[0001] La présente invention a pour objet un procédé pour la fabrication de sulfure de
métal alcalin.
[0002] Un procédé connu pour fabriquer du sulfure de sodium consiste à faire réagir une
solution de polysulfure de sodium avec un amalgame de sodium obtenu par électrolyse
d'une solution aqueuse de chlorure de sodium dans une cellule d'électrolyse à cathode
de mercure (J.S. SCONCE - Chlorine, Its Manufacture, Properties and Uses - Reinhold
Publishing Corporation, 1962 - page 180). Ce procédé connu présente l'inconvénient
d'impliquer la mise en oeuvre d'un amalgame de sodium dont l'obtention par électrolyse
est une opération onéreuse, qui se complique par ailleurs par la nécessité d'éviter
une contamination de l'environnement par du mercure. Il est d'autre part difficile
d'éviter la présence de mercure dans le sulfure de sodium produit, ce qui constitue
un autre désavantage de ce procédé connu.
[0003] L'invention vise à fournir un nouveau procédé qui évite les inconvénients précités.
[0004] L'invention concerne dès lors un procédé de fabrication de sulfure de métal alcalin,
selon lequel on met en oeuvre une cellule d'électrolyse dans laquelle une membrane
perméable sélectivement aux cations sépare une chambre anodique contenant une anode,
d'une chambre cathodique contenant une cathode, on électrolyse un électrolyte contenant
des cations dudit métal alcalin dans la chambre anodique et on électrolyse simultanément
une solution aqueuse de polysulfure du métal alcalin dans la chambre cathodique.
[0005] Le procédé selon l'invention implique la mise en oeuvre d'une cellule d'électrolyse
du type à membrane perméable sélectivement aux cations. Elle peut être une cellule
à membrane conçue sur le modèle de celles convenant pour la production de chlore et
d'hydroxyde de sodium par électrolyse de solutions aqueuses de chlorure de sodium.
[0006] La membrane a pour fonction de séparer physiquement l'électrolyte contenu dans la
chambre anodique, de la solution de polysulfure contenue dans la chambre cathodique,
en permettant seulement le transfert de cations de la chambre anodique vers la chambre
cathodique. Elle doit être en un matériau inerte vis-à-vis de l'électrolyte mis en
oeuvre dans la chambre anodique et vis-à-vis de la solution de polysulfure de métal
alcalin. On peut généralement utiliser des membranes en polymère fluoré contenant
des groupements fonctionnels dérivés d'acides carboxyliques, phosphoniques ou sulfoniques.
Des membranes préférées sont celles en polymère perfluoré contenant des groupements
fonctionnels dérivés d'acides sulfoniques et/ou carboxyliques. Des exemples de membranes
de ce type sont celles décrites dans les documents GB-A-1497748 et GB-A-1497749 (ASAHI
KASEI KOGYO K.K.), GB-A-1518387, GB-A-1522877 et US-A-4126588 (ASAHI GLASS COMPANY
LTD) et GB-A-1402920 (DIAMOND SHAMROCK CORP.). Des exemples de membranes adaptées
au procédé selon l'invention sont celles connues sous les marques NAFION (DU PONT
DE NEMOURS & CO) et FLEMION (ASAHI GLASS COMPANY LTD).
[0007] Le choix des matériaux de l'anode et de la cathode est conditionné par la nécessité
qu'elles résistent mécaniquement et chimiquement aux conditions de l'électrolyse.
Le matériau de la cathode doit par ailleurs satisfaire à la condition de réaliser,
pendant l'électrolyse, une réduction du soufre; il convient dès lors de le choisir
parmi ceux présentant un potentiel de réduction du soufre plus positif que celui
de l'hydrogène, dans les conditions de l'électrolyse. Des exemples de cathodes utilisables
dans le procédé selon l'invention sont celles dont le matériau actif catalysant la
réaction d'électrolyse est sélectionné parmi le sulfure de molybdène, le sulfure de
cuivre, les métaux du groupe 8 du tableau périodique des éléments et les alliages,
les sulfures et les oxydes de ces métaux. Le nickel, le cobalt, le platine, le rhodium,
le ruthénium, l'osmium, l'iridium, les oxydes de ces métaux, le sulfure de molybdène
et le sulfure de cuivre sont préférés.
[0008] Le choix de l'anode dépend de l'électrolyte mis en oeuvre dans la chambre anodique
de la cellule d'électrolyse, pour engendrer une oxydation électrochimique de l'électrolyte
dans des conditions normales d'électrolyse.
[0009] L'électrolyte contenant des cations de métal alcalin est de préférence un électrolyte
aqueux. Il est avantageusement choisi parmi les solutions aqueuses d'hydroxyde de
métal alcalin et les solutions aqueuses des sels hydrosolubles des métaux alcalins.
