[0001] La présente invention concerne le domaine de l'exploration et l'exploitation de gisements
pétroliers. Plus particulièrement l'invention concerne l'évaluation de tels gisements,
par l'étude et l'optimisation de schémas de production de tels gisements pétroliers.
[0002] Un schéma de production constitue une option de développement d'un gisement. Il regroupe
tous les paramètres nécessaires à la mise en production d'un gisement. Ces paramètres
peuvent être la position d'un puits, le niveau de complétion, la technique de forage...
[0003] L'étude d'un gisement comporte deux phases principales : une phase de caractérisation
du réservoir et une phase de prévision de production.
[0004] La phase de caractérisation du réservoir consiste à construire un modèle de réservoir.
Un modèle de réservoir est une maquette décrivant la structure spatiale du gisement,
sous forme d'une discrétisation de l'espace. Cette discrétisation se matérialise par
un ensemble de mailles. A chacune de ces mailles, on associe des valeurs de propriétés
caractérisant le gisement : porosité, perméabilité, lithologie, pression, nature des
fluides,... Les ingénieurs n'ont accès qu'à une infime partie du gisement qu'ils étudient
(mesures sur carottes, diagraphies, essais de puits, ...). Ils doivent extrapoler
ces données ponctuelles sur la totalité du champ pétrolier pour construire un modèle
de réservoir fiable. En conséquence, la notion d'incertitude doit être constamment
prise en compte.
[0005] Pour la phase de prévision de production à un instant donné, pour améliorer cette
production, ou, en général, pour augmenter le rendement économique du champ, le spécialiste
possède un outil, appelé « simulateur d'écoulement ». Un simulateur d'écoulement est
un logiciel permettant, entre autre, de modéliser la production d'un gisement en fonction
du temps, à partir de mesures décrivant le gisement, c'est-à-dire, à partir du modèle
de réservoir.
[0006] Un simulateur d'écoulement fonctionne en acceptant des paramètres en entrée, et en
résolvant des équations physiques de mécanique des fluides en milieu poreux, pour
délivrer des informations appelées réponses. L'ensemble des paramètres d'entrées est
contenu dans le modèle de réservoir. Les propriétés associées aux mailles de ce modèles
sont alors appelées paramètres. Ces paramètres sont notamment associés à la géologie
du gisement, aux propriétés pétro-physiques, au développement du gisement et aux options
numériques du simulateur. Les réponses (sorties) fournies par le simulateur sont,
par exemple, la production d'huile, d'eau ou de gaz du réservoir et de chaque puit
pour différents temps. Généralement, pour chacune des valeurs des différents paramètres
d'entrée, le simulateur d'écoulement renvoie une seule valeur pour chaque réponse
(sortie). Le simulateur d'écoulement est alors qualifié de déterministe.
[0007] Cependant, la majorité des paramètres d'entrée sont incertains. Ces incertitudes
se traduisent par le fait que l'on ne peut pas attribuer une valeur unique, dont est
sûr de la valeur, à un paramètre du modèle de réservoir. Par exemple, on ne peut pas
assurer que la porosité en un point du gisement est de 20%. On peut au mieux considérer
que la porosité est comprise entre 15% et 25% en ce point. Ceci est notamment dû au
fait que les paramètres d'entrée sont déterminés à l'aide d'un nombre de mesures et
informations limitées. Les réponses possibles du simulateur d'écoulement sont donc
multiples, compte tenu de l'incertitude inhérente au modèle de réservoir. Dans notre
exemple, il y aura une réponse du simulateur si la porosité est 15%, une réponse différente
si la porosité est 20,5%... Il est ainsi indispensable de pouvoir quantifier l'incertitude
sur les sorties du simulateur. De même, une correcte caractérisation de l'incertitude
des paramètres d'entrée est indispensable. Il est également important de déterminer
les paramètres d'entrée qui ont un effet significatif sur les réponses d'intérêts.
[0008] Le spécialiste de l'exploitation d'un gisement pétrolier doit donc intégrer ces notions
d'incertitudes dans l'évaluation d'un gisement, de façon à déterminer, par exemple,
des conditions optimales de production.
État de la technique
[0009] Afin de bien caractériser l'impact de chaque incertitude sur la production de pétrole,
de nombreux scénarios de production doivent être testés, et par conséquent, un nombre
important de simulations de réservoir est nécessaire.
