[0001] L'invention concerne un procédé de décontamination d'une pièce présentant sur sa
surface des particules contaminées, ainsi qu'un produit de décontamination destiné
à être utilisé pour la mise en oeuvre de ce procédé.
[0002] Le procédé et le produit de décontamination sont tout particulièrement destinés au
traitement de la contamination radioactive fixée, c'est-à-dire lorsque les particules
radioactives sont soit incrustées dans la pièce, soit liées chimiquement à la surface
de la pièce. Pour déplacer les particules de la surface de la pièce vers le produit
de décontamination, il est alors nécessaire d'éroder la pièce.
[0003] Bien entendu, le procédé et le produit de décontamination peuvent également être
utilisés pour le traitement de la contamination radioactive non fixée, c'est-à-dire
lorsque les particules sont simplement déposées sur la surface de la pièce et qu'il
n'est pas nécessaire d'éroder la pièce pour les atteindre.
[0004] La décontamination de la pièce correspond à la diminution du nombre de particules
radioactives présentes sur la surface de la pièce, jusqu'à un seuil prédéterminé,
pouvant varier selon les besoins et les souhaits de l'utilisateur de la pièce.
[0005] Les pièces à décontaminer peuvent être des conduites de fluides, des murs, des sols,
des plafonds, des cuves, des piscines, ou des objets divers.
[0006] On connaît déjà des procédés destinés à traiter la contamination fixée.
[0007] Ces procédés consistent généralement en l'application sur la pièce à traiter d'une
solution de Cérium (IV) dans un acide fort. Le Cérium (IV) permet en effet d'éroder
les alliages métalliques, notamment l'acier ou l'acier inoxydable, matériaux constitutifs
de nombreuses pièces - ou de leur revêtement - dans le domaine du nucléaire.
[0008] Toutefois, les procédés connus ne donnent pas entière satisfaction.
[0009] Un premier problème posé par les procédés de l'art antérieur concerne la forme sous
laquelle le produit de décontamination est appliqué sur la pièce.
[0010] L'application de la solution de Cérium (IV) s'effectue la plupart du temps en phase
liquide (procédés de lavage, trempage, ou d'aspersion par jet haute pression), ce
qui présente les inconvénients suivants : formation d'une grande quantité d'effluents
contaminés, ce qui accroît le coût de retraitement des effluents générés, temps de
contact réduit avec la pièce et affinité limitée entre des particules contaminées
et la solution, d'où une décontamination insuffisante.
[0011] De plus, lorsque les pièces à décontaminer présentent de grandes dimensions, ces
procédés ne sont pas optimaux, car ils nécessitent un grand volume de réactifs.
[0012] On connaît également des procédés où le produit comportant le Cérium (IV) est appliqué
sous forme de gel sur la pièce à traiter. Le temps de contact entre le produit de
décontamination et la pièce est alors plus important qu'en phase liquide, et la décontamination
plus efficace.
[0013] Toutefois, ces gels doivent répondre à des spécifications très contraignantes en
ce qui concerne :
- d'une part leurs propriétés rhéologiques (viscosité suffisamment faible pour permettre
la projection de ces gels mais suffisamment élevée pour permettre leur adhésion à
la surface de la pièce pendant une durée prédéfinie) ;
- d'autre part la possibilité de retraitement des effluents générés lors de la décontamination.
[0014] Il s'ensuit que la composition des gels est complexe, et leur prix de revient relativement
élevé.
[0015] Une autre forme sous laquelle les produits de décontamination peuvent être appliqués
est la phase mousse, qui est particulièrement avantageuse. En effet, les mousses contenant
plus de gaz que de liquide, on réduit ainsi les volumes de réactifs et d'effluents
générés. De plus, le temps de contact entre la mousse et la pièce étant plus important
qu'avec un liquide, la décontamination se trouve considérablement améliorée.
[0016] Néanmoins, la valeur du potentiel normal d'oxydoréduction du couple Ce
4+/Ce
3+ étant élevée (1.72 V en milieu acide), l'ion Ce
4+ est susceptible d'oxyder de très nombreuses fonctions organiques, dont celles des
molécules tensioactives, génératrices de mousses. Les principales fonctions organiques
oxydées par le Ce
4+ sont : les acides carboxyliques et les acides aminés, les alcools et phénols, les
aldéhydes et cétones, les esters, les amides, les hydrocarbures à liaisons multiples.
[0017] La présence de l'ion Ce
4+ dans les produits de décontamination comprenant un tensioactif comme agent moussant
conduit donc à la dégradation rapide des mousses.
