(19)
(11) EP 0 756 017 A1

(12) DEMANDE DE BREVET EUROPEEN

(43) Date de publication:
29.01.1997  Bulletin  1997/05

(21) Numéro de dépôt: 96420235.2

(22) Date de dépôt:  10.07.1996
(51) Int. Cl.6C22C 21/16
(84) Etats contractants désignés:
DE FR GB

(30) Priorité: 28.07.1995 FR 9509443

(71) Demandeur: PECHINEY RHENALU
92400 Courbevoie (FR)

(72) Inventeur:
  • Bechet, Denis
    38120 St. Egreve (FR)

(74) Mandataire: Mougeot, Jean-Claude et al
PECHINEY 28, rue de Bonnel
69433 Lyon Cedex 03
69433 Lyon Cedex 03 (FR)

   


(54) Alliage aluminium-cuivre-magnésium alloy à résistance élevée au fluage


(57) L'invention concerne un alliage d'aluminium présentant à l'état corroyé et traité par mise en solution, trempe et revenu, une déformation au fluage à 1000 h à 150°C sous une contrainte de 250 MPa de moins de 0,3% et un temps à rupture d'au moins 2500 h, ayant la composition suivante (% en poids):
Cu: 2,0 - 3,0 Mg: 1,5 - 2,1 Mn: 0,3 - 0,7 Fe < 0,3 Ni < 0,3 Ag < 1,0 Zr < 0,15 Ti < 0,15 avec Si tel que: 0,3 < Si + 0,4Ag < 0,6 autres éléments < 0,05 chacun et < 0,15 au total.
L'alliage peut être utilisé pour des pièces de structure aéronautiques ou spatiales, des pièces de machines tournantes ou des moules de plasturgie.


Description

Domaine technique



[0001] L'invention concerne des alliages d'aluminium de la série 2000 selon la désignation de l'Aluminum Association des Etats-Unis, du type AlCuMg, présentant, après transformation par filage, laminage ou forgeage, une très faible déformation au fluage et un temps à rupture élevé pour des températures comprises entre 100 et 150°C, tout en conservant des propriétés d'emploi au moins équivalentes à celles des alliages de ce type habituellement utilisés pour des applications de même nature.

Etat de la technique



[0002] On sait, depuis plusieurs dizaines d'années, que des alliages du type AlCuMgFeNi présentent une résistance au fluage plus élevée que les alliages AlCuMg à même teneur en Cu et Mg. D'abord utilisés sous forme de pièces moulées, matricées ou forgées, de tels alliages ont été adaptés à la fabrication de tôles à haute résistance et utilisés notamment pour le fuselage de l'avion supersonique Concorde. Ils correspondent à la désignation 2618 de l'Aluminum Association avec les fourchettes de composition suivantes (% en poids):
Cu: 1,9 - 2,7    Mg: 1,3 - 1,8    Fe: 0,9 - 1,3
Ni: 0,9 - 1,2    Si: 0,10 - 0,25    Ti: 0,04 - 0,10

[0003] Une variante, pouvant contenir jusqu'à 0,25% de Mn et 0,25% de Zr + Ti, a été également enregistrée sous la désignation 2618A.

[0004] L'alliage 2618, utilisé maintenant depuis plus de 20 ans, présente effectivement une résistance au fluage compatible avec les conditions de vol d'un avion supersonique, mais sa résistance à la propagation de fissures est un peu insuffisante, ce qui oblige à une surveillance accrue du fuselage.

[0005] Dans le but de préparer un successeur à Concorde, on a cherché à modifier l'alliage 2618 pour améliorer sa résistance à la propagation de criques. Ainsi, le brevet FR 2279852 de CEGEDUR PECHINEY propose un alliage à teneur réduite en fer et nickel de composition suivante (% en poids):
Cu: 1,8 - 3    Mg: 1,2 - 2,7    Si < 0,3    Fe: 0,1 - 0,4
Ni + Co: 0,1 - 0,4    (Ni + Co)/Fe: 0,9 - 1,3

[0006] L'alliage peut contenir également Zr, Mn, Cr, V ou Mo à des teneurs inférieures à 0,4%, et éventuellement Cd, In, Sn ou Be à moins de 0,2% chacun, Zn à moins de 8% ou Ag à moins de 1%. On obtient avec cet alliage une amélioration sensible du facteur de concentration de contraintes K1c représentatif de la résistance à la propagation de criques. Par contre, les résultats des essais de fluage aux températures de 100 et 175°C sont tout à fait comparables à ceux du 2618.

