[0001] La présente invention se rapporte à un spiral auto-compensateur pour oscillateur
mécanique balancier-spiral de mouvement d'horlogerie ou autre instrument de précision,
en alliage paramagnétique Nb-Hf possédant un coefficient thermique du module de Young
(CTE) positif, apte à compenser les dilatations thermiques du spiral et du balancier.
[0002] Toutes les méthodes proposées pour compenser ces variations de fréquence sont basées
sur la considération que cette fréquence propre dépend exclusivement du rapport entre
la constante du couple de rappel exercé par le spiral sur le balancier et le moment
d'inertie de ce dernier, comme indiqué dans la relation suivante:
F = fréquence propre de l'oscillateur avec
C = constante du couple de rappel exercé par le spiral de l'oscillateur
I = moment d'inertie du balancier de l'oscillateur
[0003] Depuis la découverte des alliages à base de Fe-Ni possédant un coefficient thermique
du module de Young (ci-après CTE) positif, la compensation thermique de l'oscillateur
mécanique est obtenue en ajustant le CTE du spiral en fonction des coefficients de
dilatation thermique du spiral et du balancier. En effet, en exprimant le couple et
l'inertie à partir des caractéristiques du spiral et du balancier, puis en dérivant
l'équation (1) par rapport à la température, on obtient la variation thermique relative
de la fréquence propre:

