[0001] La présente invention concerne un émetteur de rayonnement infrarouge en bande III
et un matériau composite permettant l'émission d'un tel rayonnement infrarouge.
[0002] On connaît des émetteurs de rayonnement infrarouge en bande II (longueurs d'onde
du rayonnement infrarouge de 3 à 5 µm) susceptibles d'être montés sur un engin volant,
par exemple un avion cible, pour simuler la signature optique de certains types d'aéronef,
en particulier dans le but de permettre la mise en oeuvre de tirs d'essai pour des
armes, telles que des missiles, de destruction d'aéronef.
[0003] La présente invention concerne un émetteur susceptible d'émettre des rayonnements
infrarouges en bande III (8 à 12 µm de longueur d'onde) et destiné, en particulier,
à être utilisé dans le même type d'application, pour simuler la signature optique
d'autres types d'aéronef.
[0004] On sait que, pour de telles applications (montage sur un aéronef volant à vitesses
élevées, pour simuler la signature optique d'avions émettant en bande III), l'émetteur
doit présenter des caractéristiques particulières, concernant notamment :
- la luminance, qui doit être de l'ordre de 100 W/sr entre 8 et 10 µm de longueur d'onde
;
- la tenue aux contraintes d'environnement mécanique et climatique, qui doit être compatible
avec les conditions d'utilisation envisagées (montage sur un engin volant pouvant
voler jusqu'à une vitesse proche de Mach 1 et pouvant monter jusqu'à une altitude
de 4 000 m) ;
- l'encombrement (la surface émissive doit rester inférieure à quelques centaines de
cm2) ; et
- le coût qui doit rester faible.
[0005] De nombreuses solutions sont envisageables, mais aucune d'elles ne permet de satisfaire
à toutes les conditions précitées. A titre d'illustration, on peut citer :
- une solution pyrotechnique utilisant un traceur à poudre. La mise en oeuvre d'une
telle solution, et notamment le maintien d'une combustion stable, paraissent difficiles,
voire impossibles, dans les conditions d'utilisation envisagées. De plus, la puissance
lumineuse susceptible d'être émise en bande III semble insuffisante ;
- une solution utilisant un laser. Cette solution est prohibitive en termes de coût,
de poids, d'encombrement et d'autonomie ; et
- des lampes de Nerst (barreau de matériau réfractaire, chauffé par effet Joule). Ces
dernières sont trop fragiles et la puissance émise en bande III est bien insuffisante,
pour les applications envisagées.
[0006] Par ailleurs, on connaît un dispositif pour simuler une signature en bande III, qui
est basé sur l'émission d'un corps fortement émissif chauffé. Ce dispositif connu
comprend un dôme en métal, qui est chauffé par un brûleur à propane. Ledit dispositif
permet d'atteindre une luminance de l'ordre de 40 W/sr lorsqu'il est monté sur un
engin volant qui vole à vitesse modérée (75 m/s).
[0007] Toutefois, ce dispositif connu ne peut être utilisé pour les applications envisagées
dans la présente invention. En effet :
- le niveau de luminance obtenu est insuffisant (40 W/sr au lieu de 100 W/sr) ; et de
plus
- le refroidissement dû au flux aérodynamique à la vitesse de vol élevée envisagée (280
m/s) provoquerait une chute de la température du dôme et l'effondrement du niveau
de luminance.
[0008] La présente invention a pour objet de remédier à ces inconvénients. Elle concerne
un émetteur de coût et d'encombrement réduits, permettant d'émettre des rayonnements
infrarouges en bande III, qui présentent les caractéristiques précitées et qui sont
susceptibles d'être utilisés dans les applications indiquées précédemment.
[0009] A cet effet, selon l'invention, ledit émetteur de rayonnement infrarouge en bande
III est remarquable en ce qu'il comprend :
- une source d'émission comportant un matériau composite qui comprend un métal usuel
et courant, par exemple du cuivre ou du nickel, sur lequel est déposée une couche
mince d'oxyde présentant, par exemple une épaisseur de l'ordre de 50 µm, ledit oxyde
présentant de plus une émissivité qui est :
. inférieure à 0,2, au moins pour les longueurs d'onde de rayonnement émis, inférieures
à 6 µm ; et
. supérieure à 0,8, pour les longueurs d'onde comprises entre 8 µm et 10 µm ; et
- un dispositif de chauffage susceptible de chauffer ledit matériau composite de sorte
qu'il émette un rayonnement infrarouge en bande III.
