[0001] La présente invention concerne la coupure des courants continus à haute tension.
[0002] On sait que la coupure des courants de défaut des lignes à courant continu est un
problème difficile, puisqu'on ne dispose pas, comme pour la coupure des courants alternatifs,
du passage par zéro du courant.
[0003] On a proposé une méthode pour la coupure du courant continu qui consiste à provoquer
une oscillation du courant et mettre à profit un passage par zéro du courant.
[0004] Un exemple de mise en oeuvre de cette méthode est mentionné dans l'article "The Development
of a HVDC SF6 breaker", IEEE PAS n° 10, octobre 1985. Il est proposé l'utilisation
d'un circuit LC avec varistance à l'oxyde de zinc créant un courant d'arc oscillatoire
amplifié à l'aide d'un disjoncteur spécial. Cette mise en oeuvre est onéreuse.
[0005] On connaît également un limiteur à courant continu à haute tension à supraconducteur,
décrit dans le brevet français n° 89 16 252. Il met en oeuvre, pour réduire le courant
de défaut, le changement d'état d'un conducteur passant de l'état supraconducteur
où sa résistance est nulle, à l'état résistif, lorsque la densité du courant dépasse
un certain seuil (densité critique). Le courant résiduel est adressé à un circuit
oscillant LC qui permet de créer des passages par zéro du courant. L'utilisation d'un
supraconducteur à basse température critique nécessite un cryostat à hélium liquide,
de sorte que la solution n'est pas économique.
[0006] On connaît également, notamment par le brevet français n°81 09 707, un disjoncteur
associé à une résistance à coefficient de température positif (CTP) à base de titanate
de baryum et de strontium. Le passage du courant de défaut provoque l'échauffement
de la résistance dont la valeur ohmique croît très vite. La réduction importante du
courant de défaut facilite sa coupure par le disjoncteur. Cette solution n'est pas
économique en raison du coût des céramiques et des pertes Joule engendrées par la
valeur ohmique relativement élevée des céramiques.
[0007] Un but de la présente invention est de réaliser un dispositif pour la coupure des
courants continus à haute tension qui soit économique à la fabrication aussi bien
qu'à l'utilisation.
[0008] L'invention a pour objet un dispositif pour la coupure du courant d'une ligne à courant
continu à haute tension comprenant deux conducteurs, caractérisé en ce qu'il comprend,
sur au moins un des conducteurs de la ligne, un ensemble comprenant, reliés en série,
au moins un premier groupe comprenant une première résistance en parallèle avec un
premier disjoncteur, au moins second groupe comprenant une seconde résistance en parallèle
avec un second disjoncteur et un sectionneur, les résistances comprenant des éléments
en polymère chargé de carbone, le dispositif comprenant en outre un détecteur de défaut
donnant en cas de défaut, un ordre d'ouverture aux disjoncteurs du premier groupe,
donnant un ordre d'ouverture aux disjoncteurs du second groupe lorsque le courant
dans la ligne dépasse par valeur inférieure une première valeur de seuil prédéterminée,
et donnant un ordre d'ouverture du sectionneur lorsque le courant dans la ligne atteint
par valeur inférieure une seconde valeur de seuil prédéterminée.
[0009] La résistance du premier groupe est choisie pour pouvoir supporter en permanence
un courant de valeur au plus égale à 1/35 de la valeur maximale du courant de court-circuit
de la ligne.
[0010] La résistance du second groupe est choisie pour pouvoir supporter en permanence un
courant de valeur égale à 1/15 environ de la valeur du courant supportée en permanence
par la résistance du premier groupe.
[0011] Les résistances des premier et second groupes sont constituées d'un empilement alterné
de disques de polymère chargé de carbone et de disques de métal bon conducteur de
l'éléctricité.
[0012] L'empilement est entouré d'une enveloppe étanche remplie de gaz isolant.
[0013] La valeur initiale de la résistance du premier groupe est de l'ordre de 0,1 Ω.
[0014] La valeur initiale de la résistance du second groupe est de l'ordre de 1,5 Ω.
