Objet de l'invention
[0001] La présente invention se rapporte à un procédé automatique de fabrication de pièce
composite de révolution et de section droite complexe.
[0002] Elle se rapporte plus particulièrement à la fabrication de pièces destinées au domaine
aéronautique.
Etat de la technique
[0003] Dans le domaine aéronautique, une innovation technologique industrielle marquante
est sans doute l'introduction des matériaux composites, car ceux-ci permettent de
réduire considérablement la masse des pièces utilisées et d'obtenir une meilleure
tenue en fatigue.
[0004] On connaît différents procédés pour la fabrication de pièces composites de révolution
et de géométrie simple.
[0005] On peut citer, entre autres, le moulage par centrifugation qui consiste à déposer
de la résine et des fils coupés à l'intérieur d'un moule cylindrique en rotation.
L'inconvénient de ce procédé est qu'il permet seulement la réalisation de formes cylindriques.
[0006] On peut également citer l'enroulement filamentaire qui est un procédé de fabrication
par dépôt en continu de fils ou de rovings (ensemble de fils), préalablement imprégnés
d'une résine, sur un mandrin ayant un mouvement de rotation. L'inconvénient de ce
procédé est qu'il permet seulement la réalisation de pièces de révolution avec des
géométries simples.
[0007] Dans le domaine aéronautique, de nombreuses pièces de révolution présentent des sections
droites complexes. A titre d'exemple, la figure 1 montre une partie d'un tambour d'un
compresseur basse pression d'un moteur d'avion ; cette pièce présente une section
variable (suivant le rayon) ainsi que plusieurs zones en surplomb (repérées par des
flèches).
[0008] Il existe un grand intérêt pour la fabrication de telles pièces en matériau composite
vu le gain de masse significatif qui en résulterait.
[0009] La demande de brevet
EP 1 938 955 A1 présente un dispositif pour la fabrication de pièces de révolution de section droite
complexe en matériau composite. Dans le dispositif divulgué, un tissu est enroulé
autour d'un mandrin ayant la géométrie de la pièce à fabriquer. Un tel dispositif
a pour inconvénient de nécessiter un mandrin par géométrie de pièces à réaliser et
de ne pas permettre la réalisation de pièces avec des zones en surplomb.
[0010] Le brevet
US 5,176,864 A présente un procédé à cire perdue; le mandrin en cire servant de support est fondu
après la fabrication de la pièce. Ce procédé présente les mêmes inconvénients que
ceux décrits ci-dessus.
Buts de l'invention
[0011] La présente invention vise à fournir un procédé automatique pour la réalisation de
pièces composites de révolution de section droite complexe.
[0012] La présente invention vise plus particulièrement à fournir un procédé permettant
de réaliser des pièces avec des géométries variables à partir d'un même outillage.
[0013] La présente invention permettra ainsi la réalisation de pièces avec une réduction
de masse significative.
Principaux éléments caractéristiques de l'invention
[0014] La présente invention se rapporte à un procédé automatique de fabrication couche
par couche d'une pièce composite de révolution et de section droite complexe,
caractérisé en ce qu'il comprend les étapes suivantes:
- a) On déroule de manière continue une bobine ou un rouleau comportant un renfort;
- b) Optionnellement, on imprègne le renfort d'une résine liquide par passage dans un
bain;
- c) On enroule le renfort imprégné sur un mandrin cylindrique en rotation;
- d) On polymérise complètement ou partiellement le renfort imprégné pour l'obtention
d'un matériau composite ;
- e) On dépose un support et/ou un matériau support de part et d'autre du matériau composite
constituant la pièce en cours de fabrication de manière à combler des vides entourant
ladite pièce.
