[0001] La présente invention concerne un procédé de fabrication d'un matériau de contact
électrique composite, notamment approprié à des disjoncteurs, ce matériau étant à
base de poudre d'un métal bon conducteur électrique tel que l'argent, le cuivre ou
leurs composés, et comprenant des fibres de carbone réparties dans la matrice métallique.
Elle concerne également le matériau obtenu par ce procédé.
[0002] De tels matériaux sont couramment utilisés pour réaliser des pastilles de contact
dans des appareils électromécaniques tels que disjoncteurs ou interrupteurs. Le carbone
ou graphite présent dans la matrice métallique a pour fonction première de réduire
le risque de soudure des contacts. Toutefois, la présence du graphite entraîne une
érosion mécanique et/ou électrique accrue du matériau.
[0003] Lorsque le carbone est apporté sous forme de fibres - voir par exemple le document
US-4 699 763 - la résistance à l'érosion est certes améliorée, mais cette amélioration
est acquise au prix d'une altération du comportement du contact à la soudure. Les
fibres de carbone sont mélangées à la poudre métallique avec apport d'agents mouillant,
lubrifiant et solvant par voie humide, puis on effectue un séchage, une compression
et un frittage. L'inconvénient d'un tel procédé est qu'il implique des complications
inhérentes à un processus conduit en voie humide.
[0004] Pour trouver un compromis acceptable entre le comportement du matériau à l'érosion
et son comportement antisoudure, il est proposé d'après le document DE-41 11 683 de
mélanger des particules de graphite à des fibres de carbone, ce mélange étant incorporé
à la poudre métallique. Par l'apport hybride ainsi réalisé dans la matrice métallique,
on peut obtenir des comportements du matériau à l'érosion et à la soudure intermédiaires
entre ceux qu'il aurait montrés avec apport de particules de graphite seules ou apport
de fibres de carbone seules. Mais il s'avère que, sous de fortes sollicitations et
en particulier sous courant de court-circuit, les particules de graphite, de par leur
parfaite structure cristalline, montrent une tendance à être expulsées de la surface
du matériau ; cette expulsion détériore la surface du matériau d'une manière telle
que les fibres de carbone en sont également expulsées à leur tour. Il en résulte un
enrichissement de la surface en argent et donc une altération des qualités initialement
recherchées par l'apport de graphite.
[0005] Dans le document EP-171 339 est décrit un procédé de fabrication de contacts électriques
par imprégnation d'un substrat de fibres de carbone par un métal liquide sous pression,
puis par filage à chaud du mélange ainsi obtenu. Les fibres de carbone sont sectionnées
au cours du filage en filament orientés dans la direction de filage et ayant l'inconvénient
de présenter une longueur comprise entre 15 µm et 150 µm, c'est-à-dire une longueur
moyenne nettement supérieure à 50 µm. On constate que les contacts résultants montrent
une trop forte propension au soudage.
[0006] L'invention a donc pour but d'éviter les inconvénients décrits et de permettre de
réaliser de manière simple un matériau de contact composite métalcarbone à structure
fine, homogène et isotrope appropriée à l'application dans des disjoncteurs, ce matériau
montrant une bonne résistance à l'érosion à la fois sous courant nominal et sous courant
de court-circuit, ainsi qu'un comportement antisoudure satisfaisant et une résistance
de contact faible et stable.
[0007] Selon l'invention, dans le procédé décrit en préambule,
- les fibres de carbone, dont la longueur initiale a une valeur moyenne prédéterminée,
subissent un traitement mécanique d'attrition ou de broyage,
- les conditions de broyage sont déterminées de manière à engendrer des résidus de fibres
de carbone broyées dont la longueur finale est répartie statistiquement de manière
prédéterminée autour d'une valeur moyenne significativement inférieure à la valeur
moyenne initiale,
- le mélange des résidus de fibres broyées à la poudre métallique est tel qu'ils sont
distribués de manière isotrope dans le matériau.
[0008] Dans le matériau ainsi obtenu, le carbone est donc exclusivement présent sous forme
de résidus de fibres de carbone courtes, dont la répartition statistique de longueur
est centrée sur la valeur moyenne finale précitée, et qui sont distribués de manière
homogène dans la matrice métallique. Le matériau montre un bon comportement antisoudure
et une résistance de contact faible et stable, en même temps que, grâce à la structure
semi-cristalline propre à l'ensemble des éléments carbonés insérés dans la matrice
métallique, une faible érosion sous courant nominal ou sous courant de court-circuit.
Le compromis entre ces qualités est déterminé entre autres par le choix de la longueur
moyenne finale des résidus de fibres, de préférence entre 5 µm et 20 µm.
[0009] Les avantages et caractéristiques de l'invention ressortiront de la description qui
suit d'exemples de réalisation, en regard des dessins annexés.
- La figure 1 est un diagramme illustrant les différentes étapes du procédé selon l'invention.
- La figure 2 en illustre une variante.
- La figure 3 montre la répartition statistique des longueurs de fibres de carbone avant
et après broyage.
