[0001] La présente invention a trait à un nouveau type de matériau en bois du type lamellé-collé,
matériau qui dans la suite de la description, sera désigné par l'expression "poutre".
[0002] Parmi les matériaux les plus anciens utilisés pour la réalisation d'ouvrages divers,
notamment pour réaliser les éléments devant résister à la flexion, le plus ancien
qui est encore couramment utilisé à ce jour, est le bois.
[0003] Le bois, comme matériau de construction, a la particularité d'avoir une très grande
variabilité de ses propriétés mécaniques étant donné qu'il s'agit d'un matériau naturel.
Ces propriétés sont influencées, au sein de chaque essence, par des paramètres géo-climatiques,
par des données sylvicoles, ou encore par des caractéristiques de transformation.
De plus, les produits dérivés de sa transformation sont limités dans leur géométrie
et dans leur volume. Les produits de sciages ont rarement une longueur supérieure
à dix mètres, avec des sections maximales de l'ordre de 180/300 cm, ce qui limite
donc le domaine d'utilisation d'un tel produit.
[0004] Par ailleurs, pour déterminer des valeurs mécaniques caractéristiques, mises à disposition
des ingénieurs par l'intermédiaire des normes pour chaque type de produit bois destiné
à la structure, les valeurs inférieures de résistance et de module de déformation,
obtenues par essais destructifs d'échantillonnage adapté, sont considérés comme référence.
Presque unanimement, et pour les valeurs de résistance, le fractile 5 % (valeur pour
laquelle 5 % des pièces testées ont des caractéristiques inférieures), est la donnée
de référence. A ce fractile 5 %, est associé un coefficient de sécurité (s) de mise
en oeuvre. Le quotient fractile 5 % divisé par le coefficient de sécurité, (s), donne
les valeurs de résistance admissibles, utilisables par le spécialiste pour le dimensionnement
de l'ouvrage (charpente par exemple).
[0005] Un tel système d'exploitation est donc fortement dépendant des valeurs de résistance
les plus faibles, sans exploiter l'existence de valeurs plus élevées. A titre illustratif,
au sein d'une même essence, un facteur d'environ huit, entre les résistances les plus
faibles et les résistances les plus élevées, est usuel. Une telle variabilité entraîne
donc de pouvoir réaliser un triage ou classement des bois en fonction des caractéristiques
qu'il présente. La méthode la plus ancienne consiste à réaliser un classement par
simple contrôle visuel, ce qui de manière évidente, donne des résultats très médiocres.
Très récemment, il a été proposé de réaliser des contrôles non destructifs, comme
par exemple à l'ultrason ou le contrôle de flexion, ce qui permet d'obtenir des résultats
nettement meilleurs. Malgré de tels contrôles, il subsiste toujours une forte variabilité,
engendrant des valeurs admissibles d'exploitation relativement faibles, et surtout,
une fiabilité incertaine.
[0006] Pour obtenir des produits, telles que des poutres de grande longueur et de section
non limitée et qui présentent par ailleurs des caractéristiques mécaniques beaucoup
plus constantes et reproductibles d'une poutre à une autre, il a été proposé il y
a bientôt un siècle, de réaliser des matériaux en bois selon la technique dite "lamellé-collé",
qui consiste à débiter le bois en lamelles de grande longueur et de faible épaisseur,
et à le reconstituer en superposant lesdites lamelles, le plus souvent à fils parallèles
et en les assemblant entre elles par collage. Une telle technique a l'avantage d'offrir
des caractéristiques géométriques très larges et permet, grâce aux techniques d'aboutage
(opération de mise bout à bout des lames), d'obtenir des ensembles de très grande
longueur (pouvant atteindre trente à quarante mètres), la seule limite étant celle
du problème de transport.
[0007] Toutes les techniques de reconstitution de bois par lamellation, présentent à la
fois un avantage et un inconvénient.
[0008] Comme avantage, il permet d'éliminer les poutres à caractéristiques très faibles,
par effet de distribution des contraintes sur les lamelles plus fortes (effet de moyenne
dans le domaine des contraintes faibles). En celà, il permet des valeurs admissibles
de résistance, en général légèrement supérieures à celles de bois sciés de qualité
équivalente.
[0009] En revanche, à cause de la faiblesse de l'aboutage sous des contraintes de traction,
qui se retrouve toujours dans une lamelle externe tendue (cas de la flexion), la résistance
moyenne du bois lamellé-collé est inférieure à celle du même bois non collé. En effet,
quand la poutre travaille en flexion, ce qui représente 70 % à 80 % des cas, une des
deux lames externes est tendue. Quand cette lame casse, dans un aboutage ou dans un
noeud de la planche, elle transfère ses contraintes à la lame supérieure, et la poutre
casse complètement. On parle alors d'un fonctionnement sériel, fragilisant la poutre.
