[0001] L'invention concerne des solutions concentrées hydroalcooliques de faible viscosité,
limpides, peu colorées et stables dans un intervalle de température compris entre
5 et 50°C, et contenant au moins 50% en poids d'alkylamidopropylbétaïne répondant
à la formule générale (I) :

dans laquelle R représente le radical alkyle d'une coupe d'acides gras de type
coprah ou palmiste hydrogénés, d'indice d'iode au maximum de 1 (en grammes d'iode
par 100 g). La composition approximative d'une telle coupe est, en pourcents pondéraux
:
50-65 % d'acide laurique,
15-26 % d'acide myristique,
8-14 % d'acide palmitique,
7-15 % d'acide stéarique,
la fraction insaturée responsable du faible indice d'iode étant représentée par moins
de 1% d'acide oléique.
[0002] Dans la suite de l'exposé, on nommera pour simplicité "bétaïnes" ces alkylamidopropyl-bétaïnes.
Leurs solutions ne présentent ces qualités que si leur composition est choisie de
façon précise dans une zone du diagramme bétaïne / éthanol / eau normalisé à 100 en
poids après correction du NaCI présent.
[0003] Les bétaïnes répondant à la formule générale (I) sont des tensioactifs amphotères
très bien tolérés par la peau, possédant d'excellentes caractéristiques nettoyantes
et moussantes, et qui sont tout à fait adaptés à la confection d'une multitude de
compositions tensioactives, tels qu'agents de lavage, de nettoyage (produits liquides
pour le lavage de la vaisselle à la main) et compositions pour soins capillaires (shampooings)
et corporels (gels douche et bains moussant).
[0004] La préparation de ce type de bétaïne est décrite dans de nombreux documents, et les
procédés sont connus de l'homme de l'art, par exemple le brevet US 3,225,074 (American
Cyanamid). Elle consiste à faire réagir un acide gras ou une coupe d'acides gras avec
la N,N-diméthyl-1,3-propanediamine (DMAPA) entre 140 et 200°C, puis à quaterniser
l'amidoamine tertiaire obtenue, de formule générale (II):

par l'acide monochloracétique en présence d'un sel alcalin ou le sel correspondant
de cet acide, la réaction de quaternisation s'opérant le plus souvent en milieu aqueux.
Le chlorure alcalin, fréquemment le chlorure de sodium, sous-produit de la réaction,
est généralement laissé dans cette solution aqueuse de bétaïne. Ces bétaïnes aqueuses
sont commercialisées avec une concentration voisine de 30 % en poids.
[0005] On a souvent essayé de préparer industriellement les solutions de bétaïne les plus
concentrées et les plus fluides possibles, pour des raisons bien compréhensibles de
réduction des coûts de transport et de stockage, sans pour autant sacrifier la facilité
de leur manipulation.
[0006] L'homme de l'art sait que lorsque la concentration d'une solution aqueuse d'agent
tensioactif augmente, sa viscosité augmente aussi. Certains auteurs ont néanmoins
cherché à concentrer par évaporation sous pression réduite des solutions de bétaïne
obtenues selon les procédés usuels, mais leur viscosité augmente rapidement, et elles
deviennent pâteuses à environ 40 % en poids de bétaïne, puis continuent de se solidifier
au fur et à mesure du départ de l'eau : il n'est pas possible d'obtenir des solutions
concentrées selon cette voie. Il est toutefois rapporté dans EP 0,302,329 (Th. Goldschmidt)
qu'il a été possible de contourner partiellement cette difficulté en ajustant le pH
de la solution entre 1 et 4,5 avec un acide minéral (chlorhydrique, sulfurique, phosphorique).
Les auteurs obtiennent ainsi des solutions contenant de 43 à 44 % en poids de bétaïne
(ou 53 à 54 % d'extrait sec) avec une viscosité voisine de 1000 mPa.s à 25°C. Mais
les problèmes de corrosion lors du stockage et du transport ainsi que le pH atypique
de ces solutions de bétaïne limitent leur utilisation, et par ailleurs elles gélifient
en dessous de 16°C.
