[0001] La présente invention se rapporte à un procédé de détection énergétique de signaux
noyés dans du bruit.
[0002] Lorsqu'on dispose d'un modèle du signal, des outils de détection de ce signal sont
largement disponibles dans la littérature, les méthodes les plus connues étant basées
sur la notion de filtre adapté et, plus généralement, sur la théorie de la décision
en traitement du signal (P. Y. ARQUES, Collection Technique et Scientifique des Télécommunications,
MASSON). Ces techniques président à l'élaboration des récepteurs cohérents et non
cohérents en communications numériques (Principle of Coherent Communication A.J.VITERBI,
MacGraw-Hill).
[0003] Par contre, la présente invention se place dans le cas où l'on ne dispose pas de
modèle susceptible de permettre l'application directe de la théorie de la détection.
On suppose être en présence d'un bruit de fond, et de temps en temps se produit une
"anomalie", qui, suivant le contexte, peut en fait représenter un signal qu'il serait
souhaitable de détecter.
[0004] Des exemples de détection d'un signal dit "utile" dans un bruit se trouvent largement
dans la littérature concernant la détection de la parole. En effet, le signal de parole,
par sa grande variabilité, ne se prête pas à une modélisation efficace et un des moyens
les plus naturels pour le détecter consiste à effectuer un seuillage énergétique.
[0005] Ainsi, beaucoup de recherches actuelles portent soit sur l'amplitude instantanée
par référence à un seuil déterminé expérimentalement (La discrimination parole-bruit
et ses applications V. PETIT, F. DUMONT Revue Technique THOMSON-CSF - Vol. 12 - N°
4 - Dec. 1980), soit sur un seuillage empirique de l'énergie ("Suppression of Acoustic
Noise in Speech Using Spectral Substraction", S.F. BOLL, IEEE Transactions on Acoustics,
Speech, and Signal Processing, Vol.ASSP-27, N°.2, April 1979), soit sur l'énergie
du signal total sur une tranche temporelle de durée T, en seuillant, toujours expérimentalement,
cette énergie à l'aide d'histogrammes locaux, par exemple ("Problème de détection
des frontières de mots en présence de bruits additifs",.P.WACRENIER, Mémoire de D.E.A.
de l'université de PARIS-SUD, Centre d'ORSAY). D'autres techniques sont présentées
dans "A Study of Endpoint Detection Algorithms in Adverse Conditions : Incidence on
a DTW and HMM Recognizer", J.C. JUNQUA, B. REAVES, B. MAK EUROSPEECH 1991.
[0006] Dans toutes ces approches, une grande part est faite à l'heuristique, et peu d'outils
théoriques puissants sont utilisés.
[0007] Il faut rappeler les travaux présentés dans "Evaluation of Linear and Non-Linear
Spectral Substraction Methods for Enhancing Noisy Speech", A. LE FLOC'H, R. SALAMI,
B. MOUY and J-P. ADOUL, Proceedings of "Speech Processing in Adverse Conditions",
ESCA WORKSHOP, CANNES-MANDELIEU, 10-13 November 1992, où toutes les énergies supérieures
à un certain seuil expérimental sont considérées comme révélatrices de la présence
de signal utile et où toutes les énergies inférieures à ce seuil sont considérées
comme des énergies dues au bruit seul lorsque la distance usuelle (valeur absolue
de leur différence) les séparant est inférieure à un seuil, expérimental lui aussi.
Cependant dans ce document de Le Floc'h et al, les auteurs travaillent sur la notion
de distances entre énergies, mais la distance utilisée est une simple valeur absolue
de la différence des énergies et leurs travaux font grandement appel à l'heuristique.
[0008] La présente invention a pour objet un procédé de détection énergétique de signaux
utiles noyés dans du bruit, procédé qui mette essentiellement en oeuvre des moyens
rigoureux sans pratiquement faire appel à l'heuristique, et qui soit optimisé, c'est-à-dire
qui permette de détecter pratiquement tous les signaux utiles noyés dans du bruit,
même intense, avec le plus faible taux possible de fausses détections.
[0009] Le procédé conforme à l'invention consiste, à partir d'un ensemble d'échantillons
d'un signal bruité groupés en trames successives, à effectuer une pré-classification
en comparant les énergies des trames successives les unes par rapport aux autres au
sens d'une distance qui est la valeur absolue de la différence des logarithmes des
deux énergies, de manière à classer dans une première classe "bruit seul" les trames
qui présentent une forte probabilité d'appartenir à cette classe, on détecte ensuite,
pour les autres trames, celles présentant une énergie suffisamment élevée par rapport
à une énergie de référence calculée à partir des énergies des trames "bruit seul"
de manière que ces trames détectées présentent une forte probabilité d'appartenance
à une deuxième classe "bruit + signal utile".
[0010] Le procédé de l'invention suppose que lorsque le signal utile est présent, I'énergie
du signal observé appartient à une certaine classe notée C₁, et que lorsque le signal
utile est absent, l'énergie observée appartient à une classe notée C₂. Une des caractéristiques
nouvelles de la présente invention est de pouvoir mettre en évidence de telles énergies
de la classe C₂ (donc des énergies de bruit seul), utilisées alors de manière à optimiser
la détection d'énergies de la classe C₁ (donc d'énergies révélant la présence de signal
utile), par un procédé optimisé.
[0011] On considère une distance entre énergies, mais la distance dont il est question dans
l'invention, entre deux énergies U et V, n'est pas la distance usuelle |U-V| mais
|Log(U/V)|, ce qui revient à considérer que deux énergies U et V sont proches l'une
de l'autre lorsqu'on a 1/s < U/V < s, ce qui équivaut à |Log(U/V)| < Log(s). Cette
distance et le seuillage qui lui est attaché sont très avantageux. En effet, considérons
le cas où le signal utile s(n) et le bruit x(n) sont tous les deux blancs et gaussiens,
s(n) étant de variance σ
s² et x(n) de variance σ
x2.. En présence de s(n), on observe