[0015] La résistance du second groupe est munie d'un dispositif de chauffage rapide commandé
à l'ouverture du disjoncteur du premier groupe.
[0016] Le dispositif est caractérisé en ce que la première valeur de seuil est comprise
entre deux trentecinquièmes et un trentecinquième de la valeur maximale (Icc) du courant
de court-circuit de la ligne.
[0017] Le dispositif est caractérisé en ce que la seconde valeur de seuil est comprise entre
un cinqcentième et un millième de la valeur maximale (Icc) du courant de court-circuit
de la ligne.
[0018] L'invention sera bien comprise à la lecture de la description donnée ci-après d'un
mode préféré de mise en oeuvre de l'invention, en référence au dessin annexé dans
lequel:
- la figure 1 est un schéma électrique du dispositif de l'invention,
- la figure 2 est une vue en élévation d'une résistance utilisée dans le dispositif.
[0019] Dans la Fig 1, la référence LL' désigne l'un des deux conducteurs d'une ligne à courant
continu; le dispositif de l'invention peut comporter deux ensembles identiques insérés
respectivement en série sur chacun des deux conducteurs de la ligne. Seul l'un des
ensembles est représenté dans la Fig. 1., dans un rectangle en traits tiretés désigné
par la référence 1.
[0020] L'ensemble 1 comprend:
- deux résistances R1 et R2 en série, shuntées respectivement par deux disjoncteurs
D1 er D2,
- un sectionneur S en série avec les résistances,
- un détecteur de défaut DD recevant sur une entrée "a" une mesure de l'intensité du
courant fournie par un transformateur de courant TC et, sur une entrée "b", une mesure
de la tension. Le détecteur de défaut est capable d'analyser ces informations et de
distinguer entre un défaut et une surcharge.
[0021] Les résistances R1 et R2 sont constituées de la même manière décrite ci-après.
[0022] La résistance comprend une pluralité de disques 13 en polymère chargé de carbone
à deux faces métallisées, séparés par des disques 14 en métal bon conducteur de l'éléctricité,
de préférence le cuivre. Les disques de polymère et de cuivre constituent un empilement
placé entre deux flasques d'extrémité métalliques 11 et 12; les flasques sont serrés
par des tiges isolantes 15 filetées à leurs extrémités et munies d'écrous 16. Sur
les flasques sont soudés des conducteurs 18 et 19 servant à la liaison électrique
avec la ligne et avec le disjoncteur. De préférence, l'ensemble constituant la résistance
est protégé par une enveloppe isolante étanche non représentée, remplie d'un gaz diélectrique
tel que l'azote. Pour mieux répartir la tension entre les disques 13 en cas de fonctionnement
non uniforme de ces derniers, des varistances 17 (ou des résistances de faible valeur
ohmique) sont connectées en parallèle sur chacun des disques 13 et permettent d'écrêter
et de limiter la tension aux bornes de chacun des disques.
[0023] On rappelle que les résistance en polymère chargé de carbone ont une résistance à
la température ambiante de l'ordre du dixième d'ohm et qu'à une température comprise
entre 100 et 110 °C, leur résistance est brusquement multipliée par un facteur de
l'ordre de 5000.
[0024] Les caractéristiques de la résistance R1 sont les suivantes.
[0025] La résistance R1 peut supporter un courant permanent inl égal à environ 15% de In
pour un courant de court-circuit maximal Icc de 10.000A sur la ligne LL', In désignant
la valeur nominale du courant de la ligne.
[0026] Par exemple, si In est égal à 2.000 A, la valeur de inl sera de 300 A.
[0027] La résistance initiale de R1 est de l'ordre de 0,1 ohm, pour une tension de réseau
de 100 kV.
[0028] Si le courant de court-circuit maximal Icc est de 20.000 A, le courant permanent
inl sera choisi égal à 30% de In, soit inl = 600 A.
[0029] Plus généralement, on fixe Icc/in1 au moins égal à 35.
[0030] Les caractéristiques de la résistance R2 sont les suivantes.
[0031] La résistance R2 peut supporter un courant permanent in2 égal environ à 1% de In,
soit 20 A si In est égal à 2.000 A.