- La figure 4 est une micrographie de la surface du matériau après coupure sous courant
de court-circuit.
[0010] Dans le mode de réalisation du procédé qui est illustré sur la figure 1, on choisit
des fibres de carbone disponibles dans le commerce, de longueur moyenne L1 comprise
entre environ 100 µm et 800 µm, et livrées avec un faible écart-type, et de diamètre
compris entre 4 et 20 µm. Ces fibres subissent un traitement mécanique à froid et
à sec 10 dans un broyeur à boulets, un broyeur planétaire ou un broyeur à jets d'air
opposés ; les conditions d'intensité et de durée du broyage permettent d'obtenir des
fibres dont la longueur est répartie statistiquement autour d'une valeur moyenne très
inférieure à la valeur moyenne initiale et avec un écart-type supérieur à l'écart-type
initial, puis sont ajoutées en proportion pondérale d'environ 2 à 5% en poids à la
poudre métallique. Cette poudre est essentiellement une poudre d'argent, ou de cuivre,
ou de leurs alliages, de granulométrie usuelle, avec éventuellement des éléments d'addition
tels que du nickel, tungstène, nitrure de titane, carbure de tungstène ou d'autres
éléments analogues. Le mélange de la poudre de métal aux fibres de carbone broyées
s'effectue en voie sèche dans un mélangeur mécanique à pales dans l'étape 20 jusqu'à
obtention d'un mélange homogène, qui subit ensuite une compression unitaire 30, puis
un frittage 40, de manière à obtenir une structure de matériau isotrope.
[0011] Dans le mode de réalisation illustré figure 2, les fibres de carbone du commerce
sont mélangées directement à froid et à sec à la poudre métallique dans une étape
de mécanosynthèse 21, par exemple dans un broyeur à boulets ou un broyeur planétaire,
telle que le broyage précité des fibres s'effectue de manière concomitante au mélange
avec la poudre métallique. Le mélange homogène subit alors comme précédemment une
compression unitaire 30 et un frittage 40.
[0012] On obtient ainsi à partir de fibres dont la longueur initiale L1 est de 100 µm à
800 µm (voir figure 3) des répartitions gaussiennes de résidus de fibres de longueurs
différentes, selon une répartition unimodale de valeur moyenne L2 inférieure à 20
µm.
[0013] Exemple : les fibres de graphite, de longueur moyenne initiale 300 µm, subissent une attrition
dans un broyeur à boulets jusqu'à obtention de résidus de fibres d'une longueur moyenne
inférieure à 20 µm et sont mélangées en proportion pondérale de 2 à 5% avec de la
poudre d'argent. La soudabilité du matériau final obtenu est excellente et son érosion
en endurance électrique est très faible. La figure 4 montre à l'échelle 280 une micrographie
de la surface du matériau après un essai de coupure de 12 kA sous 250 V ; on constate
que la surface de contact garde après coupure sous courant de court-circuit sa structure
fine, homogène et isotrope de résidus de fibres 50 de longueur variable et d'orientation
quelconque dans la matrice d'argent 51.
[0014] Par son comportement en court-circuit, le matériau décrit est particulièrement approprié
à être utilisé dans des disjoncteurs.
1. Procédé de fabrication d'un matériau de contact électrique à base d'une poudre de
métal bon conducteur électrique tel que l'argent, le cuivre ou leurs composés, par
mélange de fibres de carbone à la poudre métallique, puis compression du mélange et
frittage,
caractérisé par le fait que :
- les fibres de carbone, dont la longueur initiale a une valeur moyenne prédéterminée
(L1), sont soumises à un traitement mécanique de broyage dans un broyeur,
- les conditions de broyage sont déterminées de manière à engendrer des résidus de
fibres broyées dont la longueur finale est répartie autour d'une valeur moyenne (L2)
significativement inférieure à la valeur moyenne initiale (L1),
- le mélange des résidus de fibres broyées à la poudre métallique est tel qu'ils sont
distribués de manière isotrope dans le matériau.
2. Procédé selon la revendication 1, caractérisé par le fait que la longueur initiale
moyenne (L1) des fibres de carbone est comprise entre environ 100 µm et environ 800
µm et que la longueur moyenne finale (L2) des résidus de fibres de carbone broyées
est inférieure à environ 20 µm.
3. Procédé selon la revendication 1, caractérisé par le fait que le mélange des fibres
de carbone avec la poudre métallique est effectué à sec.
4. Procédé selon la revendication 1, caractérisé par le fait que le broyage des fibres
de carbone est effectué avant leur mélange à la poudre métallique.
5. Procédé selon la revendication 1, caractérisé par le fait que le broyage des fibres
de carbone est effectué de manière concomitante au mélange avec la poudre métallique
par mécanosynthèse.
6. Matériau de contact obtenu par le procédé selon l'une des revendications 1 à 5, caractérisé
par le fait qu'il comprend des résidus de fibres carbone de structure semi-cristalline
broyées, distribuées de manière homogène dans la matrice métallique.