[0010] Cependant, dans l'industrie pétrolière, pour être de plus en plus fiables et prédictifs,
la tendance est d'utiliser des simulateurs d'écoulements de plus en plus complexes,
qui demandent un modèle de réservoir de plus en plus détaillé (plusieurs millions
de mailles). Mais compte tenu du délai important requis pour effectuer une simulation
d'écoulement, il ne peut pas être envisagé de tester tous les scénarios possibles
via un simulateur d'écoulement.
[0011] Pour éviter de réaliser un grand nombre de simulations, on connaît une technique,
décrite dans le brevet
FR 2 874 706, et basée sur les plans d'expériences. Cette méthode permet de gérer des incertitudes
via la construction de modèles approchés, appelés « surfaces de réponses », obtenus
par exemple par krigeage. Ces surfaces fournissent des réponses approchées de celles
issues du simulateur d'écoulement.
[0012] Cependant, toute surface de réponse commet une erreur de prédiction plus ou moins
importante, selon la réponse qu'elle essaie d'approximer. En général, l'ajout d'information
(i.e. de simulations) permet la construction d'une surface de réponse de plus en plus
prédictive.
[0013] L'objet de l'invention est une méthode alternative, pour évaluer des schémas de production
de gisements souterrain, en estimant la production de tels gisements à l'aide d'un
modèle approché, et ajusté de façon itérative pour qu'il reproduise au mieux les réponses
du simulateur, tout en maîtrisant le nombre de simulations nécessaires à sa construction.
La méthode selon l'invention
[0014] L'invention concerne une méthode pour évaluer un schéma de production d'un gisement
souterrain. Selon la méthode, on sélectionne des propriétés physiques caractérisant
ledit gisement et ledit schéma de production. Ces propriétés constituent des paramètres
d'entrée d'un simulateur d'écoulement permettant de simuler des réponses du gisement,
telles que la production. On construit un modèle analytique approché permettant de
prédire lesdites réponses du gisement. La méthode comporte également les étapes suivantes
:
- on ajuste ledit modèle analytique approché à l'aide d'un processus itératif comportant
les étapes suivantes :
- a)- on définit, pour chacune desdites réponses, un degré de précision Dp que l'on souhaite obtenir, ledit degré de précision Dp mesurant l'écart entre les réponses prédites par le modèle et celles simulées par
le simulateur ;
- b)- on calcule un degré de précision Dp(M) des prédictions du modèle analytique approché ;
- c)- si cette valeur Dp(M) est inférieure au degré de prédiction souhaité Dp, le processus itératif s'arrête, sinon on poursuit par les étapes suivantes :
- d)- on construit un plan d'expériences de façon à sélectionner des simulations à réaliser,
pertinentes pour ajuster ledit modèle ;
- e)- on réalise les simulations sélectionnées par le plan d'expérience à l'aide du
simulateur d'écoulement, puis, pour chacune des réponses simulées par le simulateur,
on ajuste ledit modèle analytique à l'aide d'une méthode d'approximation, de façon
à ajuster les réponses prédites par le modèle à celles simulées par le simulateur
;
- f)- on recommence à l'étape b), jusqu'à ce que le degré de précision souhaité Dp soit atteint ; et
- on évalue ledit schéma de production, en analysant lesdites réponses dudit gisement
prédites par ledit modèle analytique approché.
[0015] Selon l'invention, on peut modifier le degré de précision souhaité
Dp à chacune des itérations. Les paramètres d'entrée peuvent être incertains, c'est-à-dire
que les valeurs de ces paramètres d'entrée sont incertaines.
[0016] Les réponses du gisement, prédites par le modèle analytique approché, peuvent être
analysées en quantifiant une influence de chacun des paramètres d'entrée sur chacune
des réponses, à l'aide d'une analyse de sensibilité globale, dans laquelle on calcule
des indices de sensibilité en utilisant le modèle analytique. A l'aide de cette analyse
de sensibilité globale, on peut les paramètres les plus influents sur les réponses
du gisement, et définir ainsi des mesures à réaliser pour faire décroître une incertitude
sur les réponses du gisement.
[0017] Selon l'invention, si les paramètres d'entrée comportent au moins un champ stochastique,
on peut décomposer ce champ stochastique en un nombre
n de composantes via une décomposition de Karhunen-Loeve. On sélectionne alors les
composantes du champ stochastique ayant un impact sur les réponses à l'aide de l'analyse
de sensibilité globale.
[0018] D'autres caractéristiques et avantages de la méthode selon l'invention, apparaîtront
à la lecture de la description ci-après d'exemples non limitatifs de réalisations,
en se référant aux figures annexées et décrites ci-après.