[0015] Selon des modes particuliers de l'invention, le procédé comporte au moins une ou
une combinaison appropriée des caractéristiques suivantes :
- le renfort est un tissu ou une tresse ;
- le renfort peut être préimprégné de résine ou être une tresse ou un tissu sec associé
à un liant ('binder'), auquel cas, l'étape b) est absente ;
- le support comporte le renfort imprégné du matériau support ;
- il comprend en outre une étape a') de découpe automatique du renfort en bandes dites
'renfort' et en bandes dites 'chutes' de largeur variable selon la géométrie de la
pièce à réaliser, après l'étape a);
- parallèlement à l'étape b), les bandes 'chutes' sont imprégnées par le matériau support,
formant ainsi le support qui sera utilisé dans l'étape e);
- dans l'étape d), la réticulation de la résine est amorcée par un rayonnement UV ou
IR;
- dans l'étape d), le renfort imprégné est échauffé par effet Joule au moyen d'un champ
magnétique variable appliqué à la pièce en cours de réalisation ;
- le dépôt de matériau support s'effectue par pulvérisation de fines gouttelettes au
moyen d'une tête d'injection, ledit matériau support étant sous forme liquide avec
une viscosité appropriée pour l'injection ;
- il comporte en outre une étape de couture (stitching) des renforts imprégnés partiellement
polymérisés à l'étape d), ladite couture s'effectuant dans une direction perpendiculaire
aux plis de renfort enroulés ;
- la pièce finie subit un cycle de post-polymérisation ;
- la résine est une résine thermodurcissable, celle-ci étant catalysée à l'aide d'un
photoamorceur ou d'un thermoamorceur ;
- le matériau support est un matériau à bas point de fusion, un matériau soluble dans
un solvant, un matériau cassable, c'est-à-dire friable après solidification ou un
matériau pulvérulent à certaines températures;
- après réalisation de la pièce couche par couche, le support ou le matériau support
est séparé de la pièce et la pièce extraite de son mandrin.
[0016] La présente invention se rapporte également à une pièce composite de révolution et
de section droite complexe obtenue avec le procédé selon l'une quelconque des revendications
1 à 14.
Brève description des figures
[0017] La figure 1, déjà mentionnée, représente une coupe partielle d'un tambour d'un compresseur
basse pression.
[0018] La figure 2 représente schématiquement les différentes étapes du procédé de renfort
(par) fil selon l'invention.
[0019] Les figures 3A à 3G donnent une description détaillée des différentes étapes de réalisation
d'une pièce couche par couche selon l'invention.
[0020] La figure 4 représente schématiquement les étapes du procédé de renfort (par) tissu
ou tresse selon l'invention.
[0021] La figure 5 représente une section droite d'une pièce de révolution obtenue selon
l'invention avec les bandes de tissu (ou de tresse) de renfort illustrées schématiquement.
[0022] La figure 6 représente une vue de profil du mandrin sur lequel s'enroulent les bandes
de tissu ou de tresse.
Légende
[0023]
- 1) Bobine de fils ou rovings
- 2) Bain de résine liquide
- 3) Poulie
- 4) Mandrin
- 5) Source UV ou IR
- 6) Tête d'injection du matériau support
- 7) Section droite d'une pièce de révolution
- 8) Section droite d'un fil
- 9) Matériau support
- 10) Section droite d'un autre fil
- 11) Rouleau de tissu
- 12) Zone de travail
- 13) Couche n°i
- 14) Couche n°j
- 15) Bande 'renfort'
- 16) Bande 'chute'
- 17) Bac de matériau support
- 18) Rouleau de calibrage
- 19) Première racle
- 20) Composite
- 21) Support (renfort + matériau support)
- 22) Renfort imprégné de résine
- 23) Seconde racle
Description détaillée de l'invention
[0024] La présente invention a trait à un procédé de fabrication de pièces composites de
révolution de section droite complexe.
[0025] Ce nouveau procédé doit permettre la réalisation de pièces fonctionnelles présentant
des caractéristiques mécaniques et thermiques suffisantes pour prendre directement
leur place dans un ensemble tel que par exemple un compresseur basse pression d'un
moteur d'avion. Plus particulièrement, un tel procédé peut être utilisé pour la réalisation
de pièces complexes telles que tambour, virole intérieure, virole extérieure, ...
[0026] Le procédé selon l'invention est basé sur une combinaison inventive de trois techniques
:
- l'enroulement filamentaire décrit précédemment, couramment utilisé comme procédé de
fabrication de pièces composites de révolution et de géométrie simple,
- le principe de construction couche par couche réalisé de façon électronique à partir
d'un fichier de DAO (Dessin Assisté par Ordinateur) de la pièce. Le programme tranche
virtuellement la pièce et envoie les données binaires à la machine. Ce principe est
notamment mis à profit dans les techniques dites de prototypage rapide.
