[0001] L'invention concerne les procédés électrochimiques, en particulier les procédés d'électrolyse.
[0002] Elle concerne plus particulièrement une électrode utilisable dans de tels procédés.
[0003] Des paramètres importants des procédés d'électrolyse industriels sont, d'une part,
les potentiels des réactions électrochimiques aux électrodes et, d'autre part, le
rendement de courant aux électrodes.
[0004] La difficulté de réaliser des rendements de courant acceptables est particulièrement
présente dans les procédés d'électrolyse des sels des métaux alcalins en solution
aqueuse, la réaction à l'anode s'accompagnant habituellement d'une formation parasite
d'oxygène. Cette difficulté est particulièrement présente dans les procédés de fabrication
de chlore par électrolyse de solutions aqueuses de chlorure de métal alcalin (en particulier
de sodium).
[0005] Le moyen utilisé pour réduire la production parasite d'oxygène dans les procédés
d'électrolyse consiste à faire usage d'anodes présentant une surtension élevée à l'oxydation
des anions d'oxygène. A cet effet, dans la demande de brevet européen EP-A-0153586,
on propose des anodes comprenant, sur un substrat électroconducteur, un revêtement
d'oxyde de ruthénium et d'oxyde d'étain, associés à du platine, de l'oxyde de platine
ou de l'oxyde d'iridium. On cite par ailleurs une anode dont le revêtement consiste
en un mélange de 14 % molaire de platine, de 6 % molaire d'iridium et de 80 % molaire
d'étain. Dans ce revêtement connu, l'iridium et l'étain sont à l'état d'oxydes.
[0006] En ce qui concerne le revêtement connu précité de platine, d'oxyde d'iridium et d'oxyde
d'étain, on a maintenant trouvé qu'en modifiant de manière appropriée ses teneurs
relatives en platine, oxyde d'iridium et oxyde d'étain, il était possible d'augmenter
de manière sensible et inattendue la surtension à l'oxydation des anions d'oxygène
et, par voie de conséquence, d'améliorer le rendement de courant anodique dans les
procédés d'électrolyse des sels de métaux alcalins en solution aqueuse.
[0007] L'invention concerne dès lors une électrode pour procédé électrochimique, comprenant,
sur un substrat électroconducteur, un revêtement de platine, d'oxyde d'iridium et
d'oxyde d'étain, ledit revêtement comprenant plus de 8 % en poids d'oxyde d'iridium.
[0008] Dans l'électrode selon l'invention, le substrat doit être en un matériau électroconducteur,
inerte dans les conditions d'électrolyse auxquelles l'électrode est destinée. Nonobstant
cette condition, le substrat de l'électrode selon l'invention n'est pas critique et
sa constitution ne constitue pas l'objet de l'invention. A titre d'exemple, le substrat
peut avantageusement être en un métal sélectionné parmi le titane, le tantale, le
zirconium, le vanadium, le niobium et le tungstène ou en un alliage de ces métaux.
[0009] Le profil du substrat n'est pas critique et ne constitue pas l'objet de l'invention,
le profil le plus adéquat dépendant de la destination de l'électrode et devant dès
lors être déterminé dans chaque cas particulier. A titre d'exemple, le substrat de
l'électrode selon l'invention peut être une plaque pleine ou ajourée, rigide ou flexible,
un fil, un treillis de fils entrelacés ou un empilage de billes.
[0010] Le revêtement doit être présent sur le substrat en une quantité suffisante pour couvrir
une partie substantielle du substrat et catalyser la réaction électrochimique à laquelle
l'électrode est destinée. La quantité optimum de revêtement va dès lors dépendre de
la réaction électrochimique à laquelle on destine l'électrode et elle peut être déterminée
dans chaque cas particulier par un travail de routine au laboratoire. En pratique,
il est souhaitable que le revêtement soit présent sur le substrat en une quantité
au moins égale à 1 g (de préférence à 5 g) par m² de la surface du substrat sur laquelle
il est appliqué. Bien qu'il n'existe pas, en principe, de limite supérieure à l'épaisseur
du revêtement sur le substrat, en pratique il n'y a pas intérêt à ce qu'il excède
20 g par m² de la surface précitée du substrat, les épaisseurs de 8 à 12 g/m² étant
spécialement recommandées.