De plus, si le collage de l'aboutage est mal maîtrisé par le producteur, ce qui est
très difficilement contrôlable, l'aboutage est systématiquement un facteur supplémentaire
de variabilité, occasionnant des poutres à caractéristiques faibles, et entraînant
donc un manque de fiabilité du produit.
[0010] Pour résoudre ce problème et en vue d'améliorer la résistance des poutres, il a été
proposé comme cela ressort notamment du DE-B-1 609 898, de faire évoluer l'inertie
des poutres qui sont initialement rectangulaires en rajoutant de la matière dans les
zones inférieure et supérieure de ladite poutre, et plus particulièrement latéralement.
L'inconvénient d'une telle solution est que l'on augmente l'épaisseur puisque l'on
rajoute de la matière, mais surtout réside dans le fait que l'on complique les sections.
[0011] Par ailleurs, les solutions proposées conduisent à des éléments qui n'ont plus une
section rectangulaire, la nouvelle forme obtenue pouvant être dommageable d'un point
de vue technique (complexité de production, modification d'assemblage...) et esthétique,
donc architecturale.
[0012] Or on a trouvé, et c'est ce qui fait l'objet de la présente invention, un nouveau
type de matériau de construction en bois obtenu selon la technique de lamellation,
qui permet de résoudre ces problèmes et élimine pratiquement tous risques de casse
de la poutre en cas de rupture de l'une des lames externes de la zone tendue lorsque
la dite poutre travaille en flexion.
[0013] Il convient de noter que, contrairement aux solutions antérieures, la solution proposée
selon l'invention, permet de résoudre ce problème d'amélioration de la résistance
des poutres par le fait que l'on obtient un renforcement tout en gardant la section
rectangulaire initiale, et ce sans ajouter de matière.
[0014] D'une manière générale, le nouveau matériau de construction conforme à l'invention
(poutre) se présente sous la forme d'un ensemble ayant une section rectangulaire,
réalisé à partir de couches de bois lamellé-collé, et
se caractérise en ce que:
- il comporte au moins deux ensembles constitués chacun d'une couche lamellée-collée
formée de lames de section rectangulaire, juxtaposées côte à côte sans décalage les
unes par rapport aux autres;
- il a une structure telle que, si l'on considère qu'une force de flexion s'exerce à
la partie supérieure dudit matériau, au moins la couche externe (couche inférieure)
la plus tendue lors de ce travail en flexion, est constituée de lames recollées entre
elles dans le sens vertical (sens de la flexion) contre la surface inférieure de la
couche qui lui est adjacente.
[0015] Dans la suite de la description, l'invention sera décrite en se référant à une telle
disposition et à un tel type de poutre à section rectangulaire.
[0016] Par ailleurs, si dans une forme de réalisation, le matériau conforme à l'invention
comporte une seule couche de lamellé-collé, recollé ainsi dans le sens vertical, les
autres couches étant constituées de lamelles recollées dans le sens horizontal, selon
une variante conforme à l'invention, une seconde couche de lamellé-collé rapportée
dans le sens vertical peut être disposée à la partie supérieure.
[0017] Enfin, selon une autre forme de réalisation, l'ensemble du matériau conforme à l'invention,
est constitué en totalité, de couches de lamellé-collé disposées verticalement et
solidarisées entre elles par collage.
[0018] Il convient également de noter que selon une caractéristique essentielle de l'invention,
la couche de lamellé-collé disposée dans le sens vertical, doit comporter au moins
trois à quatre lames élémentaires, pour bénéficier de l'effet de redistribution des
contraintes de la lame la plus faible localement sur les lames verticales adjacentes
(effet parallèle), l'augmentation du nombre de lames verticales permettant de diminuer
la variabilité de résistance des poutres produites, et donc d'augmenter leur fiabilité.
[0019] Les figures 1, 2 et 3 illustrent, de manière schématique, les trois formes de réalisation
d'un matériau de construction en bois lamellé-collé réalisé conformément à l'invention.
[0020] Dans l'exemple illustré à la figure 1, une telle poutre se compose d'un ensemble
lamellé-collé conventionnel (1), constitué de onze couches parallèles disposées horizontalement
et, recollée dans un sens vertical, d'une couche (2) d'un lamellé-collé comportant
cinq lamelles et disposée dans la zone la plus tendue, et donc orientée dans le sens
où s'exerce la flexion.
[0021] Dans l'exemple illustré à la figure 2, le matériau conforme à l'invention se présente
sous la forme d'une poutre également de section rectangulaire, constituée dans sa
partie centrale d'un lamellé-collé conventionnel (1) comportant dix couches horizontales
et, situées de part et d'autre de cette zone centrale (1), de deux couches (2) de
lamellé-collé, recollées dans le sens vertical, et constituées chacune de cinq lames.
[0022] La variante illustrée à la figure 3 d'un matériau conforme à l'invention, est constituée
uniquement de couches (2) de lamellé-collé disposées verticalement dans le sens où
s'exerce la flexion.
