[0001] La présente invention concerne un acier inoxydable austénitique resulfuré à usinabilité
améliorée, utilisé notamment dans le domaine de l'usinage à très grande vitesse de
coupe et le domaine du décolletage.
[0002] Pour un homme du métier, on entend par usinage à grande vitesse des aciers inoxydables
austénitiques, l'utilisation de vitesses de coupe supérieures à 500 m/mn.
[0003] Les vitesses utilisables sur un acier sont, par exemple, déterminées par des tests
de tournage avec des outils comportant des plaquettes en carbure revêtu, tests désignés
Vb
15/0,15, qui consistent à déterminer la vitesse pour laquelle l'usure en dépouille est de
0,15 mm après 15 mn d'usinage. Au delà de cette vitesse, il n'est pas envisageable
d'usiner sans risque, en deçà la pratique industrielle est possible.
[0004] Il est connu du brevet européen N° 403 332 un acier austénitique resulfuré à usinabilité
améliorée. Ce document décrit un procédé dans lequel il est proposé, pour améliorer
l'usinabilité, d'introduire dans un acier ayant la composition générale suivante :
carbone inférieur à 0,15%, silicium inférieur à 2%, manganèse inférieur à 2%, molybdène
inférieur à 3%, nickel compris entre 7 et 12%, chrome compris entre 15 et 25%, une
quantité de soufre dans une proportion comprise entre 0,1 et 0,4%, associée à du calcium
et de l'oxygène dans des teneurs respectivement supérieures à 30.10
-4 % et 70. 10
-4% , les teneurs en calcium et oxygène satisfaisant à la relation Ca/O comprise entre
0,2 et 0,6.
[0005] Dans ce document, le but recherché est la formation, avec le manganèse et dans une
plus faible proportion, avec le chrome, d'un sulfure de manganèse et de chrome ( Mn,Cr
)S qui génère sous la forme d'inclusions spécifiques une lubrification solide de l'outil
de coupe pendant les opérations d'usinage.
[0006] Il est également précisé que le soufre a un effet défavorable sur la résistance à
la corrosion et que, malgré cela, une orientation choisie est l'introduction, dans
un acier resulfuré, d'inclusions d'oxydes de silicoaluminate de chaux le plus souvent
associées aux inclusions de sulfures.
[0007] Un tel acier austénitique a de bonnes propriétés en usinabilité dans le domaine des
vitesses de coupe conventionnelle, c'est-à-dire inférieures à 500 m/mn en tournage.
L'acier comporte des inclusions associées composées d'oxydes de type silicoaluminate
qui enrobent préférentiellement des inclusions de sulfure. Ces inclusions sont plus
grandes et plus déformables que les inclusions de sulfure seules. L'effet de la lubrification
dite solide de l'outil de coupe s'en trouve amélioré. L'acier décrit dans le document
cité comporte cependant un inconvénient. En effet, le soufre réduit de façon conséquente
les propriétés de l'acier du point de vue déformation à froid avec apparition de tapures
par exemple en étirage ou tréfilage.
[0008] L'invention a pour but de proposer un acier à usinabilité améliorée pouvant être
utilisé, d'une part dans le domaine de l'usinage à très grande vitesse, avec des vitesses
de coupe en tournage pouvant dépasser 700 m/mn, et, d'autre part dans le domaine du
décolletage avec des productivités supérieures à 30% à celles obtenues avec un acier
inoxydable austénitique resulfuré ordinaire.
[0009] L'invention a pour objet un acier inoxydable austénitique resulfuré à usinabilité
amélioré utilisable notamment dans le domaine de l'usinage à grande vitesse de coupe
et le domaine du décolletage, qui se caractérise en la composition pondérale suivante
:
- Carbone < à 0,1 %,
- Silicium < à 2%,
- Manganèse < à 2%,
- Nickel de 7 à 12%,
- Chrome, de 15 à 25%,
- Soufre, de 0,10 à 0,55%,
- Cuivre, de 1 à 5%,
- Calcium > à 35.10 -4 %,
- Oxygène > à 70.10 -4%,
le rapport de la teneur en calcium sur la teneur en oxygène étant compris entre 0,2
et 0,6.
[0010] Les autres caractéristiques de l'invention sont :
- la teneur en soufre est comprise entre 0,20 et 0,40% et, de préférence, entre 0,25
et 0,35%.
- la teneur en cuivre est comprise entre 1,2 et 3% et, de préférence, entre 1,4 et 1,8%.
- la composition comprend en outre moins de 3% de molybdène.
[0011] La description qui suit et les figures annexées, le tout donné à titre d'exemple
non limitatif, fera bien comprendre l'invention.
[0012] La figure 1 présente les courbes d'usure en dépouille d'aciers inoxydables resulfurés,
soit sans cuivre, soit sans inclusion aluminosilicate de chaux et d'un acier resulfuré
selon l'invention, ces aciers étant usinés à très grande vitesse de coupe.