Les sels donnant lieu à l'émission d'un gaz à l'anode au cours de l'électrolyse sont
préférés, tels que les chlorures, les fluorures, les carbonates, les sulfates et les
phosphates par exemple. Le cas échéant, on choisit l'anode de manière à obtenir un
dégagement d'halogène ou d'oxygène dans les conditions normales d'électrolyse.
[0010] La solution aqueuse de polysulfure de métal alcalin peut être obtenue par tous moyens
adéquats. Elle est avantageusement obtenue en dissolvant du soufre dans une solution
aqueuse de sulfure de métal alcalin, selon la réaction :
M₂S + xS → M₂S
1+x
dans laquelle M désigne le métal alcalin.
[0011] Dans le procédé selon l'invention, du soufre est réduit à la cathode et des cations
de métal alcalin passent de la chambre anodique dans la chambre cathodique en traversant
la membrane, ce qui a pour résultat de convertir progressivement le polysulfure de
métal alcalin en sulfure de métal alcalin.
[0012] A l'issue de l'électrolyse, on recueille de la chambre cathodique une solution aqueuse
de sulfure de métal alcalin. Le sulfure de métal alcalin peut ensuite être extrait
de la solution, par exemple par évaporation de celle-ci.
[0013] L'invention s'applique notamment à la fabrication de sulfure de sodium, à l'état
anhydre ou hydraté (généralement nonahydraté).
[0014] Des particularités et détails de l'invention vont ressortir de la description suivante
de quelques formes de realisation du procédé selon l'invention, en référence à la
figure unique du dessin annexé qui représente le schéma d'une cellule d'électrolyse
à membrane.
[0015] La cellule d'électrolyse représentée à la figure comprend une enceinte 1 qui est
divisée, par un séparateur 2, en deux chambres respectivement anodique 3 et cathodique
4.
[0016] Le séparateur 2 est une membrane à perméabilité sélective aux cations; elle est par
exemple une membrane NAFION (DU PONT DE NEMOURS & CO), qui est constituée d'une feuille
en polymère perfluoré comprenant des groupements fonctionnels dérivés d'acides sulfoniques.
[0017] La chambre anodique 3 contient une anode 5 et la chambre cathodique 4 contient une
cathode 6. L'anode 5 et la cathode 6 sont couplées respectivement à la borne positive
et à la borne négative d'une source de courant continu, non représentée.
[0018] Dans une première forme d'exécution du procédé selon l'invention, on alimente la
chambre anodique 3 avec une solution aqueuse sensiblement saturée de chlorure de sodium
7; simultanément, on alimente la chambre cathodique 4 avec une solution aqueuse de
polysulfure de sodium 8 obtenue en dissolvant du soufre 9 dans une solution aqueuse
de sulfure de sodium 10, en amont de la cellule. Pendant l'électrolyse, du chlore
est produit à l'anode et du soufre est réduit à la cathode. Simultanément, sous l'action
du champ électrique entre les électrodes 5 et 6, des cations de sodium de la chambre
anodique 3 traversent la membrane 2 et pénètrent dans la chambre cathodique 4. Le
processus électrochimique peut dès lors être résumé par les réactions suivantes :

[0019] On recueille de la chambre anodique 3, du chlore 11 et une solution diluée de chlorure
de sodium 12. Simultanément, on recueille de la chambre cathodique une solution aqueuse
13, enrichie en sulfure de sodium. La solution 13 peut être traitée pour en extraire
le sulfure de sodium, par exemple par une technique de cristallisation.
[0020] La forme de réalisation qui vient d'être décrite permet ainsi la fabrication simultanée
de chlore et de sulfure de sodium.
[0021] Dans une autre forme de réalisation de l'invention, on substitue à la solution de
chlorure de sodium 7, une solution aqueuse concentrée d'hydroxyde de sodium. Pendant
l'électrolyse, de l'oxygène est produit à l'anode. Le processus électrochimique dans
la cellule peut dès lors être résumé par les réactions suivantes :

[0022] Les exemples suivants servent à illustrer l'invention.
Exemple 1
[0023] On a mis en oeuvre une cellule d'électrolyse présentant les caractéristiques suivantes
:
- anode : plaque perforée en titane, recouverte d'une couche formée d'un mélange équimolaire
d'oxyde de ruthénium et de dioxyde de titane;
- cathode : tôle déployée en nickel;
- aire de la surface utile d'électrolyse : 14 cm²;
- écart entre l'anode et la cathode : 2 mm;
- membrane perfluorée du type sulfonique, NAFION (DU PONT DE NEMOURS & CO).