avec:
E: module de Young du spiral de l'oscillateur


= CTE = coefficient thermique du module de Young du spiral de l'oscillateur
αs : coefficient de dilatation thermique du spiral de l'oscillateur
αb : coefficient de dilatation thermique du balancier de l'oscillateur
[0004] En ajustant le terme d'autocompensation A = ½(
CTE+3
αs) à la valeur du coefficient de dilatation thermique du balancier, il est possible
d'annuler l'équation (2). Ainsi, la variation thermique de la fréquence propre de
l'oscillateur mécanique peut être éliminée.
[0005] Les coefficients de dilatation thermique α
b des matériaux pour balanciers les plus utilisés, comme les alliages de cuivre, d'argent,
d'or, de platine ou d'acier se situent dans un domaine de l'ordre de 10 à 20 ppm/°C.
Pour compenser les effets des variations de température sur la fréquence propre des
oscillateurs dues à sa dilatation, les alliages pour spiraux doivent donc avoir un
terme d'auto-compensation correspondant. La précision désirée pour les montres exige
de pouvoir ajuster en fabrication, de manière contrôlée, le terme d'auto-compensation
avec une tolérance de quelques ppm/°C autour de la valeur recherchée.
[0006] Les alliages ferromagnétiques à base de fer, nickel ou cobalt utilisés actuellement
pour la fabrication des spiraux possèdent un CTE anormalement positif dans une plage
d'environ 30°C autour de la température ambiante, dû à la proximité de leur température
de Curie. Au voisinage de cette température, les effets magnétostrictifs qui diminuent
le module de Young de ces alliages disparaissent, entraînant une augmentation du module.
Outre le fait que cette plage de température est relativement étroite, ces alliages
sont sensibles aux effets des champs magnétiques. Ceux-ci modifient les propriétés
élastiques des spiraux de manière irréversible et changent de ce fait la fréquence
propre de l'oscillateur mécanique. En outre, les propriétés élastiques des alliages
ferromagnétiques varient avec le taux d'écrouissage à froid, ce qui nécessite de contrôler
exactement ce paramètre lors de la fabrication du spiral.
[0007] Les valeurs de CTE recherchées pour les spiraux réalisés avec cette famille d'alliages
sont ajustées par un traitement thermique de précipitation qui fixe également la forme
définitive du spiral par relaxation.
[0008] On a déjà proposé dans le CH-551 032 (D1), dans le CH-557 557 (D2) et dans le DE-C3-15
58 816 (D3) des alliages paramagnétiques à forte susceptibilité magnétique et coefficient
thermique de la susceptibilité négatif, comme alternative aux alliages ferromagnétiques
pour la fabrication de spiraux autocompensateurs et de ressorts de précision. Ces
alliages possèdent un CTE anormalement positif et ont l'avantage d'avoir des propriétés
élastiques insensibles aux champs magnétiques. Leurs propriétés élastiques dépendent
de la texture créée lors du tréfilage du spiral, mais peu du taux d'écrouissage, au
contraire des alliages ferromagnétiques. De plus, comme mentionné dans le document
D3, ces alliages offrent un domaine de compensation thermique des oscillateurs mécaniques
qui s'étend sur plus de 100°C autour de la température ambiante.
[0009] Les causes physiques qui créent le CTE anormalement positif de ces alliages paramagnétiques
sont expliquées dans les documents susmentionnés. Selon eux, ces alliages possèdent
une forte densité d'états électronique au niveau de Fermi, ainsi qu'un fort couplage
électron-phonon, ce qui engendre ce comportement anormal du CTE.
[0010] Le document D3 cite en particulier comme étant susceptibles de convenir à la fabrication
de spiraux pour oscillateurs de mouvements d'horlogerie, des alliages dans lesquels
le Nb ou le Ta sont alliés au Zr, au Ti ou à l'Hf qui se trouvent dans ces alliages
dans des proportions telles qu'ils sont capables de précipiter en deux phases.
[0011] On a encore proposé dans le EP 0 886 195 (D4) un alliage Nb-Zr contenant entre 5%
et 25% en poids de Zr et au moins 500 ppm en poids d'un agent dopant formé au moins
en partie d'oxygène. Avec cet alliage, le CTE est contrôlé par la texture. La précipitation
qui se produit au cours du processus de fixage induit une recristallisation qui modifie
la texture et permet d'ajuster le CTE. L'oxygène influence la précipitation et la
recristallisation et donc le CTE.
[0012] L'ajustement du CTE lors de l'opération de fixage est difficile à maîtriser. En effet,
la texture qui contrôle le CTE est modifiée au cours du fixage par la recristallisation.
Or, dans les alliages de Nb-Zr-O, le déclenchement de la recristallisation et son
déroulement dépendent de la concentration d'oxygène, du taux d'écrouissage et de la
température. On a constaté qu'avec ces alliages, la plage de température sur laquelle
se déroule la recristallisation est très étroite (environ 50°C). De plus, la variation
de CTE induite est grande, de l'ordre de 150 ppm/°C entre le début et la fin de recristallisation.
L'étroit intervalle de température dans lequel se déroule la recristallisation et
cette forte variation du CTE rendent l'ajustement du CTE des alliages Nb-Zr-O difficilement
reproductible. L'étroitesse de cet intervalle de température est due au fait que cette
réaction est déclenchée par la précipitation des phases riches en Zr à partir de la
solution solide.
[0013] Alors que le document D3 se fonde sur la capacité des composants de l'alliage de
précipiter en deux phases. Le ressort avec CTE anormalement positif est fabriqué à
partir de l'alliage recuit à haute température puis refroidi rapidement de manière
à obtenir une solution solide sursaturée. Dans cet état, l'alliage est ensuite déformé
à froid à plus de 85%. Cette forte déformation induit une texture favorable à un CTE
positif. Pour ajuster le CTE à la valeur désirée, l'alliage est finalement traité
thermiquement dans un intervalle de température qui permet la précipitation de la
solution solide sursaturée. Les phases qui précipitent à partir de la solution solide
ont des CTE plus faibles, ce qui entraîne une diminution du CTE global et permet son
ajustement à la valeur désirée. La recristallisation après la précipitation en deux
phases est relativement difficile à maîtriser. En outre, dans le cas du Hf, la proportion
de Hf doit être supérieure à 30% at., puisque jusqu'à cette concentration, cet élément
est en solution solide dans le Nb. La capacité de déformation en est donc réduite.
[0014] Le but de la présente invention est un alliage qui permette de remédier, au moins
en partie, aux inconvénients des alliages susmentionnés.
[0015] On a découvert, de façon surprenante, que des alliages Nb-Hf avec de très faibles
proportions de Hf, c'est-à-dire, des proportions qui se situent bien au-dessous de
la limite à partir de laquelle le Hf précipite, permettait d'obtenir un CTE positif,
cette limite s'abaissant jusqu'à 2% at.
[0016] L'invention a par conséquent pour objet un spiral autocompensateur pour oscillateur
mécanique balancier-spiral de mouvement d'horlogerie ou autre instrument de précision,
en alliage paramagnétique Nb-Hf possédant un coefficient thermique du module de Young
(CTE) positif, apte à compenser les dilatations thermiques du spiral et du balancier,
selon la revendication 1.
[0017] L'alliage à partir duquel le spiral objet de l'invention est réalisé présente plusieurs
avantages.
[0018] Le Hf est en solution solide dans le Nb sur une très large gamme de concentration
(jusqu'à 30% at.).
[0019] La contribution du Hf au CTE positif est très forte, de sorte que de faibles proportions
de Hf sont nécessaires. C'est ainsi qu'environ 2% at. de Hf suffisent à rendre le
CTE positif. Il s'est avéré, après essais, qu'un alliage Nb-Hf 4% at. possède un CTE
de 13 ppm/°C après recristallisation partielle, ce qui correspond tout à fait aux
valeurs requises dans le cas d'un système balancier-spiral.
[0020] Avec cet alliage Nb-Hf 4% at., l'ajustement du CTE plus facile à maîtriser parce
que:
1. La variation de CTE au cours de la recristallisation n'est que de 50 ppm/°C, soit
trois fois moins que pour un alliage Nb-Zr.
2. La recristallisation n'étant pas déclenchée par une précipitation, elle est plus
lente et a lieu sur une très large plage de température (env. 400°C) comme le montre
la figure annexée.
[0021] Enfin, la faible concentration de Hf nécessaire pour avoir le CTE requis de 13 ppm/°C
améliore la capacité de déformation du spiral et facilite les opérations de tréfilage.
[0022] Le spiral en alliage de Nb-Hf peut encore contenir un ou plusieurs éléments additionnels
comme Ti, Ta, Zr, V, Mo, W, Cr en concentrations telles qu'aucune précipitation n'ait
lieu durant l'opération de fixage de la forme du spiral.
[0023] L'effet de l'oxygène sur le spiral Nb-Hf s'est révélé faible, voire nul.
1. Spiral autocompensateur pour oscillateur mécanique balancier-spiral de mouvement d'horlogerie
ou autre instrument de précision, en alliage paramagnétique Nb-Hf possédant un coefficient
thermique du module de Young (CTE) tel, qu'il permet d'annuler substantiellement l'expression:

avec:
E: module de Young du spiral de l'oscillateur


= CTE = coefficient thermique du module de Young du spiral de l'oscillateur
αs : coefficient de dilatation thermique du spiral de l'oscillateur
αb : coefficient de dilatation du balancier de l'oscillateur,
caractérisé en ce qu'il contient entre 2% et 30% at. de Hf.
2. Spiral selon la revendication 1, dans lequel l'alliage comporte au moins un des éléments
additionnels suivants : Ti, Ta, Zr, V, Mo, W, Cr en concentrations telles qu'aucune
précipitation n'ait lieu au cours de l'opération de fixage de sa forme.
3. Spiral selon l'une des revendications précédentes, dans lequel l'alliage contient
moins de 10% at. de Hf.