(19)
(11) EP 0 378 281 A2

(12) DEMANDE DE BREVET EUROPEEN

(43) Date de publication:
18.07.1990  Bulletin  1990/29

(21) Numéro de dépôt: 90200379.7

(22) Date de dépôt:  28.02.1985
(51) Int. Cl.5H01J 49/40
(84) Etats contractants désignés:
DE FR GB SE

(30) Priorité: 29.02.1984 FR 8403127

(62) Numéro de dépôt de la demande initiale en application de l'article 76 CBE:
85400380.3 / 0154590

(71) Demandeur: CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE (CNRS)
75700 Paris Cedex 07 (FR)

(72) Inventeurs:
  • Le Beyec, Yvon
    F-91440 Bures sur Yvette (FR)
  • Della-Negra, Serge
    F-91380 Chilly Mazarin (FR)

(74) Mandataire: Joly, Jean-Jacques et al
Cabinet Beau de Loménie 158, rue de l'Université
F-75340 Paris Cédex 07
F-75340 Paris Cédex 07 (FR)


(56) Documents cités: : 
   
       


    (54) Spectromètre de masse à temps de vol


    (57) Le spectromètre comprend une source d'ions (10), un miroir ionique (14) recevant les ions issus de la source, un premier détecteur (15) placé de manière à recevoir les ions réfléchis par le miroir et un second détecteur (16) disposé derrière le miroir. Un spectre "reflex" d'ions réfléchis par le miroir (14) et reçus par le premier détecteur (15) peut être obtenu en même temps qu'un spectre de neutres provenant de décomposition en vol d'ions métastables et reçus par le deuxième détecteur (16). Cette disposition est particulièrement adaptée à l'étude d'ions métastables, des moyens de traitement (20) étant prévus pour produire des spectres reflex corrélés avec un spectre de netures pour mettre en évidence les contributions des fragments ioniques correspondant à des fragments neutres reçus.




    Description


    [0001] La présente invention concerne un spectromètre de masse à temps de vol.

    [0002] Dans un spectromètre de masse à temps de vol, les ions issus d'une source sont accélérés par un champ électrique et leur masse est déterminée en mesurant le temps de vol des ions jusqu'à leur arrivée sur un détecteur.

    [0003] Dans les spectromètres à temps de vol classique du type direct, les ions sont émis à une extrémité du spectromètre et sont reçus, après un vol direct, à l'autre extrémité. Avec ces spectro­mètres, il est possible d'analyser en masse tous les ions issus de la source, y compris des ions moléculaires qui se décomposent en vol, après accélération, en donnant éventuellement naissance à des espèces neutres. Toutefois, la résolution en masse des spectro­mètres à vol direct peut s'avérer quelquefois insuffisante.

    [0004] Il est bien connu d'améliorer la résolution en masse en allongeant le trajet des ions par réflexion au moyen d'un miroir ionique recevant les ions issus de la source et les réfléchissant vers le détecteur. Le miroir ionique est formé par un ensemble de grilles parallèles, espacées les unes des autres et établissant un champ électrique propre à décélérer les ions et à les réfléchir. Avant leur réflexion, les ions pénètrent plus ou moins profondément dans le miroir en fonction de leur énergie cinétique. Par une configuration adaptée du miroir, il est ainsi possible de compenser des écarts de vitesse entre ions de même masse pour faire en sorte que ces ions arrivent en même temps sur le détecteur après réflexion.

    [0005] Un spectromètre de ce type est décrit dans un article de R. Igersheim et al. paru dans "International Journal of Mass Spectrometry and Ion Physics, Vol. 20, No. 1, mai 1976, pages 77-88, Elsevier Scientific Publishing Co., Amsterdam (NL). Dans ce spectromètre connu, les ions issus de la source située à une extrémité d'un tube de vol sont dirigés vers le miroir situé à l'autre extrémité du tube, en suivant un trajet incident qui forme un angle faible par rapport à la normale au miroir. Les ions sont réfléchis vers un détecteur situé à proximité de la source, de l'autre côté de l'axe du tube par rapport à celle-ci.

    [0006] Mais si l'utilisation d'un miroir apporte des avantages, elle rend impossible l'analyse complète des ions moléculaires métastables qui se décomposent pendant le vol en donnant des espèces neutres, ces dernières n'étant bien évidemment pas réfléchies par le miroir.