Objet de l'invention



[0007] Dans le cadre de l'étude d'un nouvel avion supersonique civil dont la vitesse et les conditions d'exploitation conduiront à une température de peau plus élevée pour le fuselage, mais aussi pour d'autres applications telles que des moules de plasturgie, des roues ou des structures de dégivrage d'avions ou des pièces de machines tournantes, il est apparu nécessaire de disposer d'un alliage présentant une résistance au fluage plus élevée que celle des alliages de l'art antérieur, c'est-à-dire une déformation totale sous contrainte très faible entre 100 et 150°C pour une durée supérieure à 60000 h, et une limitation de l'endommagement de fluage susceptible d'amorcer des fissurations de fatigue, se traduisant par un temps à rupture élevé, sans bien sûr détériorer les autres propriétés d'emploi telles que les caractéristiques mécaniques statiques ou la résistance à la corrosion.

[0008] L'invention a ainsi pour objet un alliage AlCuMg permettant d'obtenir sur un produit corroyé par filage, laminage ou forgeage, une déformation en fluage après 1000 h, à 150°C et sous une contrainte de 250 MPa, de moins de 0,3% et un temps à rupture d'au moins 2500 h, de composition (% en poids):
Cu: 2,0 - 3,0    Mg: 1,5 - 2,1    Mn: 0,3 - 0,7    Zr < 0,15
Si: 0,3 - 0,6    Fe < 0,3    Ni < 0,3    Ti < 0,15
autres éléments < 0,05 chacun et 0,15 au total balance Al. L'alliage peut comporter également de l'argent à une teneur inférieure à 1% et, dans ce cas, cet élément peut se substituer partiellement au silicium et la somme Si + 0,4Ag doit être comprise entre 0,3 et 0,6%.

[0009] Cu est compris de préférence entre 2,5 et 2,75% et Mg entre 1,55 et 1,8%.

Description de l'invention



[0010] L'alliage selon l'invention se distingue de celui décrit dans le brevet FR 2279852 par une teneur encore plus réduite en fer et en nickel et par une teneur plus élevée en silicium.

[0011] Le fer et le nickel sont maintenus en dessous de 0,3% au lieu de 0,4% et il est même possible de supprimer totalement le nickel, ce qui présente un avantage certain pour le recyclage des déchets de fabrication en alliages courants de deuxième fusion. Cette réduction n'était pas suggérée par l'état de la technique. Ainsi, D. ADENIS et R. DEVELAY ont étudié l'influence du fer et du nickel sur la résistance au fluage dans l'article "Relation entre la résistance au fluage et la microstructure de l'AU2GN" paru dans les Mémoires scientifiques de la Revue de Métallurgie, n° 10, 1969 et ils ont montré que la résistance au fluage à 150°C d'un alliage sans Fe et Ni était plutôt moins bonne que celle d'un 2618. Le même article étudie également le rôle du silicium et montre que la résistance au fluage est optimale pour une teneur en silicium de 0,25%.

[0012] De même, les études menées à l'ONERA par H. MARTINOD et J. CALVET sur l'alliage 2618 ("Sur la stabilité à chaud des alliages d'aluminium réfractaires du type AU2GN" Etude ONERA 1961) concluent qu'une teneur en silicium comprise entre 0,15 et 0,25% convient le mieux pour l'utilisation même très prolongée à 200°C, les teneurs supérieures en silicium jusqu'à 0,5% n'apportant aucune amélioration. D'autre part, le rôle métallurgique du silicium, présent dans la structure sous forme de solution solide ou de précipités Mg2Si, ne semble pas devoir être différent pour le 2618 et pour un alliage à bas fer et nickel. Ainsi, l'augmentation de la teneur en silicium vers des valeurs de l'ordre de 0,5% n'était pas du tout suggérée par la littérature sur le sujet ni par le raisonnement métallurgique.

[0013] Le rôle favorable de l'argent dans la résistance au fluage des alliages AlCuMg est connu depuis de nombreuses années, en particulier pour les alliages de moulage, et il a fait l'objet d'études métallurgiques, par exemple les travaux de I.J. POLMEAR et M.J. COUPER "Design and development of an experimental wrought aluminum alloy for use at elevated temperatures" Metallurgical Transactions A, vol. 19A, avril 1988, pp. 1027-1035.

[0014] La demanderesse a constaté qu'on pouvait substituer au silicium une quantité 2,5 fois supérieure d'argent, ce qui, compte-tenu du coût de ce métal, n'a pas grand intérêt économique. Elle a constaté par ailleurs, et de manière surprenante, que l'addition simultanée de silicium et d'argent à des teneurs telles que Si + 0,4Ag soit supérieur à 0,6% a une influence défavorable sur la résistance au fluage, en particulier sur le temps à rupture.