Présentation succincte des figures
[0019]
- la figure 1 représente un canevas de la méthode de gestion des incertitudes selon
l'invention.
- la figure 2 montre un exemple d'évolution de l'erreur de prédiction estimée (en %)
par une surface de réponse (modèle approché).
Description détaillée de la méthode
[0020] La méthode selon l'invention permet d'optimiser le schéma de production d'un gisement
pétrolier. La méthode est schématisée par le diagramme de la figure 1. Après avoir
choisi un simulateur d'écoulement, la méthode comporte les étapes suivantes :
- 1- Sélection et caractérisation des incertitudes des paramètres d'entrée du simulateur
- 2- Construction d'un modèle analytique approché du simulateur
- 3- Ajustement du modèle analytique approché
- 4- Optimisation du schéma de production du gisement.
Étape 1 : Sélection et caractérisation des incertitudes des paramètres d'entrée du
simulateur
[0021] Tout simulateur d'écoulement permet notamment de calculer la production d'hydrocarbures
ou d'eau en fonction du temps, à partir de paramètres physiques caractéristiques du
gisement pétrolier, tels que le nombre de couches du réservoir, la perméabilité des
couches, la force de l'aquifère, la position des puits de pétrole, etc.
[0022] Ces paramètres physiques constituent les entrées du simulateur d'écoulement. Elles
sont obtenues par des mesures effectuées en laboratoire sur des carottes et des fluides
prélevés sur le gisement pétrolier, par diagraphies (mesures réalisées le long d'un
puits), par essais de puits, etc.
[0023] Parmi les paramètres physiques caractéristiques du gisement pétrolier, on sélectionne
de préférence des paramètres d'entrée ayant une influence sur les profils de production
d'hydrocarbures ou d'eau par le gisement. La sélection des paramètres peut se faire
soit par rapport à la connaissance physique du gisement pétrolier, soit par une étude
de sensibilité. Par exemple, on peut mettre en oeuvre un test statistique de Student
ou de Fischer.
[0024] Des paramètres peuvent être intrinsèques au réservoir pétrolier. Par exemple, on
peut considérer les paramètres suivants : perméabilité de certaines couches du réservoir,
force de l'aquifère, saturation d'huile résiduelle après balayage à l'eau...
[0025] Des paramètres peuvent correspondre à des options de développement du gisement. Ces
paramètres peuvent être la position d'un puits, le niveau de complétion, la technique
de forage.
[0026] Après sélection de ces paramètres d'entrée, on caractérise les incertitudes associées
à ces paramètres. On peut par exemple remplacer une valeur d'un paramètre par un intervalle
de variation de ce paramètre.
Étape 2 : Construction d'un modèle analytique approché du simulateur
[0027] Le simulateur d'écoulement étant un outil complexe et gourmand en temps de calcul,
on ne peut pas l'utiliser pour tester tous les scénarios en tenant compte de toutes
les incertitudes des paramètres. On construit alors un modèle analytique approché
du comportement du gisement pétrolier. Ce modèle approché est également appelé « surface
de réponse ». Il consiste en un ensemble de formules analytiques, chacune traduisant
le comportement d'une réponse donnée du simulateur d'écoulement. Ces formules analytiques
sont fonction d'un nombre réduit de paramètres, et elles sont construites à partir
d'un nombre limité de simulations.
[0028] Ce modèle approché traduit le comportement de réponses données, par exemple le cumulé
d'huile produit à 10 ans, en fonction de quelques paramètres d'entrée. Ainsi, pour
chaque réponse (sortie) du simulateur d'écoulement, nécessaire à l'optimisation de
la production ou l'évaluation du gisement, on associe une formule analytique permettant
d'approximer cette réponse à partir de paramètres d'entrée.
[0029] Pour construire ce modèle approché du simulateur d'écoulement, on combine deux techniques
: une méthode d'approximation et une méthode de plans d'expériences.
[0030] Les plans d'expériences permettent de déterminer le nombre et la localisation, dans
l'espace des paramètres d'entrée, d'un nombre réduit de simulations à réaliser pour
avoir le maximum d'informations pertinentes, au coût le plus faible possible.
[0032] Un plan indique différents jeux de valeurs pour les paramètres incertains. Chaque
jeu de valeurs des paramètres incertains est utilisé pour effectuer une simulation
d'écoulement. Dans l'espace des paramètres d'entrée, chaque simulation représente
un point. Chaque point correspond à des valeurs pour les paramètres incertains et
donc à un modèle de réservoir possible. Le choix de ces points, grâce aux plans d'expériences,
peut faire intervenir de nombreux types de critères, comme l'orthogonalité ou le remplissage
de l'espace (« space-filling »).