    [0007] Il a été proposé de remédier à cette insuffisance en utilisant un premier détecteur placé de manière à recevoir les ions réfléchis par le miroir ionique et un deuxième détecteur placé derrière le miroir de manière à recevoir les espèces neutres éventuelles. La figure 1 annexée montre cette configuration telle que divulguée dans un article de H. Davigel et al. paru dans "International Journal of Mass Spectroscopy and Ions Physics", Vol. 52, Nos 2/3, septembre 1983, pages 223-240, Elsevier Science Publishers Amsterdam (NL). Le miroir M est incliné à 45° sur le trajet des ions issus de la source S pour réfléchir les ions vers un détecteur D1, dans une direction perpendiculaire à celle d'émission, tandis que les espèces neutres et les ions ayant une énergie cinétique suffisante pour traverser le miroir sont reçus par un détecteur D2.

    [0008] Cette construction connue présente des inconvénients.

    [0009] D'abord, il est en pratique impossible d'utiliser le miroir pour compenser des différences de vitesse d'ions de même masse. De plus, l'étude d'ions métastables demanderait un miroir capable de réfléchir des ions de masses très différentes, allant de la masse de l'ion non décomposé aux masses des fractions ioniques provenant de la décomposition en vol. Il serait donc nécessaire de disposer d'un miroir de profondeur relativement importante et les trajectoires réfléchies des ions seraient notablement espacées les unes des autres, selon la profondeur de pénétration dans le miroir. Pour pouvoir intercepter tous les ions réfléchis, il serait alors nécessaire de disposer d'un détecteur D1 de dimensions importantes, c'est-à-dire difficile, voire pratiquement impossible à réaliser.

    [0010] L'utilisation d'un miroir peu profond pour réfléchir des ions dont l'énergie cinétique se situe dans une plage assez large signifie l'établissement dans le miroir d'un champ électrique intense provoquant une réflexion brutale. Les différences de temps de séjour dans le miroir sont alors minimes même pour des ions d'énergies cinétiques notablement différentes. Il s'ensuit que pour des ions métastables, l'écart est très minime entre le temps de vol d'un ion non décomposé et celui d'une fraction ionique après décomposition en vol, l'ion complet et la fraction ionique arrivant sur le miroir avec la même vitesse. Une analyse précise des ions métastables impliquant la mesure de cet écart de temps de vol ne peut alors être réalisée.

    [0011] Aussi la présente invention a-t-elle pour but de fournir un spectromètre à temps de vol permettant une analyse précise et complète d'ions moléculaires métastables tout en conservant une très bonne résolution en masse et avec une structure relativement simple et peu onéreuse.

    [0012] Ce but est atteint grâce à un spectromètre du type comportant une source d'ions à analyser, un miroir ionique destiné à recevoir des ions issus de la source, des moyens pour appliquer un potentiel d'accélération des ions issus de la source en direction du miroir ionique, un premier détecteur disposé de manière à recevoir les ions réfléchis par le miroir, un deuxième détecteur disposé derrière le miroir, des premiers et deuxièmes moyens de conversion temps-numérique pour convertir sous forme numérique les temps de vol entre la source et, respectivement, le premier et le deuxième détecteur, et des premiers et deuxièmes moyens de mémorisation pour enregistrer le nombre d'évènements détectés respectivement par le premier et le deuxième détecteur en fonction du temps de vol afin d'élaborer un spectre des ions réfléchis par le miroir et reçus par le premier détecteur et un spectre des espèces neutres éventuellement apparues pendant le vol et reçues par le deuxième détecteur,
    spectromètre dans lequel, conformément à l'invention, sont en outre prévus :
    - des moyens de sélection pour sélectionner au moins une fenêtre de temps définie par une valeur de temps minimale et une valeur de temps maximale prédéterminées,
    - des moyens de mémorisation supplémentaires, et
    - des moyens de corrélation agissant en réponse à la détection d'un neutre par le deuxième détecteur au bout d'un temps de vol compris dans une fenêtre de temps sélectionnée pour autoriser l'enregistrement, dans un moyen respectif de mémorisation supplémentaire, du nombre d'évènements détectés par le premier détecteur en fonction du temps de vol.