[0011] Dans l'électrode selon l'invention, le platine, l'oxyde d'iridium et l'oxyde d'étain
sont de préférence répartis de manière homogène dans le revêtement. On entend par
cette expression, que les concentrations relatives de platine, d'oxyde d'iridium et
d'oxyde d'étain sont sensiblement identiques en tous points de revêtement ou qu'elles
ne divergent pas de plus de 5 % (de préférence 1 %) entre deux points quelconque du
revêtement.
[0012] Tous moyens appropriés peuvent être utilisés pour appliquer le revêtement sur le
substrat. Un moyen recommandé consiste à appliquer sur le substrat un enduit de composés
thermodécomposables du platine, de l'iridium et de l'étain et à soumettre ensuite
l'enduit à un traitement thermique en atmosphère oxydante, de manière à décomposer
les composés thermodécomposables et à former le revêtement. Les composés thermodécomposables
peuvent être tous composés qui, chauffés en atmosphère oxydante, libèrent du platine
ou de l'oxyde de platine, du dioxyde d'iridium et du dioxyde d'étain. Ils peuvent
par exemple être sélectionnés parmi les nitrates, les sulfates, les phosphates, les
halogénures et les sels d'acides carboxyliques. Pour constituer l'enduit, les composés
thermodécomposables précités peuvent être mis en oeuvre à l'état solide, par exemple
à l'état d'une poudre, ou à l'état liquide, par exemple sous la forme de sels fondus,
de suspensions ou de solutions. Le traitement thermique consiste, par définition,
en un chauffage de l'enduit à une température suffisante en atmosphère oxydante contrôlée
pour décomposer les composés thermodécomposables et coprécipiter du platine ou de
l'oxyde de platine, de l'oxyde d'iridium et de l'oxyde d'étain. L'atmosphère oxydante
peut consister en de l'air atmosphérique, de l'air enrichi ou de l'oxygène pur. On
préfère utiliser l'air atmosphérique. Le choix des composés thermodécomposables et
la température du traitement thermique sont interdépendants. Le choix des composés
thermodécomposables est notamment influencé par la température admissible pour le
traitement thermique, de manière à éviter que celui-ci endommage le substrat. Dans
une forme d'exécution avantageuse de l'invention, les composés thermodécomposables
sont sélectionnés parmi les halogénures et ceux-ci sont mis en oeuvre à l'état dissous
dans un solvant organique. Les chlorures sont préférés, en particulier le tétrachlorure
d'iridium, le tétrachlorure d'étain et l'acide hexachloroplatinique, et le solvant
organique est avantageusement sélectionné parmi les alcools, de préférence les alcools
aliphatiques tels que le méthanol, l'éthanol et l'isopropanol, par exemple. Pour l'exécution
du traitement thermique, les températures de 100 à 1 000 °C conviennent dans la majorité
des cas, celles de 200 à 750 °C étant spécialement recommandées. Dans la mise en oeuvre
de cette forme d'exécution de l'invention, il est généralement recommandé d'appliquer
plusieurs couches successives de la solution organique des composés thermodécomposables
sur le substrat et de soumettre chaque couche individuellement au traitement thermique
défini plus haut.
[0013] Selon l'invention, la sélection d'une teneur en oxyde d'iridium supérieure à 8 %
(de préférence au moins égale à 25 %) du poids du revêtement permet d'augmenter de
manière substantielle la surtension de décharge des anions oxygène, lorsque l'électrode
selon l'invention est utilisée comme anode dans un procédé d'électrolyse d'une solution
aqueuse d'un sel de métal alcalin, en particulier de chlorure de sodium.