[0033] Pour cette étape "exploratoire", le choix des points de simulation peut être réalisé
grâce à différents types de plans d'expériences, par exemple, les plans factoriels,
les plans composites, les plans de distance maximum, etc. On peut également utiliser
un plan d'expérience de type Hypercube Latin Maximin ou Sobol LP-τ (
A. Saltelli, K. Chan and M. Scott: "Sensitivity Analysis", New York, Wiley, 2000).
[0034] Après la construction de ce plan d'expériences, et lorsque les simulations d'écoulement
sont réalisées, une méthode d'approximation est utilisée pour déterminer un modèle
approché. Ce modèle approche les réponses du simulateur d'écoulement. De façon très
simplifiée, on peut imaginer qu'en réalisant quatre simulations, on obtient quatre
couples (paramètre d'entrée, réponse). On estime alors une relation respectant au
mieux ces couples.
[0035] En pratique, les paramètres et les sorties étant multiples, on peut utiliser, comme
méthode d'approximation, des polynômes du premier ou du deuxième ordre, des réseaux
de neurones, des machines à support vectoriel ou éventuellement des polynômes d'ordre
supérieur à deux. De nombreuses autres techniques sont connues des spécialistes, telles
que les méthodes à base d'ondelettes, de SVM, de noyau hilbertien auto reproduisant,
ou encore la régression non-paramétrique basée sur un processus Gaussien ou krigeage
(
Kennedy M., O'Hagan A.: "Bayesian calibration of computer models (with discussion)".
J R. Statist. Soc. Ser. B Stat. Methodol. 68, 425-464, 2001). Le choix de la méthode dépend d'une part du nombre de simulations maximum envisageable
par l'utilisateur, et d'autre part, du plan d'expériences initial utilisé.
[0036] Ainsi, pour construire le modèle approché, on procède de la façon suivante :
- on construit un plan d'expériences de façon à sélectionner un nombre restreint de
simulations ;
- on réalise les simulations sélectionnées par le plan d'expérience à l'aide du simulateur
d'écoulement, à partir de paramètres d'entrée sélectionnés ;
- pour chacune des réponses du simulateur, on définit une formule analytique reliant
les paramètres d'entrée sélectionnés à la réponse (issue des simulations), à l'aide
d'une méthode d'approximation.
Étape 3- Ajustement du modèle analytique approché
[0037] Le modèle approché, ainsi déterminé, permet de prédire les sorties du simulateur
d'écoulement avec une certaine précision. Selon l'invention, la méthode comporte une
mesure de la précision de prédiction de ce modèle de façon à définir un critère d'évaluation
associé à la précision du modèle approché construit. La figure 2 illustre un exemple
d'évolution de l'erreur de prédiction estimée (
Err) par une surface de réponse (modèle approché), en fonction du nombre de simulations
(
Nsim) utilisées pour construire la surface de réponse. Dans cette exemple, la surface
de réponse approxime la sortie du simulateur d'écoulement correspondant au débit d'huile
du réservoir après 10 ans de production.
[0038] Ce critère permet à un utilisateur de décider de l'ajout éventuel de simulations
afin d'améliorer la fiabilité de prédiction du modèle.
[0039] Le degré de prédiction requis est obtenu de façon itérative. Cette étape se décompose
de la façon suivante :
- a)- on définit un degré de précision Dp de la prédiction du modèle approché que l'on souhaite obtenir pour chaque réponse
du simulateur que l'on veut analyser.
- b)- on estime le degré de prédiction Dp(M) du modèle analytique approché. Cette estimation peut se faire en utilisant des méthodes
de type validation croisée ou bootstrap.
- c)- Si cette valeur Dp(M) est inférieure au degré de prédiction souhaité Dp, le processus itératif automatique s'arrête, sinon on poursuit par les étapes suivantes
:
- d)- on sélectionne p nouvelles combinaisons de paramètres d'entrée dans l'espace des paramètres d'entrée,
au moyen d'une méthode adaptative. Une méthode adaptative consiste à ajouter de l'information
aux endroits où il en manque, et où le modèle approché n'est pas suffisamment prédictif.
De telles méthodes sont bien connues des spécialistes.
- e)- on réalise les p simulations correspondantes, et l'on modifie le modèle approché en conséquences.
