[0001] La présente invention a pour objet un acier inoxydable austéno-ferritique.
[0002] On connaît des aciers inoxydables austéno-ferritiques ayant de bonnes propriétés
mécaniques, une bonne résistance à la corrosion et une bonne soudabilité.
[0003] De tels alliages comprennent, outre le fer qui constitue le solde, du
- chrome et du molybdène de façon à améliorer les propriétés résistance à la corrosion
;
- nickel et azote de façon à améliorer la stabilité de la phase austénitique ;
- carbone en faible pourcentage car il affecte la résistance à la corrosion compte
tenu de sa faible solubilité dans la ferrite ;
- silicium ;
- manganèse.
[0004] La demande de brevet EP 0.156.778 décrit ainsi un alliage d'acier inoxydable austéno-ferritique
dont la phase austénitique reste stable autorisant des déformations à froid entre
10 et 30 %, une bonne soudabilité et une bonne résistance à la corrosion.
[0005] La composition d'un tel alliage est la suivante :
|
C < |
0,06 |
en poids |
|
Si < |
1,5 |
|
|
Mn < |
4,0 |
|
21 |
< Cr < |
24,5 |
|
2 |
< Ni < |
5,5 |
|
0,01 |
< Mo < |
1,0 |
|
0,05 |
< N < |
0,3 |
|
0,01 |
<Cu < |
1,0 |
|
le solde étant du Fe, les composés ci-dessus devant répondre par ailleurs aux conditions
suivantes :
- pourcentage de ferrite α entre 35 et 65
- pourcentage de ferrite α < 0,20 (% Cr/% N) + 23
- (% Cr + % Mn)/% N > 120.
- 22,4 x % Cr + 30 x % Mn + 22 x % Mo + 26 x % Cu + 110 x % N > 540.
- % Mo + % Cu > 0,15 avec % Cu d'au moins 0,005 %.
[0006] De tels alliages ont une phase austénitique stable qui n'a pas tendance à se transformer
en martensite mais ils sont difficilement usinables et leurs propriétés mécaniques
restent faibles.
[0007] La présente invention a pour but la réalisation d'un alliage austéno-ferritique
dont la tenue à la corrosion est ameliorée par rapport aux alliages existants et qui
présente un indice élevé d'usinabilité.
[0008] Un tel alliage possède un faible pourcentage de molybdène mais une forte teneur en
cuivre, ce dernier étant mis en solution par traitement thermique au-dessus de 900°C,
la composition de cet alliage étant la suivante, exprimée en pourcentage en poids.
|
C < |
0,06 |
|
Si < |
1,2 |
|
Mn < |
3 |
21 |
< Cr < |
25 |
3 |
< Ni < |
6 |
0,06 |
< N < |
0,30 |
|
< Mo < |
1 |
1 |
<Cu < |
3,5 |
le solde étant du Fe. La composition est équilibrée pour obtenir entre 38 et 70 %
de ferrite à 300° K.
[0009] D'autres avantages et caractéristiques apparaîtront à la lecture de la description
qui va suivre de modes de réalisation particuliers de l'alliage selon l'invention,
la figure unique annexée représentant les domaines de durcissement de l'alliage dans
un diagramme temps, température.
[0010] Deux alliages particuliers A et B sont analysés comparativement à des alliages de
composition connue, notamment l'UNS 32304 correspondant à l'alliage décrit dans la
demande de brevet EP 0.156.778.
|
C |
Si |
Mn |
Ni |
Cr |
Mo |
Cu |
N |
A |
0,02 |
0,6 |
1,9 |
4,1 |
23,5 |
0,13 |
1,60 |
0,1 |
B |
0,02 |
0,5 |
2 |
3,9 |
24,3 |
0,14 |
2,8 |
0,09 |
AISI 304L |
0,02 |
0,6 |
1,3 |
10 |
18,2 |
0,03 |
0,02 |
0,05 |
AISI 316 |
0,025 |
0,5 |
1,5 |
11,5 |
17,5 |
2,3 |
0,03 |
0,05 |
UNS 32304 |
0,02 |
0,5 |
1,8 |
4,2 |
23 |
0,13 |
0,127 |
0,123 |
UNS 31803 |
0,02 |
0,5 |
1,7 |
5,7 |
21,9 |
2,75 |
0,135 |
0,120 |
[0011] Dans le tableau ci-dessus, on a récapitulé les compositions en éléments d'addition
au Fe pour les alliages A et B selon l'invention et les alliages connus.
[0012] Les alliages de l'invention sont réalisés par fusion jusqu'à 1600°C minimum et réchauffés
à 1180°C environ après solidification. Ils subissent un laminage en tôles. Des prélèvements
sont effectués afin de déterminer la stabilité structurale en fonction des traitements
thermiques et plus particulièrement le durcissement, les caractéristiques mécaniques
et physiques, la résistance à la corrosion ainsi que l'aptitude à l'usinabilité.