[0032] Si inl = 600 A, in2 sera égal à 40 A.
[0033] Plus généralement on choisit les résistances R1 et R2 pour que le rapport inl/in2
soit voisin de 15.
[0034] La résistance initiale de R2 est de l'ordre de 1,5 ohm pour une tension de réseau
de 100 kV.
[0035] Les disques 13 de la résistance R1 ont par exemple une secion de 220 cm
2; les diques 13 de la résistance R2 auront alors une section de 15 cm
2.
[0036] Le fonctionnement du dispositif est le suivant.
[0037] En fonctionnement normal, les disjoncteurs D1 et D2 et le sectionneur S sont fermés.
Le courant traverse les disjoncteurs, dont la valeur ohmique des résistances de contact
est faible devant la valeur ohmique des résistances R1 et R2. Le courant traverse
également le sectionneur S.
[0038] En cas de défaut, par exemple en T (Fig. 1), le détecteur de courant DD donne au
disjoncteur D1, sur une sortie 3, un ordre d'ouverture.
[0039] L'ouverture du disjoncteur D1, qui s'accompagne d'un grand soufflage de gaz entre
ses contacts, force le courant de défaut à traverser la résistance R1, étant donnée
la faible tension à ses bornes. En effet, cette tension est par exemple égale à 10.000A
x 0,1 Ω = 1.000 V, si le courant de défaut est de 10.000 A.
[0040] Selon la valeur du courant de défaut, la résistance R1 changera de valeur ohmique
par effet Joule plus ou moins vite, par exemple en 15 millisecondes si le courant
de défaut est de 10.000 A, en 60 millisecondes si le courant de défaut est de 5.000
A.
[0041] Le changement brusque de valeur ohmique de la résistance R1 provoque une brusque
diminution du courant; cette diminution est détectée par le détecteur DD qui, lorsque
la valeur du courant atteint par valeur inférieure un premier seuil prédéterminé,
donne sur une sortie 4, un ordre d'ouverture au disjoncteur D2. Ce seuil est par exemple
compris entre 2in1 et in1, soit entre deux trentecinquièmes et un trentecinquième
de la valeur maximale (Icc) du courant de court-circuit de la ligne.
[0042] Le courant qui, à l'ouverture du disjoncteur D1, traversait la résistance R1 et le
disjoncteur D2, traverse, à l'ouverture du disjoncteur D2, la résistance R2. Ce courant
ayant une valeur supérieure à la valeur in2 définie plus haut, provoque l'échauffement
rapide de la résistance R2 dont la valeur ohmique croît, provoquant une nouvelle diminution
du courant dans la ligne. Cette diminution est plus ou moins rapide selon la valeur
du courant traversant la résistance R2.
[0043] Après le fonctionnement de la résistance R2, le courant résiduel est coupé par le
sectionneur, dès détection par le détecteur DD du passage par valeur inférieure d'un
second seuil prédéterminé. Cet ordre est transmis par une liaison 5. Le seuil précité
est par exemple compris entre in2 et 0,5 in2, soit environ entre un cinqcentième et
un millième de la valeur maximale (Icc) du courant de court-circuit de la ligne.
[0044] On notera que la résistance R2 est avantageusement équipée d'un dispositif de chauffage
rapide C qui est mis en route dès l'ouverture du disjoncteur D1, soit par un ordre
émis par le détecteur de défaut DD (liaison 3'), soit par une commande non représentée
liée au déplacement des contacts du disjoncteur D1. Ce dispositif de chauffage, en
chauffant rapidement la résistance R2 à une température de 100°C environ, permet d'accélérer
la transition de la résistance R2.
[0045] La coupure sans défaut du courant nominal In, ou d'un courant de valeur inférieure
à In, est effectuée selon le même processus que celui qui vient d'être décrit, mais
en commandant l'ouverture du disjoncteur D1 directement, sans faire intervenir à ce
stade le détecteur de défaut.
[0046] En variante, pour la coupure intentionnelle d'un courant de valeur inférieure à la
valeur nominale In, on peut n'ouvrir que le disjoncteur D2, en inhibant le premier
seuil du détecteur de courant.