- f)- puis l'on recommence à l'étape b), jusqu'à ce que le degré de précision soit atteint.
On peut également recommencer à l'étape a), de façon à définir un nouveau degrés de
précision.
On peut également arrêter "manuellement" le processus.
[0040] Le nombre
p de simulations réalisées à chaque itération peut être contrôlé par l'utilisateur,
en fonction du nombre de machines disponibles pour réaliser des simulations par exemple.
[0041] Le modèle approché ainsi obtenu permet de prédire les réponses quasi instantanément
(en temps de calcul), et permet donc de remplacer le simulateur d'écoulement coûteux
en temps de calcul. On peut donc tester un grand nombre de scénarios de production,
tout en tenant compte de l'incertitude de chaque paramètre d'entrée.
[0042] Les méthodes utilisées pour sélectionner de nouveaux points dans l'espace des paramètres
à l'étape d) peuvent être diverses. On peut par exemple se baser sur une méthode décrite
dans les documents suivants :
- Scheidt C., Zabalza-Mezghani I., Feraille M., Collombier D.: "Adaptive Evolutive Experimental
Designs for Uncertainty Assessment - An innovative exploitation of geostatistical
techniques", IAMG, Toronto, 21-26 August, Canada, 2005.
- Busby D., Farmer C.L., Iske A.: "Hierarchical Nonlinear Approximation for Experimental
Design and Statistical Data Fitting". SIAM J. Sci. Comput. 29, 1, 49-69, 2007
Dans Busby et al., on effectue d'abord une partition de l'espace en différentes zones
de taille équivalente (méthode connue des spécialistes sous le nom « adaptive gridding
»). Les nouveaux points sont ensuite ajoutés dans les zones où la prédiction du modèle
approché n'est pas bonne (i.e. au dessous du degré de précision
Dp fixé par l'utilisateur). La prédiction du modèle est calculée indépendamment dans
chaque zone. Cette erreur de prédiction est calculée en prenant la moyenne des erreurs
obtenue par validation croisée (« leave-one-out »).
[0043] L'ajout de simulations à l'étape e) est répété, automatiquement, jusqu'à satisfaire
un critère d'arrêt qui est lié au degré de prédiction souhaité par l'utilisateur,
défini à l'étape a), par exemple prédiction moyenne de 5% de la réponse étudiée. Un
exemple d'estimation de la prédiction est obtenu à partir de la moyenne des erreurs
de validation croisée dans chaque zone.
[0044] Les réponses d'intérêts choisies peuvent correspondre à des sorties directes du simulateur
d'écoulement ou à des combinaisons et interpolations de sorties. Par exemple ont peut
s'intéresser:
- uniquement à la production cumulée de l'huile (gaz, eau) du réservoir au temps final
de production,
- à la production cumulée de l'huile (gaz, eau) du réservoir pour différents temps,
- à l'ajout de la production d'huile et de la production d'eau,
- à la production d'huile pour des valeurs fixées de water cut (ou de production d'eau),
- à la durée du plateau du profil de production,...
[0045] De plus on peut facilement rajouter des incertitudes économiques et les combiner
aux incertitudes techniques pour définir des réponses associées à la valeur économique
du gisement comme par exemple la Valeur Actuelle Nette (VAN) et ne pas se limiter
à des réponses techniques (de production d'huile, de gaz, d'eau, ...). Une telle méthode
est décrite dans la demande
EP 1 484 704.
4- Optimisation du schéma de production et évaluation du gisement
[0046] Le principe d'optimisation du schéma de production consiste à définir différents
scénarios de production, et pour chacun d'eux, prédire la production. Cette technique
permet également, de la même façon, d'évaluer économiquement un gisement pétrolier.
[0047] Au cours de cette phase de prévision de production, le modèle approché est utilisé
parce qu'il est simple et analytique et, donc, chaque estimation obtenue par ce modèle
est immédiate. Cela constitue une économie de temps considérable. L'utilisation de
ce modèle autorise l'ingénieur réservoir à tester autant de scénarios qu'il le souhaite,
sans se soucier des délais nécessaires pour effectuer une simulation numérique d'écoulement,
et surtout cela lui permet de prendre en compte les incertitudes en testant différentes
valeurs de paramètres d'entrée.
[0048] Le modèle analytique approché est utilisé avec des techniques d'échantillonnage direct
de type Monte Carlo ou Quasi Monte Carlo (MCMC, Hypercube Latin, ...) pour pouvoir
propager les incertitudes des paramètres d'entrée sur la ou les réponses du simulateur
choisies.
