[0001] La présente invention a trait au domaine de la protection de l'acier contre la corrosion
dans les milieux aqueux chargés en gaz carbonique.
[0002] La corrosion de l'acier au carbone par l'acide carbonique (en abrégé, corrosion carbonique)
est un type de corrosion qui se manifeste très fréquemment dans l'industrie, en particulier
dans les puits de production des pétroles bruts et dans les canalisations (pipe-lines)
qui servent à leurs transports. Le remède habituellement apporté est l'utilisation
d'inhibiteurs de corrosion en particulier des inhibiteurs à base d'amine, de sels
d'ammonium quaternaire, d'imidazolines ou d'esters phosphoriques. Ces composés ne
sont pas entièrement satisfaisants parce que écotoxiques et non biodégradables.
[0003] On connaissait par le brevet britannique GB 2028810 l'utilisation des N-alcoyl-sarcosines
(sarcosides), et de leurs sels, composés faiblement toxiques et biodégradables répondant
à la formule générale

dans laquelle R est une chaîne hydrocarbonée saturée ou insaturée et Z
+ est un cation minéral ou organique monovalent, comme inhibiteurs de la corrosion
carbonique de l'acier, et certaines de leurs associations avec d'autres inhibiteurs
non biocompatibles.
[0004] On connaissait aussi par EP 446.616 une activité de même type dans les N-alkyl-amidopropylbétaïnes,
composés également peu toxiques et biodégradables, de structure générale

dans laquelle R' est une chaîne hydrocarbonée saturée ou insaturée, ainsi que celle
de certaines de leurs accosiation avec des inhibiteurs non biocompatibles.
[0005] On vient maintenant de trouver une surprenante synergie d'inhibition de la corrosion
carbonique du fer dans l'association de N-alcoyl-sarcosines et de N-alkylamidopropylbétaïnes.
On peut exploiter avantageusement cette synergie avec des compositions dont les rapports
pondéraux entre ces deux types de composants sont compris entre 25:75 et 75:25, le
maximum d'efficacité étant obtenu dans un rapport approximativement équipondéral.
[0006] L'invention a donc pour objet un procédé pour l'inhibition de la corrosion carbonique
de l'acier dans les milieux aqueux, qui consiste en l'utilisation, à titre d'inhibiteur
de corrosion, d'une composition aqueuse comportant comme matière active le mélange
de N-alkyl-amidopropylbétaïne de formule générale

et d'un sel soluble monovalent de N-alcoyl-sarcosine de formule générale

formules dans lesquelles R ou R' sont indépendamment l'un de l'autre des chaînes
hydrocarbonées comportant de 9 à 19 atomes de carbone, et où Z est un cation minéral
ou organique monovalent.
[0007] On préfère ici la N-lauryl-amidopropylbétaïne ou le dérivé industriel correspondant
N-coco-amidopropylbétaïne [RN 61789-39-7], ou la N-lauroyl-sarcosine ou la N-cocoyl-sarcosine,
sous forme de leur sel de sodium dont les RN sont respectivement [137-16-6] et [61791-59-1].
(Dans le présent texte, coco- et cocoyl- ont respectivement la signification reste
R- ou reste R-CO- d'acide gras de coco.)
[0008] On met en oeuvre l'invention de préférence par injection continue dans le fluide
corrosif, à des doses comprises entre 2 et 10 ppm en matière active par rapport au
fluide corrosif. On peut également procéder par filmage du métal (traitement par batch).
[0009] Les compositions inhibitrices constituées de solutions aqueuses à environ 30% en
poids de mélange d'un sel soluble monovalent de N-alcoyl-sarcosine et de N-alkyl-amidopropylbétaïne
dans un rapport pondéral de 1:3 à 3:1 sont également des objets de l'invention.
[0010] Les exemples suivants feront mieux comprendre l'invention.
Exemple 1
[0011] On évalue le pouvoir inhibiteur des compositions témoins et des cmpositions selon
l'invention par mesure de la résistance de polarisation d'une éprouvette d'acier plongé
dans un milieu corrosif de type NACE constitué d'une solution aqueuse de 50 g/l de
chlorure de sodium et 0,25 g/l d'acide acétique, saturé à température ambiante par
du gaz carbonique.
[0012] On opère dans une cellule de Pyrex de 600 ml comportant, outre une entrée et une
sortie des gaz, trois électrodes assujetties à la cellule par des rodages, à savoir
une électrode de travail en acier au carbone ordinaire dont la surface de contact
avec la solution corrosive est de 1 cm
2, une électrode de référence au calomel saturé, et une contre électrode de platine
à très grande surface de contact avec la solution. On place dans la cellule 500 ml
de la solution corrosive ; on introduit ensuite la contre électrode et l'électrode
de référence. On désaère par barbotage d'azote pendant une heure et on sature la solution
par barbotage de CO
2 pendant une heure supplémentaire, on ajoute l'inhibiteur, et on introduit l'électrode
de mesure dont on inspecte le potentiel de corrosion. Lorsque celui-ci s'est stabilisé,
ce qui demande environ 30 minutes, on mesure la résistance de polarisation Rp selon
le protocole de la norme française NF 15-602-9.
[0013] On estime le pouvoir inhibiteur de chaque formule testée par un pourcentage de protection
calculé de façon connue selon