[0047] Pour la coupure d'un courant inférieur ou égal à 0,01 In, si le sectionneur ne peut
pas couper ce courant, on utilisera le dispositif de chauffage C pour chauffer la
résistance R2 avant d'ouvrir le sectionneur S.
[0048] Les disjoncteurs D1 et D2 sont choisis pour avoir un "temps d'ouverture" de l'ordre
de 20 millisecondes; le sectionneur a un temps d'ouverture de quelques secondes.
[0049] Pour une tension nominale du réseau plus élevée, par exemple 200kV au lieu de 100
kV, on pourra constituer l'ensemble 1 avec deux groupes R1-D1 en série et deux groupes
R2-D2 en série, les disjoncteurs dans chaque groupe étant commandés simultanémént
et avec les mêmes séries de seuils que celles indiquées plus haut. Le sectionneur
S devra avoir une tenue en tension double et un bon pouvoir de coupure.
[0050] L'invention trouve application dans l'équipement des réseaux à haute tension à courant
continu.
1. Dispositif pour la coupure d'un courant continu d'une ligne à haute tension comprenant
deux conducteurs, caractérisé en ce qu'il comprend, sur au moins un des conducteurs
de la ligne (LL'), un ensemble comprenant, reliés en série, au moins un premier groupe
comprenant une première résistance (R1) en parallèle avec un premier disjoncteur (D1),
au moins second groupe comprenant une seconde résistance (R2) en parallèle avec un
second disjoncteur (D2) et un sectionneur (S), les résistances comprenant des éléments
en polymère chargé de carbone, le dispositif comprenant en outre un détecteur de défaut
(DD) donnant en cas de défaut un ordre d'ouverture aux disjoncteurs (D1) du premier
groupe, donnant un ordre d'ouverture aux disjoncteurs (D2) du second groupe lorsque
le courant dans la ligne dépasse par valeur inférieure une première valeur de seuil
prédéterminée, et donnant un ordre d'ouverture du sectionneur (S) lorsque le courant
dans la ligne atteint par valeur inférieure une deuxième valeur de seuil prédéterminée.
2. Dispositif selon la revendication 1, caractérisé en ce que la résistance (R1) du premier
groupe est choisie pour supporter en permanence un courant de valeur (in1) au plus
égale à 1/35 de la valeur maximale (Icc) du courant de court-circuit de la ligne.
3. Dispositif selon l'une des revendications 1 et 2, caractérisé en ce que la résistance
(R2) du second groupe est choisie pour supporter en permanence un courant de valeur
(in2) égale à 1/15 environ de la valeur du courant (in1) supportée en permanence par
la résistance du premier groupe.
4. Dispositif selon l'une des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que les résistances
(R1, R2) des premier et second groupes sont constituées d'un empilement alterné de
disques (13) de polymère chargé de carbone et de disques (14) de métal bon conducteur
de l'éléctricité.
5. Dispsositif selon la revendication 4, caractérisé en ce que l'empilement est entouré
d'une enveloppe étanche remplie de gaz isolant.
6. Dispositif selon l'une des revendications 1 à 5, caractérisé en ce que la valeur initiale
de la résistance (R1) du premier groupe est de l'ordre de 0,1 Ω.
7. Dispositif selon l'une des revendications 1 à 6, caractérisé en ce que la valeur initiale
de la résistance (R2) du second groupe est de l'ordre de 1,5 Ω.
8. Dispositif selon l'une des revendications 1 à 7, caractérisé en ce que la résistance
(R2) du second groupe est munie d'un dispositif de chauffage rapide (C) commandé à
l'ouverture du disjoncteur (D1) du premier groupe.
9. Dispositif selon l'une des revendications 1 à 8, caractérisé en ce que la première
valeur de seuil est comprise entre deux trentecinquièmes et un trentecinquième de
la valeur maximale (Icc) du courant de court-circuit de la ligne.
10. Dispositif selon l'une des revendications 1 à 9, caractérisé en ce que la seconde
valeur de seuil est comprise entre un cinqcentième et un millième de la valeur maximale
(Icc) du courant de court-circuit de la ligne.