[0049] On obtient ainsi les distributions de probabilité associées aux sorties du simulateur.
Ces distributions sont utiles pour pouvoir prendre des décisions sur l'exploitation
du gisement en question, compte tenu de la production ou valeur économique possible
et de l'incertitude associée.
[0050] Selon un mode de réalisation particulier, on utilise le modèle approché pour réaliser
une analyse de sensibilité globale, de façon à sélectionner les paramètres influant
la production du gisement, afin de réaliser les mesures nécessaires à une meilleure
évaluation du gisement.
[0051] Il est par exemple intéressant de savoir que l'activité de l'aquifère ou la perméabilité
d'une couche géologique particulière joue un rôle prépondérant sur les résultats de
production future du gisement.
[0053] Pour décrire la méthode, on considère un modèle mathématique décrit par une fonction
f(x), x = (
xl, ...,
xp), et défini dans espace à p dimensions Ω
p = {x|0 ≤
xi ≤ 1;
i = 1,...
p}.
[0054] L'idée principale de la décomposition de Sobol est de décomposer
f(xl,...,xp) de la façon suivante :

avec
f0 une constante, et

où 1 ≤
i1 < .... <
is ≤
p, s = 1,...,
p et 1 ≤
k ≤
s.
[0055] Selon cette définition, on peut écrire :

et si (
il,...,
is)≠(
j1,...,
jl), alors

[0056] Sobol a montré que la décomposition de
f(x1,...,xp) est unique et que tous les termes peuvent être évaluées via des intégrales multidimensionnelles
:

avec
dxi et
dxij le produit
dx1...dxp sans
dxi et
dxi dxj, respectivement.
La variance totale
V de
ƒ(x) peut alors s'écrire :

ou encore:

[0057] Puis, pour expliquer la part de la variance des réponses due aux paramètres d'entrées,
l'indice de sensibilité suivant peut être défini :

[0058] Si est appelé l'indice de sensibilité de première ordre pour le facteur
xi. Cet indice mesure la part de la variance de la réponse expliquée par l'effet de
xi.
[0059] Si,j, pour i ≠ j, est appelé l'indice de sensibilité de second ordre. Cet indice mesure
la part de la variance de la réponse due aux interactions entre les effets de
xi et
xj.
[0060] L'indice de sensibilité total,
STi pour un paramètre particulier
xi, défini comme la somme de tous les indices de sensibilité impliquant les paramètres,
peut également être très utile pour mesurer la part de la variance de la réponse expliquée
par tous les effets dans lesquels
xi joue un rôle.
[0061] 
où #i représente tous les termes
Sil,....is qui inclus l'indice i.
[0062] L'analyse de sensibilité globale permet d'expliquer la variabilité des réponses en
fonction des paramètres d'entrée, à travers la définition d'indices de sensibilité
total ou partiel. Ces indices peuvent être estimés par des techniques de Monte Carlo
ou Quasi Monte Carlo pour approximer les différentes intégrales multidimensionnelles,
nécessitant un large échantillonnage.
[0063] Ainsi, l'analyse de sensibilité globale ne peut pas être utilisée directement en
utilisant un simulateur d'écoulement. Selon l'invention, les calculs des indices de
sensibilité sont effectués en utilisant des modèles analytiques pour chaque réponses,
Ces modèles analytiques sont construits comme décrits précédemment.
[0064] L'Analyse de Sensibilité Globale (ASG) utilisée dans l'invention n'a pas les limitations
classiques liées aux hypothèses que peuvent avoir d'autres méthodes permettant les
calculs d'indices de sensibilité type Spearman, Pearson, SRC, indice de rang, ...
La seule hypothèse est le fait que les paramètres incertains sont indépendants, ce
qui élargi grandement l'utilisation de l'ASG utilisant la décomposition de Sobol.
Cette hypothèse est généralement respectée dans les problèmes d'ingénierie de réservoir,
puisque les liens entre paramètres sont connus a priori.
[0065] Au cours de cette analyse, on détermine la contribution de l'incertitude de chaque
paramètre à la variance totale de la (ou les) réponse(s). Le principe consiste à calculer
plusieurs indices de sensibilité (premier, deuxième, ... Nième ordre et indices totaux)
permettant de connaître l'influence précise de chaque paramètre ou groupe de paramètres
sur les réponses d'intérêt. Ces indices sont calculés par des formules nécessitant
le calcul d'intégrales multiples pouvant être réalisé de manière approximative par
des techniques de Monte Carlo ou Quasi Monte Carlo.