[0018] Ainsi, l'utilisation des produits de décontamination connus comprenant du Cérium
(IV) dans un acide fort dans des procédés de décontamination en phase mousse ne donne
pas satisfaction d'un point de vue pratique et économique.
[0019] Par ailleurs, un deuxième problème posé par les procédés de l'art antérieur réside
dans le fait que les procédés de décontamination à base de Cérium (IV) connus conduisent
à une érosion importante des pièces, au-delà du seuil généralement autorisé par les
utilisateurs.
[0020] A titre d'exemple, la contrainte d'érosion maximale imposée par EDF, sur certaines
installations sensibles, est de 3 µm sur la durée de vie de l'installation, soit 20
ans, une décontamination étant prévue par arrêt de l'installation. Ainsi, en général,
l'érosion ne doit pas dépasser 0,3 µm par opération de décontamination.
[0021] Or, les procédés connus, en particulier ceux mettant en oeuvre des gels organiques,
conduisent à une érosion de 3 µm en moyenne par opération de décontamination, voire
de 10 à 15 µm sur les surfaces des pièces où le produit est susceptible de se déposer,
sous forme liquide après dégradation ou après rinçage (fond d'une piscine, canalisation,
etc.).
[0022] Une telle érosion n'est pas souhaitable. Elle n'est pas non plus utile. En effet,
le traitement de la décontamination fixée sur une pièce ne nécessite pas d'enlever
une couche de matériau comprenant la particule contaminée dans son intégralité ; il
suffit d'éroder la pièce sur une épaisseur suffisante pour que les particules contaminées,
par exemple incrustées dans les irrégularités de la surface, puissent être atteintes
par le produit de décontamination et détachées de la surface de la pièce.
[0023] Enfin, un troisième problème posé par les procédés de l'art antérieur est que ceux-ci
ne permettent pas de transformer la totalité du Cérium (IV) utilisé en Cérium (III).
Or, le Cérium (IV) est très réactif et difficile à traiter, il n'est donc pas souhaitable
que les effluents générés par la décontamination en contiennent.
[0024] L'invention a pour but de fournir un procédé permettant de traiter la contamination
fixée de façon plus efficace et moins contraignante que dans l'art antérieur, notamment
en utilisant un produit comportant du Cérium (IV) en phase mousse.
[0025] A cet effet, et selon un premier aspect, l'invention concerne un procédé de décontamination
d'une pièce présentant sur sa surface des particules contaminées, ledit procédé comprenant
les étapes successives consistant à :
- prévoir une solution aqueuse acide de Cérium (IV), de pH inférieur à 3, dénommée première
solution ;
- prévoir une solution aqueuse comportant au moins un tensioactif non ionique oxydable
par le Cérium (IV), dénommée deuxième solution, ladite deuxième solution étant conditionnée
séparément de la première solution ;
- alimenter un dispositif de génération de mousse avec un mélange de la première et
de la deuxième solutions, dans des proportions aptes à permettre la formation d'une
mousse à partir du mélange par l'action du tensioactif ;
- former un flux de mousse pour l'application de ladite mousse sur la pièce.
[0026] La première solution - comprenant le Cérium (IV) - et la deuxième solution - comprenant
le(s) tensioactif(s), formant agent(s) moussant(s) - sont conditionnées séparément,
par exemple dans deux récipients distincts, et ne sont mélangées qu'au moment de leur
utilisation (éventuellement avec de l'eau).
[0027] De ce fait, le Cérium (IV) n'a pas le temps d'oxyder une grande quantité de tensioactif,
et l'on peut former une mousse présentant les qualités requises (stabilité, taille
des bulles, qualité d'accrochage sur les parois, sur les plafonds, etc.).
[0028] Pour obtenir des résultats satisfaisants, il est préférable de respecter les contraintes
suivantes :
- d'une part, la génération de la mousse doit être effectuée très peu de temps après
que les deux solutions sont mélangées, ou simultanément. Par exemple, les deux solutions
sont mélangées, puis le mélange est immédiatement introduit dans le générateur de
mousse. Selon une autre réalisation possible, les deux solutions arrivent séparément
dans le dispositif de génération de mousse et sont mélangées dans ledit dispositif,
pour former la mousse ;
- d'autre part, l'application de la mousse sur la pièce doit être effectuée rapidement
après que la mousse a été formée.
[0029] Par exemple, l'alimentation du dispositif de génération de mousse, la formation de
mousse et l'application sur la pièce de la mousse formée sont des étapes successives
effectuées en continu.