[0013] Au préalable, il est nécessaire d'étudier l'influence des différents éléments d'addition.
Le carbone est réduit à de faibles teneurs inférieures à 0,06 % afin de réduire les
risques de formation de carbures au cours des traitements thermiques ce qui serait
préjudiciable à la résistance à certaines formes de corrosion.
Le silicium est réduit à de faibles teneurs inférieures à 1,2 % afin de réduire les
risques de formation de composés intermétalliques qui fragilisent l'alliage.
Le manganèse permet d'augmenter la mise en solution solide de l'azote dans l'alliage
mais sa teneur doit être limitée à 3 % pour ne pas devenir préjudiciable à la tenue
à la corrosion généralisée et localisée dans certains cas.
Le chrome est contrôlé de façon à ce que les fractions volumiques des phases ferritiques
et austénitiques soient voisines. Une teneur trop faible ne permet pas d'obtenir une
fraction volumique de ferrite suffisante.
[0014] Une teneur trop élevée peut nécessiter des additions importantes de nickel et d'azote,
ce qui, compte tenu du prix du nickel, doit être évité. De plus, l'alliage a une tendance
accrue à la précipitation de phases intermétalliques fragilisantes lors des traitements
thermiques.
[0015] Aussi de façon classique on utilise on utilise des teneurs en chrome comprises entre
21 et 25 %, plus exactement une teneur de 23,5 %. A un tel pourcentage, l'alliage
a une excellente résistance à la corrosion.
[0016] Une telle teneur en chrome associée à une faible teneur en nickel et molybdène permet
d'éviter, même pour des traitements thermiques de quelques heures, la formation d'une
phase α′, par démixtion de la phase α, durcissante et fragilisante. La formation d'une
telle phase α′ intervient lors de traitements thermiques entre 300 et 500°C.
Le nickel est un élément qui stabilise la phase austénitique de façon à optimiser
l'équilibre austénite/ferrite. Compte tenu de son prix on limite son addition entre
3 et 6 % plus particulièrement 4,2 %.
L'azote intervient pour maintenir l'équilibre austénite/ferrite et de plus une telle
addition permet d'accroître les caractéristiques mécaniques et la tenue à la corrosion
par piqûres. L'addition de l'azote est limitée à 0,30 et souvent voisine de 0,13 %.
[0017] Le molybdène est limité à un pourcentage de 1 % maximum de façon à réduire les coûts
de fabrication de l'alliage et à limiter la formation de phases intermétalliques.
Le molybdène améliore la tenue à la corrosion de l'alliage.
[0018] Le cuivre, contrairement aux alliages connus, est présent dans des pourcentages relativement
importants entre 1 et 3,5 %. Cet élément est généralement présent en faible quantité
dans les alliages connus car sa solubilité dans les alliages austéno-ferritiques
lors du refroidssement est limitée.
[0019] Par contre, selon l'invention, une mise en solution par traitement thermique à haute
température à des températures supérieures à 950°C est possible. Cette étape doit
être suivie d'un refroidissement rapide à l'ambiante de façon à ce que la structure
austénite/ferrite soit exempte de précipitation et reste sursaturée en cuivre. Le
cuivre : - augmente la tenue de l'alliage vis-à-vis de certains milieux acides notamment
les milieux sulfuriques.
- améliore l'aptitude à l'usinabilité.
[0020] On a étudié la stabilité structurale de l'alliage B en fonction du temps et de la
température ainsi que représenté à la figure en annexe.
[0021] Dans l'intervalle 300-600°C, un durcissement important de l'alliage se produit par
précipitation de particules enrichies en cuivre dans la phase ferritique de l'alliage.
[0022] Ce durcissement est proportionnel pour un traitement thermique donné à la teneur
en cuivre.
[0023] Par contre il y a un retard à la précipitation pour les maintiens à 700°-900°C dû
à la stabilité de la phase ferritique vis-à-vis de la phase intermétallique, conférée
par la très faible teneur en molybdène.
[0024] Les propriétés mécaniques sont récapitulées dans le tableau ci-dessous
|
Dureté HV5 |
Caractérstiques de traction |
|
|
Re 0,2% MPa |
Re 1% MPa |
Rm MPa |
A % |
Z % |
AISI 304 |
148 |
205 |
260 |
520 |
51 |
75 |
Alliage A |
223 |
449 |
514 |
660 |
30,5 |
50,6 |
Alliage B |
270 |
566 |
639 |
735 |
17,5 |
48,7 |
Alliage B durci |
350 |
647 |
788 |
900 |
18,5 |
39 |
[0025] Quant à l'alliage B durci, il s'agit de l'alliage B auquel on a fait subir un traitement
thermique de 5 h à 400°C.
