[0001] L'invention concerne une électrode en alliage d'argent pour torche de coupage plasma,
automatique ou manuelle, de préférence une torche automatique, une torche à plasma
munie d'une telle électrode et son utilisation dans une opération de coupage plasma
d'une pièce métallique.
[0002] Les torches de coupage à plasma d'arc reposent toutes sur une architecture similaire
incluant une électrode formée d'un corps au sein duquel est fixé un insert émissif,
un diffuseur de gaz et une tuyère de constriction du jet plasma.
[0004] En général, les électrodes utilisées dans ces torches à plasma sont formées d'un
corps en cuivre et/ou alliage de cuivre au sein duquel est fixé un insert émetteur
d'électrons ou insert émissif Suivant la nature oxydante ou non du gaz plasma utilisé
dans la torche, l'insert est soit en tungstène, soit en hafnium ou zirconium.
[0005] Plus précisément, si on met en oeuvre un gaz inerte ou réducteur, tel que azote,
argon, hydrogène, CH
4 ou leurs mélanges, on utilise une électrode à insert en tungstène, alors que si le
gaz est oxydant, c'est-à-dire contenant ou formé d'oxygène ou de CO
2, on utilise plutôt un insert en hafnium ou zirconium qui sera moins rapidement dégradé
qu'un insert en tungstène par l'action oxydante du gaz.
[0006] En effet, il est bien connu que, durant une opération de coupage plasma, un insert
émissif est soumis notamment à des températures très élevées et à des forces de succion
engendrées par le jet de plasma d'arc qui vient prendre racine sur ledit insert, qui
engendrent une vaporisation plus ou moins importante du métal ou alliage métallique
constituant l'insert, son expulsion dans le jet de plasma et donc inévitablement une
usure dudit insert avec formation d'un cratère dans celui-ci.
[0007] Cette dégradation plus ou moins rapide des inserts des électrodes des torches à plasma
est quasi inévitable et pose un réel problème au plan industriel car elle oblige à
remplacer fréquemment les électrodes des torches, ce qui nuit à la productivité du
procédé de coupage car oblige à stopper le procédé pour opérer le remplacement de
l'électrode et engendre inévitablement des coûts supplémentaires car lorsqu'un insert
émissif est usé, il n'est pas possible de remplacer uniquement l'insert et c'est l'ensemble
de l'électrode qui doit être changé.
[0008] Pour tenter de résoudre ou de minimiser ces problèmes d'usure des inserts et/ou électrodes
des torches à plasma, plusieurs solutions ont déjà été proposées.
[0009] Ainsi,
EP-A-1147692 a proposé une électrode formée en un alliage de cuivre et de tellure.
[0010] Par ailleurs,
EP-A-980197 a suggéré l'incorporation de l'insert en hafnium ou tungstène dans un manchon en alliage
d'argent, lui même fixé au corps d'électrode en cuivre.
[0011] En outre, il a aussi été préconisé de réaliser une brasure à l'argent ou en un alliage
d'argent, de l'insert en hafnium dans le corps d'électrode en cuivre ou alliage de
cuivre.
[0012] Enfin, le document
US-A-5,857,888 décrit des électrodes en argent, en alliage d'argent, en or ou en alliage d'or. D'après
ce document, une électrode contenant 85% d'argent a permis de réaliser seulement 803
coupes, alors qu'une électrode contenant 60% d'argent permet d'opérer 1143 coupes
avant usure trop importante de l'insert.
[0013] Toutefois, ces solutions ne sont pas totalement satisfaisantes car elles n'ont pas
permis d'aboutir à une amélioration significative de la durée de vie des électrodes
des torches et/ou ont engendré une complexification des torches et aussi une forte
augmentation des coûts de production.
[0014] Un problème qui se pose est dès lors d'améliorer encore, et si possible significativement,
la durée de vie de ces électrodes et plus particulièrement de diminuer le taux d'usure
des inserts des électrodes, lors de son utilisation dans une torche de coupage plasma
pour réaliser une opération de coupage plasma et ce, sans nécessité de devoir modifier
l'architecture des torches à plasma actuelles.
