[0001] L'invention concerne l'utilisation d'un lipide du cassis dans le traitement des anomalies
des lipoprotéines liées au métabolisme du cholestérol.
[0002] Les lipides circulent dans le sang sous forme de lipoprotéines solubles en milieu
aqueux constituées d'un noyau lipidique de cholestérol estérifié par des acides gras
et de tryglicérides entouré par une couche de protéines, de phospholipides et de cholestérol
libre. L'agencement de ces divers composants caractérise le type de lipoprotéine.
De nombreuses études épidémiologiques mettent en évidence le rôle prépondérant joué
par les lipoprotéines dans le développement de l'athérosclérose.
[0003] En simplifiant, on admet que certaines lipoprotéines, dites de basse densité (LDL)
constituent une fraction à risque cardio-vasculaire car il y a une correlation positive
entre leur présence à un taux élevé dans la circulation sanguine et l'athérosclérose.
Par contre, les lipoprotéines de haute densité (HDL) constituent un facteur anti-risque
cardio-vasculaire car on observe une correlation négative entre leur taux et la maladie.
Il y a donc un "bon cholestérol", transporté par les HDL qui drainent le cholestérol
de la paroi artérielle pour le ramener au foie où il est catabolisé. Au contraire,
les LDL déposent le cholestérol sur la paroi artérielle.
[0004] On sait que les huiles riches en acides gras polyinsaturés ont pour effet de baisser
le taux de cholestérol total (CT) plasmatique. Cependant, dans les études effectuées,
la baisse du CT est due soit à une baisse concommittante du cholestérol des LDL (CLDL)
et du cholestérol des HDL (CHDL), soit à une baisse du CLDL sans modification du CHDL.
D'après D.V. Horrobin et Coll. dans Lipids, vol. 18, N°8, p. 558-561, ce dernier cas
serait celui de l'huile d'onagre.
[0005] Nous avons trouvé de manière surprenante que l'administration d'huile de pépins
de cassis conduisait à faire baisser le CLDL tout en augmentant de manière significative
le CHDL.
[0006] L'invention concerne donc l'utilisation d'un lipide du cassis pour fabriquer une
composition diététique ou pharmaceutique pour le traitement des anomalies des lipoprotéines
liées au métabolisme du cholestérol.
[0007] Sous le terme "anomalies des lipoprotéines liées au métabolisme du cholestérol",
on entend :
- l'hypercholestérolémie essentielle (type IIa) caractérisée par un taux normal de
triglycérides (TG), une augmentation du CT correspondant à une augmentation du CLDL
et à une diminution ou un taux normal du CHDL,
- l'hyperlipidémie mixte (type IIb) caractérisée par une augmentation ou un taux normal
des TG, une augmentation ou un taux normal du CT, correspondant à une augmentation
du CLDL et à une diminution du CHDL,
- la dys-bêta-lipoprotéinémie (type III) caractérisée par une augmentation des TG
et du CT, cette dernière étant nettement moins fréquente que les deux autres.
- l'anomalie correspondant à un taux bas de HDL.
[0008] Par lipide du cassis, on entend selon l'invention :
- l'huile de pépins de cassis (
Ribes nigrum), obtenue par extraction à partir de résidus de cassis et raffinage, par exemple
comme indiqué dans le brevet européen No 92.085 ou la demande de brevet européen No
137.862,
- un mélange d'acides gras provenant de l'hydrolyse ou du fractionnement de l'huile
de pépins de cassis, obtenus par exemple selon la demande de brevet européen No 178.442
ou selon la demande de brevet européen No 271.747.
- un sel pharmaceutiquement acceptable des acides gras précédents,
- une huile obtenue par réestérification d'un tel mélange d'acides gras avec le glycérol,
- un mélange des lipides précédents.
[0009] Le lipide du cassis peut être avantageusement protégé de l'oxydation par un antioxydant
liposoluble, par exemple le palmitate d'ascorbyle, les tocophérols ou un mélange de
tels antioxydants.
[0010] Les compositions diététiques peuvent se présenter sous forme d'émulsions, par exemple
des sauces, mayonnaises ou margarines.
[0011] Les compositions pharmaceutiques peuvent se présenter sous différentes formes adaptées
au mode d'administration, par exemple par voie orale, entérale, rectale ou parentérale.
