[0001] La présente invention concerne un procédé de revêtement de fibres et ses applications
à la réalisation de matériaux composites.
[0002] On sait réaliser des matériaux composites constitués par un élément de renforcement
(fibre par exemple) et une matrice dans laquelle ledit élément de renforcement est
noyé. On sait également que les propriétés des matériaux composites obtenus dépendent
fortemen non seulement de la nature et des propriétés des matériaux qui les composent
mais également des possibilités d'accrochage (propriétés interfaciales) entre la matrice
et l'élément de renforcement. Un certain nombre de recherches se sont donc orientées
vers la modification des propriétés superficielles de l'élément de renforcement pour
rendre celui-ci compatible (ou plus accrocheur) avec la matrice.
[0003] Dans le cadre de ces recherches on a déjà décrit un procédé dans lequel les éléments
de renforcement (fibres) étaient soumis, par passage entre deux électrodes, à des
champs électrostatiques produits par utilisation de courants électriques continus
et/ou alternatifs sous haute tension. On a indiqué que le champ électrostatique produit
à partir d'un courant continu provoquait essentiellement un gonflement des éléments
de renforcement et que le champ électrostatique, produit à partir d'un courant alternatif,
provoquait un mordançage de la surface des éléments de renforcement et éventuellement
une oxydation partielle de ladite surface. On rappelle que les courants électriques
utilisés - les mêmes que ceux employés dans la présente invention - ont pour les courants
continus une tension de 50 000 et 150 000 V et pour les courants alternatifs une
fréquence comprise entre 50 et 1 000 Hz (de préférence entre 200 et 500 Hz) et une
tension comprise entre 10 000 et 30 000 V. Ces propriétés des champs électrostatiques
entraînent une modification de l'accrochage entre l'élément de renforcement et la
matrice et, par conséquent, une modification (généralement une amélioration) des
propriétés du matériau composite obtenu.
[0004] Il a été trouvé maintenant que ce même traitement d'éléments de renforcement par
des champs électrostatiques produits par utilisation de courants électriques continus
et/ou alternatifs permettait de revêtir lesdits éléments de renforcement à l'aide
d'une poudre de matériau conducteur ou semi-conducteur.
[0005] On obtient ainsi un élément de renforcement constitué de l'élément de renforcement
initial dont la surface a été revêtue d'une couche mince très adhérente du matériau
en poudre conducteur ou semi-conducteur.
[0006] Ce nouvel élément de renforcement possède bien évidemment des propriétés de surface
différentes de celles du matériau de renforcement initial et peut donc être utilisé
soit pour améliorer les propriétés de matériaux composites comportant ledit élément
de renforcement initial, soit pour réaliser des matériaux composites par combinaison
nouvelle de ce nouvel élément de renforcement avec certaines matrices.
[0007] Les éléments de renforcement que l'on peut revêtir sont très nombreux, par exemple
des éléments en verre, en polyamide aromatique, en bore, en carbone, en carbure de
silicium, en lin, en chanvre et plus généralement en tout matériau d'origine végétale
(matériaux cellulosiques par exemple). Le procédé de revêtement est spécialement intéressant
dans le cas de matériaux d'origine végétale (matériaux cellulosiques, lin, chanvre,
jute, etc). Bien évidemment, les conditions opératoires du procédé permettant d'obtenir
un revêtement convenable de ces divers produits vont dépendre desdits produits ; on
indiquera ci-après lesdites conditions.
[0008] Ces éléments de renforcement peuvent avoir des formes très diverses, mais le plus
souvent ils se présentent sous forme de fibres plus ou moins orientées, de bourre
ou de pulpe.
[0009] Le produit utilisé pour réaliser le revêtement est constitué par une poudre d'un
matériau conducteur ou semi-conducteur ou un mélange de poudres de ces matériaux ;
parmi les poudres utili sables, on citera, par exemple, le carbone, le graphite,
l'oxyde de magnésium, l'oxyde d'argent, l'oxyde ou le bromure de cuivre, l'oxyde de
zinc, l'oxyde de titane... toutes ces poudres semblent caractérisées par un potentiel
électrique relativement élevé par rapport à d'autres poudres présentant un potentiel
électrique faible ou nul. On peut définir les matériaux conducteurs ou semi-conducteurs
utilisables comme les matériaux dont la résistivité, en volume, est inférieure à
10¹⁰ohm/cm³.
