[0001] L'invention concerne le domaine de la fabrication semi-automatique de chaussures
et de semelles orthopédiques.
[0002] Chez les patients diabétiques, les pieds sont souvent sujets à des complications.
On parle d'ailleurs de « pieds diabétiques ». Par exemple, le déséquilibre vasculaire
et neurologique entraîne une perte de la sensibilité du pied, ainsi que des pertes
d'acuité visuelle. Cette absence de sensibilité du pied peut entraîner l'apparition
de plaies pouvant s'infecter jusqu'à l'os, étant donné que celles-ci ne sont pas détectées
par le patient qui ne ressent plus la douleur et sont aggravées par une mauvaise vue,
ne lui permettant plus de distinguer des corps étrangers dans sa chaussure.
[0003] Par ailleurs, on constate que les plaies de pieds des diabétiques sont principalement
causées par des chaussures inadaptées aux pieds du patient ce qui crée des frottements
non perçus par le patient.
[0004] De manière connue, on fabrique des semelles et des chaussures orthopédiques par moulage
à l'aide de bandes plâtrées enroulées autour du pied du patient, puis par coulage
de résine de polyuréthanne dans le moule de plâtre séché pour obtenir un « positif
» correspondant au volume de la forme du pied. Ces opérations sont coûteuses et polluantes
notamment à cause du plâtre jeté après utilisation. La résine de polyuréthanne étant
toxique, sa manipulation entraîne des risques d'intoxication pour le façonneur. De
plus, ce procédé peut entraîner une contamination bactérienne importante, dans le
cas où le patient est porteur de « Bactérie Multi-Résistante » dites BMR.
[0005] L'invention vise donc à fournir un nouveau procédé de fabrication de chaussures ou
de semelles orthopédiques qui pallie aux inconvénients ci-dessus.
[0006] A cet effet, l'invention a pour objet un procédé de fabrication de chaussures et
de semelles orthopédiques,
caractérisé en ce qu'il comprend les étapes suivantes :
- on forme des images numériques de la surface extérieure d'un pied d'un patient et
d'une empreinte de la plante du pied du patient ;
- à partir desdites images numériques, on reconstruit par calcul dans une unité de traitement
de données un modèle en trois dimensions du pied du patient, ce modèle étant défini
par des données exploitables pour commander une machine outil ;
- à partir desdites données, on usine par machine un bloc de matériau pour fabriquer
une forme correspondant au modèle en trois dimensions ;
- on applique sur ladite forme une ou plusieurs feuilles thermo formables pour réaliser
un gabarit de ladite semelle ou chaussure ou de ladite semelle orthopédique ;
- on numérise ledit gabarit dans l'unité de traitement de données pour construire un
patron servant à la fabrication de la semelle ou de la chaussure ou de la semelle
orthopédique.
[0007] Selon le procédé de l'invention, le patient est de préférence placé sur un fauteuil
rotatif muni d'un repose-pieds. La caméra numérique pour les prises de vues reste
fixe au sol face au fauteuil. Les prises de vues sont enchaînées suivant différentes
positions angulaires du fauteuil. Pour la prise de vue de la plante du pied du patient,
on utilise un coussin déformable rempli de billes de polystyrène qui est raccordé
à une pompe à vide. Le pied du patient est posé sur le coussin déformable. Le vide
est ensuite réalisé à l'intérieur du coussin qui conserve alors l'empreinte plantaire
corrigée du patient. On réalise ensuite une prise de vue de cette empreinte. L'unité
de traitement de données comprend un ensemble d'outils graphiques pour visualiser
à l'écran un modèle en trois dimensions de la surface extérieure du pied du patient.
A l'aide de ces outils informatiques, le podo-orthésiste modifie l'aspect du modèle
affiché en trois dimensions, en modelant à l'écran des bosses ou zones à décharger
ou des creux en surface ou zone à recharger selon les besoins podologiques du patient.
A partir des données numériques définissant le modèle dans l'unité de traitement de
données, on peut commander des machines outils de fabrication d'une forme positive
du pied du patient ou de peausserie pour la fabrication de la semelle ou chaussure
orthopédique. La fabrication des formes et des chaussures peut être réalisée à distance
de l'endroit où les images du pied du patient sont formées dans la mesure où les images
numériques et les données du modèle en trois dimensions peuvent être transférées par
un réseau de communication à distance.