[0030] L'invention permet ainsi d'obtenir, à partir d'un produit de décontamination comprenant
du Cérium (IV), une mousse stable pendant une durée suffisante pour permettre l'application
de cette mousse sur la pièce à traiter.
[0031] Un autre avantage de l'invention est de permettre de diminuer l'érosion de la pièce
traitée.
[0032] En effet, une fois la mousse formée, le tensioactif continue à réagir avec le Cérium
(IV), diminuant ainsi la quantité de Cérium (IV) disponible pour l'attaque de la pièce
sur laquelle la mousse est appliquée.
[0033] Ainsi, le procédé permet de réaliser une attaque contrôlée du matériau constitutif
de la pièce à décontaminer, inférieure à la limite fixée par l'utilisateur (par exemple
0,05 à 0,5 µm). Cette valeur limite suffit pour permettre d'atteindre les particules
contaminées incrustées dans les irrégularités de surface de la pièce, de façon à assurer
le passage desdites particules vers le produit de décontamination. Le procédé selon
l'invention permet ainsi de diminuer l'érosion des pièces traitées sans pour autant
altérer la qualité de la décontamination.
[0034] Selon d'autres caractéristiques, la masse de Cérium (IV) dans le mélange est comprise
entre 0,5 et 5 fois la masse du ou des tensioactifs.
[0035] Les proportions de la première et de la deuxième solutions sont choisies, en fonction
de la concentration en Cérium (IV), du tensioactif utilisé, du degré de contamination
de la pièce et du degré de décontamination souhaité, de sorte que la concentration
en tensioactif dans le mélange :
- soit la plus faible possible ;
- tout en étant suffisamment importante pour permettre :
- de faire mousser le mélange avant son application sur la surface ;
- et de réduire sensiblement tout le Cérium (IV) excédentaire, restant dans le mélange
après la décontamination.
[0036] Après la décontamination, le Cérium (IV) n'ayant pas été consommé pour la décontamination
et le tensioactif réagissent. La première conséquence est que la concentration en
Cérium (IV) dans les effluents est extrêmement réduite (le tensioactif étant en excès),
conformément à ce qui est généralement souhaité par les utilisateurs.
[0037] La deuxième conséquence est que la concentration en tensioactif dans les effluents
est relativement faible (le tensioactif étant présent en quantité la plus faible possible
dans le mélange alimentant le dispositif de génération de mousse). De ce fait, les
effluents moussent peu, et peuvent ainsi être facilement retraités dans un évaporateur.
[0038] La première solution peut comporter :
- entre 5 et 20 % en masse d'acide nitrique ;
- entre 10 et 20 % en masse de Cérium nitrate ammonium Ce(NO3)4(NH4NO3)2;
- de l'eau.
[0039] La deuxième solution peut comporter :
- entre 1 et 25 % en masse d'un premier tensioactif non ionique dont le HLB (balance
hydrophile - lipophile), mesuré à température ambiante en milieu aqueux, est compris
entre 14 et 16 ;
- entre 1 et 20 % en masse d'un deuxième tensioactif non ionique dont le HLB, mesuré
à température ambiante en milieu aqueux, est compris entre 12 et 14;
- de l'eau.
[0040] Le HLB (balance hydrophile - lipophile) est une caractéristique des tensioactifs
étroitement liée à la structure de leur molécule, définie par la formule suivante
:

où H est la masse molaire totale de la partie hydrophile du tensioactif et L est
la masse molaire totale de la partie hydrophobe du tensioactif.
[0041] Le HLB d'un tensioactif est d'autant plus élevé que ce tensioactif est hydrophile,
la limite entre le caractère hydrophile et le caractère hydrophobe se situant aux
environ de HLB = 7.
[0042] La deuxième solution peut en outre comporter entre 1 et 15 % d'un troisième tensioactif
non ionique dont le HLB, mesuré à température ambiante en milieu aqueux, est compris
entre 13 et 15.
[0043] Selon une réalisation possible, le premier tensioactif est un polyglucoside dont
la chaîne alkyle comporte entre 6 et 10 atomes de carbone. Le deuxième tensioactif
est par exemple un alcool gras éthoxylé, comportant entre 8 et 12 atomes de carbone
et entre 5 et 9 groupements oxydes d'éthylène en moyenne.
[0044] Le troisième tensioactif peut être un polyglucoside dont la chaîne alkyle comporte
entre 8 et 12 atomes de carbone, ledit troisième tensioactif étant différent du premier
tensioactif.