[0026] Les alliages selon l'invention possèdent des propriétés mécaniques améliorées notamment
les valeurs de la limite d'élasticité conventionnelle (Re 0,2 %) et de la limite d'élasticité
à 1 % (Re 1 %) tout en conservant une valeur de la résilience sur éprouvette à entaille
en V (KCV) et une ductilité (Allongement A) suffisantes.
[0027] Quant à la dureté, elle augmente sensiblement notamment après traitement thermique.
[0028] L'indice d'usinabilité des alliages selon l'invention est amélioré de façon notable
comparé aux alliages connus et notamment à l'alliage de la demande de brevet EP 0.156.778.
[0029] Les résultats sont récapitulés dans le tableau suivant :
|
HB |
V 0,500 m/min |
Nbr trous pour 500 mm |
Alliage A |
223 |
26 |
72 |
AISI 304L |
148 |
8 |
33 |
UNS 31803 |
241 |
16 |
56 |
UNS 32304 |
234 |
11 |
33 |
[0030] Les trois paramètres étudiés sont la dureté Brinnel (HB), l'indice d'usinabilité
pour une vitesse de coupe de 0,5 m/mn et un essai de perçage en nombre de trous correspondant
à une longueur cumulée de 500mm (0,5 m).
[0031] Les alliages connus ont des valeurs de dureté qui encadrent la valeur de dureté
de l'échantillon A de l'alliage selon l'invention et l'ensemble des deux tests d'usinabilité
montre des performances ne tement supérieures de l'alliage A.
[0032] Les essais de corrosion montrent que les avantages acquis ne le sont pas au détriment
de la resistance à la corrosion.
[0033] Les mesures récapitulées dans le tableau ci-dessous ont été obtenues en milieux
acides (H₂SO₄ à 50°C).
|
E corrosion mV/ecs |
I a µA/cm² |
I p µA/cm² |
E rupture mV/ecs |
UNS 32304 |
-430 |
1250 |
14 |
250 |
Alliage A |
-460 |
1270 |
3 |
480 |
Alliage B |
-460 |
2000 |
3,8 |
400 |
[0034] Pour l'obtention des courbes de polarisation qui ont conduit à ces résultats, le
potential de départ est de -600 mV par rapport à une électrode au calomel saturé
(ecs) et pour une vitesse de balayage de 0,25 mV/sec. Le retour a été réalisé pour
un courant de 100 µA jusqu'à -1100 mV/ecs.
[0035] Le courant de passivation Ip est réduit tandis que le potentiel de rupture est augmenté
ce qui permet d'étendre le domaine d'emploi de l'alliage selon l'invention en matière
de potentiel d'oxydo réduction.
[0036] Ceci est également dû au cuivre ce qui est confirmé par la résistance de l'alliage
B après traitement thermique dans un milieu acide en présence de particules abrasives
de diamètre 0,5 ; 1,19 et 2,38 mm (cf tableau ci-dessous) :
Résultat de perte de poids (mg) 8 h H₂SO₄ (2N) |
|
UNS 32304 |
ALLIAGE B DURCI |
AISI 304 |
essai Statique |
25 |
4 |
28 |
essai dynamique sans particule |
8 |
0 |
8 |
essai dynamique particules 0,5 mm |
34 |
35 |
58 |
essai dynamique particules 1,19 mm |
97 |
73 |
110 |
essai dynamique particules 2,38 mm |
130 |
99 |
136 |
[0037] L'alliage selon l'invention résoud le problème posé, en améliorant les caractéristiques
mécaniques, l'usinabilité sans que ces améliorations soient préjudiciables aux qualités
de résistance à la corrosion.
[0038] Les améliorations des qualités de cet alliage lui sont conférées par l'augmentation
du pourcentage en cuivre et la solubilisation ou la précipitation partielle de ce
dernier.
[0039] Ces résultats sont remarquables compte-tenu du fait que les alliages connus notamment
UNS 32304 préconisent des pourcentages Cu + Mo = 1 % dans un mode de réalisation préféré.
[0040] Néanmoins, dans l'alliage selon l'invention, la teneur en Cu doit être limitée à
3,5 % afin d'éviter les risques majeurs de déchirures de produits lors de la mise
en oeuvre.
[0041] Dans cette fourchette de 1 à 3,5 %, l'homme de l'art adaptera le pourcentage en fonction
de l'utilisation de l'alliage.
[0042] De même des additions complémentaires connues permettent d'augmenter l'usinabilité
telles que soufre, bismuth.