[0014] Dans une forme de réalisation particulière de l'électrode selon l'invention, la teneur
en platine du revêtement est d'au moins 10 % (de préférence d'au moins 12 %) en poids.
Cette forme de réalisation de l'électrode selon l'invention possède l'avantage supplémentaire
de présenter une plus faible surtension à la décharge électrochimique des anions chlorure
et elle est de ce fait spécialement adaptée à servir d'anode dans les procédés de
fabrication électrolytique de chlore.
[0015] Le revêtement de l'électrode peut être constitué exclusivement de platine, d'oxyde
d'iridium et d'oxyde d'étain, ou bien il peut comprendre un ou plusieurs composés
additionnels, différents du platine, de l'oxyde d'iridium et de l'oxyde d'étain. En
général on préfère que le revêtement de l'électrode selon l'invention soit essentiellement
constitué de platine, d'oxyde d'iridium et d'oxyde d'étain.
[0016] Selon une forme de réalisation préférée de l'invention, le revêtement de l'électrode
est essentiellement constitué de 12 à 17 % en poids de platine, de 30 à 40 % en poids
d'oxyde d'iridium et de 43 à 58 % en poids d'oxyde d'étain. L'électrode conforme à
cette forme de réalisation de l'invention convient spécialement bien comme anode pour
la production de chlore par électrolyse des solutions aqueuses de chlorure des métaux
alcalins.
[0017] L'invention concerne dès lors également l'utilisation de l'électrode selon l'invention
comme anode dans les procédés d'électrolyse des sels des métaux alcalins en solution
aqueuse, spécialement pour la production de chlore par électrolyse des solutions aqueuses
de chlorure des métaux alcalins. Elle concerne tout spécialement l'utilisation de
l'électrode selon l'invention comme anode pour la production de chlore par électrolyse
d'une solution aqueuse de chlorure de sodium.
[0018] L'intérêt de l'invention va ressortir de la description des exemples suivants, en
référence à la figure unique du dessin annexé qui est un diagramme fournissant les
performances comparées d'une électrode selon l'invention et d'une électrode antérieure
à l'invention.
[0019] Dans les exemples dont la description suit, on a préparé des électrodes comprenant
un substrat en titane et un revêtement de platine, d'oxyde d'iridium et d'oxyde d'étain
sur le substrat. Le substrat a consisté en un treillis ayant la forme d'un disque
d'environ 100 cm² de superficie et le revêtement a été appliqué sur la totalité de
la superficie du disque. Pour former le revêtement, on a d'abord préparé trois solutions
organiques distinctes, à savoir une solution d'acide hexachloroplatinique dans de
l'isopropanol (30 g d'acide hexachloroplatinique par litre de solution), une solution
de tétrachlorure d'iridium dans de l'isopropanol (20 g de tétrachlorure d'iridium
par litre de solution) et une solution de tétrachlorure d'étain dans de l'isopropanol
(23 g de tétrachlorure d'étain par litre de solution). Les trois solutions ont ensuite
été mélangées en proportions adéquates pour constituer l'enduit et celui-ci a ensuite
été appliqué sur le disque en dix couches successsives. A l'issue de chaque couche
d'enduit, le disque et l'enduit ont été chauffés dans l'air atmosphérique, à la température
de 450 °C pendant une heure.