[0007] Une autre voie est celle de l'obtention de bétaïne en poudre, par atomisation des
solutions fluides à moins de 30 %. On peut penser à redissoudre ces poudres dans des
solvants adéquats, mais la redissolution de ces poudres est entravée par la formation
lors de la mise en contact de la poudre et du solvant de grumeaux ou de pâtes gélifiées
qui ne peuvent pratiquement plus repasser en solution, du moins dans des temps raisonnables
et compatibles avec une activité industrielle.
[0008] La demande internationale WO 97/12856 (HENKEL) divulgue et revendique un procédé
de fabrication d'agents tensioactifs de type bétaïne à faible teneur en sels (0,98
à 1,01 % de NaCI résiduel) par quaternisation d'amines tertiaires et/ou d'amidoamines
tertiaires par le monochloracétate de sodium dans un mélange hydroalcoolique composé
de 5 à 10 % en poids d'eau et de 35 à 50 % en poids d'éthanol et/ou d'isopropanol,
cette réaction étant suivie d'une élimination de la fraction de sel précipité, d'une
élimination totale du solvant et d'un réajustement en eau du milieu réactionnel afin
d'amener la solution à la concentration en matière active désirée, en l'occurrence
30 %. Le rapport pondéral eau / éthanol revendiqué par les auteurs est typique d'un
procédé visant à éliminer le NaCI formé au cours de la réaction. Une composition de
ce genre avait fait l'objet du brevet US 4,705,893 (KAO), représentée par une zone
pentagonale du diagramme ternaire bétaïne / eau / éthanol définie par les coordonnées
triangulaires (80/10/10), (80/15/5), (40/55/5), 40/27,5/32,5) et (52,5/10/37,5). Dans
les 2 cas, il s'agit de procédés dont l'objectif essentiel est l'obtention de solutions
de tensioactifs amphotères non concentrées totalement aqueuses à faibles teneurs en
sels.
[0009] L'homme du métier est familiarisé avec l'idée de l'existence possible de domaines
de phases fluides dans un système tensioactif amphotère/ eau / solvant. Cette idée
est reprise dans WO 95/14076 (Albright et Wilson), en réalité sans autre enseignement
concret que celui des exemples individuels rapportés dans cette publication qui approchent
au mieux les conditions du problème présent, à savoir des compositions de coco-ou
lauryl-amidopropylbétaïne - sel en solution dans un solvant mixte du type eau / glycol.
[0010] Le problème qui reste posé est celui de l'obtention de solutions d'alkylbétaïne de
coprah ou de palmiste hydrogéné qui soient les plus concentrées possibles, c'est-à-dire
à au moins 50% en poids, limpides et peu colorées, fluides et pompables (viscosité
inférieure à 1000 mPa.s), stables entre 5 et 50°C sur des durées prolongées, ceci
afin de réduire les coûts de conditionnement, de transport et de stockage, qui soient
facilement manipulables et qu'on puisse formuler en l'état avec d'autres tensioactifs,
par exemple les alkyléthersulfates, les alcanolamides, ou autres matières premières
de base entrant notamment dans les formulations de savons liquides, shampooings, gels
de douche, et autres préparations cosmétiques. Le recours au coprah hydrogéné est
une contrainte imposée par l'exigence pour ces compositions destinées à des utilisations
cosmétiques d'une meilleure stabilité à l'oxydation que celle qu'on peut espérer des
coupes naturelles non hydrogénées.
[0011] La présente invention apporte une solution à ce problème technique, qui consiste
à préparer l'alkylbétaïne par quaternisation du produit de réaction de la diméthylaminopropylamine
sur un acide gras de coprah ou de palmiste hydrogéné en présence de petites quantités
d'éthanol, à condition toutefois de se limiter à un domaine bien précis et étroit
du diagramme de phase tel que défini maintenant.
