[0001] La présente invention concerne des aciers destinés à fabriquer des réacteurs, des
fours, des conduites ou certains de leurs éléments utilisés notamment dans des procédés
pétrochimiques, ces aciers ayant une résistance au cokage améliorée.
[0002] L'invention concerne également la fabrication de réacteurs, de fours, de conduites
ou de certains de leurs éléments, au moyen de ces aciers.
[0003] Le dépôt carboné qui se développe dans les fours lors de la conversion des hydrocarbures
est généralement appelé coke. Ce dépôt de coke est néfaste dans les unités industrielles.
En effet, la formation du coke sur les parois des tubes et des réacteurs entraîne
notamment une diminution des échanges thermiques, des bouchages importants et donc
des augmentations de pertes de charge. Pour conserver une température de réaction
constante, il peut être nécessaire d'augmenter la température des parois, ce qui risque
d'entraîner un endommagement de l'alliage constitutif de ces parois. On observe aussi
une diminution de la sélectivité des installations et par conséquent du rendement.
[0004] Il s'avère donc nécessaire d'arrêter périodiquement les installations afin de procéder
à un décokage. Il est donc intéressant économiquement de développer des matériaux
ou des revêtements susceptibles de diminuer la formation du coke.
[0005] On connaît la demande JP 03-104843 qui décrit un acier réfractaire anti-cokage pour
tube de four de vapocraquage à l'éthylène. Mais cet acier comporte plus de 15 % de
chrome et de nickel, et moins de 0,4 % de manganèse. Cet acier est développé pour
limiter la formation du coke entre 750°C et 900°C pour le vapocraquage d'un naphta,
d'éthane ou d'un gasoil.
[0006] Ainsi, la présente invention concerne des aciers de composition déterminée pour obtenir
une bonne résistance au cokage. Ces aciers ont la composition pondérale suivante :
- environ 0,05 % de carbone,
- de 2,5 % à 5 % de silicium,
- de 10 % à 20 % de chrome,
- de 10 à 15 % de nickel,
- de 0,5% à 1,5 % de manganèse,
- au plus 0,8 % d'aluminium,
- le complément à 100 % étant essentiellement du fer.
[0007] Les aciers de l'invention peuvent contenir en outre de 0,25 à environ 0,5 % en poids
de titane.
[0008] Selon une variante de l'invention, les aciers peuvent avoir la composition pondérale
suivante :
- environ 0,06 % de carbone,
- environ 3,5% à 5 % de silicium,
- environ 17,5 % de chrome,
- environ 10 % de nickel,
- environ 1,2 % de manganèse,
- environ 0,5 % de titane,
- environ 0,07 % l'aluminium,
- le complément à 100 % étant essentiellement du fer.
[0009] Ils peuvent alors présenter une structure austéno-ferritique.
[0010] Selon une autre variante de l'invention, les aciers peuvent avoir la composition
pondérale suivante :
- environ 0,05 % de carbone,
- d'environ 2,5 % à 3 % de silicium,
- d'environ 17 à 17,5 % de chrome,
- environ 12 % de nickel,
- environ 1,2 % de manganèse,
- environ 0,35 % de titane,
- et environ 0,06 % d'aluminium,
- le complément à 100 % étant essentiellement du fer.
[0011] Ils peuvent alors présenter une structure austénitique.
[0012] L'invention concerne également un procédé de fabrication d'éléments d'installations
destinées à des procédés pétrochimiques se déroulant à des températures comprises
entre 350 et 1100°C, dans lequel, pour améliorer la résistance au cokage desdits éléments,
on les fabrique, dans leur totalité ou en partie, en utilisant un acier tel que défini
plus haut.
[0013] Ces aciers peuvent être utilisés pour fabriquer des installations mettant en oeuvre
des procédés pétrochimiques, par exemple, le craquage catalytique ou thermique et
la déshydrogénation.
[0014] Par exemple, pendant la réaction de déshydrogénation de l'isobutane qui permet d'obtenir
de l'isobutène entre 550°C et 700°C, une réaction secondaire produit la formation
de coke. Cette formation de coke est catalytiquement activée par la présence de nickel,
fer et de leurs oxydes.