- la pose d'un matériau support lors de la fabrication. Ce matériau ne sert qu'à la
fabrication et doit être séparé de la pièce, une fois celle-ci finie. Le rôle du matériau
support est de maintenir en place la pièce en cours de fabrication. Dans le cas d'une
pièce avec des zones en surplomb telle que celle de la figure 1, il est impératif
que les couches nouvelles soient déposées sur un matériau support, et non dans le
vide, afin d'éviter tout fluage. Les côtés de la pièce seront également pris en sandwich
par le matériau support. Le matériau support doit donc présenter une rigidité suffisante
et permettre une extraction aisée de la pièce composite sans en altérer ses propriétés.
[0027] Plusieurs matériaux peuvent convenir :
- les matériaux à bas point de fusion qui doivent fondre à une température suffisamment
basse pour éviter de dégrader le matériau composite. On peut citer la cire, par exemple.
- les matériaux solubles dans l'eau ou tout autre solvant, comme par exemple le plâtre
ou l'Aquacore™ (matériau céramique).
- les matériaux qui deviennent pulvérulents sous une certaine température, comme l'étain
pur. Ce dernier a une température de fusion de 232°C et devient un matériau pulvérulent
en-dessous de -50°C, ce qui correspond aux limites d'utilisation demandées au matériau
composite et donc ne doit pas poser de problème si on refroidit la pièce à une telle
température de manière à éliminer le matériau support.
- les matériaux à base d'amidon.
- le sel ou le sable qui une fois solidifiés sont cassés ou dissous dans l'eau.
[0028] Les zones de vide de la pièce à réaliser seront comblées par ce matériau support.
Une alternative est de combler ces vides par un système ou support comprenant le renfort
et le matériau support.
[0029] Idéalement, la pièce réalisée par le procédé selon l'invention doit satisfaire aux
exigences dimensionnelles en plus de présenter les caractéristiques mécaniques et
physiques requises pour l'application. Il est probable cependant que, comme dans tout
procédé de fabrication de pièces composites, les tolérances dimensionnelles serrées
ne soit pas réalisables dans une première étape. Dans ce cas, deux solutions sont
envisageables.
[0030] La première consiste à réaliser une préforme de dimension légèrement supérieure à
la pièce finie. Dans ce cas, l'ajustement des dimensions se fait par enlèvement de
matière par des procédés conventionnels de type tournage, etc.
[0031] La seconde solution consiste à réaliser une préforme de dimension légèrement inférieure
à la pièce finie. Dans ce cas, la préforme peut être ensuite placée entre deux moules,
usinés précisément aux dimensions de la pièce, pour subir une imprégnation.
[0032] Même si cette seconde solution doit présenter une masse totale de fibre légèrement
inférieure à la première solution, elle doit être préférée car l'usinage fragilise
la pièce (amorce de délaminage, rupture de fibre, écaillage du gel-coat, etc.).
[0033] Le matériau composite obtenu avec le procédé selon l'invention est constitué d'une
matrice en résine et d'un renfort.
[0034] Le choix de la matrice et du renfort dépendra des propriétés requises (résistance
à la rupture en traction, module de Young, tenue en température, etc.). A titre d'exemple,
la matrice peut être une résine époxyde ou une résine phénolique et le renfort peut
être en carbone, Kevlar
® (aramide) ou verre. La résine sera catalysée à l'aide de thermoamorceurs et éventuellement
photoamorceurs.
[0035] Le procédé décrit ci-dessous est un procédé dit à fibres longues offrant de meilleures
propriétés mécaniques (module d'élasticité, résistance à la traction, ténacité, etc.)
que les procédés dits à fibres courtes, et où le renfort peut être constitué d'un
fil (ou roving), d'un tissu ou d'une tresse.
[0036] Selon une première forme d'exécution de l'invention, le procédé sera décrit ci-après
pour un renfort de type fil. Ensuite, on décrira une variante de ce procédé pour un
renfort de type tissu ou tresse.