avec u(n) = s(n) + x(n). En l'absence de s(n), on observe

Des résultats classiques en statistique nous permettent d'écrire :

et
V ε
N(
Nσ
x², 2
Nσ
x⁴). Si U et V sont considérées comme indépendantes,

Désignons par
r = σ
s²/σ
x² le rapport signal à bruit. On peut encore écrire :

Le résultat dépend de σ
x² et de r, ce qui montre qu'un seuillage de la distance |U-V| n'est pas valide lorsqu'on
ne connaît pas σ
x². Par contre, si on considère le rapport U/V, on démontre que la densité de probabilité
de U/V ne dépend plus que de r, et est donc indépendante de σ
x². Ce résultat remarquable valide l'utilisation d'un seuil sur U/V lorsqu'on ne connaît
que r.
[0012] De façon résumée, selon le procédé de l'invention, on observe L*N échantillons u(n)
d'un signal.
Chaque ensemble
Ti ={
u(
iN+
k)/
k ε{0,...,
N -1}}, lorsque i varie de 0 à L-1, est appelé trame et est associé à une énergie E(T
i) notée U
i = E(T
i), ce qui permet de définir
E={
Ui/
i ε{0,...,
L-1}}. Lorsque le signal utile est absent, les échantillons u(iN+k) sont exactement
égaux aux échantillons du bruit noté x(iN+k) (u(iN+k) = x(iN+k)). Lorsque le signal
utile (noté s(iN+k)) est présent, les échantillons u(iN+k) sont exactement égaux à
u(iN+k) = s(iN+k) + x(iN+k). On met en évidence par un premier procédé, décrit ci-après
(procédé dit de pré-classification) un sous-ensemble Δ d'éléments de E qui sont vraisemblablement
des énergies de la classe C₂. Il est alors possible de calculer un modèle autorégressif
du bruit x(n) qui viendra blanchir les trames que l'on traitera par la suite, ou un
spectre moyen du bruit x(n) qui peut servir à débruiter les trames suivantes (ni le
blanchiment ni le débruitage ne sont impératifs mais sont utilisés suivant le contexte
particulier traité). On utilise ensuite un second procédé (procédé dit de détection)
décrit ci-dessous, qui détectera au mieux parmi les éléments de E (blanchis ou non,
débruités ou non) les énergies de la classe C₁. Soient alors N nouveaux échantillons,
réunis sous forme d'une trame associée à une nouvelle énergie. On peut soit utiliser
cette nouvelle énergie pour venir réactualiser l'ensemble Δ en utilisant le procédé
de pré-classification, soit décider au sens d'un aspect particulier du procédé si
cette nouvelle énergie appartient ou non à C₁, après un éventuel débruitage ou un
éventuel blanchiment. Ce processus est réitéré pour chaque trame de N échantillons
acquis. Le procédé de l'invention est caractérisé par l'utilisation d'outils théoriques
nouveaux de traitement du signal et de statistiques. Ainsi, il fait appel à un modèle
des lois statistiques que suivent les énergies des signaux, celui des Variables Aléatoires
Gaussiennes Positives (VAGP) décrit ci-après. On utilise alors une propriété originale
concernant le rapport de deux VAGP.
[0013] On va maintenant définir les Variables Aléatoires Gaussiennes "Positives" (VAGP)
utilisées par l'invention.
Une variable aléatoire X sera dite positive lorsque Pr{ X < 0 } << 1. Soit X₀ la variable
centrée normalisée associée à X, on a :