[0008] Un exemple d'un mode de mise en oeuvre du procédé de fabrication selon l'invention
est décrit plus en détail ci-après et illustré par les dessins. Cette description
n'est donnée qu'à titre d'exemple indicatif et nullement limitatif de l'invention.
[0009] La figure 1 illustre de façon très schématique l'installation pour la mise en oeuvre
du procédé de fabrication selon l'invention.
[0010] La figure 2 illustre par un organigramme les différentes étapes du procédé de fabrication
selon l'invention.
[0011] Le procédé de fabrication d'une chaussure orthopédique (ou d'une semelle orthopédique
encore appelée orthèse plantaire) selon l'invention peut inclure un protocole rigoureux
initial de prise en charge podologique du patient.
[0012] Selon ce protocole de prise en charge podologique d'un patient porteur de BMR ou
d'autres infections bactériennes, le podo-orthésiste utilise : des gants latex à usage
unique, un mètre ruban en papier à usage unique, des champs ou serviettes en papier
absorbant à usage unique, une feuille de mesure auto-
carbonée (dont la 1ère feuille du dessus est en contact avec le pied, sera jetée puisqu'elle présentera
un risque de contamination), des baguettes en bois à usage unique pour remplacer le crayon pour écrire sur la
feuille de prise de mesures carbonée, et tout le matériel de l'intervention est aseptisé
avant et après son usage, les déchets contaminés seront déposés dans une poubelle
réservée à cet effet équipée d'une pédale pour l'ouverture du couvercle, dont le podo-orthésiste
aura pris soin d'y mettre un sachet avant tout dépôt.
[0013] Sur la figure 1, on a illustré un patient assis dans un fauteuil 1 pour effectuer
des prises de vues d'un ou des deux pieds du patient. Le fauteuil 1 comprend une assise,
un dossier et des accoudoirs, le tout fixé à un support vertical lui-même monté sur
un socle qui repose au sol. Le fauteuil comprend aussi un repose-pieds de sorte que,
dans une position assise du patient dans le fauteuil, les pieds du patient sont placés
de manière corrigée sur le repose-pied. Avec cet agencement, on peut réaliser différentes
prises de vue des faces latérales droite et gauche, du talon et du cou-de-pied du
pied du patient sans déplacer la caméra 2 servant à la formation des images mais en
déplaçant angulairement le fauteuil dans lequel est assis le patient. Cette caméra
2 est de préférence un dispositif de formation d'images numériques exploitables par
ordinateur. Cette caméra peut être placée à environ 1,5 mètre du fauteuil. Cet agencement
contribue à l'obtention d'une bonne qualité des prises de vue en un temps réduit.
Cet agencement est très appréciable pour les patients à mobilité réduite.
[0014] Avantageusement, l'assise, le dossier et les accoudoirs du fauteuil sont montés de
manière mobile verticalement par rapport au support vertical pour pouvoir être réglés
en fonction de la morphologie du patient. De plus, le socle et le repose-pied du fauteuil
sont prévus en couleur sombre, par exemple en noir, pour ne pas créer d'interférences
lors de la prise de vue.
[0015] Avec la caméra 2, on effectue aussi une prise de vue de l'empreinte plantaire. Selon
l'invention, on utilise un coussin de décompression 3 de forme ovoïde avec un renflement
médian et contenant des billes de polystyrène de sorte à prendre en charge les différentes
déformations internes et externes du patient. Lors de la prise d'empreinte plantaire,
on place le coussin sur un socle formant la cambrure du pied et déterminant la hauteur
de talon de la future chaussure orthopédique. Le coussin est relié à une pompe à vide
4 qui aspire l'air à l'intérieur du coussin de décompression pour marquer l'empreinte
plantaire du pied du patient.
[0016] Pour diminuer les risques de contamination, un champ en papier absorbant est placé
par le praticien sur le repose-pieds. Le coussin de décompression est confectionné
en un matériau facile à aseptiser avec un spray de lotion décontaminante.
[0017] On décrit maintenant les différentes étapes du procédé de fabrication selon l'invention
en relation avec les figures 1 et 2.