[0066] L'Analyse de Sensibilité Globale (ASG) des paramètres incertains sur les réponses
du simulateur permet également d'évaluer l'effet moyen d'un paramètre sur une réponse
donnée. Cet effet moyen peut être utilisé par exemple pour des paramètres contrôlables,
e.g. position d'un puit, débit d'injection etc... et constitue donc un outil simple
de comportement des paramètres.
[0067] L'utilisation du modèle approché afin de faire de l'ASG, permet de déterminer les
paramètres influents, et la façon dont ils sont influents. Il est ainsi possible de
connaître l'impact total d'un paramètre, ainsi que son impact combiné avec un ou plusieurs
autres paramètres sur la réponse en production ou économique du gisement. L'ASG permet
clairement une meilleure compréhension du comportement du gisement. De plus, la détermination
des effets moyens des paramètres est aussi un outil permettant caractériser l'influence
moyenne d'un paramètre, compte tenue de l'incertitude sur les autres paramètres sur
les réponses en production ou économique du réservoir.
[0068] Enfin, on peut déterminer les mesures supplémentaires à réaliser pour mieux caractériser
le gisement et ainsi faire décroître l'incertitude sur la production future. La quantification
de l'influence des paramètres incertains sur la production du gisement permet de déterminer
les paramètres les plus influents. Ainsi, pour limiter l'incertitude sur la production
ou l'économie future du gisement, on caractérise d'abord les paramètres les plus influents.
L'utilisation de la méthodologie décrite donne donc les moyens à l'ingénieur réservoir
de déterminer les paramètres qui doivent être mieux définis, et donc, donne un guide
dans le choix des nouvelles mesures à réaliser (logging, carottage, SCAL, ...). Une
fois les paramètres influents mieux caractériser par mesures, il est alors possible
d'utiliser à nouveau la méthodologie décrite afin de propager l'incertitude pour quantifier
la nouvelle incertitude sur les réponses de production ou économique du réservoir.
[0069] La propagation, l'analyse de sensibilité globale et le calcul des effets moyens requièrent
plusieurs milliers d'évaluation de la ou des réponses associées. Cela rend donc ces
méthodes inutilisables directement avec des gros codes numériques (comme c'est le
cas pour les simulateurs d'écoulement), d'où l'intérêt de construire des modèles approché
prédictifs, permettant d'utiliser ces techniques très intéressantes pour les réponses
qu'elles apportent à des questions métiers.
[0070] Selon un autre mode de réalisation, les paramètres d'entrées comporte des champs
stochastiques, e.g. perméabilité, porosité, faciès,... L'incertitude provenant des
cartes géostatistiques est souvent négligée dans les méthodes d'analyse d'incertitude
basée sur des plans d'expérience.
[0071] Dans le cas de paramètres de type champ stochastique on décompose le champ stochastique
en un nombre
n de composantes via la décomposition de Karhunen-Loeve (M.M. Loève. Probability Theory.
Princeton University Press, 1955.). Les techniques géostatistiques utilisés en ingénierie
de réservoir pour modéliser les grandeurs de perméabilité et de porosité des roches,
sont pour la plupart basées sur des fonctions aléatoires gaussiennes, discrétisés
sur un maillage couvrant l'espace physique du réservoir. La décomposition de Karhunen-Loève
d'un modèle géostatistique consiste à représenter celle-ci dans la base formée des
vecteurs propres de son opérateur de covariance. On obtient ainsi une représentation
fonctionnelle du champ aléatoire. En ne conservant qu'un nombre limité de composantes
dans cette représentation, on obtient une approximation du champ aléatoire qui représente
une part quantifiable de la variance du processus. En effet, à chaque terme de la
décomposition est attribuée une part de la variance globale qui est égale à la valeur
propre associée au vecteur propre correspondant. On peut ainsi quantifier l'erreur
d'approximation en terme de variance. Le nombre de composantes nécessaires à reproduire
le modèle géostatistique est souvent assez élevé. Des tests numériques ont montrés
qu'une centaine de composantes peuvent être nécessaires dans certains cas. Pourtant,
dans beaucoup de cas, seule la variation d'un nombre limité de ces composantes va
impacter les réponses en production simulées du modèle de réservoir, par exemple le
cumulé d'huile après 10 ans de production. Selon l'invention, on sélectionne les composantes
du champ stochastique ayant un impact sur les réponses d'intérêts simulées, à l'aide
d'une analyse de sensibilité globale avec un modèle approché comme indiqué dans les
étapes précédentes.
