(57) L'invention concerne des produits laminés ou filés pour constructions soudées en
alliage d'aluminium du type AlMgMn.
Ces produits ont pour composition (% en poids):
3,0 < Mg < 5,0
0,75 < Mn < 1,0
Fe < 0,25
Si < 0,25
Zn < 0,40
éventuellement un ou plusieurs des éléments Cr, Cu, Ti, Zr, tels que:
Cr < 0,25
Cu < 0,20
Ti < 0,20
Zr < 0,20
autres éléments < 0,05 chacun et < 0,15 au total.
avec: Mn + 2Zn > 0,75
ces produits présentant une fraction volumique de dispersoïdes au manganèse de plus
de 1,2%.
Ces produits présentent à l'état soudé une résistance mécanique et une tenue en fatigue
améliorée sans conséquences défavorables pour la tenacité et la résistance à la corrosion,
et sont particulièrement aptes à la construction navale, aux véhicules industriels
et aux cadres de bicyclettes en tubes soudés.
Domaine technique
[0001] L'invention concerne le domaine des produits laminés ou filés, tels que tôles, profilés,
fils ou tubes, en alliage d'aluminium du type AlMgMn à Mg > 3% en poids, destinées
à des constructions soudées présentant une limite élastique élevée, une bonne résistance
à la fatigue et une bonne tenacité pour des applications structurales, comme, par
exemple, les bateaux, les véhicules industriels ou les cadres de bicyclettes soudés.
Etat de la technique
[0002] Le dimensionnement optimal des structures soudées en alliage d'aluminium conduit
à utiliser des alliages AlMg de la série 5000 selon la nomenclature de l'Aluminum
Association, comme par exemple l'alliage 5083 dont la composition déposée à l'Aluminum
Association est (% en poids):
Mg: 4,0 - 4,9
Mn: 0,4 - 1,0
Fe < 0,40
Si < 0,40
Zn < 0,25
Cu < 0,10
Cr: 0,05 - 0,25
Ti < 0,15
Le brevet allemand n° 2443332 de Siemens décrit un exemple d'utilisation de ce type
d'alliage à l'état soudé pour des éléments de machine aptes à subir un formage par
explosion. L'article de J.S. Vetrano et al. "Effect of Precipitate Stucture on Hot
Deformation of Al-Mg-Mn Alloys" in "Advances in Hot Deformation Textures and Microstructures",
TMS, Pittsburgh, 18-20 octobre 1993, pp. 223-234, décrit, pour le même type d'alliage,
les différents précipités, notamment au manganèse, formant la microstructure, et leur
influence sur la déformation à chaud de l'alliage.
Ces alliages sont utilisés à l'état écroui (état H1 selon la norme NF-EN-515), ou
partiellement adouci (état H2), ou stabilisé (état H3), tout en conservant une bonne
résistance à la corrosion (état H116), plutôt qu'à l'état recuit (état O).
Mais, le plus souvent, l'augmentation des caractéristiques mécaniques par rapport
à l'état O ne subsiste pas après soudage, et les recommandations des organismes de
certification et de contrôle conseillent généralement, pour les structures soudées,
de ne tenir compte que des caractéristiques à l'état O. On doit prendre en compte
également, pour le dimensionnement, la tenue à la fatigue et la vitesse de propagation
des fissures.
Dans ce domaine, les travaux de recherche se sont surtout concentrés sur la conduite
de l'opération de soudage elle-même. De plus, on a cherché, par des traitements thermomécaniques
appropriés, à améliorer la tenue à la corrosion de la pièce.
La demande de brevet japonais JP 06-212373 propose, pour minimiser la réduction de
la résistance mécanique due au soudage, d'utiliser un alliage contenant de 1,0 à 2,0%
de Mn, de 3,0 à 6,0% de Mg et moins de 0,15% de fer. Mais, l'utilisation d'un alliage
avec une teneur aussi élevée en manganèse conduit à un abaissement de la résistance
à la fatigue et de la tenacité.
Objet de l'invention
[0003] L'invention a pour but, dans des conditions de soudage déterminées, d'améliorer de
manière significative la résistance mécanique et la tenue à la fatigue des structures
soudées en alliage AlMgMn, sans conséquences défavorables sur d'autres paramètres
tels que la tenacité, la résistance à la corrosion et la déformation à la découpe,
due aux contraintes internes.