    [0013] Il est ainsi possible d'effectuer une étude précise des ions métastables par corrélation entre le spectre "reflex" élaboré à partir des signaux du premier détecteur et le spectre de "neutres" élaboré à partir des signaux du deuxième détecteur.

    [0014] Suivant une réalisation particulière de l'invention, la source, le miroir ionique, le premier détecteur et le second détecteur sont centrés sur un même axe de symétrie et disposés sensiblement perpendiculairement à celui-ci.

    [0015] Le premier détecteur est de forme annulaire pour laisser un passage central aux ions issus de la source.

    [0016] La disposition des éléments du spectromètre suivant un même axe permet une réalisation compacte. De plus, il est possible de conférer au miroir la profondeur désirée sans qu'il en résulte une dispersion des trajectoires des ions réfléchis en fonction de leurs masses. En conséquence, il n'y a pas d'obstacle pratique à la réalisation du miroir de manière à compenser des variations de vitesse d'ions de mêmes masses.

    [0017] La source d'ions à analyser est par exemple formée par une surface solide bombardée par des particules pour libérer de cette surface les ions dont l'analyse en masse est à effectuer. Le bombardement peut être réalisé au moyen d'ions primaires produits par une source radioactive ²⁵²Cf, d'ions lourds accélérés par cyclotron, d'ions de quelques KeV d'atomes neutres, ou encore d'un rayonnement laser.

    [0018] D'autres particularités et avantages du spectromètre conforme à l'invention ressortiront à la lecture de la description faite ci-après, à titre indicatif mais non limitatif, en référence aux dessins annexés sur lesquels :

    - la figure 1, déjà décrite illustre une configuration d'un spectromètre à temps de vol de l'art antérieur ;

    - la figure 2 est une vue schématique en coupe d'un mode de réalisation d'un spectromètre selon l'invention ;

    - les figures 3a à 3c illustrent de façon très schématique les trajectoires d'ions issus de la source et les spectres correspondants obtenus ;

    - la figure 4 est un organigramme d'opérations effectuées pour l'acquisition de données nécessaires à l'élaboration de spectres "neutres", "reflex" et "corrélés", et

    - les figures 5a à 5f illustrent des spectres "neutre", "réflex" et "corrélés" obtenus avec une source d'ions particulière.



    [0019] Sur la figure 2, la référence 10 désigne une source d'ions moléculaires dont l'analyse en masse est à réaliser. La source 10 est formée par une surface métallique 10a sur laquelle des molécules sont déposées.

    [0020] Une source 11 d'ions primaires est disposée à égale distance entre la source 10 d'ions secondaires et un dispositif de détection 12 destinée à fournir le signal de départ.

    [0021] Dans L'exemple illustré, la source 11 est une source radioactive de ²⁵²Cf. Le californium 252 est un isotope radioactif qui se désintègre en émettant deux fragments de fission dans des directions opposées.

    [0022] L'un des fragments émis vers l'arrière du spectromètre parvient sur une feuille métallique 12a du dispositif de détection 12 et en éjecte des électrons. Un champ électrique est établi entre la feuille 12a et une électrode 12b pour accélérer vers l'arrière les électrons éjectés. Ceux-ci sont reçus par un détecteur l2c situé à l'arrière du spectromètre et qui fournit une impulsion électrique S0 constituant le signal de départ.

    [0023] L'autre fragment de fission émis vers l'avant libère par désorption des ions secondaires de la surface métallique 10a. Les ions secondaires libérés sont accélérés par un champ électrique établi entre la surface métallique 10a et une électrode 13 qui peuvent par exemple être portées à des potentiels respectifs de 10 à 20 kV et 0 kV.

    [0024] Un miroir ionique 14 reçoit les ions secondaires émis et les réfléchit vers un détecteur 15.