[0014] Dès que m/σ est suffisamment grand, X peut être considérée comme positive. Lorsque
X est gaussienne, on désigne par F(x) la fonction de répartition de la variable gaussienne
normale et on a : Pr { X < 0 } = F(-m/σ) pour X ε N(m,σ²). Pour une Variable Aléatoire
Gaussienne Positive X ε N(m,σ²), on définira le paramètre α de cette variable par
α = m/σ, de sorte que l'on peut encore écrire X ε N(m,m²/α²).
Modèles des énergies : exemples de variables gaussiennes "positives"
Signal à énergie déterministe
[0015] Soient les échantillons x(0),...x(N-1) d'un signal quelconque, dont l'énergie est
déterministe et constante, ou approximable par une énergie déterministe ou constante
(comme précisé ci-dessous).
On a donc

où

[0016] Prenons comme exemple le signal x(n) = A cos(n+ϑ) où ϑ est équiréparti entre [0,2π].
Pour N suffisamment grand, on a : (1/N) Σ
0≦n≦N-1x(n)² # E[x(n)²] = A²/2. Pour N assez grand, U peut être assimilé à NA²/2 et donc
à une énergie constante.
[0017] On va maintenant examiner le cas de l'énergie d'un Processus Gaussien quelconque.
Considérons un processus x(n), stationnaire du second ordre, mais gaussien, de variance
σ
x². On démontre le résultat suivant : U = Σ
0≦ n≦ N-1 x(n)² ε N( Tr(C
x,N) , 2Tr(C
x,N²) ) , où C
x,N est la matrice de covariance du vecteur

Comme le processus est stationnaire au second ordre, il vient

Donc

Un calcul simple amène à Tr(C
x,N²) = Σ
0≦i≦N-1,0≦j≦N-1 Γ
x(i-j)² où Γ
x(i) est la fonction de corrélation du processus. Le paramètre α vaut:

Cette variable sera une variable gaussienne positive si la fonction de corrélation
le permet. Il existe des cas particuliers intéressants décrits ci-dessous, permettant
d'accéder à cette fonction d'autocorrélation.
[0018] Cas de l'énergie d'un Processus Blanc Gaussien.
[0019] On considère le cas d'un processus blanc gaussien x(n) où n est compris entre 0 et
N-1. Les échantillons sont indépendants et sont tous de même variance σ
x² = E[x(n)²].
On a alors C
x,N = σ
x² I
N, où I
N est la matrice identité de dimension NxN.
On en déduit : Tr(C
x,N²) = Nσ
x⁴ de sorte que :

Le paramètre α est α = (N/2)
½
[0020] Cas de l'énergie d'un Processus Gaussien Bande Etroite.
On suppose que le signal numérique x(n) est issu de l'échantillonnage du processus
x(t), lui-même issu du filtrage d'un bruit blanc gaussien b(t) par un filtre passe-bande
h(t) de fonction de transfert:
H(f) = U
[-f0-B/2,-f0+B/2](f) + U
[f0-B/2,f0+B/2](f), où U désigne la fonction caractéristique de l'intervalle en indice et f₀ la fréquence
centrale du filtre.
La fonction de corrélation Γ
x(τ) de x(t) vaut Γ
x(τ) =Γ
x(0)cos(2πf₀τ)sin
c(πBτ) où sin
c(x) = sin(x)/x.
La fonction de corrélation de x(n) est alors :

Si
gf0,B,Te(k) = cos(2πkf₀T
e)sin
c(πkBT
e), on a :

On a : U ε N(Nσ
x², 2σ
x⁴Σ
0≦i≦ N-1,0≦j≦N-1gf0,B,Te(i-j)²). Cette variable est une variable aléatoire gaussienne positive. Le paramètre
α de cette variable est