[0010] Ainsi, grâce notamment aux caractéristiques d'émissivité dudit oxyde (par exemple
de l'oxyde d'aluminium, de magnésium ou d'ytrium), l'émetteur conforme à l'invention
est susceptible d'émettre un rayonnement en bande III d'énergie lumineuse suffisante
pour les applications envisagées. Comme de plus, le rayonnement émis présente une
luminance très réduite en bandes I (1 µm - 1,5 µm) et II (3 µm - 5 µm), la consommation
énergétique est réduite en conséquence, ce qui permet d'optimiser le rendement énergétique
global dudit émetteur.
[0011] On notera que, par définition, l'émissivité d'un corps est une valeur sans dimension
qui exprime le rapport entre la luminance émise par ce corps et la luminance maximale
d'un corps idéal, dit "corps noir". Cette valeur varie, en fonction du matériau et
de la longueur d'onde, entre 0 et 1.
[0012] En outre, par le dépôt de l'oxyde sur un métal, on remédie aux problèmes de coût,
de robustesse, d'usinage, de chauffage et d'approvisionnement, qui existeraient si
on utilisait de l'oxyde seul, avec les conditions de surface (150 cm
2) et de température (800°C) envisagées ici.
[0013] De plus, l'utilisation d'un métal (par exemple du titane, du cuivre, du nickel ou
du platine irradié) associé audit dispositif de chauffage permet un chauffage efficace
dudit matériau composite à une température prescrite comprise entre 500°C et 1000°C,
de préférence de l'ordre de 800°C.
[0014] De préférence, ledit métal présente une forme demi-sphérique et ledit oxyde est déposé
sur la face externe demi-sphérique dudit métal.
[0015] Par ailleurs, de façon avantageuse, ledit dispositif de chauffage comprend des moyens
pour régler la température de chauffage et il réalise de préférence le chauffage par
effet Joule. D'autres modes de chauffage connus sont bien entendus également envisageables.
[0016] En outre, dans un mode de réalisation particulier, l'émetteur conforme à l'invention
comporte de plus :
- un réflecteur permettant de diriger le rayonnement infrarouge émis par la source d'émission
selon un angle solide prédéfini, ce qui permet d'augmenter le rendement global de
l'émetteur ; et/ou
- un boîtier qui renferme la source d'émission, de manière à la protéger par rapport
à l'extérieur, et qui est muni d'une fenêtre transparente aux rayonnements infrarouges
émis par ladite source d'émission, ce qui permet notamment d'isoler la source émissive
du flux aérodynamique externe.
[0017] La présente invention concerne également un matériau composite comportant un métal
et un oxyde, pour l'émission de rayonnement infrarouge en bande III, ledit matériau
composite et notamment l'oxyde présentant les caractéristiques précitées.
[0018] Les figures du dessin annexé feront bien comprendre comment l'invention peut être
réalisée. Sur ces figures, des références identiques désignent des éléments semblables.
[0019] La figure 1 montre schématiquement un émetteur conforme à l'invention.
[0020] La figure 2 représente des courbes montrant l'émissivité respectivement d'un corps
noir et d'un matériau composite conforme à l'invention, en fonction de la longueur
d'onde.
[0021] La figure 3 représente des courbes montrant la luminance respectivement d'un corps
noir et d'un émetteur conforme à l'invention, en fonction de la longueur d'onde.
[0022] L'émetteur 1 conforme à l'invention et représenté schématiquement sur la figure 1
est destiné à émettre un rayonnement infrarouge R en bande III, précisé ci-dessous.
[0023] A cet effet, ledit émetteur 1 comprend, selon l'invention :
- une source d'émission 2 comportant un matériau composite 3 qui comprend un métal 4
sur lequel est déposée une couche mince d'oxyde 5, ledit oxyde 5 présentant une émissivité
E1, tel que représenté sur la figure 2, qui est :
. inférieure à 0,2 au moins pour les longueurs d'onde λ inférieures à 6 µm ; et
. supérieure à 0,8 et le plus proche possible de 1 pour les longueurs d'onde λ comprises
entre 8 µm et 10 µm ; et
- un dispositif de chauffage 6 susceptible de chauffer ledit matériau composite 3 de
sorte qu'il émette un rayonnement infrarouge en bande III.
[0024] On a de plus représenté sur la figure 2, en traits interrompus, l'émissivité E2 d'un
corps noir parfait, qui est supposée être égale à 1 quelle que soit la longueur d'onde
λ considérée.
[0025] La courbe E1 d'émissivité, représentée sur la figure 2, correspond à celle de l'oxyde
d'aluminium (Al
2O
3) qui est l'oxyde préféré pour la mise en oeuvre de la présente invention.
