[0001] L'invention concerne un procédé pour améliorer les qualités élastiques d'une carre
en acier destinée à être utilisée dans la fabrication d'un ski. Elle concerne également
une carre de ski obtenue avec le procédé ainsi que le ski équipé d'une telle carre.
[0002] On connait déjà différents types de ski et il en existe de très nombreuses variantes.
Ceux-ci sont constitués par une poutre de forme allongée dont l'extrémité avant est
courbée vers le haut pour constituer une spatule, l'extrémité arrière l'étant aussi
plus légèrement pour constituer le talon.
[0003] Les skis actuels ont généralement une structure composite dans laquelle sont combinés
différents matériaux, de manière que chacun d'eux intervienne de façon optimale compte-tenu
de la distribution des contraintes mécaniques lors de l'utilisation du ski. Ainsi,
la structure comprend généralement des éléments de protection périphériques, des éléments
internes de résistance pour résister aux contraintes de flexion et de torsion, et
un noyau. La structure comprend également une semelle de glissement formant la face
inférieure du ski et des carres métalliques inférieures formant les arêtes inférieures
du ski. Ces éléments sont assemblés par collage ou par injection, l'assemblage s'effectuant
généralement à chaud dans un moule présentant la forme définitive du ski, avec une
partie avant fortement relevée en spatule, une partie arrière légèrement relevée en
talon, une partie centrale cambrée.
[0004] Les skis alpins actuels sont équipés de carres en acier au carbone du type XC50 à
XC70, c'est à dire comprenant de 0,5% à 0,7% de carbone. Ce type d'acier permet d'atteindre,
après transformation par tréfilage, laminage et traitement thermique par trempe, d'une
part les dimensions de profils spécifiques des carres de ski et la dureté de 50 ±
2 HRC ou de 525 ±30 Vickers HV10 nécessaire à la tenue de l'affûtage, et d'autre part,
la limite élastique conventionnelle qui permet à la carre de s'allonger de 0,65% sans
déformation et de supporter les flexions alternées d'un ski sans perte de cambre pour
celui-ci, et qui permet d'encaisser les chocs accidentels contre les pierres sans
détérioration majeure. La limite de 0,5% peut être atteinte au cours de la pratique
du ski, lors de chocs violents à grande vitesse, chute du skieur, etc...
[0005] Depuis quelques années, l'insatisfaction principale des utilisateurs de skis alpins
est l'oxydation des carres de skis; aussi, de nombreux fabricants de ski ont tenté
d'y remédier en substituant aux nuances d'acier au carbone, des nuances du type inox
martensitique au chrome, telles que celles utilisées dans la coutellerie.
[0006] Pour parvenir aux spécifications précédentes propres à la carre de ski, le choix
s'est porté sur les nuances Z
x et C
y, "x" pouvant varier de 20 à 40 et "y" pouvant varier de 12 à 14, c'est à dire des
aciers ayant de 0,2 à 0,4% de carbone pour atteindre le niveau de dureté requis après
trempe, et ayant de 12 à 14% de chrome pour la résistance à la corrosion.
[0007] Ces tentatives se sont soldées par des échecs car ce type de nuance ne permet pas
d'atteindre le niveau de limite élastique (à 0,2% de déformation résiduelle) nécessaire
à une carre de ski (environ 1350 N/mm² correspondant à 0,65% d'allongement élastique).
[0008] L'évaluation de cette limite à 0,01% a démontré que pour ce type de carres, on chutait
à 850 N/mm² ou 0,4% d'allongement.
[0009] La présente invention veut donc résoudre les inconvénients des aciers utilisés pour
la réalisation des carres de ski et propose un procédé permettant de conserver les
propriétés d'anticorrosion des aciers martensitiques résistants à la corrosion, tout
en augmentant la limite élastique correspondant à cette nuance, jusqu'à une valeur
suffisante pour résister aux conditions dans lesquelles ils sont utilisés. Le procédé
selon l'invention permet de donner aux aciers martensitiques au chrome, une limite
élastique proche ou même légèrement supérieure à celle qu'ont les aciers au carbone
du type XC50 à XC70 et notamment ceux du type XC60 couramment utilisés, et référencés
aux Etats-Unis sous la référence AISI C1060 et en Allemagne, sous le référence WNr
1.1221 ou CK60.