[0013] La figure 2 présente les courbes d'écrouissage d'un acier resulfuré sans cuivre et
d'un acier selon l'invention.
[0014] L'acier inoxydable austénitique selon l'invention a la composition pondérale suivante
: carbone inférieur à 0,1%, silicium inférieur à 2%, manganèse inférieur à 2%, nickel,
de 7 à 12%, chrome, de 15 à 25%, soufre, de 0,10 à 0,55%, cuivre, de 1 à 5%, calcium
supérieur à 35.10
-4 %, oxygène supérieur à 70.10
-4%, le rapport de la teneur en calcium sur la teneur en oxygène étant compris entre
0,2 et 0,6.
[0015] Cet acier est du domaine des aciers dit resulfurés dont la teneur en soufre et les
teneurs en calcium et en oxygène dans un rapport déterminé assurent auxdits aciers
une bonne usinabilité à des vitesses de coupe inférieures à 500 m/mn.
[0016] Dans l'usage de l'acier selon l'invention, dans le domaine de l'usinage à très grande
vitesse de coupe, l'usinabilité est améliorée par l'action conjointe d'un grand nombre
d'inclusions, sulfures de manganèse et oxydes aluminosilicates de chaux issus de l'apport
de calcium et d'oxygène et par la présence du cuivre. Le cuivre limite les efforts
nécessaires à la formation du copeau. Du fait de cette propriété, la température à
la pointe de l'outil reste à un niveau supportable pour celui-ci. Dans ces conditions,
les nombreuses inclusions de sulfure de manganèse et d'oxydes aluminosilicates de
chaud assurent pleinement, en combinaison, leur rôle de lubrifiant solide pour retarder
l'usure de l'outil. Dans l'acier selon l'invention, les sulfures de manganèse sont
très peu substitués en chrome du fait d'une teneur en manganèse adaptée à la teneur
en soufre, leur malléabilité et donc leur efficacité lors de la coupe s'en trouvant
améliorée. Le soufre peut être partiellement remplacé par du sélénium et/ou du tellure.
[0017] L'acier resulfuré selon l'invention, utilisable préférentiellement dans le domaine
de l'usinage dit à grande vitesses de coupe, par la présence d'un grand nombre d'inclusions
malléables à bas point de fusion de sulfure et d'oxyde associées ou non associées,
et par la présence d'une teneur en cuivre selon l'invention, assure d'une part, des
usinages à des vitesses de coupe exceptionnelles et d'autre part, une conservation
de la durée de vie de l'outil de coupe .
[0018] Dans un essai d'usinabilité comparatif à très grande vitesse de coupe, c'est-à-dire
à plus de 500 m/mn, il est utilisé un outil en carbure revêtu TiN. Il a été comparé
l'évolution de l'usure en dépouille de l'outil au cours de l'usinage de trois aciers
resulfurés référencés A, B et C. Les aciers A et B sont des aciers resulfurés de référence,
l'acier A ne contenant pas de calcium ni d'oxygène en proportion convenable, l'acier
B ne contenant pas de cuivre dans sa composition. L'acier C, selon l'invention, dans
cet exemple d'application, comporte dans sa composition, 1,5 % de cuivre, 44.10
-4% de calcium et 118 10
-4% d'oxygène . Les compositions des aciers A et B de référence et de l'acier C selon
l'invention sont présentées dans le tableau 1 ci-dessous.
Acier |
C |
Si |
Mn |
Mo |
Ni |
Cr |
S |
Cu |
Ca |
O |
A |
0,048 |
0,42 |
1,50 |
0,29 |
8,05 |
17,03 |
0,30 |
1,5 |
10 |
53 |
B |
0,051 |
0,38 |
1,49 |
0,29 |
8,03 |
17,05 |
0,30 |
0,5 |
51 |
110 |
C |
0,050 |
0,43 |
1,50 |
0,31 |
8,10 |
17,04 |
0,30 |
1,5 |
44 |
118 |
D |
0,049 |
0,45 |
1,48 |
0,28 |
8,02 |
17,11 |
0,39 |
1,5 |
14 |
57 |
E |
0,052 |
0,39 |
1,51 |
0,30 |
8,07 |
17,03 |
0,30 |
1,5 |
62 |
134 |
[0019] L'essai consiste en une opération de tournage, sans lubrification, avec une avance
de 0,25 mm/tour, une profondeur de passe de 1,5 mm et une vitesse de coupe de 700
m/mn. L'outil est démonté régulièrement pour la mesure de l'usure en dépouille. Les
courbes qui en résultent sont présentées sur la figure 1.
[0020] Les aciers de référence A et B sont inaptes à ce type d'usinage. Après seulement
quelques minutes de tournage, les outils usinant ces aciers sont détruits, c'est-à-dire
que soit, leur usure en dépouille est supérieure à 0,15 mm, soit leur arête est effondrée.