[0045] La deuxième solution peut comporter :
- entre 15 et 20 % en masse d'un polyglucoside dont la chaîne alkyle comporte 8 atomes
de carbone, en tant que premier tensioactif ;
- entre 5 et 10 % en masse d'un alcool gras éthoxylé comportant 10 atomes de carbone
et 7 groupements oxydes d'éthylène en moyenne, en tant que deuxième tensioactif ;
- entre 1 et 5 % en masse d'un polyglucoside dont la chaîne alkyle comporte 10 atomes
de carbone, en tant que troisième tensioactif ;
- le complément en eau.
[0046] Le mélange avec lequel le dispositif de génération de mousse est alimenté peut comprendre
:
- entre 25 et 35 % en masse de la première solution, entre 3 et 7 % en masse de la deuxième
solution, et le complément en eau, ou
- entre 40 et 60 % en masse de la première solution, entre 3 et 7 % en masse de la deuxième
solution, et le complément en eau.
[0047] Le dispositif de génération de mousse peut comporter d'une part une buse d'introduction
de liquide et d'autre part un étage Venturi comportant un convergent coaxial à ladite
buse, une entrée de gaz débouchant dans le convergent, et un divergent communiquant
avec une chambre de mélange, la géométrie du dispositif étant définie pour créer un
phénomène de cavitation en sortie de l'étage Venturi. On introduit la première et
la deuxième solutions sous forme liquide par la buse vers l'étage Venturi, entraînant
l'aspiration du gaz par effet Venturi et la formation de mousse dans le divergent
et la chambre de mélange.
[0048] Selon l'invention, après avoir appliqué la mousse sur la pièce, on rince ladite pièce
avec de l'eau.
[0049] Enfin, selon un deuxième aspect, l'invention concerne un produit de décontamination
destiné à être utilisé pour la mise en oeuvre du procédé tel que précédemment décrit,
ledit produit de décontamination comprenant :
- une solution aqueuse acide de Cérium (IV), de pH inférieur à 3 ;
- une solution aqueuse comportant au moins un tensioactif non ionique oxydable par le
Cérium (IV) ;
lesdites solutions étant conditionnées séparément.
[0050] On décrit à présent un mode de réalisation particulier de l'invention.
[0051] Le procédé de décontamination selon l'invention consiste à appliquer sur une pièce,
sous forme de mousse, un produit comprenant deux solutions de décontamination.
[0052] Dans un premier temps, on décrit la première et la deuxième solutions de décontamination.
[0053] La première solution de décontamination est une solution aqueuse acide, comprenant
:
- un composé comportant du Cérium (IV). Il peut s'agir par exemple du Ce(NO3)4(NH4NO3)2 (Cérium nitrate ammonium, ou cérate d'hexanitrato ammonium), du Ce(NO3)4, du Ce(SO4)6, ou de tout autre composé ;
- de l'acide nitrique ;
- de l'eau, par exemple de l'eau déminéralisée.
[0054] Un exemple particulier de la première solution de décontamination est donné dans
le tableau ci-après.
| composant |
% massique |
fournisseur |
| acide nitrique (concentration : 52,5 %) |
20 |
LAFORGE |
| Cérium nitrate ammonium |
14 |
RHONE POULENC |
| eau |
66 |
|
[0055] Le procédé de fabrication de la première solution est maintenant décrit.
[0056] Tout d'abord, on verse dans une cuve les trois quarts de l'eau déminéralisée, à température
ambiante. On ajoute ensuite la totalité de l'acide nitrique.
[0057] Après une agitation de 5 minutes environ, on ajoute lentement la totalité du Cérium
(IV), par exemple sous la forme de Cérium nitrate ammonium, puis on agite pendant
10 minutes environ. On rince alors les récipients ayant contenu l'acide nitrique et
le Cérium nitrate ammonium avec le reste d'eau déminéralisée, le liquide obtenu étant
ensuite versé dans la cuve.
[0058] Après une agitation de 5 minutes environ, la première solution est obtenue. Celle-ci
est placée dans un premier récipient, de préférence opaque.
[0059] En effet, l'un des inconvénients des sels cériques est leur décomposition photochimique
lente, mais non négligeable, par leur réaction avec l'eau, selon la réaction suivante
:

[0060] Lorsque les solutions sont exposées à un rayonnement UV, la réduction du Ce
4+ en Ce
3+ est encore plus rapide. A titre d'exemple, on note une perte d'environ 40% en ions
Ce
4+ en 24 heures pour une solution 1M en acide nitrique et 35 mM en Cérium (IV).