[0010] Ainsi selon l'invention le procédé destiné à améliorer l'élasticité des carres de
ski en acier résistant à la corrosion du type martensitique au chrome, consiste à
pré-étirer la carre, en lui faisant subir une traction au-delà de sa limite élastique
afin de lui donner une déformation longitudinale irréversible tout en modifiant son
taux d'écrouissage.
[0011] Le procédé selon l'invention consiste donc, dans une étape préalable conventionnelle,
à réaliser la carre de ski avec un acier résistant à la corrosion du type martensitique
au chrome, puis de la pré-étirer en lui faisant subir une traction au-delà de sa limite
élastique, et d'arrêter le pré-étirage en supprimant la traction longitudinale. Au
cours de l'étape préalable, la carre est réalisée de façon conventionnelle, à savoir
par tréfilage, laminage avec recuit, estampage, trempe et revenu. Et en augmentant
son taux d'écrouissage par une opération de prédéformation.
[0012] L'invention concerne aussi la carre de ski obtenue avec le procédé ainsi que le ski
fabriqué avec une telle carre.
[0013] D'autres caractéristiques et avantages de l'invention se dégageront de la description
qui va suivre en regard des dessins annexés, qui ne sont donnés qu'à titre d'exemples
non limitatifs.
[0014] La figure 1 est une vue latérale montrant un ski selon l'invention.
[0015] La figure 2 est une coupe transversale selon TT du ski de la figure 1, montrant les
différents composants et notamment les carres selon l'invention.
[0016] La figure 2a est un détail de la figure 1.
[0017] Les figures 3 et 4 sont des diagrammes représentant des courbes de contraintes en
fonction des déformations.
[0018] La figure 3 représente la courbe d'un acier au carbone et la courbe d'un acier au
chrome.
[0019] La figure 4 représente la courbe d'un acier au chrome et la courbe du même acier
ayant subi le procédé de l'invention.
[0020] Les figures 5, 6, 7 et 8 représentent les différentes phases du procédé de l'invention.
[0021] La figure 9 représente une variante d'exécution du procédé.
[0022] Le ski représenté à la figure 1 et destiné à recevoir les carres réalisées selon
le procédé de l'invention, est constitué par une poutre de forme allongée comprenant
de façon connue en soit, à l'avant une zone relevée constituant la spatule (100) et
à l'arrière une partie légèrement relevée constituant le talon (101). La structure
du ski (1) peut être du type sandwich avec par exemple des lames de flexion parallèles
et disposées de part et d'autre d'un noyau, ou du type à caisson avec lame de résistance
enveloppant le noyau sur les quatre faces, ou de tout autre type. A la figure 2, on
a représenté un exemple de structure comprenant un renfort supérieur (2) rigide, en
forme de coque à section en "U" formant une paroi supérieure (3) et deux parois latérales
(4) recouvrant un noyau (5), l'ensemble étant fermé à sa partie inférieure par un
élément inférieur (6) comportant les carres métalliques (7), une couche (8) de glissement
généralement en polyéthylène ainsi que des éléments de renfort inférieur (9, 10).
Une couche supérieure superficielle (11) recouvre le renfort supérieur pour former
le décor de l'embase.
[0023] Les couches de renfort (2, 9, 10) peuvent être de tous types tels que des couches
de matériaux composites comme de la fibre de verre, fibre de carbone avec de la résine
époxy ou polyester ou en alliage métallique.
[0024] Le noyau (5) peut être de la mousse chargée ou non, du bois ou du nid d'abeille en
métallique ou en plastique.
[0025] La couche superficielle (11), monocouche ou multicouche assurant le décor peut être
en polyamide, en acrylonitrile-butadiène-styrène ou autre, tel qu'en matériau thermoplastique.
[0026] La carre (7) est, de façon connue en soi, constituée par un profil en "L" (figure
2a) et sa longueur est approximativement celle de la longueur du dessous du ski. Ledit
profil comprend un talon (72) de largeur "a" et de hauteur "b" et une ailette d'ancrage
(73) d'épaisseur "c" et de largeur "d". Les dimensions des carres étant par exemple
telles que a = b = 2 millimètres, c = 0,6 millimètres et d = 3 à 6 millimètres.