[0018] A l'étape 21, le patient est donc placé de manière adéquate dans le fauteuil 1, les
pieds en place sur le repose-pied et la caméra ou scanner 2 placée de manière fixe
à environ 1.50 mètres du fauteuil. Les pieds du patient reposent sur un socle 5 formant
la cambrure du pied pour tenir compte d'une hauteur de talon. Le fauteuil est orienté
par rotation autour de son axe vertical dans plusieurs positions angulaires afin de
réaliser des prises de vue du cou-de-pied, du talon et des malléoles interne et externe
(faces latérales droite et gauche). Le coussin 3 est placé ensuite sous le pied du
patient pour former une empreinte plantaire corrigée et à l'aide de la caméra 3 placée
au dessus de l'empreinte, on réalise une prise de vue de cette empreinte plantaire
laissée apparente par la décompression permanente du coussin lorsque le pied est sorti
du coussin.
[0019] Pour la formation de l'empreinte plantaire dans le coussin de décompression, le patient
peut rester dans le fauteuil 1. Son pied est placé sur le coussin et l'ensemble pied
et coussin est posé sur un socle 5 déterminant la cambrure. Le praticien place des
marqueurs (non représentés), sous forme de pastille de couleur vive, au niveau du
petit et gros orteil du pied du patient sur lequel on forme les images. Ces marqueurs
sont des repères exploités pour la modélisation en trois dimensions détaillée ci-après.
Ces marqueurs apparaissent dans les images du cou-de-pied et des faces latérales droite
et gauche.
[0020] En complément des prises de vues, le praticien effectue à l'étape 21 des mesures
manuelles de périmètre à différentes positions sur le pied du patient. Par exemple,
le praticien place le mètre ruban en partie haut et bas du cou-de pied. Il peut également
enrouler le ruban mètre entre le talon et le cou-de-pied. Une autre série de mesures
peut être effectuée en plaçant le pied du patient sur une feuille, en traçant le contour
extérieur du pied ou sa projection sur la feuille de mesure auto-carbonée pour mesurer
la longueur du pied ou sa largeur à différentes positions. La feuille auto-carbonée
en contact avec le pied est jetée après utilisation puisqu'elle présente un risque
de contamination. Par ailleurs, on utilise des baguettes en bois à usage unique remplaçant
avantageusement le crayon pour écrire sur la feuille de prise de mesures carbonée.
[0021] A l'issue de l'étape 21, les 6 images numériques en deux dimensions et les mesures
de périmètre, longueur et largeur sont transmises à une unité de traitement de données
6 du type ordinateur à écran 7 et clavier 8.
[0022] A l'étape 22, l'unité 6 est agencée pour exécuter un programme de reconstruction
en trois dimensions de la forme extérieure du pied du patient à partir des images
numériques en deux dimensions formées à l'étape 21. Le programme de reconstruction
s'appuie notamment sur un accrochage des marqueurs pour corriger les volumes du modèle
en 3D. Il est entendu que le modèle 3D intègre la cambrure donnée par le socle 5.
[0023] Ensuite, à l'étape 23, on corrige à l'écran ce modèle en 3D (illustré par 9) à l'aide
des mesures manuelles de périmètre, longueur... saisies informatiquement au moyen
d'un clavier d'ordinateur par exemple de sorte à obtenir un modèle le plus approchant
de la forme réelle du pied du patient. Ce modèle en 3D est défini dans l'unité 6 par
des données (coordonnées spatiales) qui sont exploitables par une machine outil telle
qu'une fraiseuse numérique 10. Avantageusement, selon l'invention les données numériques
représentatives de la forme du pied sont stockées numériquement et plus physiquement,
ce qui représente une réduction des coûts de stockage.
[0024] A l'étape 24, les données définissant le modèle en 3D 9 sont transmises à la fraiseuse
numérique 10 pour usiner un bloc de matériau, notamment un matériau recyclable comme
le bois. Avantageusement, la forme 11 en bois peut être recyclée en bois de chauffage
pour satisfaire aux exigences environnementales. A l'issue du processus d'usinage
en 24, on obtient une forme positive 11 correspondant au modèle en 3D 9 représentant
la forme extérieure du pied du patient. Cette forme 11 peut intégrer ou non une orthèse
plantaire laquelle peut le cas échéant être fabriquée de façon semi-automatique.
