[0001] La présente invention est relative à un procédé perfectionné de décapage des bandes
à chaud et plus précisément à un perfectionnement de la phase du procédé consistant
à chauffer la bande en cours de décapage.
[0002] On sait qu'au cours du laminage à chaud, le matériau est déformé à haute température
(> 900°C) puis bobiné à des températures supérieures à 600°C. Il est ensuite refroidi
avant de subir le traitement suivant. Pendant le laminage et le refroidissement, une
couche d'oxyde se forme à la surface de la tôle. La composition et l'épaisseur varient
en fonction de la durée de refroidissement.
Avant de soumettre les bobines à la phase de production suivante, à savoir le laminage
à froid, il faut éliminer cette couche d'oxyde. Cette opération est le rôle du décapage,
un traitement chimique qui consiste à faire passer la bande en continu dans un bain
d'acide chaud.
[0003] La décaperie, où ce traitement est appliqué, est un maillon important de la chaîne
de production. Elle est importante par sa taille, car elle s'étend sur plusieurs centaines
de mètres, par les objectifs qui lui sont assignés, soit traiter toute la production
au rythme des autres engins tout en contribuant à une haute qualité de surface, et
par son impact sur l'environnement, car la décaperie utilise de l'acide et de l'énergie
et doit optimiser ses consommations.
[0004] Dans de nombreuses usines, la décaperie constitue un goulot dont on veut améliorer
les performances. Cette situation s'explique par plusieurs phénomènes. En premier
lieu, on lamine à chaud des bandes de plus en plus minces (on approche aujourd'hui
1 mm) et pour la décaperie, cela signifie plus de surface à décaper pour un même tonnage.
En second lieu, pour des raisons techniques et économiques, on veut coupler le décapage
et le laminage à froid en une seule opération continue; ceci impose d'augmenter la
vitesse de traitement de la décaperie (les vitesses de défilement de la bande dans
les décaperies conventionnelles sont de quelque 200 m/min, alors que les vitesses
d'entrée nominales des laminoirs à froid sont supérieures à 350 m/min).
[0005] Enfin, les nouvelles familles d'aciers de haute qualité qui ont été développées sont
fréquemment plus difficiles à décaper : un exemple en est les aciers IF (aciers sans
interstitiels) qui sont bobinés à haute température après laminage à chaud. Pour répondre
à toutes ces demandes, il est nécessaire d'accélérer le décapage.
[0006] Par ailleurs, le décapage intervient également dans la qualité de surface des bandes
laminées: il doit enlever toute la couche d'oxyde sans attaquer la surface de l'acier.
C'est un problème difficile si l'on sait que toutes les bobines ne se décapent pas
à la même vitesse et qu'en outre le centre de la bande est plus rapidement décapé
que les rives. Par ailleurs, on ne désire plus utiliser systématiquement les inhibiteurs
qui étaient ajoutés aux bains d'acide pour limiter l'attaque de l'acier: ils risquent
en effet d'être dommageables pour la propreté superficielle. Une technique de décapage
puissante et contrôlable avec précision est donc primordiale pour optimiser les propriétés
de surface.
[0007] Enfin, toute amélioration de l'efficacité de la décaperie apporte des avantages en
termes de consommation d'énergie et d'acide et représente donc un bénéfice immédiat
pour l'environnement.
[0008] L'amélioration des décaperies est une préoccupation commune à tous les sidérurgistes.
Dès lors des solutions ont été recherchées dans de nombreuses voies et les méthodes
qui ont été développées jusqu'ici peuvent se classer en quatre grandes catégories
: les méthodes chimiques, les procédés mécaniques, les techniques hydrauliques et
enfin les méthodes d'activation.
[0009] La première amélioration a porté sur la composition chimique du bain de décapage
: une grande majorité de sidérurgistes sont passés de l'acide sulfurique à l'acide
chlorhydrique qui assure un décapage plus homogène et surtout qui permet un recyclage
performant des sous-produits.
[0010] Les méthodes mécaniques ont été introduites dans de nombreuses décaperies : elles
consistent à déformer la bande d'acier par traction avant le décapage. La déformation
plastique du métal a pour effet de fissurer la couche d'oxyde, ce qui permet une pénétration
plus rapide de l'acide et par conséquent une réduction du temps de décapage. On estime
que le gain qui a été apporté par cette méthode se chiffre à quelque 30 % du temps
de décapage.
[0011] Les méthodes hydrauliques quant à elles visent à assurer un brassage important de
l'acide près de la surface de la bande à décaper : il s'agit de renouveler la solution
acide et d'éliminer les produits de décapage afin de maintenir la réaction à sa vitesse
maximale. Ces techniques ont permis des vitesses de décapage plus élevées et plus
régulières.
[0012] Enfin les méthodes dites d'activation ont cherché à améliorer la cinétique des réactions
impliquées dans les processus de décapage. Les méthodes suivantes ont été ainsi proposées
: application d'une tension électrique (comme dans le cas du décapage électrochimique
appliqué aux aciers inoxydables), tentatives de création de cavitation, agitation
de la bande au moyen d'électroaimants de forte puissance, focalisation de faisceaux
d'ultra-sons à la surface de la bande en cours de décapage, ...
[0013] Toutes ces techniques ont mené à la situation actuelle où la vitesse de décapage
a été nettement augmentée et où les premiers couplages "décapage + laminage" ont été
mis en service. Dans ces lignes, la vitesse nominale de défilement dépasse les 300
m/min, mais elle ne peut être maintenue pour les bobines plus difficiles à décaper.
