère contenant (% en volume) :
CO₂ de 5 à 98 %
2 ≦ air sec ≦ 95 %
reste : H₂O
Elle est tenue de préférence dans les limites suivantes :
CO₂ de 5 à 95 %
5 ≦ air (sec) ≦ 95 %
reste : H₂O
[0007] La teneur en CO₂ peut être réduite entre 10 et 60 % (et préférentiellement entre
12 et 50 %), avec air sec compris entre 40 et 90 % (préférentiellement 50-88 %) et
le reste étant de l'eau.
[0008] Au-dessous de 5 % de CO₂, il a été constaté que la protection superficielle n'est
pas efficace.
Au-delà de 98 % ou de 95 % de CO₂ des problèmes de réalisation industrielle dans des
fours à air classiques se posent. Il est alors nécessaire d'avoir des fours dont l'étanchéité
est suffisante et/ou de procéder à des purges aussi complètes que possible de l'air
qui a pu y pénétrer soit au chargement, soit au déchargement.
Les limites supérieures de 50 ou 60 % en CO₂ sont justifiées par des raisons économiques;
les teneurs inférieures 10 et 12 % pour des raisons d'efficacité de la protection,
elle-même fonction de la composition effective de l'alliage traité.
[0009] Ce traitement s'applique à l'état solide, voire entre liquidus et solidus. Ce procédé
permet d'une part de supprimer la piqûration des demi-produits et d'autre part d'éliminer
la couche de porosités habituellement présente dans la zone appauvrie en lithium.
De plus, il réduit la profondeur de cette zone appauvrie en lithium. La réduction
de la profondeur de la zone appauvrie en Li reste inexpliquée; on sait en effet que
les alliages contenant du lithium subissent en général les phases d'oxydation suivantes
dans l'air :
1. Oxydation avec formation notamment de Li₂O
2. Réaction de l'oxyde avec l'humidité de l'air pour former LiOH.
3. Réaction de l'hydroxyde LiOH avec le gaz carbonique naturellement présent dans
l'air pour former Li₂CO₃, produit final de la réaction (voir à ce propos Fridlyander
: "Oxydation of an Al-Mg-Li system with Be additive" Alyum Splavy, 1968,5).
[0010] Les atmosphères selon l'invention contenant CO₂ et H₂O devraient donc accélérer les
processus de réaction, contrairement à ce qui est observé lors des essais effectués.
[0011] Le procédé selon l'invention s'applique aux atmosphères habituelles des fours à air,
sans limitation particulière liée par exemple au point de rosée ou à la présence d'additifs
dessicateurs de type bifluorure d'ammonium ou fluoborate de sodium.
[0012] L'invention sera mieux comprise à l'aide des exemples suivants illustrés par les
fig. 1 et 2
. La figure 1 représente dans sa partie supérieure un profil des teneurs en Li et
Mg en fonction de la profondeur, perpendiculairement à la surface du produit, après
traitement dans un four à air ordinaire avec addition de bifluorure d'ammonium (cas
B, exemple 1). La profondeur de la zone appauvrie en Li (z) est de 150 µm (concentration
en Li = 90 % de la concentration en Li à coeur de produit). Dans sa partie inférieure,
la figure 1 représente une coupe macrographique de la zone superficielle du produit,
dans un plan Long-Travers court, après attaque chromique et au grandissement x 200.
. La figure 2 représente les mêmes éléments pour un traitement sous CO₂ selon le cas
D de l'exemple 1. La profondeur z de la zone appauvrie en Li est alors de 65 µm.
Exemple 1
[0013] Un alliage de type 8090 : 2,55 % Li - 1,3 % Cu - 1,0 % Mg - 0,12 % Zr - 0,06 % Fe
- 0,05 % Si est coulé en billettes ⌀ 200 mm, homogénéisé 24 h à 535°C, écroûté, réchauffé
en four à induction à 430°C, filé à cette température en un larget de section 110
x 4 mm².
