[0001] L'invention concerne une feuille bitumineuse d'étanchéité destinée à recevoir une
couche d'asphalte coulé, dans le but de réaliser l'étanchéité notamment de toitures
terrasses, d'ouvrages d'art, de planchers de parkings, de bassins de rétention, etc.
[0002] Les revêtements d'étanchéité dits "bicouche" sont de deux types
- l'un obtenu par deux coulées successives d'asphalte, la première d'asphalte pur
et la seconde d'asphalte contenant comme additifs du sable et des gravillons;
- l'autre obtenu par utilisation d'une feuille souple bitumineuse qui se compose d'une
armature (généralement un voile de verre) imprégnée d'un mélange bitumineux (composé
de bitume, d'une ou de charges et d'un ou de polymères modificateurs) et qui est posée,
avec ou sans fixation, sur la surface à revêtir, avant qu'y soit coulée une couche
d'asphalte. Cet asphalte est constitué d'un mélange de bitume, de charges, de poudre
de minerai d'asphalte, de granulats minéraux (sables et graviers) et éventuellement
de polymères. Un des inconvénients de cette solution réside dans le fait que, lors
de la coulée à chaud de l'asphalte, le bitume de la composition bitumineuse de la
feuille souple fond et, du fait de sa plus faible densité, a tendance à remonter à
travers la couche d'asphalte et peut entraîner la formation de points faibles. Ces
remontées sont visibles en surface sous forme de taches et de pustules. Pour éviter
cet inconvénient, on place généralement sur la surface de la feuille bitumineuse une
feuille étanche soit métallique (par exemple feuille d'aluminium) soit en matière
plastique (par exemple film de polyéthylène). Cette feuille étanche peut être posée
sur le chantier ou intégrée à la feuille bitumineuse lors de la fabrication de celle-ci.
Dans les deux cas, le coût est augmenté et il se pose des problèmes d'adhérence en
plus des risques de déchirures de la feuille étanche.
[0003] Une autre solution proposée (FR-A-2 580 990) consiste à incorporer à la feuille bitumineuse
un écran tissé ou non-tissé imperméable ou presque au bitume sous-jacent. En pratique,
il faut alors choisir, pour la composition bitumineuse de la feuille, un bitume de
densité et de point de ramollissement plus élevés que les bitumes normalement employés
et utiliser un écran de grammage important (50 à 500 g/m²). Des essais montrent que
cela n'est pas suffisant pour empêcher les remontées de bitume au travers de la couche
d'asphalte ultérieurement déposée, et le produit est coûteux.
[0004] L'invention permet de résoudre le problème en fournissant une feuille bitumineuse
du type ci-dessus, comportant sur la face destinée à recevoir la couche d'asphalte
une couche fusible d'un matériau fondant à une température inférieure à la température
de coulée de l'asphalte particulier utilisé et absorbant une part suffisante de la
chaleur de cette coulée pour que la fusion du bitume sous-jacent s'en trouve empêchée.
[0005] Par couche fusible, on entend une couche dont les caractéristiques de chaleur latente
de changement d'état associées à des caractéristiques physiques (grammages, épaisseurs,
etc ...) permettent la fusion totale ou quasi totale de la couche, avec absorption
de chaleur. C'est cette absorption de chaleur qui empêchera la feuille bitumineuse
de trop monter en température et le bitume de se liquéfier. La coulée de l'asphalte
se fait à des températures de l'ordre de 200 à 240°C, en fonction de la composition
exacte de l'asphalte utilisé mais est en tous les cas inférieure à 260°C qui est la
température maximale des essais usuels. Dans les écrans utilisés dans la technique
antérieure, soit le matériau utilisé, et c'est le cas notamment des voiles de verre,
a un point de fusion nettement supérieur à la température de coulée de l'asphalte,
soit le grammage de produit de point de fusion équivalent utilisé (50 à 500 g/m²)
n'autorise au plus qu'un ramollissement partiel du matériau qui continue à transmettre
la chaleur à la couche inférieure.
[0006] Le matériau fusible utilisé doit avoir une chaleur latente de changement d'état suffisante
et être compatible avec la feuille bitumineuse et l'asphalte, et on emploiera avantageusement
une matière plastique sous forme de non-tissé avec un grammage de 20 à 60 g/m², de
préférence de 20 à 40 g/m². On obtient de bons résultats avec les polyesters, qui
donnent en particulier une très bonne adhérence entre la feuille bitumineuse et l'asphalte
coulé ultérieurement. On notera par ailleurs que les polyéthylènes de manière générale
ne conviennent pas car leur chaleur latente de changement d'état n'est pas suffisante.
Le spécialiste déterminera par des essais appropriés si la chaleur latente d'un produit
donné est suffisante pour une utilisation dans un contexte donné, en fonction du bitume
et de l'asphalte particuliers.
[0007] D'autres caractéristiques et avantages de la présente invention apparaîtront à la
lecture de la description détaillée suivante faite en référence au dessin annexé dans
lequel:
la figure 1 est une représentation schématique en coupe de la feuille bitumineuse
selon la présente invention,
la figure 2 est une représentation schématique en coupe d'un détail des bords de la
feuille bitumineuse, et
la figure 3 est une représentation schématique en coupe de l'utilisation d'une feuille
bitumineuse selon l'invention.
[0008] On prépare une feuille bitumineuse 1 en imprégnant une armature 2, par exemple un
voile de verre de 100 g/m², à l'aide d'une composition bitumineuse 3, éventuellement
une composition de bitume modifiée par des polymères (SBS,APP ou polypropylène atactique,
etc.) couramment utilisée dans le domaine, par exemple une de celles disponsibles
sur le marché. Il n'est pas nécessaire de modifier les propriétés des compositions
du commerce, avec les avantages qui en découlent. De manière générale, l'armature
2 sera située en partie basse de la feuille bitumineuse terminée et a pour rôle de
donner à la feuille une certaine tenue pendant la manutention et la mise en oeuvre.