[0037] Le procédé dit « renfort fil » (PRF) s'inspire de la méthode de l'enroulement filamentaire.
[0038] Le matériau composite est formé d'un fil ou roving imprégné de résine enroulé de
façon continue autour d'un mandrin. Le matériau support est également déposé de façon
continue en cours de fabrication.
[0039] La figure 2 présente schématiquement les cinq étapes du procédé renfort fil selon
l'invention.
[0040] L'étape a) concerne le déroulement du renfort. Un rouleau 1 de renfort constitué
de fil ou roving est déroulé de façon continue. La vitesse de déroulement est fonction
de la vitesse de fabrication. Une alternative est l'utilisation directe de fils préimprégnés
auquel cas l'étape b) qui est décrite ci-dessous n'a plus de raison d'être. Par souci
de clarté, le renfort sera considéré comme étant formé par un seul fil de diamètre
D.
[0041] L'étape b) concerne l'imprégnation du fil (ou roving). Ce dernier va constituer le
renfort de la pièce composite. Il va donc être imprégné dans un bain de résine liquide
et catalysée 2 (voie humide). Comme mentionné précédemment, cette étape n'existe pas
dans le cas de l'utilisation de fils préimprégnés, encore appelés prépregs (voie sèche).
[0042] L'étape c) concerne l'enroulement du fil sur le mandrin. Le fil, guidé par une poulie
3 dont le déplacement axial est contrôlé précisément, s'enroule sur un mandrin 4.
Idéalement, le mandrin est réalisé en acier inoxydable. Il peut être ciré pour faciliter
le démoulage de la pièce finie. La pièce finie sera formée de plusieurs couches d'épaisseur
égale au diamètre D du fil (en négligeant l'épaisseur du mince film de résine). Chaque
couche sera formée de plusieurs spires jointives dans l'hypothèse d'un enroulement
à ∼90° par rapport à l'axe du mandrin. Pour ce faire, la poulie de guidage décrit
un mouvement dans le sens axial d'une quantité D à chaque tour de mandrin.
[0043] L'étape d) concerne la polymérisation de la résine. Soit la polymérisation au cours
de la fabrication suffit à atteindre un degré de polymérisation maximum, soit on atteint
un degré de polymérisation partiel. Dans ce dernier cas, la pièce finie devra subir
un cycle de post-polymérisation. Il est évident que la zone cylindrique comprise entre
le dépôt du matériau support et le dépôt du fil imprégné de résine - à savoir la partie
du mandrin non utilisée jusqu'à présent - peut être mise à profit pour continuer la
polymérisation du matériau composite et/ou le durcissement du matériau support (ex
: séchage du plâtre). La réticulation de la résine peut être amorcée par un rayonnement
UV ou IR 5. L'avantage du rayonnement UV est qu'il ne risque pas de fondre le matériau
support si celui-ci est de type fusible. Dans le cas présent où le renfort est simplement
formé par un fil, la lumière UV va diffuser et se diffracter de sorte que l'accrochage
du fil à la couche précédente sera probablement suffisant. Pour le procédé PRF, la
source UV semble donc préférable à la source IR. Une post-cuisson est toujours envisageable
afin d'achever la polymérisation de la matrice pour les parties de résines moins bien
exposées au rayonnement UV.
[0044] L'étape e) concerne le dépôt du matériau support. Le matériau doit se présenter sous
la forme d'un liquide plus ou moins visqueux, afin de permettre son dépôt. Il importe
que l'épaisseur du matériau support soit égale à l'épaisseur de la couche de matériau
composite elle-même égale à D. Il existe des techniques de dépôts de cire très précises
et utilisées notamment dans des techniques de prototypage rapide. Dans ce cas, la
cire est déposée en fines gouttelettes par une tête 6 formée d'une centaine de petites
buses d'injection côte à côte. La figure 2 montre dans sa partie inférieure droite
une vue de dessus du mandrin où on voit la configuration de la source UV ou IR 5 et
de la tête d'injection 6 sur le mandrin 4. La largeur de cette tête (∼200 mm) doit
être égale à la largeur de la zone de travail. Sinon, il suffit d'utiliser plusieurs
têtes.