[0021] Ces relations restent valables même si f₀ = 0.
[0022] Cas de l'énergie d'un processus gaussien quelconque "sous-échantillonné".
Ce modèle est plus pratique que théorique. Si la fonction de corrélation est inconnue,
on sait cependant que : lim
k → + ∞ Γ
x(k) = 0. Donc, pour k assez grand tel que k > k₀, la fonction de corrélation tend
vers 0. Aussi, au lieu de traiter la suite d'échantillons x(0)...x(N-1), peut-on traiter
la sous-suite x(0), x(k₀),x(2k₀),..., et l'énergie associée à cette suite reste une
variable aléatoire positive gaussienne, à condition qu'il reste dans cette sous-suite
suffisamment de points pour pouvoir appliquer les approximations dues au théorème
central-limite.
[0023] Cette façon de procéder peut permettre dans certains cas difficiles d'appliquer les
règles de décision qui sont décrites ci-dessous.
Résultat théorique fondamental.
Si X = X₁/X₂ où X₁ et X₂ sont toutes deux gaussiennes, indépendantes, telles que :

[0024] Lorsque α₁ et α₂ sont suffisamment grands pour pouvoir supposer que X₁ et X₂ sont
des variables aléatoires gaussiennes positives, la densité de probabilité f
X(x) de X = X₁/X₂ peut alors être approchée par :

où U(x) est la fonction indicatrice de
R⁺ :


où F désigne la fonction de répartition de la variable normale, et où

De plus:

[0025] Dans toute la suite, lorsque l'on utilise des couples de VAGP caractérisés par les
paramètres α₁, α₂ et m, on supposera connaître les valeurs de ces paramètres fixées
par une connaissance a priori ou par l'heuristique.
[0026] On va maintenant exposer l'étape de pré-classification du procédé de l'invention.
On suppose que C₁ = N(m₁, σ₁²) représente les énergies observables en présence de
signal utile et que C₂ = N(m₂, σ₂
²) représente les énergies observables en absence de signal utile. On pose m = m₁/m₂,
α₁ = m₁/σ₁ et α₂ = m₂/σ₂ et on suppose α₁ et α₂ suffisamment grands pour que les éléments
de C₁ et de C₂ soient des VAGP.
[0027] E = {
U₁,...,
Un} est l'ensemble des énergies dont on dispose.
Chacune de ces énergies U
i vaut

où les u
i(k) pour k allant de 0 à N-1 représentent les échantillons de la trame T
i, N le nombre de ces échantillons u
i(k), c'est-à-dire la longueur des trames T
i. Les énergies U
i sont supposées indépendantes entre elles. L'étape de pré-classification cherche à
mettre en évidence quelques énergies seulement, qui sont vraisemblablement des énergies
de la classe C₂. Cette étape fait appel aux notions présentées ci-dessous.
Notion de compatibilité entre énergies :
Soit (U, V) ε (C₁UC₂)X(C₁UC₂) et X = U/V. On définit les hypothèses suivantes :
H₁ : (U,V) ε (C₁XC₁)U(C₂UC₂) et H₂ : (U,V) ε (C₁XC₂)U(C₂UC₁). Si on a: 1/s < X < s
⇔ on décide que U et V appartiennent à la même classe, c'est-à-dire que H₁ est considérée
comme vraie. On dira que U et V sont compatibles. Cette décision sera notée D₁. Mais
si on a : X < 1/s ou X > s ⇔ on décide que U et V n'appartiennent pas à la même classe,
c'est-à-dire que H₂ est considérée comme vraie. On dira que U et V sont incompatibles.
Cette décision sera notée D₂.
Si I = [1/s,s], la règle s'exprime selon : x ε I ⇔ D = D₁, x ε R - I ⇔ D = D₂.
On cherche à optimiser cette règle de décision qui permet d'associer les réalisations
de variables aléatoires entre elles. Pour ce faire, on calcule le seuil s optimal.
Ce calcul est différent suivant que l'on connaît ou non la probabilité p. Lorsque
p est connue, on applique directement le critère du maximum de vraisemblance. Lorsque
p est inconnue, et comme les hypothèses sont réduites au nombre de 2, on utilise le
critère de Neyman-Pearson.
Critère du Maximum de vraisemblance :
[0028] On démontre que la probabilité de décision correcte est :