[0026] Toutefois, d'autres oxydes peuvent également être utilisés pour la mise en oeuvre
de l'invention, et notamment de l'oxyde de magnésium ou de l'oxyde d'ytrium.
[0027] On notera que l'émissivité E pour des longueurs d'onde λ supérieures à 10 µm est
sans importance dans le cadre de la présente invention, puisque l'énergie émise pour
de telles longueurs d'onde est négligeable.
[0028] On notera de plus que le fait d'utiliser un matériau composite 3, dont l'émissivité
est proche de 1 dans la bande utile (bande III) et quasi-nulle pour les gammes de
longueurs d'onde inférieures, permet de limiter les problèmes d'échauffement thermique
et d'augmenter le rendement.
[0029] Dans un mode de réalisation préféré représenté sur la figure 1, ledit métal 4, de
préférence un métal courant, par exemple du titane, du cuivre, du nickel ou du platine
irradié, présente une forme demi-sphérique, par exemple de diamètre 15 cm, et ledit
oxyde 5 est déposé sur la face externe demi-sphérique dudit métal 4, ce qui permet
d'obtenir un rapport élevé entre la surface émissive et l'encombrement dudit matériau
composite 3.
[0030] De préférence, ledit oxyde 5 est déposé sous forme d'une couche mince, dont l'épaisseur
résulte d'un compromis entre les propriétés optiques de l'oxyde utilisé et les contraintes
liées au procédé de dépôt mis en oeuvre, et est, par exemple, proche de 50 µm dans
le cas de l'oxyde d'aluminium.
[0031] Dans le cadre de la présente invention, ledit oxyde 5 peut être déposé par différents
procédés connus, par exemple par pulvérisation à plasma. Le choix du procédé dépend,
de préférence, du type de métal et du type d'oxyde choisis. On peut en particulier
utiliser des procédés de projection thermique, un procédé "PVD" ("Physical Vapor Deposition")
ou un procédé "CVD" ("Chemical Vapor Deposition").
[0032] Par ailleurs, le dispositif de chauffage 6 comporte :
- des moyens 7 connus, par exemple des résistances électriques, représentés schématiquement
et destinés à chauffer par effet Joule ledit métal 4 ;
- des moyens 8 connus, pour régler la température de chauffage, comme illustré par une
liaison 9 ; et
- une unité 10 d'alimentation en courant électrique, reliée par une liaison 11 aux moyens
8.
[0033] Le dispositif de chauffage 6 n'est fourni qu'à titre d'exemple préféré. D'autres
dispositifs de chauffage connus peuvent bien entendu également être utilisés.
[0034] Par ailleurs, selon l'invention, ledit émetteur 1 comporte de plus :
- un réflecteur métallique 12, par exemple de forme parabolique, centré autour du matériau
composite 3 et permettant de diriger le rayonnement infrarouge R émis par ladite source
émissive 2 selon un angle solide a prédéfini, ce qui permet d'augmenter le rendement
global de l'émetteur 1 ; et
- un boîtier, dont on a uniquement représenté une fenêtre 13, destiné à protéger la
source émissive 2 de l'extérieur, et notamment du flux aérodynamique externe lorsque
l'émetteur 1 est monté sur un engin volant. Ladite fenêtre 13 est bien entendu transparente
auxdits rayonnements infrarouges R.
[0035] Ainsi, grâce à l'invention, on peut émettre un rayonnement infrarouge R en bande
III (8-12 µm) qui présente une luminance de 100 W/sr entre 8 et 10 µm, avec une surface
émissive de par exemple 150 cm
2.
[0036] Sur la figure 3, on a représenté la luminance L (en W/st/m
2/µm), pour une température de l'ordre de 800°C correspondant à la température de chauffage
préférée, à savoir :
- d'une part, la luminance L1 de l'émetteur 1 conforme à l'invention ; et
- d'autre part, à titre de comparaison, la luminance L2 d'un corps noir, dans les mêmes
conditions de mise en oeuvre.
[0037] On voit bien que l'émetteur 1 émet essentiellement en bande III, alors que le corps
noir présente un pic de luminance très élevé situé entre 2 et 3 µm.
[0038] On notera qu'en plus des avantages précités, on réalise grâce à l'invention un compromis
efficace entre l'encombrement et le rendement de l'émetteur 1. En effet, on rappellera
que, concernant un corps noir, pour des températures supérieures à 1000°C, le gain
en luminance en bande III devient de plus en plus réduit, l'énergie émise en bande
I devient prépondérante et le rendement bande III / bande I, qui doit être important
dans les applications envisagées dans la présente invention, s'effondre. L'optimum
de rendement se situe à des températures modérées de 200°C. Cependant, pour de telles
températures, la surface des matériaux nécessaire à l'obtention de la luminance souhaitée
(100 W/sr dans 1,5 sr) en bande III est prohibitive (environ 10 000 cm
2). Par conséquent, grâce à l'invention, on obtient un rendement élevé avec une source
d'émission 2 de surface émissive réduite (150 cm
2), chauffée à une température de l'ordre de 800°C.