[0015] L'alliage selon l'invention a une teneur en manganèse comprise entre 0,3 et 0,7%. Le manganèse contribue à augmenter les caractéristiques mécaniques. L'alliage 2618 ne comportait pas de manganèse (H. MARTINOD mentionne dans son article une teneur de 0,014% pour un exemple d'alliage industriel) sans doute pour ne pas perturber la formation des composés intermétalliques au fer et au nickel Al9FeNi. C'est probablement pour la même raison que le brevet FR 2279852, s'il mentionne bien la possibilité d'une addition de manganèse d'au plus 0,4%, cet élément n'étant d'ailleurs que l'un des 11 éléments d'addition optionnels, ne donne aucun exemple de composition contenant du manganèse. Cette addition, jusqu'à une teneur de 0,7% au delà de laquelle apparaissent des précipités nuisibles, est rendue possible par la limitation du fer et du nickel et elle correspond à celle de l'alliage à haute résistance 2024 utilisé pour les fuselages d'avions subsoniques.

[0016] La combinaison de ces différentes modifications, à savoir la limitation du fer et du nickel, l'augmentation de la teneur en silicium et la présence de manganèse, conduit à une augmentation inattendue de la résistance au fluage par rapport à l'alliage 2618 et par rapport à un alliage tel que décrit dans le brevet FR 2279852. Ainsi, lors d'essais sur tôles minces d'épaisseur 1,6 mm, d'une durée de 1000 h sous contrainte de 250 MPa à une température de 150°C, on obtient une déformation à 1000 h inférieure à 0,3% au lieu de 1%, une vitesse de fluage en régime secondaire inférieure à 10-9 s- 1 au lieu de 2,5 10-9 s-1 et un temps à rupture supérieur à 2500 h au lieu de moins de 1500 h. Or, la structure recristallisée à grains fins des tôles minces représente le cas le plus défavorable pour la tenue en fluage, en particulier pour la déformation sous contrainte, à cause de la déformation localisée aux joints de grains.

[0017] Ce dernier résultat est particulièrement intéressant, bien qu'il ait été rarement pris en compte dans les études antérieures sur le fluage des alliages d'aluminium. En effet, il est important, dans le cas d'une pièce de structure soumise à des contraintes cycliques, non seulement que la déformation au fluage soit faible, mais que la rupture soit la plus tardive possible. On retarde ainsi l'entrée de la courbe de fluage déformation-temps dans la phase dite "tertiaire", c'est-à-dire celle où la pente de la courbe se remet à augmenter et où s'amorce la rupture, avec l'apparition de fissures de fluage conduisant, à cette température, à une faible résistance en fatigue.

[0018] La tenacité des alliages selon l'invention est tout à fait semblable à celle mentionnée dans le brevet FR 2279852, c'est-à-dire qu'elle représente, pour le coefficient de concentration de contrainte K1c un gain de 20 à 40% par rapport à l'alliage 2618.

[0019] Les alliages selon l'invention peuvent être coulés sous forme de billettes ou de plaques par les procédés classiques de coulée des alliages de la série 2000, et transformés par filage, laminage à chaud et éventuellement à froid, matriçage ou forgeage, le demi-produit ainsi obtenu étant habituellement traité thermiquement par mise en solution, trempe, éventuellement traction contrôlée pour diminuer les contraintes résiduelles et revenu, pour lui conférer les caractéristiques mécaniques requises par l'application envisagée.

Exemples


Exemple 1



[0020] On a coulé des plaques en alliage 2618, en alliage A selon le brevet FR 2279852, en 4 alliages B, C, D et E selon l'invention et 3 alliages F, G et H hors invention. Les compositions chimiques des alliages sont indiquées au tableau 1. L'alliage A contient du manganèse contrairement aux alliages exemplifiés dans le brevet, ce qui permet de mieux apprécier par comparaison le rôle des autres éléments, en particulier le silicium. Les alliages B, D et E contiennent de l'argent. L'alliage E est conforme à l'invention, mais sa teneur en Mg est en dehors du domaine préférentiel. L'alliage F est juste en dessous de la limite inférieure pour la somme Si + 0,4Ag et, de plus, en dehors de la zone préférentielle pour Mg. L'alliage G est un peu au dessus de la limite supérieure pour Si + 0,4Ag et l'alliage H est hors limites pour Cu.

[0021] Les plaques ont été ensuite homogénéisées 24 h à 520°C, laminées à chaud, puis à froid jusqu'à l'épaisseur de 1,6 mm, présentant une structure métallurgique recristallisée à grains fins après mise en solution de 40 mn à 530°C, traction contrôlée à 1,4% de déformation, trempe et revenu de 19 h à 190°C.