[0045] Le procédé décrit ci-dessus sera plus clair à la lumière des figures 3A à 3G décrivant
respectivement les étapes successives de la fabrication d'une pièce complexe à symétrie
de révolution. On se limitera à titre d'exemple aux cinq premières couches, avec un
diamètre de fil choisi volontairement gros pour faciliter l'explication.
[0046] La section droite de la pièce 7 à réaliser est montrée sur la figure 3A. L'enroulement
de la première spire commence par la partie à l'extrême gauche de la pièce. Le rond
noir 8 représente la section droite du fil (figure 3B). Pour réaliser la première
couche, la poulie de guidage se déplace de gauche à droite de façon à former des spires
jointives. Simultanément à la réalisation de la première couche, le dépôt de matériau
support 9, à savoir la cire, se fait de part et d'autre de la pièce (figure 3C). La
seconde couche est réalisée de façon similaire à la première couche avec un déplacement
de la poulie de droite à gauche (figure 3D). La troisième couche est réalisée de façon
identique à la première couche avec un déplacement de la poulie de gauche à droite
(figure 3E). La quatrième couche est plus complexe à réaliser car elle nécessite la
réalisation simultanée de deux parties distinctes en matériau composite (figure 3F).
Un fil 10 issu d'une seconde bobine doit alors être enroulé pour réaliser la partie
gauche de la pièce. On notera qu'à partir de cette couche, le matériau support (cire)
est également déposé entre ces deux parties de matériau composite. La cinquième couche
et les couches suivantes sont fabriquées de façon similaire à la quatrième (figure
3G).
[0047] Une variante du procédé décrit ci-dessus est d'utiliser comme renfort un tissu 2D
ou une tresse plate plutôt qu'un fil. Le renfort utilisé dans cette variante du procédé
peut par exemple être un tissu avec des fibres de carbone orientées à 0 et 90° (tissu
0/90°) ou une tresse plate bi-axiale avec un angle de 60° entre les fibres de carbone
ou encore une tresse plate tri-axiale (tresse 0/±60°, quasi-isotrope), cette dernière
permettant d'obtenir de meilleures valeurs de résistance à l'impact et des propriétés
mécaniques quasi-identiques dans toutes les directions du plan de la tresse plate.
Le renfort peut également être constitué d'une alternance de tissu et de tresse; cette
alternance permettant d'améliorer les propriétés mécaniques globales. Tout autre renfort,
tel que par exemple un renfort 3D (stitching, Z-pinning, etc.), peut également, selon
l'invention, être appliqué pour augmenter les propriétés interlaminaires de la pièce
composite.
[0048] L'utilisation d'un tissu (ou une tresse) à la place d'un fil nécessite de modifier
certaines étapes du procédé PRF. Le procédé dit « renfort tissu » (ou tresse), encore
appelé PRT, comporte six étapes consécutives comme illustré à la figure 4. Par la
suite, on décrira le procédé pour un renfort tissu mais cela s'applique bien entendu
également à un renfort tresse.
[0049] L'étape a) concerne le déroulement du renfort de manière semblable au procédé PRF.
Un rouleau de renfort constitué de tissu sec 11 est déroulé de façon continue. La
vitesse de déroulement est fonction de la vitesse de fabrication. Une alternative
est l'utilisation directe de tissus préimprégnés, auquel cas l'étape b) décrite ci-dessous
n'a plus de raison d'être.
[0050] Le procédé PRT nécessite une étape supplémentaire, l'étape a'), de découpe de la
bande de tissu à la largeur désirée (repérée par une flèche verticale à la figure
4). En fonction de la couche en cours de réalisation et du fichier de DAO de la pièce,
la machine calcule la largeur de la (des) bande(s) de tissu à déposer comme illustré
à la figure 5. La zone de travail 12 est plus large que la pièce de façon à ce que
le support maintienne les parois extérieures de la pièce lors de la fabrication.
[0051] La découpe peut être parallèle ou perpendiculaire à la direction de défilement des
bandes selon la géométrie de la pièce à réaliser.
[0052] Pour une découpe parallèle au sens de défilement, la découpe du tissu peut se faire
de façon automatique par laser, par jet d'eau ou de façon mécanique. Des techniques
de découpe de prépregs par machine à commandes numériques donnent déjà satisfaction.