[0061] Le conditionnement de la première solution en récipients opaques permet donc de limiter
la transformation des ions Ce
4+ en ions Ce
3+, et ainsi d'assurer que la première solution présente une efficacité de décontamination
satisfaisante.
[0062] La première solution comprenant une quantité importante d'eau, la concentration en
matières organiques et/ou minérales dans ladite première solution est largement inférieure
à 35 %, comme indiqué ci-après :
- matières organiques dans le produit frais : 0 % en masse
- matières minérales dans le produit frais : 24,5 % en masse
- eau dans le produit frais : 75,5 % en masse.
[0063] La concentration en acide nitrique dans le produit frais est de 10,5% en poids.
[0064] Par « produit frais », on entend la solution fabriquée selon le procédé décrit ci-dessus,
par exemple conditionnée en bidons, et prête à être utilisée (diluée, chauffée, mise
en pression pour la formation d'une mousse, etc.) pour la décontamination d'une pièce.
[0065] Les propriétés physico-chimiques de cette solution sont les suivantes :
- état physique à 20°C liquide
- couleur orange - orange foncé
- odeur acide très piquante
- solubilité dans l'eau à 20°C très soluble
- pH (10% dans l'eau à 20°C) entre 0,5 et 1,5
- pression de vapeur à 20°C similaire à celle de l'eau
- masse volumique à 20°C entre 1,10 et 1,20 g/cm3
[0066] Cette première solution peut être utilisée seule, en phase liquide, pour le traitement
de la décontamination fixée et non fixée.
[0067] Notamment, on peut frotter une pièce présentant sur sa surface des particules contaminées
avec un support en matériau textile (par exemple un chiffon en coton) ou cellulosique
imbibé de cette première solution. On peut alors ajouter sur ledit support, en plus
de la première solution : de l'acide nitrique, de la soude, un solvant et/ou de l'eau
savonneuse.
[0068] La deuxième solution est une formulation aqueuse d'agents de surface biodégradables,
à pH neutre.
[0069] Il est à noter que la deuxième solution peut également être utilisée seule, pour
le traitement de la contamination non fixée, sur tous les matériaux (compte tenu de
son pH neutre).
[0070] La deuxième solution comporte trois tensioactifs non ioniques :
- un polyglucoside, dérivé du sucre, dont la chaîne alkyle comporte 8 atomes de carbone
;
Ce premier tensioactif présente un HLB voisin de 15,8 et permet ainsi la formation
de mousses possédant une stabilité et une persistance importantes. Ces mousses peuvent
ainsi être générées à distance de la pièce à décontaminer et être transportées vers
cette pièce, sans subir de dégradation de leurs qualités, notamment dans le temps.
- un alcool gras éthoxylé, comportant 10 atomes de carbone et 7 groupements oxydes d'éthylène
en moyenne.
Ce deuxième tensioactif présente un HLB voisin de 13,5, ce qui le rend très adsorbant
sur la surface des particules contaminées, permettant ainsi de déplacer facilement
les particules radioactives depuis la surface de la pièce à décontaminer vers la solution
(pouvoir mouillant important vis à vis des particules contaminées). Ce deuxième tensioactif,
agissant en synergie avec le premier tensioactif lorsqu'ils sont associés, contribue
à l'efficacité de l'opération de décontamination de la pièce.
- un polyglucoside, dérivé du sucre, dont la chaîne alkyle comporte 10 atomes de carbone.
Ce troisième tensioactif permet d'obtenir une meilleure adsorption de la solution
sur la surface des particules contaminées et un meilleur contrôle de la stabilité
de la mousse.
[0071] La solution comporte également de l'eau, par exemple de l'eau déminéralisée.
Un exemple particulier de solution est donné dans le tableau ci-après.
| composant |
% massique |
dénomination commerciale du composant |
fournisseur |
| polyglucoside (8 atomes de carbone) |
18 |
SIMULSOL SL8 |
SEPPIC |
| alcool gras éthoxylé (10 atomes de carbone, 7 groupements oxydes d'éthylène) |
7,2 |
SYNPERONIC 10/7 |
ICI |
| polyglucoside (10 atomes de carbone) |
3 |
SIMULSOL SL10 |
SEPPIC |
| eau |
71,8 |
|
|
[0072] Selon un mode de réalisation possible, la deuxième solution peut également comporter
du dipropylène glycol (entre 1 et 15 % en masse). Ce composant, miscible dans l'eau,
permet de solubiliser les corps gras (graisse, huile présentes à la surface de la
pièce à décontaminer), à l'intérieur des micelles formées par les tensioactifs. La
deuxième solution de décontamination est alors apte à traiter la contamination en
présence de corps gras.