[0015] Une solution est une électrode pour torche à plasma, c'est-à-dire conçue pour et
adaptée à être montée dans une torche à arc plasma, formée d'un corps d'électrode
comprenant une cavité au sein de laquelle est fixé un insert émissif, caractérisée
en ce que ledit corps d'électrode est formé d'un alliage contenant plus de 90% en
poids d'argent.
[0016] Selon le cas, l'électrode de l'invention peut comprendre l'une ou plusieurs des caractéristiques
suivantes :
- le corps d'électrode est formé d'un alliage contenant au moins 92% en poids d'argent.
- le corps d'électrode est formé d'un alliage contenant de l'argent et un ou plusieurs
éléments d'alliage secondaires choisis parmi le cuivre, l'aluminium et le nickel.
- le corps d'électrode est formé d'un alliage contenant au moins 90% en poids d'argent,
moins de 10% en poids de cuivre, moins de 2% en poids d'aluminium et moins de 2% en
poids de nickel, de préférence d'un alliage contenant au moins de l'argent et du cuivre.
- le corps d'électrode est formé d'un alliage contenant au plus 96% en poids d'argent,
de préférence au plus 95% en poids d'argent, de préférence encore au plus 94% en poids
d'argent.
- le corps d'électrode est formé d'un alliage contenant entre 91 et 92,95% en poids
d'argent, de 2 à 7% en poids de cuivre, moins de 1% en poids d'aluminium et moins
de 1% en poids de nickel.
- le corps d'électrode a une forme allongée et comporte un évidement interne borgne.
- le corps d'électrode comprend une extrémité aval portant l'insert émissif, une extrémité
amont au niveau de laquelle débouche l'évidement interne borgne, et des moyens de
fixation conçus et adaptés pour permettre une fixation de l'électrode dans le corps
d'une torche à plasma. Les moyens de fixation comprennent par exemple un filetage
ou un taraudage aménagé dans le corps d'électrode ; toutefois, tout autre dispositif
de fixation adapté peut être utilisé.
- l'insert émissif est en tungstène, en hafnium ou en zirconium.
[0017] L'invention porte aussi sur une torche à plasma comprenant un corps de torche muni
d'une électrode à insert émissif selon l'invention, ainsi que sur un procédé de coupage
à l'arc plasma, dans lequel on utilise une torche ou une électrode selon l'invention
pour découper une pièce métallique, en particulier une plaque en acier, en acier inoxydable,
en aluminium ou en un alliage d'aluminium, en cuivre, ou en acier galvanisé ou électro-zingué
(i.e. avec revêtement surfacique de zinc).
[0018] L'invention va être mieux comprise grâce à la description détaillée suivante faite
en références aux figures annexées parmi lesquelles :
- la Figure 1 est un schéma d'un mode de réalisation d'une électrode selon l'invention,
- la Figure 2 est un schéma d'un deuxième mode de réalisation d'une électrode selon
l'invention, et
- les Figures 3 et 4 sont des courbes d'usure obtenues avec une électrode selon l'invention.
[0019] Comme illustré sur les Figures 1 et 2, l'électrode 1 selon l'invention est de type
« bicorps », c'est-à-dire qu'elle se compose d'un corps 2 d'électrode faisant office
de support pour un insert 3 émissif en hafnium ou tungstène.
[0020] Cet insert 3, typiquement de forme cylindrique, est fixé par brasage, emboutissage,
sertissage ou autre au sein d'une cavité 4, tel un perçage borgne, aménagée à l'extrémité
aval 2a du corps d'électrode 1.
[0021] Selon l'invention, le corps 2 d'électrode est formé d'un alliage d'argent. La teneur
en argent de l'alliage est préférentiellement d'au moins 92% en poids (par rapport
au poids de l'alliage constituant le corps d'électrode), et si possible supérieure.
[0022] Les autres éléments d'alliage ou éléments d'alliage secondaires (jusqu'à 100% en
poids) peuvent être le cuivre, l'aluminium ou le nickel, en particulier des alliages
contenant jusqu'à 93% d'argent environ et jusqu'à 7% environ de cuivre peut être utilisés.
La présence sous forme de traces d'autres éléments métalliques est également envisageable,
voire inévitable pour ce qui concerne les impuretés.