[0012] On raisonne en compositions ternaires bétaïne / eau / éthanol, représentées sur le
diagramme ternaire en coordonnées réduites
B* = [bétaïne / (bétaïne + eau + éthanol)] . 102
W* = [eau / (bétaïne + eau + éthanol )] . 102
E* = [éthanol / (bétaïne + eau + éthanol )] . 102
où bétaïne a le sens de, et se mesure comme bétaïne = extrait sec - NaCI, où s'applique
la relation de bouclage à 100% de la composition B* + W* + E* = 100,
toutes les grandeurs bétaïne, extrait sec, eau, éthanol, ClNa étant exprimées en poids,
les grandeurs réduites B*, W* et E*, apparaissant comme des poids %.
[0013] Avec cette définition, la bétaïne prise en compte est une bétaïne brute, c'est à
dire constituée d'alkylamidobétaïne telle que répondant à la formule I, avec quelques
restes de réactifs et quelques sous-produits de réaction de dépassant pas 3 % en poids
(voir l'exemple 1).
[0014] Les compositions de l'invention sont celles qui obéissent à aux relations
52 % ≤ B* ≤ 57 %
E* ≥ 21 %
W* ≥ 20 %
W* /W* + E* ≤ 54 %
[0015] Dans les compositions de l'invention, NaCI est présent à hauteur de 6 % maximum en
poids, valeur au-delà de laquelle ces compositions deviennent incontrôlables, ne serait-ce
que par précipitation du sel.
[0016] Les compositions selon l'invention sont aptes au stockage prolongé sur des périodes
d'au moins trois mois, au cours desquelles on n'observe ni gélification, ni démixtion,
ni précipitation de sels, ni évolution importante de coloration ou de limpidité dans
l'intervalle de température compris entre 5 et 50°C. Ces solutions présentent en outre
l'avantage d'être peu moussantes à l'état concentré ce qui facilite leur manipulation.
Un autre avantage réside dans le fait que ces solutions concentrées sont suffisamment
résistantes à l'invasion microbienne, de sorte que l'adjonction de conservateurs est
inutile. Ces caractéristiques rendent ces solutions particulièrement aptes à la confection
de compositions cosmétiques.
[0017] Un autre objet de la présente invention concerne le procédé de fabrication de ces
solutions concentrées qui consiste à préparer les diméthylaminopropylamides de coprah
ou de palmiste hydrogéné intermédiaires et à les quaterniser par l'acide monochloracétique
en présence de soude ou le monochloracétate de sodium directement dans le milieu solvant
choisi, c'est-à-dire obéissant à la règle de composition



définie plus haut.
[0018] Les exemples et contre-exemples qui suivent feront mieux comprendre l'invention.
[0019] Exemple 1 : fabrication d'une bétaïne de coprah hydrogéné à environ 52,4 % en poids de bétaïne,
soit 57,4 % d'extrait sec, dont les coordonnées réduites B*/W*/E* dans le diagramme
de phase sont 55 / 22,5 / 22 5 (en % poids).
1/a - Préparation de l'aminoamide de coprah (Mw = 309 g)
[0020] Dans un réacteur, charger 731 kg d'acide gras de coprah d'indice d'iode ≤ 1, fondu
à 50°C. Purger le réacteur et son contenu par barbotage à l'azote et le porter à 190°C.
Ajouter en 4 heures par plongeant 347 kg de diméthylaminopropylamine (DMAPA), en sortant
en permanence les eaux de distillation. Maintenir à 190°C sous courant d'azote jusqu'à
ce que le produit de réaction affiche un indice d'acide inférieur à 4,5 mg KOH/g .
Refroidir à 150°C, injecter par plongeant en 1 heure 100 kg d'eau et sécher à 150°C
sous barbotage d'azote jusqu'à une teneur en eau inférieure à 0,1 %. Refroidir à 60°C,
arrêter le barbotage d'azote et vidanger.