[0024] La chambre anodique de la cellule a été alimentée avec une solution aqueuse contenant
220 g de chlorure de sodium par kg, avec un débit de 100 cm³/heure.
[0025] On a fait circuler en boucle dans la chambre cathodique, à la vitesse de 24 cm/s,
370 cm³ d'une solution aqueuse contenant initialement 4 moles de sulfure de sodium
et 1 mole de soufre par litre.
[0026] On a imposé une différence de potentiel de 3,22 V aux bornes de la cellule d'électrolyse;
on a par ailleurs maintenu le potentiel de la cathode à -1,1 V au moyen d'un circuit
potentiostatique. La température dans la cellule a été maintenue à 73°C.
[0027] A l'issue de l'électrolyse, qui a duré 4,4 heures, la teneur en soufre dans la solution
de la chambre cathodique était tombée à environ 0,15 mole/litre.
Exemple 2
[0028] On a utilisé une cellule analogue à celle de l'exemple 1, dans laquelle l'anode a
consisté en une tôle déployée en nickel, identique à la cathode.
[0029] On a procédé comme à l'exemple 1, dans les conditions suivantes :
- électrolyte dans la chambre anodique : solution aqueuse d'hydroxyde de sodium (320
g/kg), au débit de 70 cm³/heure;
- électrolyte dans la chambre cathodique : solution aqueuse contenant 4 moles de sulfure
de sodium et 1 mole de soufre par litre;
- différence de potentiel aux bornes de la cellule, au démarrage de l'électrolyse
: 3,01 V;
- potentiel constant imposé à la cathode : -0,91V;
- température : 75°C.
[0030] A l'issue de l'électrolyse, qui a duré 10,8 heures, la teneur en soufre dans la solution
de la chambre anodique était tombée à environ 0,002 mole/litre.
Exemple 3
[0031] On a reproduit les conditions de l'exemple 2, en imposant cette fois une densité
de courant constante, égale à 4 kA par m² d'aire de l'anode, pendant toute la durée
de l'électrolyse. Par ailleurs, on n'a plus imposé le potentiel de la cathode.
[0032] Après 1,5 heure d'électrolyse, de l'hydrogène a commencé à se dégager à la cathode,
et on a dès lors arrêté l'électrolyse. La teneur résiduelle en soufre dans la solution
de sulfure de sodium recueillie de la chambre cathodique était de 0,7 mole/litre.
1 - Procédé de fabrication de sulfure de métal alcalin, caractérisé en ce qu'on met
en oeuvre une cellule d'électrolyse dans laquelle une membrane perméable sélectivement
aux cations sépare une chambre anodique contenant une anode, d'une chambre cathodique
contenant une cathode, on électrolyse un électrolyte contenant du métal alcalin dans
la chambre anodique et on électrolyse simultanément une solution aqueuse de polysulfure
du métal alcalin dans la chambre cathodique.
2 - Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que la solution de polysulfure
de métal alcalin est obtenue en dissolvant du soufre dans une solution aqueuse de
sulfure de métal alcalin.
3 - Procédé selon la revendication 1 ou 2, caractérisé en ce qu'on sélectionne l'électrolyte
contenant des ions du métal alcalin parmi les solutions aqueuses de chlorure et d'hydroxyde
du métal alcalin.
4 - Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisé en ce qu'on
met en oeuvre une cellule d'électrolyse dans laquelle la membrane est en un polymère
perfluoré comprenant des groupements fonctionnels dérivés d'acides sulfoniques et/ou
carboxyliques.
5 - Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 4, caractérisé en ce qu'on
met en oeuvre une cellule d'électrolyse dans laquelle la cathode comprend un matériau
actif sélectionné parmi le sulfure de molybdène, le sulfure de cuivre, les métaux
du groupe 8 du tableau périodique des éléments, ainsi que les alliages, les sulfures
et les oxydes desdits métaux.
6 - Procédé selon la revendication 5, caractérisé en ce qu'on sélectionne le matériau
actif de la cathode parmi le nickel, le cobalt, le platine, le rhodium, le ruthénium,
l'osmium, l'iridium et les oxydes de platine, de rhodium, de ruthénium, d'osmium et
d'iridium.
7 - Procédé selon la revendication 5, caractérisé en ce qu'on met en oeuvre une cathode
comprenant un substrat en nickel et un revêtement de sulfure de molybdène ou de sulfure
de cuivre.
8 - Procédé selon la revendication 6, caractérisé en ce qu'on met en oeuvre une cathode
comprenant un substrat en titane et un revêtement en oxyde d'un métal sélectionné
parmi le platine, le rhodium, le ruthénium, l'osmium et l'iridium.
9 - Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 8, caractérisé en ce qu'il
est appliqué à la production de sulfure de sodium.