[0015] Une autre application peut concerner un procédé de vapocraquage de produits comme
un naphta, l'éthane ou un gasoil, qui conduit à la formation d'hydrocarbures insaturés
légers, notamment l'éthylène, etc... à des températures de 750°C à 1100°C.
[0016] Les aciers selon l'invention peuvent être utilisés pour fabriquer en totalité des
tubes ou des plaques destinés à la fabrication de fours ou de réacteurs.
[0017] Dans ce cas, les aciers selon la présente invention peuvent être élaborés par les
méthodes classiques de fonderie et de moulage, puis mis en forme par les techniques
usuelles pour fabriquer des tôles, des grilles, des tubes, des profilés, etc...Ces
produits semi-finis peuvent être utilisés pour construire les parties principales
des réacteurs ou seulement des parties accessoires ou auxiliaires.
[0018] On peut également utiliser les aciers selon l'invention pour le recouvrement des
parois internes de fours, réacteurs, ou conduites, par l'une au moins des techniques
suivantes: co-centrifugation, plasma, électrolytique, "overlay". Ces aciers peuvent
alors être utilisés sous forme de poudre pour effectuer des revêtements des parois
internes des réacteurs, des grilles ou tubes, en particulier après montage des installations.
[0019] L'invention sera mieux comprise et ses avantages apparaîtront plus clairement à la
lecture des exemples et des essais, nullement limitatifs, qui suivent, illustrés par
les figures ci-annexées parmi lesquelles:
- la figure 1 montre les courbes de cokage de différents aciers au cours d'une réaction
de déshydrogénation de l'isobutane,
- la figure 2 compare l'effet cumulé de cokage puis décokage pour les aciers selon l'invention
en comparaison avec un acier standard pour la même réaction,
- la figure 3 montre des courbes de cokage pour différents aciers pour une réaction
de vapocraquage de l'hexane.
[0020] Les aciers utilisés dans les exemples ont les compositions indiquées ci-après (%
poids) :
| ACIERS |
C |
Si |
Mn |
Ni |
Cr |
S |
P |
Al |
Ti |
| AS |
0,06 |
0,5 |
1,1 |
10 |
17,5 |
0,015 |
<0,04 |
0,07 |
0,5 |
| F1 |
0,37 |
2,31 |
|
|
10,25 |
|
|
|
|
| D1 |
0,04 |
1,9 |
1,8 |
12,5 |
19,3 |
0,001 |
0,02 |
0,06 |
0,005 |
| D2 |
0,2 |
3,6 |
0,8 |
14,5 |
18,5 |
0,015 |
<0,04 |
1,0 |
<0,01 |
| C1 |
0,06 |
5 |
1,2 |
10 |
17,5 |
0,015 |
<0,04 |
0,07 |
0,5 |
| C2 |
0,06 |
3,5 |
1,2 |
10 |
17,5 |
0,015 |
<0,04 |
0,07 |
0,5 |
| C3 |
0,05 |
3 |
1,2 |
12 |
17,5 |
0,015 |
<0,04 |
0,06 |
0,35 |
| C4 |
0,05 |
2,5 |
1,2 |
12 |
17,0 |
0,05 |
<0,04 |
0,06 |
0,35 |
[0021] AS est un acier standard utilisé couramment pour la fabrication de réacteurs ou d'élément
de réacteurs. Les aciers F1, D1 et D2 sont également présentés à titre comparatif.
Exemple 1:
[0022] Différents alliages ont été testés dans un réacteur de déshydrogénation de l'isobutane.
La réaction de déshydrogénation de l'isobutane permet d'obtenir de l'isobutène. Une
réaction secondaire est la formation de coke. Aux températures utilisées pour la déshydrogénation
de l'isobutane, le dépôt de coke est principalement constitué de coke d'origine catalytique.
[0023] L'acier F1 présente une structure ferritique, les aciers C1 et C2 une structure austéno-ferritique
et les aciers C3 et C4 une structure austénitique. Les teneurs en chrome et nickel
des aciers C3 et C4 ont été ajustées en utilisant les coefficients d'équivalence de
Guiraldenq et Pryce, afin de situer ces aciers dans le domaine monophasé austénitique
du diagramme de Schaeffer.