[0023] Grâce à une telle conception selon laquelle on positionne, dans la partie tendue
de la poutre, au moins une épaisseur (2) de lamellé-collé, recollé dans un sens vertical,
on retrouve donc une pluralité de lamelles (2a,2b..) fonctionnant simultanément sur
la surface tendue. Par suite, si l'une de ces lamelles casse, les lamelles adjacentes
supportent les contraintes, en se les redistribuant, et le système continue de résister.
Un tel fonctionnement s'apparente à un système parallèle très favorable d'un point
de vue résistance ultime. Cela permet d'augmenter la résistance moyenne de la poutre
et limite considérablement l'existence de valeurs faibles résultant d'un problème
d'aboutage ou d'un gros défaut local sur une lame (noeud).
[0024] D'une manière générale, on peut dire que si le coefficient de variation, rapport
écart-type sur moyenne, du bois d'approvisionnement (les lames butes) est de 25 %
par exemple, le coefficient de variation du bois lamellé-collé conventionnel sera
de 18 à 20 %, et celui du bois réalisé conformément à l'invention de l'ordre de 10
à 13 %. La réduction de cette variabilité est liée directement au gain de fiabilité
et permet ainsi d'augmenter les valeurs de résistance utilisées par les spécialistes
pour le dimensionnement des structures.
[0025] Une telle conception permet d'obtenir des poutres ayant des valeurs admissibles de
résistance supérieures de 30 à 40 % par rapport à des poutres réalisées en lamellé-collé
classique. On obtient également une évolution du module d'élasticité de 10 à 20 %
par rapport aux normes actuelles des différents pays.
[0026] De plus, la qualité mécanique de la poutre est encore optimisée en triant les meilleures
lames que l'on destine préférentiellement aux lames verticales.
[0027] Comme dit précédemment, dans le matériau conforme à l'invention, il convient d'avoir
au minimum trois à quatre lames dans l'élément lamellé-collé disposé verticalement
dans la zone tendue. Pour des largeurs de poutres faibles, par exemple inférieures
à 110 mm, il conviendra d'utiliser des lames de environ 25 mm d'épaisseur par exemple
pour réaliser l'élément disposé dans la zone tendue. Pour des largeurs supérieures,
des lames classiques de 33 mm d'épaisseur ou plus conviennent. Bien entendu, la diminution
d'épaisseur des lames de l'élément multi-collé disposé dans la zone tendue, est un
paramètre d'optimisation en ce sens qu'il augmente le nombre de lames verticales et
ainsi qu'il réduit la variabilité de résistance des poutres.
[0028] Il convient également de noter que le produit conforme à l'invention présente un
autre avantage qui est que les valeurs mécaniques qui en découlent, sont valables
pour toutes les sections. Si la hauteur de la section augmente, dans le cadre d'un
produit lamellé-collé conventionnel, des coefficients réducteurs interviennent pour
réduire les valeurs admissibles, prenant en ce sens en compte des effets volumes négatifs
sur la résistance de la poutre (cas de tous les systèmes sériels). Avec le produit
conforme à l'invention, il n'y a pas d'effet volume, pour autant que l'élément disposé
dans la zone tendue, représente au moins 15 % de la section.
[0029] Un tel matériau peut être réalisé à partir de tous types de bois et selon les techniques
conventionnelles de lamellation, techniques qui ne seront donc pas décrites par mesure
de simplification. Les propriétés mécaniques de la poutre seront déduites des propriétés
des bois d'approvisionnement (sapin, épicéa, pin, mélèze ..).
1/ Matériau de construction (poutre) présentant une section rectangulaire, réalisé à
partir de couches de bois lamellé-collé,
caractérisé en ce que:
- il comporte au moins deux ensembles (1,2) constitués chacun d'une couche lamellée-collée
formée de lames de section rectangulaire, juxtaposées côte à côte sans décalage les
unes par rapport aux autres;
- il a une structure telle que, si l'on considère qu'une force de flexion s'exerce
à la partie supérieure dudit matériau, au moins la couche externe (couche inférieure)
la plus tendue lors de ce travail en flexion, est constituée de lames (2) recollées
entre elles dans le sens vertical (sens de la flexion) contre la surface inférieure
de la couche qui lui est adjacente.
2/ Matériau selon la revendication 1, caractérisé en ce qu'il comporte une seule couche
(2) de lamellé-collé, recollée dans le sens vertical, l'autre couche (1) étant constituée
de lamelles recollées dans le sens horizontal.
3/ Matériau selon la revendication 1, caractérisé en ce qu'il comporte deux couches
(2) de lamellé-collé, recollées dans le sens vertical, disposées de part et d'autre
d'une couche centrale (1) constituée d'un lamellé-collé horizontal.
4/ Matériau selon la revendication 1, caractérisé en ce que la totalité des couches
de lamellé-collé (1,2) sont disposées verticalement.
5/ Matériau selon l'une des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que la (ou les)
couche(s) de lamellé-collé (2) disposée dans le sens vertical, comporte au moins trois
à quatre lames élémentaires.