[0020] Les électrodes obtenues de la manière exposée ci-dessus ont été utilisées comme anodes
dans une cellule d'électrolyse de laboratoire, dont la cathode a consisté en un disque
en nickel de 100 cm², séparé de l'anode par une membrane de marque NAFION® (DU PONT),
sélectivement perméable aux cations. La distance entre l'anode et la cathode a été
fixée à 1 mm. Pour évaluer les performances de l'anode, on a procédé à l'électrolyse
d'une solution aqueuse sensiblement saturée de chlorure de sodium à 85 °C, sous une
densité de courant anodique de 3,5 kA/m². A cet effet, pendant l'électrolyse, on a
alimenté la chambre anodique de la cellule en permanence avec la solution de chlorure
de sodium, de manière à produire, dans la chambre cathodique, une solution aqueuse
de 32 % en poids environ d'hydroxyde de sodium. On a de la sorte produit du chlore
à l'anode et de l'hydrogène à la cathode. Pour évaluer les performances de l'anode,
on a mesuré la teneur en oxygène dans le gaz recueilli à l'anode. Les résultats des
mesures ont été portés sur le diagramme du dessin annexé. Sur ce diagramme, l'échelle
des abscisses représente le temps, exprimé en jours, et l'échelle des ordonnées représente
la teneur en oxygène dans le gaz produit à l'anode (exprimée en % en poids de gaz).
Exemple 1 (de référence)
[0021] Dans cet exemple, les solutions d'acide hexachloroplatinique, de tétrachlorure d'iridium
et de tétrachlorure d'étain ont été mélangées en proportions adéquates pour qu'à l'issue
du traitement thermique, le revêtement présente la composition pondérale suivante,
qui est celle de l'électrode utilisée à l'exemple 13 de la demande de brevet EP-A-0153586
citée plus haut :
platine : |
17 %, |
dioxyde d'iridium : |
8 %, |
dioxyde d'étain : |
75 %. |
[0022] L'évolution au cours du temps de la teneur en oxygène dans le gaz recueilli a l'anode
est représentée par les symboles ■ au diagramme du dessin.
Exemple 2 (conforme à l'invention)
[0023] Dans cet exemple, les solutions d'acide hexachloroplatinique, de tétrachlorure d'iridium
et de tétrachlorure d'étain ont été mélangées en proportions adéquates pour qu'à l'issue
du traitement thermique, le revêtement présente la composition pondérale suivante,
conforme à l'invention :
platine : |
15 %, |
dioxyde d'iridium : |
35 %, |
dioxyde d'étain : |
50 %. |
[0024] L'évolution au cours du temps de la teneur en oxygène dans le gaz recueilli a l'anode
est représentée par les symboles + au diagramme du dessin.
[0025] Une comparaison des résultats des exemples 1 et 2 au diagramme du dessin fait immédiatement
apparaître le progrès apporté par l'invention.
1. Electrode pour procédé électrochimique, comprenant, sur un substrat électroconducteur,
un revêtement de platine, d'oxyde d'iridium et d'oxyde d'étain, ledit revêtement comprenant
plus de 8 % en poids d'oxyde d'iridium.
2. Electrode selon la revendication 1, caractérisée en ce que le revêtement comprend
au moins 25 % en poids d'oxyde d'iridium.
3. Electrode selon la revendication 1 ou 2, caractérisée en ce que le revêtement comprend
au moins 10 % en poids de platine.
4. Electrode selon l'une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisée en ce que
le revêtement est essentiellement constitué de platine, d'oxyde d'iridium et d'oxyde
d'étain.
5. Electrode selon la revendication 4, caractérisée en ce que le revêtement comprend
de 12 à 17 % en poids de platine, de 30 à 40 % en poids d'oxyde d'iridium et de 43
à 58 % en poids d'oxyde d'étain.
6. Electrode selon l'une quelconque des revendications 1 à 5 caractérisée en ce que le
substrat est en un métal sélectionné parmi le titane, le tantale, le zirconium, le
vanadium, le niobium et le tungstène ou en un alliage de ces métaux.
7. Utilisation de l'électrode selon l'une quelconque des revendications 1 à 6, comme
anode dans un procédé d'électrolyse d'un sel de métal alcalin en solution aqueuse.
8. Utilisation selon la revendication 7, pour la production de chlore, le sel de métal
alcalin étant un chlorure.
9. Utilisation selon la revendication 8, dans laquelle le métal alcalin est le sodium.