[0027] On trouve généralement dans le domaine du ski, des carres en acier-carbone non allié.
Ce type d'acier est utilisé actuellement dans la fabrication des skis pour leurs excellentes
caractéristiques mécaniques et notamment leur bonne élasticité. En effet, l'acier
utilisé est généralement de l'acier du type XC60 ayant une limite élastique d'environ
1 450 MégaPascal et une résistance à la rupture d'environ 1 800 MégaPascal.
[0028] A la figure 3, on a représenté dans un diagramme, les contraintes P en fonction des
déformations D d'une courbe C1 relative à un acier du type XC60, et une courbe C2
relative à un acier au chrome résistant à la corrosion du type Z30C13, référencé aux
Etats-Unis sous la référence AISI 420 et en Allemagne, sous la référence X30Cr13 ou
WNr 4028. On constate sur ce premier diagramme que les caractéristiques élastiques
de l'acier classique du type XC60 sont excellentes (courbe C1), mais que ce n'est
pas le cas pour l'acier au chrome (courbe C2), pour lequel la limite élastique est
d'environ 850 MégaPascal seulement. L'idéal serait donc d'avoir, pour un acier au
chrome résistant à la corrosion, une courbe du type de la courbe C1 pour que ses caractéristiques
élastiques soient suffisantes pour être utilisées pour la réalisation d'une carre
d'un ski. La présente invention se propose de modifier les caractéristiques élastiques
d'une carre de ski en acier au chrome pour que celles-ci soient améliorées et qu'elles
soient identiques ou supérieures à celles d'une carre en acier au carbone non allié.
[0029] Le procédé d'amélioration de l'élasticité d'une carre (5) de ski selon l'invention,
consiste dans une première phase (figure 5), à prendre une carre de ski (7) de longueur
initiale "Li" réalisée en acier martensitique au chrome résistant à la corrosion et
par exemple de l'acier du type Z30C13 ayant 0,3 % de carbone et 13 % de chrome. La
longueur initiale "Li" de la carre étant au moins égale à la longueur du ski pour
lequel elle est destinée et est un profil longitudinal de section en "L" connue en
soi, telle que représentée aux figures 2 et 2a.
[0030] La carre est dans une deuxième phase (figures 6 et 7), pré-étirée grâce à un ensemble
de pré-étirage (12) qui comprend un bâti (13) et deux mâchoires de retenue (14, 15)
dont l'une (14) est fixe, tandis que l'autre (15) est mobile et se déplace par rapport
à la première, grâce à des moyens d'actionnement (16) qui sont représentés schématiquement
et comprennent par exemple une vis (17) et un volant de manoeuvre.(18) L'ensemble
de pré-étirage comprend par ailleurs des moyens de mesure (19) des efforts de pré-étirage
constitués par exemple par un anneau dynamométrique. L'une des extrémités (70) de
la carre (7) est retenue par la mâchoire fixe (14) tandis que l'autre (71) des extrémités
l'est par la mâchoire mobile (15), et pendant cette deuxième phase, par déplacement
selon F de la mâchoire mobile (15), on provoque l'allongement "l" de la carre jusqu'à
dépasser sa limite élastique de façon à lui imposer une déformation irréversible.
Ainsi, pour une carre de section 6,6 millimètres carrés et de longueur initiale 2
000 millimètres, les contraintes d'étirage sont de l'ordre de 800 à 1 500 kilogrammes
force, pour l'étirer jusqu'à une longueur étirée "Le" de 2 014 à 2 040 millimètres
correspondant à un allongement de 0,7% à 2% (figure 8).
[0031] Dans une troisième étape, on stoppe l'étirement pour décharger la carre qui se trouve
avoir une longueur étirée "Le". Pour ce faire, on ouvre les mâchoires de retenue (14,
15) pour libérer la carre et l'on retire celle-ci de l'ensemble de pré-étirage (figure
8). La carre se trouve donc dans un état pré-étiré de longueur "Le" égale à 2 014
millimètres, et sa limite élastique passe ainsi de 850 MégaPascal à 1 300 MégaPascal.