Avantages
[0072] La méthode selon l'invention constitue un outil pour l'analyse des incertitudes d'un
simulateur d'écoulement, et pour aider un ingénieur à réduire cette incertitude, en
se focalisant sur la caractérisation des paramètres dont l'incertitude contribue de
façon principale à la mauvaise caractérisation des sorties.
[0073] Cette méthode fournit un outil robuste et à moindre coût (en termes du nombre de
simulations) pour l'analyse de sensibilité globale et la propagation des incertitudes.
Elle permet à l'ingénieur de contrôler le degré d'approximation de ses résultats en
analysant en temps réel les avantages en termes de prédiction par rapport au nombre
de simulations effectuées.
[0074] L'analyse de sensibilité globale et l'effet moyen des paramètres permettent de voir
l'impact de l'incertitude d'un paramètre sur l'incertitude globale d'une réponse,
et donne donc un guide dans le choix des nouvelles mesures à réaliser afin de mieux
caractériser les paramètres ayant un rôle central sur les résultats de production
ou économiques.
[0075] Enfin, la méthode permet la prise en compte des incertitudes du modèle géostatistique
(perméabilité, porosité, faciès, ...) par une utilisation des techniques de surface
de réponse et d'analyse de sensibilité globale.
1. Méthode pour évaluer un schéma de production d'un gisement souterrain, dans laquelle
on sélectionne des propriétés physiques caractérisant ledit gisement et ledit schéma
de production, lesdites propriétés constituant des paramètres d'entrée d'un simulateur
d'écoulement permettant de simuler des réponses du gisement, telles que la production,
et l'on construit un modèle analytique approché permettant de prédire lesdites réponses
du gisement,
caractérisé en ce que l'on réalise les étapes suivantes :
- on ajuste ledit modèle analytique approché à l'aide d'un processus itératif comportant
les étapes suivantes :
a)- on définit, pour chacune desdites réponses, un degré de précision Dp que l'on souhaite obtenir, ledit degré de précision Dp mesurant l'écart entre les réponses prédites par le modèle et celles simulées par
le simulateur ;
b)- on calcule un degré de précision Dp(M) des prédictions du modèle analytique approché ;
c)- si cette valeur Dp(M) est inférieure au degré de prédiction souhaité Dp, le processus itératif s'arrête, sinon on poursuit par les étapes suivantes :
d)- on construit un plan d'expériences de façon à sélectionner des simulations à réaliser,
pertinentes pour ajuster ledit modèle ;
e)- on réalise les simulations sélectionnées par le plan d'expérience à l'aide du
simulateur d'écoulement, puis, pour chacune des réponses simulées par le simulateur,
on ajuste ledit modèle analytique à l'aide d'une méthode d'approximation, de façon
à ajuster les réponses prédites par le modèle à celles simulées par le simulateur
;
f)- on recommence à l'étape b), jusqu'à ce que le degré de précision souhaité Dp soit atteint ; et
- on évalue ledit schéma de production, en analysant lesdites réponses dudit gisement
prédites par ledit modèle analytique approché.
2. Méthode selon la revendication 1, dans laquelle on modifie le degré de précision souhaité
Dp à chacune des itérations.
3. Méthode selon l'une des revendication précédentes, dans laquelle les valeurs des paramètres
d'entrée sont incertaines.
4. Méthode selon l'une des revendication précédentes, dans laquelle on analyse lesdites
réponses dudit gisement prédites par ledit modèle analytique approché, en quantifiant
une influence de chacun desdits paramètres d'entrée sur chacune desdites réponses,
à l'aide d'une analyse de sensibilité globale, dans laquelle on calcule des indices
de sensibilité en utilisant ledit modèle analytique.
5. Méthode selon la revendication 4, dans laquelle on sélectionne les paramètres les
plus influents sur les réponses dudit gisement, à l'aide de l'analyse de sensibilité
globale, et on définit des mesures à réaliser pour faire décroître une incertitude
sur les réponses dudit gisement.
6. Méthode selon la revendication 4, dans laquelle les paramètres d'entrée comportant
au moins un champ stochastique, on décompose le champ stochastique en un nombre n de composantes via une décomposition de Karhunen-Loeve, et on sélectionne les composantes
du champ stochastique ayant un impact sur les réponses à l'aide de l'analyse de sensibilité
globale.