L'invention a pour objet des produits destinés à des constructions soudées en alliage
AlMgMn de composition (en poids %):
3,0 < Mg < 5,0
0,5 < Mn < 1,0
contenant Fe, Si et Zn en quantité telle que:
Fe < 0,25
Si < 0,25
Zn < 0,40
éventuellement l'un au moins des éléments Cr, Cu, Ti, Zr tels que:
Cr < 0,25
Cu < 0,2
Ti < 0,20
Zr < 0,20
autres éléments < 0,05 chacun et < 0,15 au total.
avec la relation: Mn + 2Zn > 0,75
ce produit présentant une fraction volumique de dispersoïdes au manganèse supérieure
à 1,2%
Description de l'invention
[0004] Contrairement aux recherches antérieures concentrées sur le procédé de soudage et
les traitements thermomécaniques, les inventeurs ont trouvé un domaine de composition
particulier pour les éléments d'addition mineurs, en particulier le fer, le manganèse
et le zinc, conduisant à un ensemble de propriétés intéressantes associant les caractéristiques
mécaniques statiques, la tenacité, la résistance à la fatigue, la résistance à la
corrosion et la déformation à la découpe, cet ensemble de propriétés étant particulièrement
bien adapté à l'utilisation de ces alliages pour la construction navale, les véhicules
utilitaires ou les cadres de cycles soudés.
Cet ensemble de propriétés est obtenu par la combinaison d'une basse teneur en fer,
< 0,25%, de préférence < 0,20%, et même 0,15%, et d'une teneur en manganèse et en
zinc telle que Mn + 2Zn > 0,75%, de préférence > 0,8%. La teneur en Mn doit être >
0,5%, et de préférence > 0,8%, pour avoir des caractéristiques mécaniques suffisantes,
mais ne doit pas dépasser pour autant 1%, si on veut éviter une dégradation de la
tenacité et de la résistance à la fatigue. L'addition de zinc en combinaison avec
le manganèse s'est révélée avoir un effet bénéfique sur les caractéristiques mécaniques
des tôles et des joints soudés. Toutefois, il vaut mieux ne pas dépasser 0,4%, car
on peut alors rencontrer des problèmes au soudage.
Le magnésium est maintenu de préférence > 4,3%, car il a un effet favorable sur la
limite élastique et la résistance à la fatigue, mais au-delà de 5% la résistance à
la corrosion est moins bonne. L'addition de Cu et Cr sont également favorables à la
limite élastique, mais Cr est maintenu de préférence < 0,15% pour conserver une bonne
résistance à la fatigue.
La résistance mécanique des tôles dépend à la fois de la teneur du magnésium en solution
solide et des dispersoïdes au manganèse. Il a été constaté que la fraction volumique
de ces dispersoïdes, qui est liée aux teneurs en fer et en manganèse, doit être maintenue,
de préférence, au dessus de 1,2%. Cette fraction volumique est calculée à partir de
la moyenne des fractions surfaciques mesurées sur des coupes polies réalisées dans
les 3 directions (longueur, largeur et épaisseur) par microscopie électronique à balayage
et analyse d'images.
Les produits selon l'invention peuvent être des produits laminés ou filés tels que
des tôles laminées à chaud ou à froid, des fils, des profilés ou des tubes filés éventuellement
réétirés.
Les tôles selon l'invention, assemblées par soudage bout à bout à l'aide d'un procédé
MIG ou TIG et avec un chanfrein de l'ordre de 45° sur environ les 2/3 de l'épaisseur,
présentent dans la zone soudée une limite élastique R
0,2 pouvant être supérieure d'au moins 25 MPa à celle d'un alliage conventionnel ayant
la même teneur en magnésium, soit un gain de l'ordre de 20%.
La largeur de la zone affectée thermiquement est réduite de l'ordre d'un tiers par
rapport à un alliage 5083 habituel, et la dureté du joint soudé passe d'environ 75
Hv à plus de 80Hv. Les joints soudés présentent également une résistance à la rupture
qui dépasse le minimum imposé par les organismes de contrôle pour les tôles brutes
écrouies non soudées .