    [0025] Le miroir 14 est situé à proximité de l'extrémité avant du spectromètre. Il comprend une première région délimitée par deux grilles 14a et 14b minces et parallèles entre elles ; cette première région constitue une région de décélération des ions reçus, lorsqu'un champ électrique retardateur est établi entre les grilles 14a et 14b. Le miroir comprend ensuite une région de réflexion délimitée par la grille 14b et une grille 14c entre lesquelles est également établi un champ retardateur. A titre d'exemple, les potentiels des grilles 14a, 14b et 14c peuvent être respectivement égaux à 0, 2/3 U et U avec U = ± 8 kV ou ± 10 kV. Des électrodes annulaires 14d à 14h sont disposées à intervalles réguliers entre les grilles 14b et 14c. Les potentiels de ces électrodes sont choisis de manière à imposer une variation uniforme du potentiel entre les grilles 14b et 14c et conférer ainsi au miroir les propriétés souhaitées. En particulier, comme cela est connu en soi, le miroir 14 est conçu de manière à compenser des différences de vitesse entre ions de même masse afin que ceux-ci arrivent en même temps sur le détecteur 15. Cette compensation résulte du fait qu'à masses égales, les ions les plus rapides pénètrent plus profondément dans le miroir avant inversion de leur direction de déplacement.

    [0026] Le détecteur 15 est de forme annulaire et est disposé du côté arrière du spectromètre, mais à l'avant de l'espace d'accélération entre la surface 10a et l'électrode 13. Il permet le passage en son centre des ions secondaires émis par la source 10 et provenant de cet espace d'accélération. L'arrivée d'ions réfléchis sur le détecteur provoque l'émission d'une impulsion S1 constituant un signal d'arrivée.

    [0027] Un deuxième détecteur 16 est placé à l'extrémité avant du spectromètre, derrière le miroir ionique 14, afin de recevoir les espèces ayant traversé le miroir sans être réfléchies et de fournir, en réponse, un signal d'arrivée S2.

    [0028] Lorsque le miroir 14 est activé, les espèces parvenant au détecteur 16 sont les espèces neutres qui sont apparues par suite de la décomposition pendant le vol d'ions moléculaires métastables, les ions non décomposés et les fractions ioniques de décomposition étant quant à eux réfléchis par le miroir et reçus par le détecteur 15.

    [0029] Lorsque le miroir 14 n'est pas activé, un fonctionnement du spectromètre de façon classique (vol direct sans réflexion) est possible. Il peut par exemple être intéressant de comparer les résultats obtenus, d'une part, sous forme d'un spectre "reflex" d'ions et d'un spectre direct d'espèces neutres, lorsque le miroir 14 est activé, et d'autre part, sous forme d'un spectre direct d'ions et d'espèces neutres, lorsque le miroir 14 n'est pas activé.

    [0030] Selon une caractéristique de l'invention, l'ensemble constitué par la source 10 d'ions secondaires, le miroir ionique 14, le premier détecteur 15 et le deuxième détecteur 16 est de symétrie axiale par rapport à l'axe optique des ions. Il n'y a pas de déflexion ou de retour des ions selon un angle différent de celui du trajet direct. L'encombrement de l'ensemble est donc relativement faible, les différents éléments constitutifs énumérés ci-avant étant logés dans un tube droit 17 relié à une source de vide (non représentée).

    [0031] Le spectre de masse "réflex" est élaboré à partir des signaux S0, S1 tandis que le spectre de masse des neutres est élaboré de façon similaire à partir des signaux S0, S2.

    [0032] Pour l'élaboration du spectre de masse "réflex", un convertisseur temps-numérique 18 est relié aux détecteurs 12 et 15. Le convertisseur est déclenché en réponse au signal S0. A chaque fois qu'un ion parvenant au détecteur 15 provoque l'émission d'un signal S1, le convertisseur 18 fournit une information numérique représentant le temps écoulé depuis son déclenchement, c'est-à-dire le temps de vol des ions. Pour réaliser le convertisseur 18, on pourra utiliser par exemple le circuit dont le principe est décrit par E. Festa et R. Sellem dans la publication "Nuclear Instruments and Methods" no 188 (1981) p. 99. Après avoir reçu un signal de départ, un tel convertisseur peut accepter, dans un intervalle de temps limité prédéterminé (par exemple 16 ou 32 microsecondes) plusieurs signaux d'arrêt (par exemple 32) et fournit, en réponse à chaque signal d'arrêt un mot numérique représentant le temps écoulé depuis la réception du signal de départ. Les informations numériques ainsi fournies après chaque désorption sont enregistrées dans un circuit de mémoire d'un dispositif de traitement 20 pour être cumulées avec celles obtenues en réponse aux autres désorptions afin d'élaborer un spectre de masse en portant en abscisse le temps de vol et en ordonnée le nombre d'évènements comptés au cours de désorptions successives. Le spectre de masse présente des pics indiquant chacun une répétition de temps de vol identiques, c'est-à-dire une répétition de réception d'ions de même masse correspondant à l'abcisse du pic.