La largeur totale de la bande de tissu égale la largeur de la zone de travail comme
montré à la figure 5. Il importe que la vitesse de découpe soit nettement supérieure
à la vitesse de défilement du tissu. Réaliser deux découpes parallèles au sens du
défilement du tissu est alors possible à l'aide d'un seul système de découpe. La précision
actuelle dans le positionnement du système de découpe choisi doit permettre la réalisation
séquentielle d'une seule découpe (laser, découpe mécanique, etc.).
[0053] Dans l'exemple illustré à la figure 5, une seule et large bande de tissu est nécessaire
pour réaliser la couche n°i référenciée 13. Pour réaliser la couche n°j référenciée
14, quatre découpes parallèles au sens d'avancement du tissu sont nécessaires et donnent
deux bandes de tissu renfort, appelées bandes 'renfort' et trois bandes de chute de
tissu, appelées bandes 'chute'. On verra plus loin que les bandes 'renfort' 15 vont
vers un bac de résine 2 alors que les bandes 'chute' 16 sont acheminées vers un autre
bac 17 (voir figure 4).
[0054] L'outil de découpe, par ex. un spot laser, peut également se déplacer perpendiculairement
à la direction de défilement. Prenons l'exemple d'une virole dans laquelle il existe
une série d'ajours orientés de façon plus ou moins radiale. La découpe de ce type
de forme ne pose aucun problème pour un système de découpe à commandes numériques.
Cependant, il faudra tenir compte de la vitesse de défilement du tissu c.à.d. du déplacement
relatif du tissu par rapport à la machine de découpe. Encore une fois, dans l'hypothèse
d'une vitesse de coupe largement supérieure à la vitesse de défilement, cela ne devrait
pas poser de problèmes.
[0055] Notons que dans le cas d'un renfort alternant tissu et tresse, il est nécessaire
de disposer de deux systèmes de découpe indépendants pour chacun des types de renfort.
[0056] L'étape b) concerne l'imprégnation du renfort comme pour le procédé PRF. La bande
'renfort' 15 va constituer le renfort de la pièce composite comme son nom l'indique.
Il va donc être imprégné dans un bain de résine liquide et catalysée 2 (voie humide).
Cette étape n'existe pas dans le cas de l'utilisation de prépregs (voie sèche) ou
dans le cas de tissu sec associé à un liant ('binder').
[0057] Les bandes 'chute' 16 peuvent être utilisées comme support et, dans ce cas, être
dirigées vers un bac 17 où elles sont imprégnées de matériau support comme par exemple
de la cire chaude ou du plâtre humide ou encore être simplement imprégnées d'un agent
démoulant. Cette dernière solution doit probablement être évitée car l'agent démoulant
présente une viscosité très faible et, en conséquence, l'épaisseur du support risque
d'être plus faible que celle du matériau composite ; or, il importe que l'épaisseur
du matériau composite soit égale à l'épaisseur du support à tout moment.
[0058] L'étape c) est l'étape d'enroulement de la bande 'renfort' imprégnée de résine 22
sur le mandrin 4. Dans le cas de découpes perpendiculaires à la direction de défilement
(ajours), il importe que les ouvertures réalisées dans deux couches successives se
juxtaposent parfaitement. En théorie la commande du système de découpe prend en compte
une augmentation du rayon de la pièce en cours de fabrication. Cependant en pratique,
bien que l'épaisseur des couches soit précisément calibrée, il est possible qu'une
légère dérive apparaisse. Afin d'éviter tout risque de ce type, on peut conseiller
l'utilisation d'un système de régulation de la tension dans la bande de façon à corriger
cette éventuelle dérive et réaliser par ce fait la parfaite juxtaposition des différentes
couches. La régulation de la tension peut être gérée très simplement par un galet
tendeur et un actionneur. Le contrôle du placement des couches peut se faire en continu
de façon optique par caméra et traitement d'image. Il existe de tels systèmes utilisés
pour suivre les micro-déplacements axiaux et latéraux de certains points d'un coupon
soumis à un essai de traction.