[0073] Le procédé de fabrication de la deuxième solution est maintenant décrit.
[0074] Tout d'abord, on prépare le polyglucoside à 10 atomes de carbone. Si le produit est
pâteux on verse les trois quarts de l'eau déminéralisée à 30°C environ. Si le produit
est liquide, on verse les trois quarts de l'eau déminéralisée à température ambiante.
[0075] On verse dans une cuve le polyglucoside à 10 atomes de carbone ainsi préparé, puis
on agite pendant 10 minutes environ, voire 20 minutes, jusqu'à ce que la dissolution
soit complète. La solution obtenue est alors translucide à jaune clair.
[0076] On ajoute alors la totalité du polyglucoside à 8 atomes de carbone, puis l'on agite
pendant 10 minutes environ. On ajoute ensuite la totalité de l'alcool gras éthoxylé,
et l'on agite à nouveau, pendant 5 minutes environ.
[0077] Enfin, les différents récipients contenant les composants sont rincés avec le reste
d'eau déminéralisée, le liquide obtenu étant ensuite versé dans la cuve. Après une
agitation de 5 minutes environ, la deuxième solution est obtenue.
[0078] La deuxième solution comprenant une quantité importante d'eau, la concentration en
matières organiques et/ou minérales dans ladite solution est largement inférieure
à 35 %, comme indiqué ci-après :
- matières organiques dans le produit frais : 19 % en masse
- matières minérales dans le produit frais : 0 % en masse
- eau dans le produit frais : 81 % en masse.
[0079] Les propriétés physico-chimiques de cette deuxième solution sont les suivantes :
- état physique à 20°C liquide
- couleur translucide
- odeur légère
- solubilité dans l'eau à 20°C très soluble
- pH (10% dans l'eau à 20°C) entre 6 et 7
- pression de vapeur à 20°C similaire à celle de l'eau
- masse volumique à 20°C entre 1,025 et 1,035 g/cm3
[0080] Les première et deuxième solutions sont biodégradables et conformes aux exigences
relatives aux produits utilisés en centrales.
[0081] De plus, les solutions sont optimisées de sorte que la concentration en matière organique
et minérale soit la plus faible possible, et inférieure à 5 %, voire à 2 %, dans les
effluents, afin de réduire le coût et de faciliter le traitement de ces effluents.
[0082] Les première et deuxième solutions sont destinées à être mélangées et mises en contact
avec une pièce présentant sur sa surface des particules contaminées, pour permettre
la décontamination de ladite pièce en assurant le passage des particules contaminées
de la surface de la pièce vers le mélange des solutions.
[0083] L'invention consiste en l'application sur la pièce à décontaminer d'un mélange de
la première et de la deuxième solutions sous forme de mousse.
[0084] Il est à noter, toutefois, que chacune des deux solutions peut être appliquée seule
sur la pièce par pulvérisation en phase liquide. L'on peut également plonger la pièce
dans la première ou la deuxième solution liquide.
[0085] Le procédé de décontamination selon l'invention est maintenant décrit.
[0086] Un premier récipient, contenant la première solution de décontamination, et un deuxième
récipient, contenant la deuxième solution de décontamination, sont reliés, séparément,
à l'entrée d'un dispositif de génération de mousse, par exemple au moyen de conduites
et de pompes de dosage.
[0087] Un troisième récipient, comprenant de l'eau, par exemple de l'eau déminéralisée,
est également relié à l'entrée du dispositif de génération de mousse.
[0088] Le dispositif de génération de mousse comporte d'une part une buse d'introduction
de liquide et d'autre part un étage Venturi comportant un convergent coaxial à ladite
buse, une entrée de gaz débouchant dans le convergent, et un divergent communiquant
avec une chambre de mélange. La géométrie du dispositif est définie pour créer un
phénomène de cavitation en sortie de l'étage Venturi.
[0089] La première solution, la deuxième solution et l'eau sont amenées séparément, dans
les proportions souhaitées, vers le dispositif de génération de mousse. Le mélange
obtenu est immédiatement introduit dans la buse et le convergent de l'étage Venturi.
[0090] Selon une première variante, le mélange comprend 30 % de la première solution, 5
% la deuxième solution et le complément en eau (cycle normal).