[0009] Après imprégnation de l'armature, la feuille bitumineuse est calandrée et reçoit
une couche 4 d'un matériau fusible dans la gamme de température de coulée de l'asphalte.
La nature et la quantité de ce matériau fusible sont déterminées de telle sorte qu'il
subisse une fusion totale ou quasi-totale lors de la coulée de l'asphalte chaud. Cette
fusion se produisant avec absorption de chaleur en raison du changement d'étant du
matériau, une partie de la chaleur dégagée par l'asphalte est ainsi absorbée sans
élévation de température et le bitume sous-jacent n'est pas porté à une température
suffisante pour qu'il puisse remonter à travers la couche d'asphalte que l'on vient
de déposer. On utilisera avantageusement à cet effet un non-tissé de matériau fusible
d'un grammage de 20 à 60 g/m², de préférence de 20 à 40 g/m². La forme de non-tissé
est utilisée pour des raisons pratiques de fabrication industrielle mais d'autres
techniques d'application de matériau approprié pourraient être utilisées. Un polyester
est un matériau parfaitement approprié, donnant en outre une excellente adhérence
entre la feuille bitumineuse et la couche d'asphalte.
[0010] L'utilisation d'un tel matériau fusible permet en outre, du fait de son interposition
entre la couche bitumineuse et l'asphalte, de modifier la couche d'asphalte pour améliorer
ses caractéristiques en lui ajoutant des polymères sans pour autant créer des phénomènes
d'incompatibilité avec les polymères de la feuille bitumineuse du fait que les polymères
des deux couches ne se rencontrent pas.
[0011] Afin d'améliorer encore les caractéristiques de la feuille bitumineuse selon l'invention
qui se présente de manière classique sous forme d'un lé enroulé, l'épaisseur du lé
est réduite sur les deux bords du lé, d'un côté sur la face supérieure (6) et de l'autre
côté sur la face inférieure (7) de sorte qu'au recouvrement de deux lés adjacents,
il ne se forme pas de surépaisseur (figure 2). Cette réduction d'épaisseur peut se
faire au moment du calandrage ou par enlèvement de matière sur la feuille calandrée.
[0012] La figure 3 représente schématiquement l'utilisation de la feuille bitumineuse selon
l'invention, cette feuille 1 étant posée avec ou sans fixation sur le support 8 à
revêtir, par exemple un plancher en béton, puis une couche d'asphalte 9 est coulée
sur la feuille 1.
[0013] Selon les caractéristiques voulues pour la fixation de la feuille 1 au support 8,
la sous-face 5 de la feuille 1 comporte une feuille étanche, une dispersion de particules
minérales (obtenue par grésage ou sablage par exemple), etc, afin de permettre une
pose avec indépendance, semi-indépendance ou adhérence totale.
[0014] Les principaux avantages de la feuille d'étanchéité selon l'invention est qu'elle
permet d'obtenir tous les avantages classiques des systèmes d'étanchéité bicouche
constitués d'une chape bitumineuse ou d'une feuille bitumineuse recouverte d'une couche
d'asphalte.
[0015] En outre, des essais en laboratoire avec des températures de coulée de l'asphalte
allant jusqu'à 260°C ont montré que pour une température normale de mise en oeuvre,
l'on n'obtenait absolument aucune remontée de bitume en utilisant une feuille selon
l'invention, même au droit des recouvrements des lés où habituellement il y a remontée
par la tranche de la feuille qui dessine en surface le fantôme du calepinage des lés.
[0016] Cet effet est obtenu sans demander à la feuille bitumineuse une composition particulière
et on utilise les liants ou liants modifiés du commerce sans changement; c'est donc
une solution économique.
[0017] En outre du fait de la séparation qui existe entre la feuille bitumineuse et la couche
d'asphalte, il est possible d'utiliser des couches d'asphalte contenant des matériaux
polymères de modification, sans créer de problèmes d'incompatibilité avec les polymères
contenus dans la composition bitumineuse sous-jacente.
1.- Feuille bitumineuse d'étanchéité destinée à recevoir une couche d'asphalte coulé,
constituée d'une armature imprégnée d'un bitume modifié par des charges et des polymères,
caractérisée en ce que la face sur laquelle sera coulée la couche d'asphalte comporte
une couche fusible d'un matériau fondant à une température inférieure à la température
de coulée de l'asphalte particulier utilisé et absorbant une part suffisante de la
chaleur de cette coulée pour que la fusion du bitume sous-jacent s'en trouve empêchée.
2.- Feuille bitumineuse selon la revendication 1, caractérisé en ce que le matériau
est une matière plastique.
3.- Feuille bitumineuse selon la revendication 1 ou 2, caractérisée en ce que le matériau
est un polyester.
4.- Feuille bitumineuse selon l'une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisée
en ce que la couche fusible est appliquée à un grammage de 20 à 60 g/m².
5.- Feuille bitumineuse selon la revendication 4, caractérisée en ce que la couche
fusible est appliquée à un grammage de 20 à 40 g/m².
6.- Feuille bitumineuse selon l'une quelconque des revendications 1 à 5, caractérisée
en ce que le matériau est sous forme de non-tissé.
7.- Feuille bitumineuse selon l'une quelconque des revendications 1 à 4, présentée
sous forme d'un lé, caractérisée en ce que les bords du lé sont d'épaisseur réduite,
d'un côté sur la face supérieure et de l'autre sur la face inférieure.