[0059] L'étape d) concerne la polymérisation de la résine. Avant la polymérisation à proprement
parler, la couche déposée est calibrée. L'épaisseur du tissu limite l'épaisseur minimale
de la couche réalisable et conditionne donc la précision radiale de la pièce. Cependant,
l'épaisseur d'un tissu (∼125 µm) est généralement largement inférieure à l'épaisseur
totale de la pièce. De façon à s'assurer de la précision de l'épaisseur de chaque
couche, il est possible de déplacer radialement un rouleau, qu'on appellera rouleau
compresseur ou rouleau de calibrage. Le déplacement radial d est synchronisé avec
l'axe du mandrin tel que d égale l'épaisseur de la couche pour chaque tour de mandrin
(formule de la spirale). L'utilisation d'un rouleau permet non seulement de contrôler
les épaisseurs des couches déposées mais également d'augmenter le volume de fibre
V
f par compression. Il serait ainsi possible d'atteindre des taux de fibres de l'ordre
de 60% ou plus.
[0060] De préférence, un système de racle permet d'assurer un bon état de surface après
le passage du rouleau. Dans ce cas, la racle se déplace radialement de façon solidaire
avec le rouleau de calibrage. La configuration du rouleau de calibrage 18 et d'une
première racle 19 autour du mandrin 4 est présentée à la figure 6. L'enroulement du
renfort imprégné 22 se fait en premier lieu, suivi d'une compression pour assurer
un taux de fibre Vf élevé. La première racle 19 est placée avant la source de rayonnement
IR ou UV 5 pour garantir un bon état de surface.
[0061] La réticulation de la résine peut être amorcée par un rayonnement UV ou IR 5. L'avantage
du rayonnement UV est qu'il ne risque pas de fondre le matériau support si celui-ci
est de type fusible. L'inconvénient est que les UV ne traversent pas le tissu opaque
et la polymérisation de la couche de résine déposée sur la partie inférieure du tissu
sera moindre. Par opposition, l'infrarouge diffuse dans la matière, le transfert de
chaleur étant effectué par conduction, et assure une polymérisation de la résine entre
deux plis. Dans le cas d'un matériau support fusible, il peut être utile de diriger
le rayonnement IR sur le renfort imprégné uniquement, par exemple par une rangée de
LEDs IR. Il est possible également de choisir une longueur d'onde et une intensité
du rayonnement inoffensive pour le matériau support si ce dernier est fusible, par
exemple dans le cas de la cire. Par contre, l'utilisation de l'IR comme source est
non seulement inoffensive dans le cas d'un matériau soluble tel que le plâtre, mais
en plus elle va permettre d'accélérer le séchage du support. Dans le cas d'un support
100% cire, une alternative peut être envisagée pour échauffer le renfort imprégné
sans échauffer la cire: soumettre la surface cylindrique de la pièce en cours à un
champ magnétique variable. Les courants induits dans le tissu de carbone (conducteur)
vont échauffer ce dernier par effet Joule. On crée ainsi une distribution de source
volumique de chaleur là où elle est nécessaire uniquement. La cire, qui est un isolant
électrique, ne subira aucun échauffement.
[0062] Si nécessaire, une post-polymérisation de la pièce finie est toujours possible bien
que la polymérisation en cours de fabrication devrait suffire.
[0063] La dernière étape ou étape e) concerne le dépôt du support. Deux cas sont envisagés.
Soit le support est constitué du matériau support uniquement, par exemple de la cire
ou du plâtre ; dans ce cas, on ne fait pas usage des bandes 'chute'. Soit le support
21 est constitué du renfort c'est-à-dire du tissu (ou tresse plate) issu des bandes
'chute' plus du matériau support. Dans le premier cas, il existe des techniques de
dépôts par tête d'injection décrites dans le procédé PRF (non représenté à la figure
4). Dans le second cas, le renfort imprégné de cire chaude ou de plâtre humide 21
s'enroule de part et d'autre du matériau composite 20 de façon à combler les vides.
Une seconde racle 23 permet d'assurer l'égalité des épaisseurs du matériau composite
20 et du support 21 (voir figure 6). Ensuite, la cire se durcit en refroidissant ou
le plâtre se durcit en séchant.