[0022] Des essais de fluage ont été réalisés selon la norme ASTM E 139 et on a mesuré, pour une contrainte de 250 MPa et une température de 150°C, la déformation après 1000 h, la vitesse de fluage minimum, c'est-à-dire la pente de la courbe de déformation en fluage en fonction du temps dans la zone secondaire de fluage, ainsi que le temps à rupture, qui est représentatif de la résistance à l'endommagement. Les résultats sont rassemblés dans le tableau 2.

[0023] On constate que les alliages selon l'invention présentent tous une déformation au fluage à 1000 h inférieure à 0,30%, une vitesse minimum de fluage inférieure à 0,6 10-9 par seconde et un temps à rupture supérieur à 2500 h, alors que ces valeurs sont respectivement, aussi bien pour le 2618 que pour l'alliage selon FR 2279852 avec addition de manganèse, de l'ordre de 0,9 à 1%, 2,5 10-9 s-1 et 1400 h.

[0024] On constate également le caractère critique des limites de la somme Si + 0,4Ag, la déformation et le temps à rupture étant très dégradés en dessous de la limite inférieure et le temps à rupture étant également dégradé au dessus de la limite supérieure de 0,6%. On voit enfin l'intérêt des fourchettes préférentielles de composition pour Cu et Mg.

Exemple 2



[0025] On a coulé des plaques en alliage 2618, en alliage A de l'exemple précédent et en 3 autres alliages selon l'invention I, J et K dont la composition chimique est donnée au tableau 3. Ces alliages ne contiennent pas d'argent et l'alliage J ne contient pas du tout de nickel. Les alliages I et J ont une teneur en manganèse proche de la limite basse de la fourchette, alors que celle de l'alliage K est proche de la limite haute.

[0026] Les plaques ont été homogénéisées 24 h à 520°C, scalpées et laminées à chaud jusqu'à une épaisseur de 14 mm. Une partie des tôles obtenues a été laissée à cette épaisseur, et une autre partie a été laminée à froid jusqu'à 1,6 mm. Les tôles ont été mises en solution à 530°C pendant 1 h pour les tôles de 14 mm et 40 mn pour les tôles de 1,6 mm, puis tractionnées, trempées et revenues 19 h à 190°C.

[0027] On a mesuré sur ces tôles la limite d'élasticité à 0,2% R0,2, la charge de rupture Rm et l'allongement à la rupture A. Ces résultats sont indiqués au tableau 4. Ils montrent que la limite d'élasticité et la charge de rupture sont pratiquement les mêmes pour les 5 alliages, et que l'allongement des tôles en alliages selon l'invention est légèrement supérieur à celui des tôles en 2618 ou en alliage A.

[0028] On a ensuite mesuré la vitesse de fluage minimum à 150°C (pour les tôles de 1,6 mm seulement) et à 175°C sous 250 MPa, comme dans l'exemple précédent. Les résultats sont reportés au tableau 5, qui montre une amélioration très sensible de la résistance au fluage des alliages selon l'invention par rapport à ceux de l'art antérieur, et particulièrement à 175°C. Enfin, la tenacité des tôles en alliages selon l'invention (environ 125 MPavm pour l'épaisseur 1,6 mm) est tout à fait comparable à celle de l'alliage A.












Revendications

1. Alliage d'aluminium à haute résistance au fluage présentant à l'état corroyé et traité par mise en solution, trempe et revenu, une déformation au fluage à 1000 h à 150°C sous 250 MPa de moins de 0,3% et un temps à rupture d'au moins 2500 h de composition (% en poids):
Cu: 2,0 - 3,0    Mg: 1,5 - 2,1    Mn: 0,3 - 0,7
Fe < 0,3    Ni < 0,3    Ag < 1,0    Zr < 0,15    Ti 0,15
avec Si tel que: 0,3 < Si + 0,4Ag < 0,6
autres éléments < 0,05 chacun et < 0,15 au total.
 
2. Alliage selon la revendication 1, caractérisé en ce que Cu est compris entre 2,5 et 2,75%.
 
3. Alliage selon l'une des revendications 1 et 2, caractérisé en ce que Mg est compris entre 1,55 et 1,8%.
 
4. Alliage selon l'une des revendications 1 à 3, caractérisé en ce qu'il est corroyé par filage.
 
5. Alliage selon l'une des revendications 1 à 3, caractérisé en ce qu'il est corroyé par forgeage.
 
6. Alliage selon l'une des revendications 1 à 3, caractérisé en ce qu'il est corroyé par laminage.
 





Rapport de recherche