Ce larget subit ensuite des mises en solution en four à air. Les conditions du traitement
sont les suivantes :
- enfournement four chaud
- point de rosée : 25°C +- 3°C.
- maintien : 533°C, 1 heure.
[0014] Une partie est traitée en four à air sans contrôle particulier de l'atmosphère (cas
A : hors l'invention).
Une autre partie du larget est traitée en four à air avec addition de bifluorure d'ammonium
(cas B : hors l'invention) à raison de 7 g/m³ (introduit dans le four en début de
traitement).
Une autre partie est traitée en four à air avec 15 % de CO₂ en volume (cas C : selon
l'invention).
Une dernière partie du larget est mise en solution avec addition de bifluorure d'ammonium
à raison de 7 g/m³ introduit dans le four en début de traitement et avec 15 % de CO₂
en volume (cas D selon l'invention).
[0015] Les résultats concernant la structure du métal après mise en solution et refroidissement
à l'air sont résumés dans le tableau ci-dessous (examen micrographique) :

[0016] On notera de plus, en comparant les figures 1 et 2 que le traitement selon l'invention
réduit la zone appauvrie en lithium.
Exemple 2
[0017] Un alliage de composition en poids : 2,5 % Li - 3,0 % Cu - 0,3 % Mg - 0,12 % Zr -
0,04 % Fe - 0,03 % Si est coulé en billette ⌀ 450 mm, homogénéisé 12h à 515°C, montée
à 25°C/h jusqu'à 538°C, puis maintenu 12 h à 538°C, réchauffé à 430°C, filé en barre
⌀ 180 mm; cette barre est débitée et filée à la même température en un profilé en
H avec un rapport de filage de 27.
Ce profilé est alors débité en diverses longueurs subissant des mises en solution
diverses en four à air dans les conditions ci-dessous :
. Cas E (hors l'invention) :
[0018] Enfournement à 430°C et montée en 20 min à 538°C puis maintien 1 heure
Point de rosée : 5°C +- 3°C
Présence de bifluorure d'ammonium (introduit à raison de 7 g/m³ en début de traitement).
. Cas F (hors l'invention) :
[0019] Enfournement à 538°C et maintien 1 heure
Point de rosée : 5°C +- 3°C
Présence de bifluorure d'ammonium (introduit à raison de 7 g/m³ en début de traitement).
. Cas G (hors l'invention)
[0020] Enfournement à 538°C et maintien 1 heure
Point de rosée : 5°C +- 3°C.
. Cas H (selon l'invention)
[0021] Enfournement à 538°C et maintien 1 heure
Point de rosée : 5°C +- 3°C
Présence de 65 % en volume de CO₂ gaz dans le four.
[0022] Dans tous les cas, les mises en solution sont suivies d'une trempe à l'eau froide.
Les échantillons, prélevés en pied et en tête de chaque longueur mise en solution,
sont ensuite examinés en microscopie optique.

Exemple 3
[0023] Un alliage de type 2091 de composition en poids : 2,1 % Li - 2,3 % Cu - 1,2 % Mg
- 0,12 % Zr - 0,10 % Fe - 0,07 % Si est coulé en plaques de section 800 x 300 mm²,
homogénéisé 12 heures à 532°C, scalpé laminé à chaud entre 490 et 400°C jusqu'à 12
mm.
La tôle ainsi réalisée est débitée et subit les mises en solution suivantes:
. Cas I (hors l'invention)
[0024] Enfournement à 530°C et maintien 2 heures
Point de rosée : -20°C +- 5°C
Teneur en CO₂ : 2 % volumique.
. Cas J (selon l'invention)
[0025] Même traitement mais teneur en CO₂ de 8 % volumique.
[0026] On observe dans le cas hors l'invention quelques piqûres localisées sur la tôle.
Celles-ci n'apparaissent pas dans le traitement réalisé selon l'invention.