Les tôles selon l'invention présentent une résistance à la fatigue, mesurée en flexion
plane avec un rapport de contraintes R = 0,1 sur des éprouvettes prélevées dans le
sens travers-long, supérieure à:
105 cycles pour une contrainte maximale > 280 MPa
106 cycles pour une contrainte maximale > 220 MPa
107 cycles pour une contrainte maximale > 200 MPa
La vitesse de propagation de fissure _K, mesurée pour R = 0,1, est > 22 MPavm pour
da/dN = 5 10
-4 mm/cycle et > 26 MPavm pour da/dN = 10
-3 mm/cycle.
Les tôles selon l'invention sont le plus souvent d'épaisseur supérieure à 1,5 mm.
Pour les épaisseurs supérieures à 2,5 mm, elles peuvent être obtenues directement
par laminage à chaud, sans nécessité d'un laminage à froid ultérieur, et, de plus,
ces tôles laminées à chaud présentent à la découpe une distorsion plus faible que
les tôles laminées à froid.
Les produits selon l'invention présentent une résistance à la corrosion aussi bonne
que les alliages habituels à même teneur en magnésium, par exemple le 5083 de composition
courante, largement utilisé dans la construction navale.
Exemple
[0005] On a préparé 13 échantillons de tôles par coulée semi-continue conventionnelle sous
forme de plaques, réchauffées pendant 20 h à une température > 500°C, puis laminées
à chaud jusqu'à l'épaisseur finale de 6 mm. La référence 0 correspond à une composition
classique de 5083 et la référence 1 a une composition légèrement en dehors de l'invention.
Les 11 autres (réf. 2 à 12) ont une composition selon l'invention.
[0006] Les compositions étaient les suivantes (% en poids):
Réf |
Mg |
Cu |
Mn |
Fe |
Cr |
Zn |
Ti |
Zr |
0 |
4,40 |
< 0,01 |
0,50 |
0,27 |
0,09 |
0,01 |
0,01 |
|
1 |
4,68 |
< 0,01 |
0,72 |
0,12 |
0,05 |
< 0,01 |
0,01 |
|
2 |
4,56 |
< 0,01 |
0,83 |
0,12 |
0,13 |
0,01 |
0,01 |
|
3 |
4,60 |
< 0,01 |
0,85 |
0,17 |
0,10 |
0,16 |
0,01 |
|
4 |
4,62 |
< 0,01 |
0,96 |
0,10 |
0,05 |
0,02 |
0,01 |
|
5 |
4,80 |
0,09 |
0,80 |
0,11 |
0,03 |
0,02 |
0,01 |
|
6 |
4,72 |
< 0,01 |
0,87 |
0,13 |
0,03 |
0,02 |
0,01 |
0,11 |
7 |
4,88 |
0,05 |
0,78 |
0,16 |
0,02 |
0,01 |
0,09 |
|
8 |
4,92 |
0,06 |
0,94 |
0,08 |
0,02 |
0,19 |
0,01 |
|
9 |
4,69 |
< 0,01 |
0,72 |
0,07 |
0,02 |
0,10 |
0,01 |
|
10 |
4,71 |
< 0,01 |
0,82 |
0,06 |
0,02 |
< 0,01 |
0,01 |
|
11 |
4,73 |
< 0,01 |
0,95 |
0,17 |
0,03 |
< 0,01 |
0,01 |
|
12 |
4,70 |
< 0,01 |
0,92 |
0,22 |
0,03 |
0,01 |
0,01 |
|
[0007] Les échantillons présentent tous, après laminage, une limite élastique R
0,2 > 220 MPa dans le sens L.
On a mesuré la résistance mécanique des joints soudés à partir de ces tôles dans les
conditions suivantes: soudage MIG bout à bout continu automatique, avec un chanfrein
symétrique de pente 45° par rapport à la verticale sur une épaisseur de 4 mm et fil
d'apport en alliage 5183.
Les caractéristiques mécaniques (résistance à la rupture R
m, limite élastique R
0,2) ont été obtenues par traction sur des éprouvettes normalisées par l'organisme norvégien
de contrôle DNV pour la construction navale, de longueur 140 mm, de largeur 35 mm,
le cordon de soudure de largeur 15 mm étant au centre et la longueur de la partie
étroite de l'éprouvette étant de 27 mm, soit la somme de la largeur du cordon et de
2 fois l'épaisseur (15 + 12 mm).