[0021] Les caractéristiques usuelles de l'amidoamine tertiaire ainsi obtenue sont les suivantes
:
Alcalinité HClO4 |
3,28 - 3,32 |
IA |
4,4 mg KOH/g |
Acide gras libre |
1,6 % |
DMAPA libre |
57 ppm |
Teneur en eau |
< 0,1 % |
1/b - Fabrication de la solution concentrée de Bétaïne de coprah
[0022] Dans un autre réacteur, charger à température ambiante 233,7 kg d'éthanol, 127,4
kg d'eau, puis 163 kg d'acide monochloracétique. Porter à 25°C, puis ajouter lentement
473 kg de l'amidoamine préparée en 1/a en contrôlant l'exotherme afin que la température
ne dépasse pas 40°C. Ajouter alors 153 kg de soude à 50 % en une heure environ, en
maintenant la température à 40°C, puis monter lentement à 80°C. Maintenir à cette
température jusqu'à ce que la teneur en amidoamine atteigne une valeur stable de 1
% en veillant à ce que le pH d'une prise d'essai préalablement diluée à 5 % dans l'eau
soit toujours compris entre 10 - 10,5. Après une heure, refroidir à 40°C et ajuster
le pH à 6,5 avec une solution HCI 31 %. Eliminer par décantation, filtration ou centrifugation
la fraction de NaCI précipité.
[0023] On obtient ainsi une solution de bétaïne concentrée présentant les compositions principales
suivantes :
Monochloracétate de sodium |
< 3 ppm |
DMAPA libre |
< 5 ppm |
Glycolate de sodium |
0,3 % |
Acide gras libre |
0,8 % |
Amidoamine libre |
1,0 % |
pH à 5 % (23°C) |
6,5 |
Couleur Hazen (t = 0) |
100 Hz |
Couleur Hazen (t = 6 semaines) d |
110 Hz |
d : vieillissement à 45°C |
[0024] C'est une solution fluide, limpide et facile à pomper, stable entre 5 et 50°C.
[0025] Contre-exemple 1 : On reprend les conditions opératoires de l'étape 1/b de l'exemple 1, à l'exception
des charges matières premières, lesquelles ont été ajustées pour obtenir une bétaïne
de coprah hydrogéné à environ 55,6 % de bétaïne, soit 60,5 % d'extrait sec, dont les
coordonnées triangulaires B*/W*/E* corrigées du NaCI dans le diagramme de phase sont
58,5 / 20,0 / 21 5 (en % poids).
[0026] On obtient un gel visqueux non newtonien biréfringent, de type cristal liquide, difficile
à manipuler et à formuler entre 5 et 50°C.
[0027] Contre-exemple 2 : On reprend les conditions opératoires de l'étape 1/b de l'exemple 1, à l'exception
des charges matières premières, lesquelles ont été ajustées pour obtenir une bétaïne
de coprah à environ 49,35 % de bétaïne brute, soit 63,75 % d'extrait sec, dont les
coordonnées triangulaires B*/W*/E* corrigées du NaCI dans le diagramme de phase sont
51,5 / 27,0 / 21,5 (en % poids).
[0028] On obtient une solution fluide, limpide et monophasique au voisinage de la température
ambiante (20 - 25°C) mais qui, entre 5 et 15°C, subit une évolution rapide vers un
mélange biphasique avec une phase gel visqueuse biréfringente et une phase liquide
surnageante. Ce produit hétérogène est difficilement utilisable dans l'état.
[0029] Contre-exemple 3 : On reprend les mêmes conditions opératoires que dans l'étape 1/b de l'exemple 1
à l'exception des charges matières premières, lesquelles ont été ajustées pour obtenir
une bétaïne de coprah à environ 53,95 % de bétaïne, soit 58,75 % d'extrait sec, dont
les coordonnées triangulaires B*/W*/E* corrigées du NaCI dans le diagramme de phase
sont 65,5 / 17,75 / 25,75 (en % poids).
[0030] On obtient une solution qui devient hétérogène au stockage à 5°C.