    [0033] Un second convertisseur temps-numérique 19 est relié aux détecteurs 12 et 16 pour fournir le spectre de masse des neutres.

    [0034] L'élaboration des spectres de masse, telle que présentée succintement ci-avant, est réalisée au moyen du circuit de traitement 20 sous forme d'un circuit à microprocesseur. En bref, les informations numériques fournies par le convertisseur 18 constituent des adresses d'écriture dans une mémoire de spectre "reflex" MSR où sont cumulés les évènements détectés par le détecteur 15. Au bout d'un temps d'analyse déterminé par l'opérateur, le contenu de la mémoire MSR est lu pour élaborer des informations graphiques permettant d'afficher le spectre "reflex" sur un écran de tube cathodique 22. De la même manière, les informations numériques fournies par le convertisseur 19 constituent des adresses d'écriture dans une mémoire de spectre de neutres MSN où sont cumulés les évènements détectés par le détecteur 16. A la fin du temps d'analyse, le contenu de la mémoire MSN est lu pour élaborer des informations graphiques permettant d'afficher le spectre des neutres sur l'écran du tube 22. L'écriture et la lecture dans la mémoire MSR ou MSN, l'élaboration des informations graphiques et la commande de l'affichage sur l'écran du tube 22 sont commandées par un circuit 21 de façon bien connue en soi qu'il n'est pas utile de détailler ici.

    [0035] Bien que l'on ait envisagé l'utilisation de fragments de fission de ²⁵²Cf pour la désorption des ions secondaires, celle-ci peut aussi être obtenue avec un rayonnement laser dirigé sur la surface 10a ou par des ions d'une énergie de 10 à 100 KeV monochargés ou multichargés avec, dans ce dernier cas, un état de charge pouvant être élevé (par exemple jusqu'à 30⁺). Des atomes neutres peuvent aussi être utilisés pour la désorption par impact sur la surface 10a. Enfin, des ions avec une énergie de plusieurs MeV (par exemple jusqu'à 100 MeV ou plus), tels que ceux délivrés par un accélérateur de particules (cyclotron tandem, etc) peuvent créer également la désorption d'ions secondaires.

    [0036] Le spectromètre conforme à l'invention est particulière­ment avantageux en ce qu'il permet avec une structure simple de combiner une résolution en masse élevée, grâce à la réflexion par le miroir ionique, avec la possibilité de détection des neutres qui, dans certains cas, contribuent pour une part importante au "pic" moléculaire du spectre obtenu. A titre indicatif, en utilisation avec réflexion, une résolution en masse d'environ 2500 peut être obtenue, alors qu'en utilisation avec vol direct, cette résolution en masse atteint seulement environ 600.

    [0037] L'utilisation du spectromètre pour l'étude d'ions moléculaires métastables sera maintenant décrite en détail.

    [0038] La figure 3a illustre la trajectoire d'un ion moléculaire métastable m⁺ entre la source 10 et le détecteur 15, étant supposé que l'ion ne se décompose pas pendant le vol. L'ion m⁺ est accéléré jusqu'à une vitesse v et pénètre dans le miroir jusqu'à une profondeur d ou règne un potentiel Um, cette profondeur d étant fonction de l'énergie cinétique de l'ion m⁺. La figure 2a montre également la contribution des ions m⁺ au spectre reflex sous forme d'une raie au temps de vol tm⁺.

    [0039] Dans le cas de la figure 2b, on supose que l'ion métastable m⁺ est décomposé pratiquement au moment du passage de l'ion primaire et un instant extrèmement bref après. Pour simplifier, on suppose également que la décomposition donne naissance à une fraction ionique m1⁺ et à une fraction neutre mO (m⁺ → m1⁺ + mO) L'ion m1⁺ est accéléré jusqu'à une vitesse V et pénètre dans le miroir jusqu'à la profondeur d. La figure 2b montre également la contribution des fractions ioniques m1⁺ en spectre reflex sous forme d'une raie au temps de vol tm1⁺ en avance par rapport à tm⁺.