[0024] Les alliages C1, C2, C3 et C4 ont la faculté de développer une couche d'oxyde stable
et inerte vis-à-vis des phénomènes de cokage catalytique. La présence de silicium
dans ces alliages favorise la formation d'une couche externe et sensiblement continue
pratiquement constituée uniquement d'oxyde de chrome sans oxydes spinelles Cr_Ni_Fe.
Cette couche d'oxyde de chrome est séparée du substrat métallique par une zone d'oxyde
riche en silicium. L'atmosphère de la réaction chimique, par exemple de déshydrogénation
de l'isobutane, est alors pratiquement uniquement en contact avec une couche d'oxyde
de chrome inerte catalytiquement vis-à-vis du phénomène de cokage.
[0025] Le protocole opératoire utilisé pour la réalisation des essais est le suivant:
- Les échantillons d'acier sont découpés par électro-érosion puis polis au papier SiC
# 180 pour assurer un état de surface standard et enlever la croûte d'oxyde qui a
pu se former lors du découpage.
- Un dégraissage dans un bain de CCl4, acétone puis éthanol est effectué.
- Les échantillons sont ensuite suspendus au bras d'une thermobalance.
- Le réacteur tubulaire est ensuite fermé. La montée en température est réalisée sous
argon.
- Le mélange réactionnel constitué d'isobutane, d'hydrogène et d'argon et environ 300
ppm d'oxygène est injecté dans le réacteur.
[0026] La microbalance permet de mesurer en continu la gain de masse sur l'échantillon.
[0027] La figure 1 montre un graphique ayant en abscisses le temps en heures et en ordonnées
la masse de coke qui se forme sur l'échantillon en cours de réaction, masse donnée
en gramme par mètre carré (g/m
2). La courbe 1 est relative à l'acier AS, la courbe 2 à l'acier F1, les courbes 3
et 3b respectivement aux aciers D1 et D2, l'ensemble des courbes 4 aux aciers C1,
C2, C3 et C4.
[0028] Il est clair que pour les aciers C1, C2, C3 et C4 selon l'invention le taux de cokage
est réduit. Dans les mêmes conditions, les aciers F1, D1 et D2 montrent une moins
bonne résistance au cokage.
[0029] La figure 2 montre les courbes de cokage lors de plusieurs cycles de cokage/décokage
successifs. Les décokages ont été réalisés sous air à 600°C, pendant le temps nécessaire
pour brûler le coke déposé (de 5 à 10 minutes). La courbe 6 représente le cokage pour
l'acier AS au premier cycle, la courbe 5 représente le cokage pour l'échantillon d'acier
AS après 20 cycles de cokage/décokage.
[0030] Les courbes 7 représentent les courbes de cokage/décokage après 20 cycles pour les
aciers C3 et C4.
[0031] Après 20 cycles de cokage/décokage, les aciers C3 et C4 ont la même résistance vis-à-vis
du cokage. Leur couche d'oxyde de chrome superficielle n'a pas évolué et elle a conservé
sa très faible activité catalytique originelle vis-à-vis du cokage. Par contre, pour
l'acier standard qui ne contient pratiquement pas de silicium, après 20 cycles de
cokage/décokage, le taux de dépôt de carbone au bout de 6 heures d'essai a été multiplié
par quatre. La couche protectrice de l'acier standard n'est pas stable: lors des décokages
successifs, il se produit un enrichissement de cette couche en élément métallique
catalytique comme le fer ou le nickel.
Exemple 2:
[0032] Un second test a été effectué avec une réaction de vapocraquage de l'hexane à une
température d'environ 850°C. Le protocole de préparation des échantillons d'acier
et de test est le même que pour l'exemple 1.
[0033] La figure 3 montre le cokage d'un échantillon d'acier AS, représenté par la courbe
8, nettement supérieure aux courbes 9 et 10 représentant respectivement le cokage
des échantillons d'aciers C4 et C3.
[0034] Pour ce second test, les alliages C3 et C4 qui contiennent notamment du silicium
ont un taux de cokage inférieur à celui des aciers standards.