Il n'est donc pas pensable d'utiliser, pour l'usinage de ces aciers, de telles vitesses
de coupe. Par contre, avec l'acier C selon l'invention, l'outil revêtu est encore
en état d'usiner après 20 minutes de tournage, ce qui permet, avec des outils classiques
en carbure revêtu de travailler industriellement à de telles vitesses de coupe. Ceci
est dû à la présence combinée, dans la composition de l'acier, d'une grande quantité
de soufre, d'oxydes malléables à bas point de fusion et d'une teneur optimale de cuivre.
[0021] Dans l'usage de l'acier selon l'invention, dans le domaine du décolletage, l'usinabilité
est améliorée par la présence du cuivre lors de la fabrication de barres, puis par
l'action des inclusions de sulfure de manganèse et d'oxydes aluminosilicates de chaux
lors de l'usinage. Le cuivre diminue l'écrouissabilité, comme le montre la figure
2 sur laquelle sont à nouveau comparés l'acier B de référence et l'acier C selon l'invention.
Cette faible écrouissabilité conduit à l'obtention de barres étirées moins dures,
en particulier en surface.
[0022] L'effet des inclusions vient ensuite en complément pour favoriser le cisaillement
du copeau et lubrifier l'interface outil/métal.
[0023] Dans un essai de production de pièces en décolletage, il a été comparé la productivité
de deux d'aciers resulfurés référencés D et E. L'acier D de référence, est un acier
resulfuré ne contenant pas dans sa composition de calcium ni d'oxygène en proportion
convenable, et l'acier E, selon l'invention, dans cet exemple de réalisation, comporte
dans sa composition, 1,5 % de cuivre, 62.10
-4% de calcium et 134.10
-4% d'oxygène.
[0024] De manière surprenante, l'action en combinaison des trois éléments cuivre, oxygène,
calcium, génère un effet particulier sur l'amélioration de l'usinabilité, imprévisible
lorsque ces éléments sont introduits dans la composition deux à deux ou de manière
séparée.
[0025] Les compositions de l'acier D de référence, et de l'acier E selon l'invention, sont
décrites dans le tableau 1.
[0026] L'essai consiste en la production, à partir d'une barre étirée d'un diamètre de 5
mm, de pièce de 50 mm de long comprenant essentiellement du tournage, à profondeur
de passe variable de 0,5 à 1,5 mm. Le tableau 2 ci-dessous présente les résultats
d'un essai de décolletage sur un tour monobroche à cames avec des outils en carbure
monobloc et une lubrification en huile entière. Les valeurs du tableau 2 représentent
le nombre de pièces ayant un usinage de bonne qualité avant changement des outils.
Productivité |
Acier D |
Acier E |
1,82 pièce/mn |
3 200 |
8 000 |
2,30 pièce/mn |
1 500 |
3 200 |
[0027] Dans les conditions de coupe optimisées pour un acier de référence, on peut produire
2,5 fois plus de pièces avec l'acier selon l'invention, avant d'avoir à changer les
outils. Inversement, avec une productivité 30 % supérieure sur l'acier selon l'invention,
la durée de vie est identique.
[0028] Dans un autre essai de décolletage, les deux même aciers D et E sont comparés sur
une simple opération de tronçonnage, consistant à produire des axes de 4 mm de diamètre
à partir d'un fil machine tronçonné sur une machine à torche. La productivité a été
améliorée de 28 % avec l'acier E selon l'invention en comparaison avec l'acier D de
référence ne contenant pas de calcium ni d'oxygène en proportion convenable.
1. Acier inoxydable austénitique resulfuré à usinabilité améliorée, utilisé notamment
dans le domaine de l'usinage à très grande vitesse de coupe et le domaine du décolletage,
caractérisé en ce que sa composition pondérale est la suivante:
- Carbone < à 0,1 %,
- Silicium < à 2%,
- Manganèse < à 2%,
- Nickel de 7 à 12%,
- Chrome, de 15 à 25%,
- Soufre, de 0,10 à 0,55%,
- Cuivre, de 1 à 5%,
- Calcium > à 35.10 -4 %,
- Oxygène > à 70.10 -4%,
le rapport de la teneur en calcium sur la teneur en oxygène étant compris entre 0,2
et 0,6.
2. Acier selon la revendication 1, caractérisé en ce que la teneur en soufre est comprise
entre 0,20 et 0,40%.
3. Acier selon les revendications 1 et 2, caractérisé en ce que la teneur en soufre est
comprise entre 0,25 et 0,35%.
4. Acier selon la revendication 1, caractérisé en ce que la teneur en cuivre est comprise
entre 1,2 et 3%.
5. Acier selon les revendications 1 et 4, caractérisé en ce que la teneur en cuivre est
comprise entre 1,4 et 1,8%.
6. Acier selon la revendication 1, caractérisé en ce que la composition comprend en outre
moins de 3% de molybdène.