[0023] A titre d'exemple, le corps 2 d'électrode peut être réalisé en un alliage comprenant
de l'ordre de 7% de cuivre, d'environ 1% d'aluminium et/ou de nickel et d'argent pour
le reste, mis à part la présence d'impuretés inévitables.
[0024] Comme on le voit sur les Figures 1 et 2, le corps d'électrode 2 a une forme allongée,
de préférence globalement tubulaire ou cylindrique, et comporte, au niveau de son
extrémité amont 2b, un évidement 5 interne borgne dimensionné pour recevoir le tube
plongeur de la torche à plasma dans laquelle l'électrode 1 est insérée, comme montré
en Figure 3.
[0025] En effet, durant le fonctionnement de la torche à plasma, on opère habituellement
un refroidissement de l'électrode 1 grâce à un fluide de refroidissement, tel que
de l'eau déminéralisée ou un mélange d'eau et de glycol, circulant dans le circuit
de refroidissement de la torche. Ce fluide de refroidissement vient baigner l'intérieur
de l'électrode 1 creuse pour en évacuer la chaleur dégagée par l'arc tout en étant
guidé notamment par le tube plongeur de la torche.
[0026] Des moyens de fixation 6 classiques permettent une fixation de l'électrode 1 dans
le corps de la torche à plasma, par exemple un filetage ou un taraudage aménagé dans
le corps 2 d'électrode permettant un vissage de l'électrode 1 dans le corps de torche.
Une telle fixation est classique dans les torches de coupage plasma.
[0027] Selon l'invention, le corps d'électrode 2 au sein duquel est fixé l'insert 3 émissif
est formé d'un alliage contenant majoritairement de l'argent, préférentiellement au
moins 92% en poids d'argent. En effet, l'utilisation d'un tel alliage d'argent permet
d'améliorer notablement le transfert thermique, c'est-à-dire le transfert d'énergie
du bain de métal en fusion de l'insert 3 vers le circuit de refroidissement de la
torche.
[0028] En effet, la conductivité thermique de l'argent étant plus forte que celle du cuivre
ou de ses alliages, le transfert thermique des zones chaudes vers le circuit de refroidissement
s'opère plus facilement. Ainsi, l'évaporation de hafnium et/ou tungstène durant les
phases d'arc est diminué et/ou ralenti. Ce meilleur transfert thermique permet également
de limiter le volume du bain de hafnium et/ou de tungstène fondu pouvant être éjecté
lors de l'extinction du plasma.
[0029] Le transfert électrique est également amélioré de par l'utilisation de cet alliage
à base d'argent de par sa plus forte conductivité électrique.
[0030] Tous ces phénomènes conduisent donc à une meilleure durée de vie des électrodes de
coupage plasma. De plus, il a été remarqué expérimentalement que l'utilisation d'argent
permet d'user plus en profondeur les électrodes de coupage plasma par rapport aux
mêmes électrodes en cuivre et/ou ses alliages.
[0031] Les résultats d'essais obtenus sont consignés sur la Figure 3 qui présente une courbe
d'usure (en mm) d'une électrode à 92% environ d'argent selon la présente invention
au fil du temps, c'est-à-dire après 325 cycles (Nb cyles) d'utilisation.
[0032] L'étoile représentée en Figure 3 correspond, quant à elle, à l'usure d'une électrode
standard en alliage de cuivre, à savoir un alliage cupro-tellure, supportant un insert
en hafnium. Comme on le voit, une telle électrode fabriquée selon l'art antérieur
présente une durée de vie comprise entre 150 et 200 cycles de coupe de 20 secondes
chacun, ce qui correspond à une usure maximale admissible d'environ 2 mm. L'intensité
du courant de coupe est de 120 A et le gaz plasmagène utilisé est de l'oxygène.
[0033] Dans les mêmes conditions, une électrode selon l'invention permet d'obtenir une durée
de vie significativement plus élevée puisque la courbe obtenue (droite sur Fig. 3)
montre que l'électrode en argent selon l'invention subit une usure régulière jusqu'à
atteindre une profondeur de cratère proche de 2.5 mm au bout d'environ 300 à 325 cycles
de coupe.