On a mesuré également les fractions volumiques de dispersoïdes au manganèse.
Les résultats sont les suivants (en MPa pour les résistances et % pour les fractions):
Réf. |
Rm |
R0,2 |
fractions |
0 |
285 |
131 |
0,62 |
1 |
292 |
144 |
1,2 |
2 |
302 |
150 |
1,4 |
3 |
300 |
146 |
1,6 |
4 |
310 |
158 |
1,7 |
5 |
309 |
149 |
1,4 |
6 |
305 |
155 |
1,5 |
7 |
315 |
166 |
1,3 |
8 |
318 |
164 |
1,9 |
9 |
310 |
153 |
1,5 |
10 |
312 |
150 |
1,5 |
11 |
315 |
153 |
1,6 |
12 |
315 |
151 |
1,5 |
[0008] On constate que la limite élastique des échantillons soudés selon l'invention présente,
par rapport à l'échantillon de référence une augmentation comprise entre 15 et 35
MPa.
[0009] On a mesuré aussi, pour les références 0 à 5, la résistance à la fatigue des tôles
non soudées en flexion plane, avec R = 0,1, en déterminant la contrainte maximale
(en MPa) correspondant respectivement à 10
6 et 10
7 cycles, ainsi que la vitesse de propagation de fissure ΔK mesurée pour da/dn = 5
x 10
-4 mm/cycle (en MPavm).
Les résultats ont été les suivants:
Réf. |
106 cycles |
107 cycles |
ΔK |
0 |
220 |
200 |
22 |
1 |
235 |
205 |
22 |
2 |
230 |
200 |
23 |
3 |
225 |
200 |
23 |
4 |
230 |
205 |
22 |
5 |
225 |
200 |
22 |
[0010] On constate que, malgré l'augmentation de la résistance mécanique, les tôles selon
l'invention présentent une résistance à la fatigue au moins aussi bonne que celle
des tôles en 5083 classique.
1. Produit pour construction soudée en alliage d'aluminium AlMgMn de composition (% en
poids):
3,0 < Mg < 5,0
0,5 < Mn < 1,0
contenant Fe, Si et Zn en quantité telle que:
Fe < 0,25
Si < 0,25
Zn < 0,40
éventuellement un ou plusieurs des éléments Cr, Cu, Ti, Zr tels que:
Cr < 0,25
Cu < 0,20
Ti < 0,20
Zr < 0,20
autres éléments < 0,05 chacun et < 0,15 au total,
avec Mn + 2Zn > 0,75 et, de préférence > 0,8%.
ce produit présentant une fraction volumique de dispersoïdes supérieure à 1,2%.
2. Produit selon la revendication 1, caractérisé en ce que Mg > 4,3%.
3. Produit selon l'une des revendications 1 et 2, caractérisé en ce que Mn > 0,8%.
4. Produit selon l'une des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que Fe < 0,20%.
5. Produit selon la revendication 4, caractérisée en ce que Fe < 0,15%.
6. Tôle selon l'une des revendications 1 à 5, caractérisée en ce qu'elle est d'épaisseur
> 2,5 mm et qu'elle est uniquement laminée à chaud.
7. Utilisation d'un produit selon l'une des revendications 1 à 6 pour la construction
navale.
8. Utilisation d'un produit selon l'une des revendications 1 à 6 pour la construction
de véhicules industriels.
9. Utilisation de tubes filés selon l'une des revendications 1 à 5 pour la fabrication
de cadres de bicyclettes soudés.
10. Tôle selon l'une quelconque des revendications 1 à 6, caractérisée en ce qu'elle présente
une résistance à la fatigue, mesurée en flexion plane avec R = 0,1 dans le sens travers-long,
supérieure à:
105 cycles pour une contrainte maximale > 280 MPa
106 cycles pour une contrainte maximale > 220 MPa
107 cycles pour une contrainte maximale > 200 MPa
11. Tôle selon l'une des revendications 1 à 6, caractérisée en ce qu'elle présente une
vitesse de propagation de fissure ΔK, mesurée pour R = 0,1, supérieure à:
22 MPavm pour da/dn = 5 10-4 mm/cycle
26 MPavm pour da/dn = 10-3 mm/cycle.