[0014] La présente invention vise à développer un procédé original qui puisse s'intégrer
aux lignes de décapage actuelles afin d'en augmenter la capacité, les possibilités
de contrôle et la qualité des produits; ce procédé original réside dans l'utilisation
d'un chauffage sélectif de la bande en cours de décapage.
[0015] La technique de chauffage sélectif, objet de la présente invention, peut être considérée
comme une technique d'activation des réactions chimiques en cours de décapage. Il
s'agit d'une voie originale par rapport aux techniques existantes.
[0016] Le procédé perfectionné de décapage d'une bande d'acier, comportant une phase de
chauffage de la bande en cours de décapage, objet de la présente invention, est caractérisé
en ce que le chauffage est réalisé par induction, et plus particulièrement par induction
à haute fréquence.
[0017] Les grandes possibilités de contrôle qu'offre le chauffage par induction en cours
de décapage permettent d'obtenir une gestion plus sélective de l'énergie injectée
dans la bande en cours de décapage : il s'agit d'injecter l'énergie là où elle est
la plus efficace; ainsi le développement récent d'inducteurs à très haute fréquence
- jusqu'à 1Mhz pour des appareils industriels - doit permettre de créer des phénomènes
de chocs superficiels favorables.
[0018] Il faut en effet observer que, alors qu'il est bien établi que la température joue
un rôle primordial dans les réactions de décapage, les injections d'énergie dans les
décaperies actuelles ne sont pas maîtrisées de manière très serrée : la bande est
chauffée par contact avec le bain, ce qui donne lieu à une inertie thermique importante
et ne permet pas de chauffer préférentiellement les bobines ou les portions de surface
les plus difficiles à décaper.
[0019] A l'opposé, le procédé de l'invention veut concentrer les apports d'énergie aux endroits
les plus difficiles à décaper. Il vise aussi à des économies d'énergie, c'est-à-dire
diminuer les apports d'énergie pour les bandes faciles à décaper, qui constituent
la majorité de la production.
[0020] Pour fixer les idées, en chauffant la bande par induction à haute fréquence avec
le même apport d'énergie que celui mis en oeuvre aujourd'hui, la température peut
être supérieure à 150°C en surface.
[0021] Suivant l'invention, le moment d'application du chauffage inductif est important
pour la rupture de la couche d'oxyde. Le décapage procède en effet en deux phases
successives : d'abord pénétration de la solution acide dans les micro-fissures de
la couche d'oxyde ensuite corrosion tangentielle à l'interface acier-oxyde. Le chauffage
par induction permet de créer des efforts et des contraintes mécaniques sur la couche
d'oxyde, à travers des chocs thermiques superficiels :
- vaporisation de la solution à la surface de la bande, ce qui crée une expansion rapide
de la vapeur, capable d'entraîner des particules d'oxyde;
- cavitation près de la surface, par condensation du mince film de vapeur, afin de créer
une chute locale de pression qui arrache la couche d'oxyde;
- contraintes dues aux dilatations superficielles (acier/oxyde) lors d'un chauffage
superficiel de la bande.
[0022] C'est dans la seconde phase du décapage que des phénomènes comme la vaporisation
de la solution à la surface de la bande et/ou à l'interface acier-oxyde et la cavitation
proche de la surface seraient les plus efficaces.
[0023] Dans cette optique, il est préconisé, selon l'invention, d'implanter les inducteurs
à très haute fréquence par exemple à l'entrée d'au moins le premier bac de décapage,
en les immergeant dans le bain.
[0024] L'intérêt du chauffage par induction est non seulement sa grande souplesse, mais
aussi la possibilité de concentrer la puissance injectée à la surface des pièces chauffées,
c'est-à-dire là où le décapage doit avoir lieu. Il est bien connu que cet "effet de
peau" du chauffage par induction est d'autant plus marqué que la fréquence est élevée.
La gamme de fréquences de 100 kHz à 20 Mhz apparaît la plus propice à créer ces effets
favorables.
[0025] Enfin, un autre avantage potentiel du chauffage par induction est la possibilité
de moduler le chauffage superficiel en fonction de la difficulté de décapage et ce
de manière à obtenir un résultat homogène. On peut par exemple accentuer l'effet du
chauffage inductif sur les bobines les plus difficiles à décaper, mais également sur
une face ou sur les deux rives de la bande. Cette possibilité n'est aujourd'hui offerte
que par le chauffage inductif.
[0026] Le procédé de décapage objet de l'invention peut être mis aisément en oeuvre dans
les lignes de décapage existantes où il suffit d'installer les inducteurs ad hoc aux
endroits adéquats.
1. Procédé de décapage d'une bande d'acier, comportant une phase de chauffage de la bande
en cours de décapage, caractérisé en ce que le chauffage est réalisé par induction.
2. Procédé suivant la revendication 1, caractérisé en ce que le chauffage est réalisé
par induction à haute fréquence.
3. Procédé suivant l'une ou l'autre des revendications 1 et 2, caractérisé en ce que
le chauffage de la bande en cours de décapage est réalisé par induction avec une fréquence
comprise entre 100 kHz et 20 MHz.
4. Procédé suivant l'une ou l'autre des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que les
inducteurs sont immergés dans le bain de décapage.
5. Procédé suivant l'une ou l'autre des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que les
inducteurs sont situés au début du décapage.
6. Procédé suivant l'une ou l'autre des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que les
inducteurs sont situés au milieu de la ligne de décapage.
7. Procédé suivant l'une ou l'autre des revendications 1 à 6, caractérisé en ce que le
chauffage inductif est modulé en fonction de la difficulté de décapage, appliqué avec
plus d'intensité dans les cas les plus difficiles.