On peut par exemple préparer des capsules, gélules, suppositoires ou sirops. Dans
le cas d'une administration entérale ou parentérale, les compositions se présentent
sous forme de solutions ou émulsions stabilisées physiquement et chimiquement, apyrogènes
et stériles.
[0012] La dose administrée dépend du type et de la gravité de l'anomalie à traiter. Elle
peut être de 1 à 25 g de lipide du cassis et de préférence de 2 à 5 g d'huile de cassis
par jour en prise unique ou de préférence en 2 à 3 prises séparées.
[0013] L'exemple ci-après illustre l'invention. Dans celui-ci, les parties et pourcentages
sont pondéraux sauf indication contraire.
Exemple
Conditions expérimentales
[0014] On a traité des patients ayant un taux initial de CT supérieur à 300 mg/dl pendant
12 semaines avec une dose moyenne quotidienne de 6 capsules de gélatine contenant
soit 450 mg d'huile de pépins de cassis (HPC) et 200 ppm (partie par million) de palmitate
d'ascorbyle, soit 450 mg d'huile de pépins de raisin (HPR) et 200 ppm de palmitate
d'ascorbyle.
[0015] HPC est constituée de triglycérides des acides gras suivants, en poids
| acide linoléique, C18:2,n-6 |
45% |
| |
| acide gamma-linolénique, C18:3,n-6 dont 38% en position béta |
17% |
| |
| acide alpha-linolénique, C18:3,n-3 dont 17% en position béta |
13% |
| acide stéaridonique, C18:4,n-3 dont 32% en position béta |
3,5% |
[0016] L'acide gamma-linolénique représente le produit de l'action de la delta-6-désaturase
sur l'acide linoléique.
[0017] L'acide stéaridonique constitue le produit de l'action de la delta-6-désaturase sur
l'acide alpha-linolénique.
[0018] HPR contient, en poids environ 70% d'acide linoléique, 1-2% d'acide alpha-linolénique,
mais pas d'acide gammalinolénique ni d'acide stéaridonique.
[0019] Tous les patients ont obtenu une feuille d'information contenant des recommandations
diététiques.
[0020] Le groupe recevant l'HPC consistait en 5 patients comprenant 3 femmes et 2 hommes
d'âge moyen 61 ans (de 36 à 76). Le groupe recevant l'HPR était constitué de 7 patients,
4 femmes et 3 hommes d'âge moyen 55 ans (de 48 à 62). Dans les deux groupes les CT
initiaux étaient similaires. Dans les deux groupes la plupart des malades étaient
de type IIb, défini précédemment.
[0021] Des prises de sang ont eu lieu à intervalles de 0, 4, 8 et 12 semaines pour l'analyse
des paramètres.
Résultats
[0022] Le tableau 1 ci-après donne les valeurs des moyennes des paramètres indiqués (X)
et les écarts type (ET) pour chaque visite ainsi que la probabilité du test statistique
(test T) pour les deux groupes. Le test T donne une réponse à la question : y a-t-il
une différence entre les moyennes des groupes étudiés et cela pour chaque visite ?
Sont soulignés les cas significatifs (probabilité ≦ 0,05)
[0023] Le CT (mg/dl) est dosé enzymatiquement à partir du sérum par colorimétrie en utilisant
les enzymes cholestérolestérase, cholestéroloxydase et le révélateur 4-amino-phénazine.
[0024] Le CHDL (mg/dl) est dosé de la même manière que le CT sur la fraction contenant les
HDL recueillie après ultracentrifugation du sérum à 12.000 t/min.
[0025] Le CLDL (mg/dl) est déduit de la valeur du CHDL d'après Friedewald et Fredrickson.