[0035] Il faut noter les bonnes caractéristiques mécaniques en température des aciers C3
et C4 selon l'invention:
| -1- |
-2- |
-3- |
-4- |
-5- |
-6- |
-7- |
| T |
Re |
Rm |
A |
trup |
trup |
t1% |
| |
|
|
|
10000 |
100000 |
10000 |
| (°C) |
(MPa) |
(MPa) |
(%) |
(MPa) |
(MPa) |
(MPa) |
| 600 |
140 |
370 |
40 |
210 |
150 |
140 |
| 700 |
130 |
320 |
44 |
75 |
30 |
50 |
| 800 |
120 |
300 |
50 |
15 |
7,5 |
8 |
[0036] La colonne 1 correspond à la température de l'échantillon, la colonne 2 à la contrainte
à la limite élastique, la colonne 3 à la contrainte à la rupture, la colonne 4 à l'allongement
à la rupture. La colonne 5 correspond à la contrainte à la rupture en test de fluage
après 10000 heures, la colonne 6 après 100000 heures, et la colonne 7 à la contrainte
pour un allongement de 1% en test de fluage après 10000 heures.
1. Acier présentant une résistance au cokage améliorée caractérisé en ce qu'il présente
essentiellement la composition pondérale suivante :
• environ 0,05 % de carbone,
• de 2,5 à 5 % de silicium,
• de 10 à 20 % de chrome,
• de 10 à 15 % de nickel,
• de 0,5 à 1,5 % de manganèse,
• au plus 0,8 % d'aluminium,
• le complément à 100 % étant essentiellement du fer.
2. Acier selon la revendication 1, caractérisé en ce qu'il contient en outre de 0,25
à environ 0,5 % en poids de titane.
3. Acier selon l'une des revendications 1 et 2 caractérisé en ce qu'il présente essentiellement
la composition pondérale suivante :
• environ 0,06 % de carbone,
• environ 3,5 à 5 % de silicium,
• environ 17,5 % de chrome,
• environ 10 % de nickel,
• environ 1,2 % de manganèse,
• environ 0,5 % de titane,
• et environ 0,07 % l'aluminium,
• le complément à 100 % étant essentiellement du fer.
4. Acier selon la revendication 3 ayant une structure austéno-ferritique.
5. Acier selon l'une des revendications 1 et 2, caractérisé en ce qu'il présente essentiellement
la composition pondérale suivante :
• environ 0,05 % de carbone,
• d'environ 2,5 à 3 % de silicium,
• d'environ 17 à 17,5 % de chrome,
• environ 12 % de nickel,
• environ 1,2 % de manganèse,
• environ 0,35 % de titane,
• et environ 0,06 % d'aluminium,
• le complément à 100 % étant essentiellement du fer.
6. Acier selon la revendication 5 ayant une structure austénitique.
7. Procédé de fabrication d'éléments d'unités destinées à des procédés pétrochimiques
se déroulant à des températures comprises entre 350 et 1100°C, caractérisé en ce que,
pour améliorer la résistance au cokage desdits éléments, on les fabrique, dans leur
totalité ou en partie, en un acier selon l'une des revendications 1 à 6.
8. Procédé selon la revendication 7, caractérisé en ce qui lesdits éléments sont fabriqués
en totalité en ledit acier.
9. Procédé selon l'une des revendications 7 et 8, caractérisé en ce que l'on effectue
le recouvrement par ledit acier des parois internes des éléments desdites unités après
leur montage.
10. Procédé selon la revendication 9, caractérisé en ce que ledit recouvrement est effectué
par au moins une technique choisie parmi la co-centrifugation, la technique de plasma,
le recouvrement électrolytique et la technique dite "overlay".
11. Procédé selon l'une des revendications 7 à 10, caractérisé en ce que l'unité est une
unité de déshydrogénation de l'isobutane fonctionnant entre 550 -700°C.
12. Procédé selon l'une des revendications 7 à 10, caractérisé en ce que l'unité est un
vapocraquage de naphta, d'éthane ou de gasoil fonctionnant entre 750 et 1100°C.