[0039] A titre d'application préférée mais non exclusive, l'émetteur 1 conforme à l'invention
peut être monté sur un engin volant, par exemple un engin cible de type C22, pour
simuler la signature optique d'un aéronef. De plus, l'existence d'une luminance faible
dans la gamme du proche infrarouge permet de ne pas perturber certains systèmes de
guidage de missiles de destruction dudit engin cible, notamment des systèmes munis
de traceur en bande I.
1. Emetteur de rayonnement infrarouge en bande III,
caractérisé en ce qu'il comprend :
- une source d'émission (2) comportant un matériau composite (3) qui comprend un métal
(4) sur lequel est déposée une couche mince d'oxyde (5), ledit oxyde présentant une
émissivité qui est :
. inférieure à 0,2 au moins pour les longueurs d'onde de rayonnement émis (R), inférieures
à 6 µm ; et
. supérieure à 0,8 pour les longueurs d'onde comprises entre 8 µm et 10 µm ; et
- un dispositif de chauffage (6) susceptible de chauffer ledit matériau composite
(3) de sorte qu'il émette un rayonnement infrarouge en bande III.
2. Emetteur selon la revendication 1,
caractérisé en ce que ladite couche mince présente une épaisseur de l'ordre de 50
µm.
3. Emetteur selon l'une des revendications 1 et 2,
caractérisé en ce que ledit oxyde (5) est de l'oxyde d'aluminium.
4. Emetteur selon l'une des revendications 1 et 2,
caractérisé en ce que ledit oxyde (5) est de l'oxyde de magnésium.
5. Emetteur selon l'une des revendications 1 et 2,
caractérisé en ce que ledit oxyde (5) est de l'oxyde d'ytrium.
6. Emetteur selon l'une des revendications 1 à 5,
caractérisé en ce que ledit métal (4) présente une forme demi-sphérique et en ce que
ledit oxyde (5) est déposé sur la face externe demi-sphérique dudit métal (4).
7. Emetteur selon l'une des revendications 1 à 6,
caractérisé en ce que ledit dispositif de chauffage (6) comprend des moyens (8) pour
régler la température de chauffage.
8. Emetteur selon l'une des revendications 1 à 7,
caractérisé en ce que ledit dispositif de chauffage (6) réalise un chauffage par effet
Joule.
9. Emetteur selon l'une des revendications 1 à 8,
caractérisé en ce qu'il comporte de plus un réflecteur (12) permettant de diriger
le rayonnement infrarouge (R) émis par ladite source d'émission (2) selon un angle
solide prédéfini.
10. Emetteur selon l'une des revendications 1 à 9,
caractérisé en ce qu'il comporte de plus un boîtier qui renferme la source d'émission
(2), de manière à la protéger par rapport à l'extérieur, et qui est muni d'une fenêtre
(13) transparente au rayonnement infrarouge (R) émis par ladite source d'émission
(2).
11. Matériau composite pour l'émission de rayonnement infrarouge en bande III,
caractérisé en ce qu'il comporte un métal (4) et un oxyde (5), en ce que ledit oxyde
(5) est déposé sous forme de couche mince sur ledit métal (4), et en ce que ledit
oxyde (5) présente une émissivité qui est :
- inférieure à 0,2 pour les longueurs d'onde inférieures à 6 µm ; et
- supérieure à 0,8 pour les longueurs d'onde comprises entre 8 µm et 10 µm.
12. Matériau selon la revendication 11,
caractérisé en ce que ladite couche mince présente une épaisseur de l'ordre de 50
µm.
13. Matériau selon l'une des revendications 11 et 12,
caractérisé en ce que ledit oxyde (5) est de l'oxyde d'aluminium.
14. Matériau selon l'une des revendications 11 et 12,
caractérisé en ce que ledit oxyde (5) est de l'oxyde de magnésium.
15. Matériau selon l'une des revendications 11 et 12,
caractérisé en ce que ledit oxyde (5) est de l'oxyde d'ytrium.
16. Matériau selon l'une des revendications 11 à 15,
caractérisé en ce que ledit métal (4) présente une forme demi-sphérique et en ce que
ledit oxyde (5) est déposé sur la face externe demi-sphérique dudit métal (4).