[0032] On a représenté à la figure 4, un diagramme montrant des courbes de variation des
contraintes en fonction des déformations. Les déformations (D) sont en abscisses tandis
que les contraintes (P) sont en ordonnées. La courbe (C'2) illustre les différentes
phases du procédé. La portion (OA) de la courbe correspondant au pré-étirage, tandis
que le segment (AB) correspond au relâchement. La carre ayant alors subi un allongement
permanent de 0,7%. La courbe (C3) représente les caractéristiques nouvelles de la
carre ayant subi le pré-étirage selon l'invention. On constate sur ce diagramme que
les caractéristiques élastiques de la carre ont été, grâce au procédé, considérablement
améliorées.
[0033] Dans le procédé décrit précédemment à titre d'exemple, la carre (7) est préalablement
découpée à sa longueur initiale "Li" avant d'être montée dans l'ensemble de pré-étirage,
mais il pourrait en être autrement, et le pré-étirage, la libération de la traction
et le découpage peuvent se faire en continu, comme cela est représenté schématiquement
à la figure 9. A cet effet, on utilise un ensemble de pré-étirage et de découpe (120)
comprenant des moyens de pré-étirage (121) et des moyens de pré-découpage (122). La
carre (7) étant initialement enroulée sur une bobine (123).
[0034] L'invention concerne aussi le ski équipé de carres (7) pré-étirées selon le procédé
de l'invention ainsi que le procédé de réalisation du ski, procédé qui consiste à
utiliser dans le processus de sa fabrication une carre obtenue avec le procédé de
l'invention.
[0035] Bien entendu, l'invention n'est pas limitée aux modes de réalisation décrits et représentés
à titre d'exemples, mais elle comprend aussi tous les équivalents techniques ainsi
que leurs combinaisons et d'autres variantes sont également possibles sans pour autant
sortir du cadre de l'invention.
1. Procédé pour améliorer l'élasticité des carres de ski en acier résistant à la corrosion
du type martensitique au chrome, caractérisé en ce qu'il consiste à pré-étirer la
carre.
2. Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que l'on exerce une traction sur
la carre pour la pré-étirer au-delà de sa limite élastique afin de lui donner une
déformation longitudinale irréversible.
3. Procédé selon la revendication 2, caractérisé en ce que l'on pré-étire la carre en
lui faisant subir un allongement compris entre 0,7 et 2%.
4. Procédé selon la revendication 2 ou 3, caractérisé en ce qu'il consiste à :
réaliser la carre de ski avec un acier résistant à la corrosion du type martensitique
au chrome,
pré-étirer la carre en lui faisant subir une traction au-delà de sa limite élastique,
supprimer le pré-étirage en supprimant la traction longitudinale.
5. Procédé selon la revendication 4, caractérisé en ce que la traction longitudinale
se fait en retenant les deux extrémités (70, 71) de la carre (7) dans des mâchoires
(14, 15) se déplaçant l'une de l'autre afin d'exercer ladite traction.
6. Procédé selon la revendication 5, caractérisé en ce que l'une des mâchoires (14) est
fixe tandis que l'autre (15) est mobile et se déplace par rapport à ladite mâchoire
fixe grâce à des moyens d'actionnement (16).
7. Procédé selon la revendication 6, caractérisé en ce que les deux mâchoires sont montées
sur un ensemble de pré-étirage (12, 120).
8. Procédé selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisé en ce que
l'on découpe un élément de carre à la longueur initiale "Li" avant de lui faire subir
l'allongement.
9. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 7, caractérisé en ce qu'il se
fait en continu avec un ensemble de pré-étirage et de découpe (120) comprenant des
moyens de pré-étirage (121) et des moyens de découpage (122).
10. Carre de ski obtenue avec le procédé de l'une quelconque des revendications précédentes.
11. Procédé de réalisation d'un ski qui consiste à utiliser au cours de son processus
de fabrication une carre (1) selon la revendication 10.
12. Ski réalisé par le procédé selon la revendication 11, caractérisé en ce qu'il comprend
deux carres (7) en acier résistant à la corrosion, du type martensitique au chrome.
13. Ski selon la revendication 12, caractérisé en ce que les carres (7) sont en acier
du type Z30C13.