    [0040] Dans le cas de la figure 2c, on suppose que la décomposition de l'ion métastable m⁺ intervient après la sortie de l'espace d'accélération. Les fractions ionique m1s⁺ et neutre m0 conservent la vitesse v. La fraction neutre va alors atteindre le détecteur 16 au bout d'un temps de vol tm0 qui correspond au temps de vol tm⁺ de l'ion métastable non décomposé. La fraction ionique m1s⁺ est réfléchie par le miroir 14 mais son temps de séjour y est inférieur à celui de l'ion m⁺ car si leur vitesse est la même, leurs énergies sont différentes. L'ion m1s⁺ pénètre jusqu'à une profondeur d1s où règne un potentiel Um1s. La fraction ionique m1s⁺ atteint alors le détecteur au bout d'un temps de vol tm1s⁺ compris entre tm1⁺ et tm⁺. La figure 2c montre la contribution des fractions neutres m0 sous forme d'une raie au temps de vol tm0 (correspondant à tm⁺) dans le spectre de neutres et la conribution des fractions ioniques m1s⁺ sous forme d'un pic au temps de vol t1s⁺ (compris entre tm1⁺ et tm⁺) dans le spectre reflex.

    [0041] Il est important de noter que la différence entre les temps de vol tm⁺ et tm1s⁺ provient de la différence dt entre les temps de séjour dans le miroir 14. La masse m1s de la fraction ionique mls⁺ est déduite de la mesure de la différence dt. On a en effet :
    m - m1s = K.m1/2.dt,
    m étant la masse de l'ion m⁺ et K un coefficient qui est déterminé par calibration en utilisant un ion moléculaire métastable dont la réaction de décomposition est bien connue. La valeur de dt est déterminée d'après le spectre "reflex" en mesurant la différence entre les axes des pics aux temps tm⁺ et tm1s⁺. La décomposition de l'ion métastable en vol s'accompagne d'une modification plus ou moins sensible de la trajectoire et de la vitesse des fractions par rapport à la trajectoire et à la vitesse initiale de l'ion ; il en résulte, sur le spectre reflex, un élargissement du pic de la fraction ionique par rapport aux pics des ions non décomposés. Aussi, pour obtenir un résultat avec une précision suffisamment élevée, il est important que les deux pics aux temps tm⁺ et tm1s⁺ soient bien distincts l'un de l'autre, donc que la différence entre les temps de séjour dans le miroir soit significative. Il ne peut pas en être ainsi dans le cas d'un miroir ayant très peu de profondeur et présentant un champ électrique d'une grande intensité réfléchissant brutalement et de manière sensiblement uniforme des ions dont les masses sont dans une plage assez étendue.

    [0042] Les pics produits dans le spectre "reflex" par des fractions ioniques provenant de la décomposition en vol d'ions moléculaires métastables peuvent être relativement faibles par rapport aux pics produits par des ions désorbés non décomposés en vol.

    [0043] Selon une particularité de l'invention, une mise en valeur de ces pics est réalisée par analyse d'informations coïncidentes. Si l'on se réfère à la figure 3c, on voit que les spectres de neutres et "reflex" sont corrélés. En effet, en supposant une efficacité à 100 % de la détection et de la transmission des informations détectées, à chaque évènement comptabilisé dans le spectre de neutres (réception d'une fraction neutre) correspond au moins un évènement dans le spectre "reflex" (réception d'au moins une fraction ionique complémentaire de la fraction neutre). Lorsqu'un pic apparait dans le spectre des neutres à l'instant tm0, un spectre reflex corrélé avec la masse m0 est élaboré en ne retenant les évènements détectés au moyen du détecteur 15 que dans la mesure où un évènement est détecté au moyen du détecteur 16 dans une fenêtre de temps centrée sur tm0. On produit de la sorte un renforcement relatif dans le spectre reflex corrélé des pics de fractions ioniques complémentaires de la fraction neutre m0 puisque ne sont pas pris en compte les évènements qui ne coïncident pas avec la détection d'une fraction neutre.

    [0044] L'élaboration de spectres corrélés est réalisée en pratique comme suit.