[0034] A l'issue de ces essais, une observation visuelle de la forme du cratère d'usure
s'étant formé à l'extrémité de l'électrode et des parois du trou borgne a été réalisée.
Cette observation a mis en évidence que le support de l'insert en alliage d'argent
n'est pas impacté par la présence de l'arc électrique. Les parois sont toujours bien
verticales. On note seulement une légère oxydation de la face avant de l'électrode
due à une ambiance fortement chargée en oxygène radicalaire (atome d'oxygène fortement
oxydant) présent en forte quantité dans la chambre plasmagène.
[0035] Une électrode selon l'invention présente donc des performances améliorées en termes
de durée de vie par rapport à une électrode classique en alliage de cuivre.
[0036] Une seconde série d'essai a été faite dans les mêmes conditions que précédemment
(même électrode) en utilisant de l'oxygène comme gaz de coupe et l'intensité du courant
de coupe est de 120 A. Toutefois, dans ce cas, la durée de chaque coupe est de 4 secondes.
[0037] Comme on le voit sur la Figure 4, une électrode selon l'invention subit une usure
régulière jusqu'à atteindre une profondeur de cratère proche de 2.7 mm au bout d'environ
600 cycles de coupe, soit environ 44 minutes. Toutefois, l'électrode n'était pas détruite
à la fin de l'essai et environ 200 cycles supplémentaires ont pu être réalisés pour
une durée totale de coupe de l'ordre de 53 minutes.
[0038] Une torche à plasma munie d'une électrode selon l'invention est utilisable pour opérer
une découpe par arc plasma d'une pièce en métal, telle une plaque ou une tôle, notamment
en acier au carbone, avec ou sans revêtement surfacique, en acier inoxydable, en cuivre,
en aluminium, en titane ou en alliage léger.
1. Electrode (1) pour torche à plasma formée d'un corps d'électrode (2) comprenant une
cavité (4) au sein de laquelle est fixé un insert (3) émissif, caractérisée en ce que ledit corps d'électrode (2) est formé d'un alliage contenant plus de 90% en poids
d'argent.
2. Electrode selon la revendication précédente, caractérisée en ce que le corps d'électrode (2) est formé d'un alliage contenant de l'argent et un ou plusieurs
éléments d'alliage secondaires choisis parmi le cuivre, l'aluminium et le nickel.
3. Electrode selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisée en ce que le corps d'électrode (2) est formé d'un alliage contenant au moins 90% en poids d'argent,
moins de 10% en poids de cuivre, moins de 2% en poids d'aluminium et moins de 2% en
poids de nickel.
4. Electrode selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisée en ce que le corps d'électrode (2) est formé d'un alliage contenant entre 91 et 92,95% en poids
d'argent, de 2 à 7% en poids de cuivre, moins de 1% en poids d'aluminium et moins
de 1% en poids de nickel.
5. Electrode selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisée en ce que le corps d'électrode (2) est formé d'un alliage contenant au moins 92% en poids d'argent
et/ou au plus 96% en poids d'argent.
6. Electrode selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisée en ce que le corps d'électrode (2) a une forme allongée et comporte un évidement (5) interne
borgne.
7. Electrode selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisée en ce que le corps d'électrode (2) comprend une extrémité aval (2a) portant l'insert (3) émissif,
une extrémité amont (2b) au niveau de laquelle débouche l'évidement (5) interne borgne,
et des moyens de fixation (6) conçus et adaptés pour permettre une fixation de l'électrode
(1) dans le corps d'une torche à plasma.
8. Electrode selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisée en ce que l'insert (3) émissif est en tungstène, hafnium ou zirconium.
9. Torche à plasma comprenant un corps de torche muni d'une électrode (1) à insert émissif
(3) selon l'une quelconque des revendications précédentes.
10. Procédé de coupage à l'arc plasma d'une pièce métallique, dans lequel on utilise une
torche selon la revendication 9 ou une électrode selon l'une des revendications 1
à 8 pour découper une pièce métallique, en particulier une plaque en acier, acier
inoxydable, aluminium ou en un alliage d'aluminium.