[0091] Selon une deuxième variante, le mélange comprend 50 % de la première solution, 5
% de la deuxième solution et le complément en eau (cycle poussé).
[0092] Les proportions des première et deuxième solutions dans le mélange sont choisies
notamment en fonction du matériau constitutif de la pièce à décontaminer, du degré
de contamination, et du degré de décontamination souhaité.
| Mélange |
% matières organiques dans le produit frais |
% matières minérales dans le produit frais |
% d'eau dans le produit frais |
| cycle normal : |
|
|
|
| - première solution : 30% |
2,7 |
21 |
76,3 |
| - deuxième solution : 5% |
|
|
|
| cycle poussé : |
|
|
|
| - première solution : 50% |
1,7 |
22,3 |
76 |
| - deuxième solution : 5% |
|
|
|
[0093] Le tableau ci-dessus indique les concentrations en matières organiques et/ou minérales
dans le mélange, qui sont inférieures à 35 %.
[0094] L'introduction du mélange liquide dans le convergent entraîne l'aspiration de gaz,
par exemple d'air, par effet Venturi. Le mélange première et deuxième solutions -
eau - air est alors déplacé vers le divergent et la chambre de mélange, et forme une
mousse. La formation de mousse est possible dans la mesure où le tensioactif, conditionné
séparément du Cérium (IV), n'a pu être oxydé par ce dernier pendant la durée limitée
où ces deux composants ont été mélangés.
[0095] La mousse est ensuite transportée, via des flexibles, depuis le dispositif de génération
de cette mousse jusqu'à la pièce à décontaminer, puis projetée, sans attendre, sur
ladite pièce à l'aide d'outillages spécifiques.
[0096] Au cours de la décontamination, le Cérium (IV) est réduit en Cérium (III). Les sels
de Cérium (IV) sont colorés (le cérium nitrate ammonium est orange, mais d'autres
composés peuvent avoir une couleur jaune clair ou jaune), tandis que le Cérium (III)
est incolore et peu acide. Ainsi, la transformation du Cérium (IV) en Cérium (III)
peut être observée très facilement par le changement de couleur.
[0097] Le Cérium (IV) est également réduit en Cérium (III) par l'action du tensioactif.
Ainsi, la quantité de Cérium (IV) est diminuée, et l'érosion de la pièce traitée moindre.
[0098] Une ou plusieurs applications de mousse peuvent s'avérer nécessaires en fonction
du degré de décontamination de la pièce prédéterminé par l'utilisateur. Enfin, après
action de la mousse, on procède à un rinçage à l'eau, qui permet d'évacuer les particules
contaminées avec la solution de décontamination.
[0099] Les effluents générés par cette solution peuvent être traités sur les installations
classiques en milieu nucléaire après une simple neutralisation avec un réactif alcalin
pour obtenir un pH neutre.
[0100] Comme indiqué précédemment, la concentration en matière organique et minérale dans
les effluents est inférieure à 5 %, voire à 2 %. Selon la décontamination effectuée
(cycle normal ou poussé), les effluents peuvent contenir de 95 à 98 % d'eau.
[0101] La qualité de la mousse obtenue à partir du mélange permet de générer la mousse à
distance de la pièce, de la transporter sur plusieurs dizaines de mètres et de la
projeter efficacement contre la pièce sans que la mousse ne soit dégradée, en termes
de composition, taille des bulles, etc., pour peu que la mousse soit générée et utilisée
très rapidement une fois que les deux solutions ont été mélangées. Un opérateur peut
donc travailler à distance de la pièce contaminée, ce qui réduit considérablement
la dose de radioactivité qu'il reçoit lors de cette décontamination.
[0102] Ainsi, le procédé et le produit selon l'invention sont aptes à respecter les nouvelles
contraintes imposées dans le domaine de la décontamination radioactive (qualité de
la mousse permettant d'obtenir un niveau de décontamination élevé, réduction de la
dose de radioactivité reçue par l'opérateur lors des opérations de décontamination...).
1. Procédé de décontamination d'une pièce présentant sur sa surface des particules contaminées,
ledit procédé comprenant les étapes successives consistant à :
- prévoir une solution aqueuse acide de Cérium (IV), de pH inférieur à 3, dénommée
première solution ;
- prévoir une solution aqueuse comportant au moins un tensioactif non ionique oxydable
par le Cérium (IV), dénommée deuxième solution, ladite deuxième solution étant conditionnée
séparément de la première solution ;
- alimenter un dispositif de génération de mousse avec un mélange de la première et
de la deuxième solutions, dans des proportions aptes à permettre la formation d'une
mousse à partir du mélange par l'action du tensioactif ;
- former un flux de mousse pour l'application de ladite mousse sur la pièce.
2. Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que la masse de Cérium (IV) dans le mélange est comprise entre 0,5 et 5 fois la masse
du ou des tensioactifs.
3. Procédé selon la revendication 1 ou 2,
caractérisé en ce que la première solution comporte :
- entre 5 et 20 % en masse d'acide nitrique ;
- entre 10 et 20 % en masse de Cérium nitrate ammonium Ce(NO3)4(NH4NO3)2 ;
- de l'eau.
4. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 3,
caractérisé en ce que la deuxième solution comporte :
- entre 1 et 25 % en masse d'un premier tensioactif non ionique dont le HLB (balance
hydrophile - lipophile), mesuré à température ambiante en milieu aqueux, est compris
entre 14 et 16 ;
- entre 1 et 20 % en masse d'un deuxième tensioactif non ionique dont le HLB, mesuré
à température ambiante en milieu aqueux, est compris entre 12 et 14 ;
- de l'eau.
5. Procédé selon la revendication 4, caractérisé en ce que la deuxième solution comporte entre 1 et 15 % d'un troisième tensioactif non ionique
dont le HLB, mesuré à température ambiante en milieu aqueux, est compris entre 13
et 15.
6. Procédé selon la revendication 4 ou 5, caractérisé en ce que le premier tensioactif est un polyglucoside dont la chaîne alkyle comporte entre
6 et 10 atomes de carbone.
7. Procédé selon l'une quelconque des revendications 4 à 6, caractérisé en ce que le deuxième tensioactif est un alcool gras éthoxylé, comportant entre 8 et 12 atomes
de carbone et entre 5 et 9 groupements oxydes d'éthylène en moyenne.
8. Procédé selon l'une quelconque des revendications 5 à 7, caractérisé en ce que le troisième tensioactif est un polyglucoside dont la chaîne alkyle comporte entre
8 et 12 atomes de carbone, ledit troisième tensioactif étant différent du premier
tensioactif.
9. Procédé selon l'une quelconque des revendications 5 à 8,
caractérisé en ce que la deuxième solution comporte :
- entre 15 et 20 % en masse d'un polyglucoside dont la chaîne alkyle comporte 8 atomes
de carbone, en tant que premier tensioactif ;
- entre 5 et 10 % en masse d'un alcool gras éthoxylé comportant 10 atomes de carbone
et 7 groupements oxydes d'éthylène en moyenne, en tant que deuxième tensioactif ;
- entre 1 et 5 % en masse d'un polyglucoside dont la chaîne alkyle comporte 10 atomes
de carbone, en tant que troisième tensioactif ;
- le complément en eau.
10. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 9, caractérisé en ce que le mélange avec lequel le dispositif de génération de mousse est alimenté comprend
entre 25 et 35 % en masse de la première solution, entre 3 et 7 % en masse de la deuxième
solution, et le complément en eau.
11. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 9, caractérisé en ce que le mélange avec lequel le dispositif de génération de mousse est alimenté comprend
entre 40 et 60 % en masse de la première solution, entre 3 et 7 % en masse de la deuxième
solution, et le complément en eau.
12. Procédé selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisé en ce que le dispositif de génération de mousse comporte d'une part une buse d'introduction
de liquide et d'autre part un étage Venturi comportant un convergent coaxial à ladite
buse, une entrée de gaz débouchant dans le convergent, et un divergent communiquant
avec une chambre de mélange, la géométrie du dispositif étant définie pour créer un
phénomène de cavitation en sortie de l'étage Venturi, et en ce qu'on introduit la première et la deuxième solutions sous forme liquide par la buse vers
l'étage Venturi, entraînant l'aspiration du gaz par effet Venturi et la formation
de mousse dans le divergent et la chambre de mélange.
13. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 12, caractérisé en ce que, après avoir appliqué la mousse sur la pièce, on rince ladite pièce avec de l'eau.
14. Produit de décontamination destiné à être utilisé pour la mise en oeuvre du procédé
selon l'une quelconque des revendications précédentes, ledit produit de décontamination
comprenant :
- une solution aqueuse acide de Cérium (IV), de pH inférieur à 3 ;
- une solution aqueuse comportant au moins un tensioactif non ionique oxydable par
le Cérium (IV) ;
lesdites solutions étant conditionnées séparément.