Le seuil optimal s vérifie


[0029] Cette équation se résout sur calculateur, une fois fixées les valeurs m, p, α₁ et
α₂.
Critère de Neyman-Pearson :
[0030] Lorsque p est inconnu, on utilise une approche du type Neyman-Pearson. On dira qu'il
y a détection si on prend la décision D₁, c'est-à-dire si on décide que les deux variables
aléatoires sont de la même classe. On définit alors les probabilités de non détection
P
nd et de fausse alarme P
fa par : P
nd = Pr{D₂|H₁} (probabilité de décider de l'incompatibilité, alors que les variables
sont de la même classe) et P
fa= Pr {D₁| H₂} (probabilité de décider de la compatibilité alors que les variables
sont incompatibles). Le critère de Neyman-Pearson consiste à minimiser P
nd lorsque P
fa est fixée (ou inversement). Ce type de critère s'applique lorsqu'une erreur est beaucoup
plus grave que l'autre. Comme il est question ici de savoir si les variables aléatoires
observées appartienent ou non à une même classe, il est évident que l'on cherchera
à n'avoir, dans les réalisations retenues comme étant des réalisations de variables
d'une même classe, que peu d'erreurs. C'est donc la P
fa que l'on va fixer de manière à n'avoir que très peu de fausses alarmes.

et

de sorte que lorsque α₁ ≠ α₂,
Pnd
dépend de p, qui est inconnu et est inaccessible.
[0031] Dans le cas où α₁ = α₂ = α, alors P
nd = 2.P (s,1|α,α) - 1 et est donc accessible. On peut fixer P
nd dans ce cas. Ayant l'expression de P
fa (ou de P
nd), on fixe cette probabilité, cequi permet d'obtenir leseuil s correspondant.
Compatibilités entre plusieurs énergies.
[0032] Lorsque le seuil a été calculé suivant un des deux procédés précités, il est intéressant
de généraliser cette notion de compatibilité entre plusieurs énergies. Soient alors
U₁, ..., U
N, N énergies, on dira que ces énergies sont compatibles entre elles, si et seulement
si, ∀ i et j, U
i et U
j sont compatibles au sens évoqué ci-dessus, autrement dit, si toutes ces énergies
sont compatibles deux à deux.
[0033] Pour la mise en oeuvre du procédé, on fait les hypothèses suivantes :
- les énergies de la classe C₂ sont plus faibles statistiquement que celles de la classe
C₁ ;
- la trame présentant l'énergie la plus faible est une trame de la classe C₂. Soit Ti0, cette trame.
[0034] Le calcul se déroule alors comme suit :
[0035] L'ensemble Δ est initialisé : Δ = {T
i0} ;
POUR i décrivant {E(T₁), ..., E(T
n)} - {E(T
i0)}
FAIRE
Si E(T
i) est compatible avec chaque élément de Δ : Δ = Δ U {E(T
i)}.
FIN POUR
[0036] Le procédé de confirmation de bruit fournit un certain nombre de trames qui peuvent
être considérées comme du bruit avec une très forte probabilité. On calcule, à partir
de la donnée des échantillons temporels, un modèle autorégressif du bruit. Si x(n)
désigne les échantillons de bruit, on modélise x(n) selon:

où p est l'ordre du modèle, les a
i sont les coefficients du modèle à déterminer et e(n) est le bruit de modélisation,
supposé blanc et gaussien si on suit une approche par maximum de vraisemblance. Ce
type de modélisation est largement décrit dans la littérature "Spectrum Analysis -
A modern Perspective", S. M. KAY/ S.L. MARPLE JR., Proceedings of the IEEE, Vol. 69,
N° 11, November 1981, notamment. Quant aux procédés de calcul du modèle, de nombreuses
méthodes sont disponibles (Burg, Levinson-Durbin, Kalman, Fast Kalman ...). De façon
avantageuse, on met en oeuvre des procédés du type Kalman et Fast Kalman : "Le Filtrage
Adaptatif Transverse", O. MACCHI, M. BELLANGER, Traitement du signal, Vol. 5, N° 3,
1988 et "Analyse des signaux et filtrage numérique adaptatif", M. BELLANGER, Collection
CNET-ENST, MASSON, qui présentent de très bonnes performances temps réel. Disposant
d'un modèle autorégressif du bruit, il est alors aisé de blanchir ce bruit, ce qui
permet de travailler sur un bruit blanc gaussien aisément manipulable.
[0037] Soit u(n) = s(n) + x(n) le signal total, composé du signal utile s(n) et du bruit
x(n). Soit le filtre