Tableau 1
| GROUPES |
CT |
CHDL |
CLDL |
| |
|
n |
0 |
4 |
8 |
12 |
0 |
4 |
8 |
12 |
0 |
4 |
8 |
12 |
| HPC |
X |
5 |
309,20 |
293,40 |
279,20 |
261,00 |
42,80 |
50,20 |
56,40 |
61,40 |
270,20 |
260,00 |
234,20 |
206,60 |
| ET |
5 |
4,49 |
3,94 |
6,27 |
9,57 |
1,91 |
2,04 |
1,92 |
1,43 |
13,73 |
12,30 |
14,21 |
17,82 |
| HPR |
X |
7 |
304,43 |
295,00 |
298,43 |
293,71 |
40,86 |
39,71 |
42,71 |
39,57 |
276,57 |
273,00 |
267,14 |
271,28 |
| ET |
7 |
4,63 |
7,12 |
6,27 |
9,57 |
1,91 |
2,04 |
1,92 |
1,43 |
13,73 |
12,29 |
14,21 |
17,82 |
| Probabilité |
|
0,492 |
0,865 |
0,079 |
0,033 |
0,526 |
0,130 |
0,029 |
0,001 |
0,790 |
0,593 |
0,191 |
0,021 |
[0026] Le tableau 2 ci-après concerne les probabilités des tests T appariés entre les visites
V₄, V₈, V₁₂ et V₀. Dans ces tests statistiques, on cherche, au niveau de chaque groupe
séparément, les différences entre la visite V₀ et les visites successives V₄, V₈ et
V₁₂, autrement dit l'évolution du phénomène en fonction du temps. Ici encore les cas
significatifs sont soulignés (probabilité ≦ 0,05).
Tableau 2
| GROUPE HPC |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
| Paramètres |
|
CT |
CHDL |
CLDL |
| Entre visites |
|
V₄-V₀ |
V₈-V₀ |
V₁₂-V₀ |
V₄-V₀ |
V₈-V₀ |
V₁₂-V₀ |
V₄-V₀ |
V₈-V₀ |
V₁₂-V₀ |
| Probabilité |
n=5 |
0,003 |
0,040 |
0,010 |
0,233 |
0,025 |
0,010 |
0,066 |
0,016 |
0,002 |
| GROUPE HPR |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
| Probabilité |
n=7 |
0,045 |
0,219 |
0,143 |
0,030 |
0,408 |
0,233 |
0,303 |
0,028 |
0,393 |
[0027] Dans le tableau 3 ci-après on étudie le rapport

appelé "risque standard d'athérogénicité" ainsi que les probabilités du test T. Le
tableau 4 ci-après donne les probabilités des tests T appariés. Sont soulignés les
cas significatifs.
Tableau 3
| Groupes |
|
CLDL/CHDL |
| |
|
n |
0 |
4 |
8 |
12 |
| HPC |
X |
5 |
6,34 |
5,63 |
4,24 |
3,48 |
| ET |
5 |
0,44 |
0,95 |
0,34 |
0,38 |
| HPR |
X |
7 |
6,86 |
6,97 |
6,35 |
6,93 |
| ET |
7 |
0,45 |
0,42 |
0,49 |
0,56 |
| Probabilité |
|
|
0,445 |
0,184 |
0,010 |
0,010 |
Tableau 4
| Groupe HPC |
|
|
|
|
| Entre visites |
|
V₄-V₀ |
V₈-V₀ |
V₁₂-V₀ |
| Probabilité |
n=5 |
0,259 |
<0,001 |
<0,001 |
| Groupe HPR |
|
|
|
|
| Probabilité |
n=7 |
0,298 |
0,155 |
0,740 |
Conclusions
[0028] Dans le groupe HPC, la moyenne du CHDL a augmenté nettement (+43,5%), les moyennes
du CLDL et du CT ont diminué (-23,5% et -15,6% respectivement) et la moyenne du facteur
risque standard d'athérogénicité a diminué de 6,34 à 3,48 au cours du traitement.
[0029] Par comparaison, les valeurs correspondantes du groupe HPR ont été :
CHDL (-3,2%), CLDL (-1,9%), CT (-3,5%)
[0030] La moyenne du facteur risque standard d'athérogénicité n'a pratiquement pas changé
(de 6,86 à 6,93).
[0031] On voit donc que l'administration de HPC conduit à une chute du CT due uniquement
à une baisse du CLDL sans participation du CHDL qui au contraire augmente de manière
substantielle. Le risque standard d'athérogénicité diminue donc fortement.
[0032] Par contre, l'administration de HPR n'apporte aucune amélioration de l'état pathologique
des patients.