[0025] A l'étape 25, on applique sur la forme 11 en bois une ou plusieurs feuilles en film
plastique transparent et thermo-formable qui viennent épouser la surface de la forme
11. On obtient alors un gabarit 12 qui servira à constituer un patron pour la fabrication
de la chaussure orthopédique.
[0026] Le gabarit 12 (après avoir été ouvert par une simple découpe dans le plan de symétrie
longitudinal 13) est de préférence en une matière plastique souple et transparente.
Il est testé directement sur le pied du patient à l'étape d'essayage 26. Pour cette
étape, le gabarit peut être découpé plus particulièrement au niveau du cou-de-pied
pour pouvoir être enfilé facilement sur le pied du patient. Le praticien ajuste le
gabarit sur le pied du patient et vérifie la précision et le confort du futur chaussage.
Le patient est alors en position statique mais les essais continuent en position de
marche alors que le patient chausse le gabarit.
[0027] A l'étape 28, le gabarit ajusté est mis à plat en plusieurs pièces selon les techniques
classiques du domaine de fabrication artisanale (confection de chaussures). L'ensemble
de ces pièces planes constituent un patron 14 qui est numérisé en 29 pour être enregistré
sous forme numérique dans l'unité 6. Sur la figure 1, le patron 14 est affiché sur
l'écran 7 pour être le cas échéant rectifié manuellement. Les données numériques du
patron (coordonnées des points de contour du patron) permettent de déterminer toutes
les pièces de patronage du futur chaussage. Les différentes pièces sont transmises
par réseau informatique à une machine outil de découpe numérique de peausserie 17
qui découpe toutes les pièces de peausseries suivant les directives préalablement
enregistrées par exemple la claque, la languette et les quartiers et autres pièces
nécessaires constituant la chaussure orthopédique.
[0028] Les pièces découpées sont enfin assemblées par piquage mécanique à l'étape 30 pour
former la chaussure orthopédique.
[0029] En variante à l'étape 27, à partir du gabarit ajusté, il est possible de modifier
la forme en bois pour que sa forme et son volume correspondent à l'ajustement réalisé
sur le gabarit, par collage de pièces de liège ou autres matériaux façonnables ou
encore il est possible d'usiner la forme en bois d'origine. Cette forme peut ensuite
être numérisée en 3D et enregistrée dans l'unité 6 pour constituer un nouveau modèle
en 3D 9. Il est également possible de modifier directement en mémoire dans l'unité
6 le modèle 9 par saisie d'informations au clavier 8.
[0030] Alternativement, il est possible de numériser la forme après avoir appréhender les
modifications et de se servir de l'image numérique de la forme pour réaliser un patronage
en trois dimensions, sans se servir du gabarit d'essayage. Cette alternative présente
un gain important de temps et de précision. Dans ce cas les fichiers du logiciel de
formage sont compatibles et exploitables avec les fichiers du logiciel de patronage.
1. Un procédé de fabrication de semelles ou chaussures orthopédiques,
caractérisé en ce qu'il comprend les étapes suivantes :
- on forme (21) des images numériques de la surface extérieure d'un pied d'un patient
et d'une empreinte de la plante du pied du patient ;
- à partir desdites images numériques, on reconstruit (22) par calcul dans une unité
de traitement de données (6) un modèle (9) en trois dimensions du pied du patient,
ce modèle étant défini par des données exploitables pour commander une machine outil
;
- à partir desdites données, on usine (24) par machine un bloc de matériau pour fabriquer
une forme (11) correspondant au modèle en trois dimensions ;
- on applique (25) sur ladite forme une ou plusieurs feuilles thermo-formables pour
réaliser un gabarit (12) de ladite semelle ou chaussure orthopédique ;
- on numérise (28) ledit gabarit dans l'unité de traitement de données pour construire
un patron (14) servant à la fabrication de la semelle ou de la chaussure orthopédique.
2. Procédé de fabrication selon la revendication 1, dans lequel on forme une empreinte
de la plante du pied du patient au moyen d'un coussin déformable (3) contenant des
billes de polystyrène et relié à une pompe à vide.
3. Procédé de fabrication selon la revendication 1 ou 2, dans lequel le patient est assis
sur un fauteuil rotatif (1) avec repose-pieds pendant la formation des images du pied
du patient.