[0010] Le procédé utilisé consiste à pulvériser les poudres sur les éléments de renforcement
pendant que ceux-ci sont soumis au champ électrostatique produit par deux électrodes
comme indiqué ci-dessus. Dans certains cas, il est possible de pulvériser les poudres
dans un milieu contenant l'élément de renforcement que l'on soumet simplement au champ
électrostatique produit par un courant continu ; mais, le plus souvent, il est préférable
d'opérer, comme précédemment décrit, en soumettant tout d'abord l'élément de renforcement
à un champ produit par un courant continu (ce qui provoque un gonflement considérable
de l'élément de renforcement) puis en soumettant l'élément gonflé au champ produit
par un courant alternatif et d'injecter alors la poudre dans le milieu contenant l'élément
soumis audit champ. Selon les fibres, il est parfois souhaitable de réaliser ces opérations
à une température supérieure à la température ambiante (par exemple, de 25 à 60°C)
de façon à faciliter et accélérer d'éventuels phénoménes d'oxydation superficielle
provoqués, sur l'élément, par le champ.
[0011] Comme il a été indiqué ci-dessus, le procédé doit être adapté notamment aux éléments
de renforcement utilisés ; les paramètres que l'on fait varier sont, outre éventuellement
le potentiel appliqué aux électrodes, l'écartement desdites électrodes et la durée
du traitement. Ainsi, pour des éléments de renforcement en carbone, on soumettra lesdits
éléments au champ produit par un courant continu d'environ 100 000 V appliqué sur
des électrodes distantes de 10 mm, la durée d'application étant d'environ 10 min.
Si on utilise des éléments de renforcement en amide aromatique, le potentiel de 100
000 V pourra être appliqué à des électrodes écartées de 7 mm et la durée d'application
sera d'environ 5 min. Si le champ provient d'un courant alternatif, l'écart entre
les électrodes sera d'autant plus grand que les éléments de renforcement seront plus
conducteurs ; comme exemple ponctuel, le traitement d'éléments de renforcement en
verre se fera avantageusement en appliquant un potentiel de 15 à 30 000 V entre deux
électrodes distantes d'environ 20 mm ; la durée d'application étant environ 3 à 5
min.
[0012] Il est clair pour le spécialiste que les éléments de renforcement soumis à ces champs
électriques recevront une certaine charge électrique qui contribuera à assurer la
bonne adhérence, sur ces éléments, des poudres en matériau conducteur ou semiconducteur.
[0013] Enfin, on remarquera que le phénomène de mordançage subi par les éléments de renforcement
soumis à un champ électrique produit par un courant alternatif est définitif alors
que le phénomène de gonflement subi par les éléments de renforcement soumis à un champ
électrique produit par un courant continu est transitoire et d'une durée variable
selon la nature desdits éléments allant par exemple de 2 à 3 min pour le verre à environ
30 min pour les polyamides aromatiques.
[0014] Comme indiqué précédemment, les éléments de renforcement revêtus selon l'invention
peuvent être utilisés dans des matrices très différentes. On peut employer pratiquement
n'importe quelle matrice organique connue et classiquement utilisée pour la réalisation
de matériaux composites. Comme matrice utilisable, on peut citer les résines époxy,
les résines organiques-inorganiques, les thermoplastiques, les céramiques et les produits
à prise hydraulique ou les résines organiques pauvres.
[0015] Il a été trouvé en effet que les éléments de renforcement revêtus pouvaient, de ce
fait, acquérir une compatibilité intéressante vis-à-vis soit des matériaux à prise
hydraulique, soit vis-à-vis de matériaux constitués d'une résine inorganique pauvre
(colle ou liant à base de silice) chargée en oxyde métallique convenable (alumine
par exemple). C'est ainsi, par exemple, que l'on a pu réa liser des matériaux nouveaux
comportant un élément de renforcement qui est une fibre de jute revêtue de carbone
et une matrice constituée par du plâtre ou du ciment.
[0016] Les exemples non limitatifs suivants illustrent l'invention :
Exemple 1
[0017] Des fibres de jute orientées de façon polydirectionnelle sont chauffées à 40°C environ
et déposées entre deux électrodes alimentées par un courant continu de 100 000 V.