Appliqué au signal U(z), il vient H(z)U(z) = H(z)S(z) + H(z)X(z).
Or H(z)X(z) = E(z) ⇒ H(z)U(z) = H(z)S(z) + E(z). Le filtre réjecteur H(z) blanchit
le signal, de sorte que le signal en sortie de ce filtre est un signal utile (filtré
donc déformé), additionné d'un bruit généralement blanc et gaussien. Travailler sur
un bruit blanchi permet de se rapprocher d'hypothèses idéales, notamment lors de l'application
du procédé de détection. Cependant ce blanchiment n'est pas obligatoire et on peut
appliquer directement le procédé de détection sans passer par cet intermédiaire.
[0038] Etant donné qu'après mise en oeuvre du procédé de l'invention, on dispose d'un certain
nombre de trames confirmées comme étant des trames de bruit, on peut aussi calculer
un spectre moyen de ce bruit, de manière à implanter un filtrage spectral du type
soustraction spectrale ou filtrage de WIENER, type largement décrit dans la littérature
: "Suppression of Acoustic Noise in Speech Using Spectral Substraction" S. F. BOLL,
IEEE Transactions on Acoustics, Speech, and Signal Processing, Vol. ASSP-27, N° 2,
April 1979; "Enhancement and Bandwidth Compression of Noisy Speech", J. S. LIM, A.
V. OPPENHEIM, Proceedings of the IEEE, Vol. 67, N° 12, Dec. 1979, et "Noise Reduction
For Speech Enhancement In Cars: Non-Linear Spectral Subtraction, Kalman Filtering",
P. LOCKWOOD, C. BAILLARGEAT, J. M. GILLOT, J. BOUDY, G. FAUCON, EUROSPEECH 91. Cet
aspect peut être intéressant dans ces certaines applications, voir par exemple: "Procédé
de détection de la parole", D. PASTOR, demande de brevet français N° 92 12582, déposée
le 21.10.92.
[0039] Détection selon le procédé de l'invention.
[0040] Disposant d'un ensemble Δ dont les composantes sont vraisemblablement des énergies
de la classe C₂ (après un éventuel blanchiment), on cherche à détecter grâce à ces
références les énergies de la classe C₁. Si V représente la valeur moyenne des énergies
de l'ensemble Δ, cette variable est aussi une VAGP. Si Δ = {V₁, ..., V
M}, on a, avec les notations déjà utilisées, ∀ i ε {1, ..., M}, V
i ε N(m₂, σ₂²).

puisque les V
i sont indépendantes. On pose m = m₁/m₂, α₁ = m₁/σ et α₂ = m₂/σ₂.
[0041] On passe alors à la règle de décision optimale.
Application du critère du maximum de vraisemblance (on connaît la probabilité p de
décision correcte) :
soit p = Pr {U ε C₁}. La règle de décision optimale est alors :


Application du critère de Neyman-Pearson :
[0042] Lorsqu'on ne connaît pas la valeur de p, on peut :
- soit la fixer arbitrairement par une approche heuristique,
- soit la fixer à p = 0,5, ce qui place dans le cas le plus défavorable,
- soit utiliser le critère de Neyman-Pearson ou le critère de la médiane qui consiste
à avoir :
probabilité de fausse alarme = probabilité de non détection.
[0043] Si l'on veut appliquer le critère Neyman-Pearson ou le critère de la médiane, la
règle de détection sera de la forme :


Le seuil λ est fixé pour atteindre une valeur a priori de la probabilité de fausse
alarme (ou la probabilité de décision correcte).
[0044] Cette probabilité P
FA de fausse alarme vaut :

[0045] Il n'y a a priori pas de calcul théorique simple de cette expression, donc pas de
moyen théorique d'évaluer le seuil λ. Le calcul de λ peut cependant se faire sous
simulation, suivant le cas particulier traité. La règle de décision simplifiée exposée
ci-dessous est plus pratique à utiliser dans ce cas.
Règle de décision simplifiée.
Cette règle est:

Cas du critère du maximum de vraisemblance :
la probabilité P
c de désicion correcte est :

[0046] Le seuil optimal est obtenu pour :