    [0045] Un spectre de neutres est d'abord élaboré afin de permettre à l'opérateur de visualiser les pics de fractions neutres et de prédéterminer des fenêtres de temps centrées sur chaque axe de pic, par exemple une fenêtre (t1m, t1M) pour un premier pic, une fenêtre (t2m, t2M) pour un deuxième pic, et ainsi de suite. Les valeurs limites ansi prédéterminées sont enregistrées.

    [0046] Le circuit de traitement 20, outre les mémoires MSR et MSN comprend des mémoires MSR1, MSR2, ... destinées à l'enregistrement des informations nécessaires à l'élaboration des spectres corrélés.

    [0047] Cette élaboration est réalisée sous la commande du circuit 21 par mise en oeuvre d'un programme dont l'organigramme est représenté sur la figure 4. Il est supposé que deux fenêtres de temps (t1m, t1M) et (t2m, t2M) ont été prédéterminées par l'opérateur.

    [0048] A partir du début de l'analyse, les opérations suivantes sont effectuées :
    - lecture et enregistrement des informations numériques tvR fournies par le convertisseur 18 (temps de vol "reflex") en réponse à chaque signal de départ S0,
    - ecriture dans la mémoire MSR aux adresses définies par les informations tvR enregistrées,
    - lecture et enregistrement des informations numérique tvN fournies par le convertisseur 19 (temps de vol des neutres),
    - écriture dans la mémoire MSN aux adresses définies par les informations tvN enregistrées (les opérations de lecture, enregistrement et écriture concernant les temps de vol reflex peuvent être conduites en parallèle avec elles concernant les temps de vol des neutres),
    - recherche si une fraction neutre est reçue pendant la première fenêtre de temps prédéterminée, par réalisation d'un test t1m < tvN < t1M ; si ce test est positif, écriture dans la mémoire MSR1 aux adresses définies par les informations tvR enregistrées,
    - recherche si une fraction neutre est reçue pendant la deuxième fenêtre de temps prédéterminée, par réalisation d'un test t2m < tvN < t2M ; si ce test est positif, écriture dans la mémoire MSR2 aux adresses définies par les informations tvR enregistrées,
    - si la fin d'analyse n'est pas demandée, retour en attente de la réception d'un nouveau signal de départ,
    - si la fin d'analyse est demandée, retour au programme principal, par exemple pour exécuter une demande d'affichage d'un spectre par conversion sous forme graphique des informations enregistrées dans l'une des mémoires MSR, MSN, MSR1, et MSR2.

    [0049] Les figures 5a, 5b et 5c illustrent respectivement un spectre de neutres, un spectre reflex complet et un spectre reflex corrélé obtenus par analyse du composé organique adénosine.

    [0050] Le spectre de neutres montre deux pics à des temps correspondant à des masses 136 et 268. Le spectre reflex complet montre aussi deux pics à des temps correspondant aux masses 136 et 268. On retrouve ainsi dans le spectre de neutres et dans le spectre reflex les contributions des ions 136 et 268 selon qu'ils se sont décomposés ou non pendant le vol. Le pic au temps tm correspondant à la masse 268 n'est pas visible sur la figure 5b, l'échelle des temps étant différente de celle utilisée sur la figure 5a.

    [0051] Le spectre reflex présente également un faible pic élargi au temps tm1s. Ce pic est beaucoup plus visible sur la figure 5c qui représente le spectre reflex corrélé avec la masse 268 du spectre de neutres. La mise en valeur du pic de fraction ionique par la corrélation est particulièrement nette. On note également, comme cela a déjà été indiqué, que le pic de fraction ionique est beaucoup plus étalé dans le temps que les pics d'ions non décomposés, cela étant dû à la dispersion de vitesse et trajectoire suite à la décomposition. La mesure de la différence entre l'abscisse tm1s et celle tm de la masse 268 permet de déterminer la masse m1 de la fraction ionique. Dans cet exemple, la décomposition est de la forme suivante :
    268⁺ → (B + 2H⁺) + neutres et la masse de fraction ionique est égale à 136.

    [0052] Le spectre de neutres de la figure 5a montre aussi un pic pour la masse 136. On a représenté sur les figures 5d et 5e des parties correspondantes du spectre reflex normal et du spectre "reflex" corrélé avec la masse 136. Ce dernier met en lumièrè des pics élargis à des temps tm2s, tm3s et tm4s, correspondant à des décompositions de l'ion 136⁺ respectivement en 18⁺ + neutres, 94⁺ + neutres et 119⁺ neutres.