où Rp est la résistance de polarisation mesurée avec inhibiteur, et Rp
0 la résistance de polarisation dans le milieu corrosif témoin, à laquelle correspond
une vitesse de corrosion de 1,3 mm/an.
[0014] Le N-lauroyl-sarcosinate utilisé est l'ORAMIX®L30 de SEPPIC à environ 30% de matière
active dans l'eau. La N-coco-amidopropylbétaïne utilisée est obtenue selon un mode
connu par condensation de N-coco-amidodiméthylpropylamine avec l'acide chloracétique.
[0015] Le tableau 1 donne les pourcentages de protection en fonction de la concentration
en inhibiteurs, exprimée en ppm de matière active.
Tableau 1 :
| inhibition de la corrosion |
| Compositions |
| Bétaïne |
100% |
75% |
50% |
25% |
0 |
| Sarcosinate |
0 |
25% |
50% |
75% |
100% |
| Protection % |
| 1 ppm |
13 |
30 |
58 |
37 |
10 |
| 2 ppm |
44 |
48 |
75 |
62 |
42 |
| 5 ppm |
69 |
77 |
90 |
89 |
78 |
| 10 ppm |
75 |
91 |
94 |
95 |
88 |
| 20 ppm |
88 |
96 |
96 |
96 |
94 |
| 50 ppm |
93 |
96 |
96 |
97 |
96 |
[0016] La synergie entre le N-lauroyl-sarcosinate de sodium et la N-coco-amidopropylbétaine
se développe surtout à des faibles dosages, ce qui est très favorable, à pourcentage
de protection donné, à l'économie des substances inhibitrices disséminée dans l'environnement.
L'optimum correspond au rapport pondérale 50/50. A 2 ppm, le mélange de proportion
pondéral 50/50 protège efficacement l'acier (75% de protection). Au même dosage, la
N-coco-amidopropylbétaïne ou le N-lauroyl-sarcosinate ne donne que 44% ou 42% de protection.
Exemple 2 : Toxicité et biodégradabilité marines.
[0017] La toxicité vis-à-vis des organismes marins est déterminée selon les méthodes ISO/DIS
10253 pour les Skeletonema costatum (algues) et ISO/TC/147/SCS/WG2 pour les Acartia
tonsa (crustacés). Ces méthodes sont recommandées par la Convention de Paris pour
la Prévention de la Pollution marine.
[0018] La toxicité est exprimée en CE
50 (concentration effective en mg/l, pour inhiber la croissance de 50% de la population
pendant 72 heures) pour le Skeletonema costatum et en CL
50 (concentration létale en mg/l, pour détruire 50% de la population en 48 heures) pour
les Acartia tonsa. Plus la CE
50, ou la CL
50, est grande, moins le produit est toxique.
[0019] La biodégradabilité est déterminée par la norme ISO 1990, BOD -Test for Insoluble
Substance-, connue sous le nom de méthode BODIS, recommandée également par la Convention
de Paris. Elle est exprimée en pourcentage de dégradation pendant 28 jours.
[0020] Les toxicités et biodégradabilités comparées sont consignées dans le tableau 2 ci-après.
Tableau 2 :
| toxicités et biodagradabilités |
| Produit |
Toxicité (mg/l) |
% Bio-dégradabilité |
| |
Skel. CE50 |
Acart. CL50 |
|
| Bétaïne |
0,87 |
3,3 |
100 |
| Sarcosinate |
6,6 |
30-53,4 |
98 |
| Bétaïne/ sarcosine 50/50 |
2,55 |
8,01 |
100 |
[0021] La comparaison des tableaux 1 et 2 montre qu'entre 2 et 5 ppm du mélange (50/50)
de N-coco-amidopropylbétaïne et de N-lauroyl-sarcosinate de sodium, on peut protéger
efficacement l'acier contre la corrosion CO
2 sans provoquer une nuisance à l'environnement.
1. Composition constituée d'une solution aqueuse d'un sel hydrosoluble de N-alcoyl-sarcosine
et de N-alkyl-amidopropylbétaïne répondant respectivement aux formules générales

et

dans lesquelles R et R' sont des chaînes hydrocarbonées saturées ou insaturées et
comportant de 9 à 19 atomes de carbone et où Z
+ est un cation minéral ou organique monovalent, le rapport pondéral entre la N-alcoyl-sarcosine
et la N-alkyl-amidopropylbétaïne étant compris entre 1:3 et 3:1, la teneur de la composition
en matière active sel soluble de N-alcoyl-sarcosine + N-alkyl-amidopropylbétaïne étant
comprise entre 20 et 30 pour-cent en poids.
2. Composition inhibitrice selon la revendication 2 caractérisée en ce que sel soluble
de N-alcoyl-sarcosine est le sel de sodium de la N-lauroyl- ou de la N-cocoyl-sarcosine
et en ce que la N-alkyl-amidopropylbétaïne est la N-lauryl- ou la N-coco-amidopropylbétaïne.
3. Utilisation de compositions selon les revendications 1 ou 2 pour l'inhibition de la
corrosion carbonique de l'acier dans l'industrie de la production pétrolière.
4. Utilisation selon la revendication 3 caractérisée en ce que l'on injecte dans le milieu
aqueux corrosif la composition inhibitrice à raison de 2 à 10 ppm, comptées en matière
active N-alcoyl-sarcosine / N-alkyl-amidopropylbétaïne.