Cas du critère de Neyman-Pearson :
Lorsque la probabilité p est inconnue, on peut :
- soit la fixer arbitrairement par une approche heuristique,
- soit la fixer à p = 0,5, ce qui place dans le cas le plus défavorable,
- soit utiliser le critère de Neyman-Pearson ou le critère de la médiane qui consiste
à avoir Probabilité de fausse alarme = Probabilité de non-détection.
[0047] Pour appliquer le critère de Neyman-Pearson ou le critère de la médiane on définit
les probabilités de non-détection et de fausse alarme :

[0048] On a :

[0049] On fixe alors P
fa ou P
nd, pour déterminer la valeur du seuil.
[0050] Le critère de la médiane amène à :

Mise en oeuvre.
[0051] Lorsque la règle de décision a été définie à l'aide des outils théoriques rappelés
ci-dessus, et disposant d'une énergie E₀ de "référence" de bruit, on effectue la détection
sur E(T₁), ..., E(T
n), avec :

où les u
i (n) sont les N échantillons constituant la trame T
i.
[0052] Parmi les trames dont on dispose au départ, l'algorithme de préclassification a mis
en évidence un ensemble Δ de trames presque sûrement de la classe "bruit". La moyenne
des énergies des trames de l'ensemble Δ permet d'obtenir une valeur de référence E
o qui va être utilisée par l'algorithme de détection de manière à classifier les énergies
des trames autres que celles de l'ensemble Δ ainsi que les nouvelles trames acquises
ultérieurement.
POUR E(T
i) décrivant {E(T₁), ..., E(T
n)}
FAIRE
X = E(T
i)/E₀
Cas de la détection optimale :

détection
sur la trame T
i.
Cas d'une détection à seuil :
SI X > s détection sur la trame T
i
FIN POUR
POUR chaque nouvelle trame T représentée par les échantillons u(0), ..., u (N-1),
FAIRE

X = E(T
i)/E₀
Cas de la détection optimale.

détection sur la trame T
i
Cas d'une détection à seuil.
SI X > s Détection sur la trame T
i
(s'il n'y a pas de détection, la trame acquise peut être considérée comme du bruit
et éventuellement venir réactualiser Δ ainsi que la valeur E
o de référence).
FIN POUR
Exemples d'application.
[0053] Il est possible de traiter un grand nombre d'exemples permettant de mettre en évidence
l'intérêt du procédé de l'invention. En fait, il existe autant d'exemples que de couples
de modèles que l'on peut former à partir de ceux décrits ci-dessus (voir les exemples
de VAGP donnés ci-dessus) :
- détection d'un bruit blanc gaussien dans un autre bruit blanc gaussien ;
- détection d'un bruit blanc gaussien dans un bruit gaussien bande étroite ;
- détection d'une énergie déterministe dans un bruit gaussien bande étroite...
Détection d'un signal d'énergie bornée dans un bruit gaussien bande étroite :
Hypothèse 1 : nous supposons ne pas connaître le signal utile dans sa forme, mais
nous ferons l'hypothèse suivante : pour toute réalisation s(0), ..., s(N-1) de s(n),
l'énergie S définie par :
S = (1/N)Σ
0≦ n≦ N-1 s(n)² est bornée par µ
s², et ce, dès que N est suffisamment grand, de sorte que : S = Σ
0≦ n≦ N-1s(n)² > Nµ
s².
Hypothèse 2 : Le signal utile est perturbé par un bruit additif noté x(n), que l'on
suppose gaussien et bande étroite. On suppose que le processus x(n) traité est obtenu
par filtrage bande étroite d'un bruit blanc gaussien.
[0054] La fonction de corrélation d'un tel processus est alors :

Si on considère N échantillons x(n) de ce bruit, on a alors :

avec:

Le paramètre α de cette variable est :

Hypothèse 3 : Les signaux s(n) et x(n) sont supposés indépendants. On suppose alors
que l'indépendance entre s(n) et x(n) implique la décorrélation au sens temporel du
terme, c'est-à-dire que l'on peut écrire :

Ce coefficient de corrélation n'est que l'expression dans le domaine temporel du coefficient
de corrélation spatial défini par :
E[s(n)x(n)]/(E[s(n)²]E[x(n)²])
½ lorsque les processus sont ergodiques.
Soit u(n) = s(n) + x(n) le signal total, et

On approxime U par :

Comme on a :

on aura :