    [0053] Une amélioration de la mise en valeur des pics de fractions ioniques est encore possible en éliminant du spectre "reflex" corrélé de la figure 5e les évènements qui ne résultent pas de décompositions en vol. Ceci est obtenu en soustrayant du spectre "reflex" corrélé une fraction du pic "reflex" complet, cette fraction étant déterminée par l'opérateur de manière à éliminer un pic bien reconnaissable dont on sait qu'il n'est pas dû à une fraction ionique provenant d'une décomposition. Dans l'exemple illustré, on peut se baser par exemple sur le pic correspondant à la masse 136. L'opérateur détermine l'ordonnée N de ce pic sur le spectre "reflex", normal, l'ordonnée n du pic correspondant sur le spectre reflex corrélé pour prédéterminer un rapport k = n/N. Un spectre corrélé corrigé des évènements non dûs à des décompositions en vol est alors élaboré sous la commande du circuit 21 par mise en oeuvre d'un programme comportant les opérations suivantes :
    - lecture du contenu N1 de la mémoire MSR à une première adresse,
    - lecture du contenu n1 de la mémoire MSR1 à la même adresse,
    - calcul de n'1 = n1 - kN1,
    - écriture de n'1 à une première adresse d'une mémoire MSR'1 (non représentée), et
    - passage à l'adresse suivante jusqu'à lecture complète des mémoires MSR et MSR1.

    [0054] L'information contenue dans la mémoire MSR'1, qui est une combinaison linéaire des informations contenues dans les mémoires MSR et MSR1, est lue pour être convertie sous forme graphique afin d'afficher à l'écran le spectre corrélé corrigé.


    Revendications

    1. Spectromètre de masse à temps de vol comportant une source d'ions à analyser (10), un miroir ionique (14) destiné à recevoir des ions issus de la source (10), des moyens pour appliquer un potentiel d'accélération des ions issus de la source (10) en direction du miroir ionique (14), un premier détecteur (15) disposé de manière à recevoir les ions réfléchis par le miroir, un deuxième détecteur (16) disposé derrière le miroir, des premiers et deuxièmes moyens de conversion temps-numérique (18, 19) pour convertir sous forme numérique les temps de vol entre la source (10) et, respectivement, le premier et le deuxième détecteur (15, 16), et des premiers et deuxièmes moyens de mémorisation (MSR, MSN) pour enregistrer le nombre d'évènements détectés respectivement par le premier et le deuxième détecteur (15, 16) en fonction du temps de vol afin d'élaborer un spectre des ions réfléchis par le miroir et reçus par le premier détecteur et un spectre des espèces neutres éventuellement apparues pendant le vol et reçues par le deuxième détecteur, spectromètre caractérisé en ce qu'il comprend en outre :
    - des moyens de sélection pour sélectionner au moins une fenêtre de temps définie par une valeur de temps minimale et une valeur de temps maximale prédéterminées,
    - des moyens de mémorisation supplémentaires (MSR1, MSR2,...), et
    - des moyens de corrélation agissant en réponse à la détection d'un neutre par le deuxième détecteur (16) au bout d'un temps de vol compris dans une fenêtre de temps sélectionnée pour autoriser l'enregistrement, dans un moyen respectif de mémorisation supplémentaire (MSR1, MSR2, ...), du nombre d'évènements détectés par le premier détecteur (15) en fonction du temps de vol.
     
    2. Spectromètre selon la revendication 1, caractérisé en ce qu'il comporte des moyens pour calculer et enregistrer des informations obtenues par combinaison linéaire du contenu du premier moyen de mémorisation (MSR) et du contenu d'un moyen de mémorisation supplémentaire (MSR1, MSR2, ...).
     
    3. Spectromètre selon l'une quelconque des revendications 1 et 2, caractérisé en ce que la source (10), le miroir ionique (14), le premier détecteur (15) et le second détecteur (16) sont centrés sur un même axe de symétrie et disposés sensiblement perpendiculairement à celui-ci.
     
    4. Spectromètre selon la revendication 3, caractérisé en ce que le premier détecteur (15) est situé entre la source (10) et le miroir (14) et est de forme annulaire pour laisser un passage central aux ions issus de la source (10).
     




    Dessins