Aprés une durée de l'ordre de 2 à 3 min, on pulvérise dans l'espace entre lesdites
électrodes une fine poudre de graphite et le courant est maintenu pendant environ
2 min.
[0018] On constate que les fibres de jute ont été revêtues d'une mince couche (de l'ordre
de 2 à 4 µm) de graphite.
Exemple 2
[0019] Des fibres de verre se présentant sous forme de torons ont été placées entre deux
électrodes alimentées par un courant continu de 100 000 V ; au bout d'environ 2 min,
on a constaté un gonflement considérable du toron (le volume apparent de celui-ci
a été multiplié par 4 environ.
[0020] Les mêmes électrodes ont été alors alimentées par un courant alternatif de 25 000
V pendant une durée de 3 min ; puis on injecte entre lesdites électrodes du graphite
en poudre, et un courant continu de 50 000 V est appliqué pendant 2 min.
[0021] On recueille des fibres de verre gonflées revêtues d'une couche d'environ 3 µm de
graphite.
Exemple 3
[0022] Des fibres cellulosiques se présentant sous forme d'une bourre légère sont placées
entre deux électrodes alimentées par un courant alternatif de 20 000 V ; on introduit
dans l'espace entre ces électrodes une poudre très fine d'oxyde de cuivre et le courant
est maintenu pendant 3 min.
[0023] On recueille des fibres cellulosiques revêtues d'une couche mince (environ 3 µm)
très adhérente, d'oxyde de cuivre.
Exemple 4
[0024] On a utilisé les fibres revêtues de graphite obtenues dans l'exemple 1 et on a introduit
ces fibres revêtues entre deux électrodes alimentées par un courant électrique alternatif
de 30 000 V. Au bout de 5 min de traitement, on a pu constater que les fibres revêtues
avaient subi superficiellement un mordançage.
[0025] Cet essai prouve que les fibres revêtues selon l'invention sont susceptibles de
subir, comme les fibres décrites dans les brevets antérieurs, des phénoménes de gonflement,
de mordançage et éventuellement d'oxydation superficielle lorsqu'elles sont disposées
entre des électrodes alimentées par un champ haute tension produit par un courant
continu et/ou alternatif.
Exemple 5
[0026] Les fibres obtenues selon l'exemple 1 ont été disposées dans un moule ayant la forme
de l'objet fini souhaité (plaque par exemple) ; on a coulé dans ce moule une quantité
suffisante pour remplir le moule d'un mélange constitué par du ciment, de l'eau (eau
de gâchage) et un liant.
[0027] On laisse la prise hydraulique du ciment s'effectuer et on démoule une plaque présentant
des propriétés au moins égales à celles des plaques de fibrociment connues. On a réalisé
la même expérience en remplaçant le ciment par du plâtre et l'on a obtenu une plaque
de plâtre très résistance ; pour obtenir une plaque de plâtre très résistante selon
la présente invention de couleur blanche on utilisera, par exemple, un élément de
renforcement constitué par des fibres de jute revêtues d'oxyde de titane.
1. Procédé de revêtement d'éléments de renforcement se présentant de préférence sous
forme de fibre, caractérisé en ce que ledit matériau est traité, entre deux électrodes,
par le champ obtenu au moyen d'un courant électrique continu de tension comprise entre
50 et 150 000 V et/ou au moyen d'un courant électrique alternatif de fréquence comprise
entre 50 et 1 000 Hz et de tension comprise entre 10 000 et 30 000 V et que l'on
met en contact ledit élément avec une poudre d'un matériau conducteur ou semiconducteur.
2. Eléments de renforcement utilisables pour la réalisation de matériaux composites,
caractérisés en ce qu'ils sont constitués par un élément de renforcement connu qui
a été revêtu d'un matériau conducteur ou semi-conducteur.
3. Eléments selon la revendication 2, caractérisés en ce que le matériau conducteur
ou semi-conducteur est du carbone, du graphite ou un oxyde métallique.
4. Matériaux composites, caractérisés en ce qu'ils sont constitués par la dispersion,
dans une matrice connue des éléments de renforcement selon l'une des revendications
2 et 3.
5. Matériaux composites nouveaux, caractérisés en ce qu'ils sont constitués par des
éléments de renforcement, selon l'une des revendications 2 et 3, dispersés dans une
matrice constituée par un composé à prise hydraulique.