Hypothèse 4 : Comme nous supposons que le signal présente une énergie moyenne bornée,
nous supposerons qu'un procédé capable de détecter une énergie µ
s², sera capable de détecter tout signal d'énergie supérieure.
[0055] Compte tenu des hypothèses précédentes, on définit la classe C₁ comme étant la classe
des énergies lorsque le signal utile est présent. Selon l'hypothèse 3, U ≧ Nµ
s² + Σ
0≦ n≦ N-1 x(n)², et selon l'hypothèse 4, si on détecte l'énergie Nµ
s² + Σ
0≦ n≦ N-1 x(n)², on saura détecter aussi l'énergie totale U.
D'après l'hypothèse 2,

Donc C₁ = N( Nµ
s² + Nσ
x² , 2σ
x⁴Σ
0≦i≦N-1,0≦j≦N-1gf0,B,Te(i,j)²) et le paramètre α de cette variable vaut : α₁ = N(1+r)/[2Σ
0≦i≦ N-1,0≦j≦N-1gf0,B,Te(i-j)²]
½, où r = µ
s²/σ
x² représente le rapport signal à bruit.
C₂ est la classe des énergies correspondant au bruit seul. D'après l'hypothèse 2,
si les échantillons de bruit sont x(0),...,x(M-1), il vient :

Le paramètre α de cette variable est :

On a donc :


et

D'où m = m₁/m₂ = (N/M)(1+r),

et

On peut alors mettre en oeuvre les étapes du procédé de l'invention exposées ci-dessus.
Détection de code PN
[0056] On considère une modulation BPSK étalée par un code PN de longueur L très grande
devant 1. La durée d'émission d'un élément binaire d
n est T
b. La durée d'émission d'un élément binaire du code PN est T'.
[0057] Sur l'intervalle de [nT
b,(n+1)T
b]. le signal émis est :

avec :
- Λ[kTc,(k+1)Tc](t) = 1 si t ε [kT',(k+1)T'] et
Λ[kT',(k+1)T'](t) = 0 si t ∉ [kT',(k+1)T'],
- K désigne le nombre d'échantillons du code PN vus sur cet intervalle, et.
- φ la phase aléatoire équirépartie sur [0,2π]
[0058] Ce signal émis est noyé dans un bruit de fond qui est b(t), que l'on suppose blanc
et gaussien.
[0059] On cherche alors à détecter le signal s(t) à partir du signal reçu r(t) = m(t) +
b(t), en supposant que l'on ne connaît pas le code PN, donc ni les valeurs c
k ni la durée L, ni le temps T
b, ni la fréquence ω₀.
[0060] Soit alors la variable aléatoire :

où :
- T est une durée d'intégration assez grande pour que les échantillons du code PN vus
sur cet intervalle soient suffisamment nombreux et décorrélés, tout en restant assez
faibles pour qu'on n'atteigne pas la prériodicité L du code PN. Si K est le nombre
d'éléments binaires du code PN vu sur cet intervalle, on suppose donc: L >> 1, K <<
L et K >> 1.
T vérifie en outre ω₀T >> 1
- ω est une fréquence qui sert à essayer de récupérer la porteuse, telle que ωT >> 1
On pose:
et:



[0061] En utilisant le théorème central-limite, et après des calculs tels que décrits dans
"Performance of a Direct Sequence Spread Spectrum System with Long Period and Short
Period Code Sequences", R. SINGH, IEEE Transactions on Communications, Vol. Com-31,
N° 3, March 1983, on montre que s(n) est une variable gaussienne, de moyenne nulle
et de variance : σ
s² = (T
b/T)(E
b/2K)sin
c²(π(ω - ω₀)/K).
[0062] En pratique, on suppose que les s(n) sont indépendants, de sorte que la suite des
échantillons s(n) constitue un processus discret blanc gaussien.
[0063] De même, la suite des échantillons x(n) constitue un processus blanc gaussien de
moyenne nulle et de variance σ
s² = σ
b². Détecter le code PN, c'est détecter s(n), donc détecter un bruit blanc gaussien
noyé dans un autre bruit blanc gaussien.
[0064] Soit alors la variable U = Σ
0≦ n≦ N-1 u(n)². En reprenant les résultats énoncés ci-dessus à propos des VAGP, on a :

Le paramètre α de cette variable est α₁ = (N/2)
½
[0065] Soit alors la variable V = Σ
0≦ n≦M-1 x(n)². On a :

[0066] Le paramètre α de cette variable est α₂ = (M/2)
½. On peut donc modéliser comme dans le cas d'une détection entre les deux classes
:

On a alors :

On notera que si

Le procédé décrit ci-dessus est donc applicable à ce problème.