[0064] En variante, le procédé PRT tel que décrit ci-dessus peut comporter une étape supplémentaire
de couture (ou stitching) des bandes de renfort entre elles dans une direction perpendiculaire
au plan du tissu ; cela permet d'éviter un éventuel glissement des bandes de tissu
et, en conséquence, cela permet d'assurer une meilleure résistance en interlaminaire
du composite. L'étape de couture s'effectue après l'étape d) sur le renfort imprégné
partiellement polymérisé; le tissu ou la tresse devant être suffisamment tendre pour
permettre l'insertion de l'aiguille au travers.
[0065] Dans cette variante, un cycle de post-polymérisation sera ensuite effectué une fois
la pièce finie.
Comparaison des procédés PRF et PRT
[0066] Notons que le procédé renfort tissu (PRT) présente plusieurs avantages comparé au
procédé renfort fil (PRF) :
- la cadence de fabrication du procédé renfort tissu (ou tresse) est supérieure. En
effet, pour la réalisation d'une couche de largeur 1 avec un fil de diamètre D, 1/D tours de mandrin sont nécessaires, contre un seul pour la méthode PRT. A titre d'exemple,
pour une pièce fabriquée avec le procédé PRT par superposition de 40 plis de renfort,
à raison de 1 tour de mandrin par minute, le temps de fabrication d'une pièce est
inférieur à une heure;
- l'enroulement à ∼90° en pose PRF va induire une faiblesse de la résistance en traction
de la pièce dans le sens axial. La méthode PRT permet de solutionner ce problème grâce
au tissu 0/90° ou à la tresse 0/+-60°;
- la complexité du procédé de fabrication PRF augmente avec la complexité de la pièce
(cfr dépôt de la quatrième couche décrite à la figure 3F). Le procédé PRT ne pose
pas ce problème grâce à la découpe automatisée du tissu;
- le rouleau de calibration utilisé dans le procédé PRT permet d'une part de s'assurer
de l'épaisseur de la couche déposée et également d'obtenir un taux de fibre Vf élevé;
- la post-polymérisation peut être évitée éventuellement dans le cas PRT alors qu'elle
sera probablement toujours nécessaire pour le procédé PRF. En effet la zone située
sous le fil déposé, étant plongée dans l'ombre, reçoit une densité d'UV insuffisante
conduisant à une polymérisation partielle. Pour atteindre un degré de polymérisation
élevé, il est alors nécessaire de faire subir à la pièce une post-cuisson. Le PRT,
en évitant peut-être cette étape supplémentaire, devrait offrir des temps de fabrication
et des coûts moindres.
Avantages du procédé renfort fil et tissu (ou tresse)
[0067] En conclusion, on peut rappeler les deux principaux avantages du procédé selon l'invention
que ce soit avec un renfort tissu (ou tresse) ou fil.
[0068] D'une part, ce procédé permet de réaliser des pièces de révolution à section droite
complexe (y compris des zones en surplomb), en composite, ce qui va permettre d'alléger
significativement les structures.
[0069] D'autre part, ce procédé permet d'automatiser la fabrication de telles pièces, offrant
ainsi une bonne répétabilité ainsi qu'une réduction des coûts de main d'oeuvre. Ce
procédé permet également une grande flexibilité au niveau des pièces obtenues par
opposition aux documents
EP 1 938 955 A1 et
US 5,176,864 A. Une infinité de pièces est ainsi réalisable sur la même machine avec pour seule
condition un diamètre minimum de pièce supérieur ou égal au diamètre du mandrin.
1. Procédé automatique de fabrication couche par couche d'une pièce composite de révolution
et de section droite complexe,
caractérisé en ce qu'il comprend les étapes suivantes:
a) On déroule de manière continue une bobine ou un rouleau comportant un renfort (1,11);
b) Optionnellement, on imprègne le renfort d'une résine liquide par passage dans un
bain (2);
c) On enroule le renfort imprégné (22) sur un mandrin (4) cylindrique en rotation;
d) On polymérise complètement ou partiellement le renfort imprégné (22) pour l'obtention
d'un matériau composite (20);
e) On dépose un support (21) et/ou un matériau support (9) de part et d'autre du matériau
composite (20) constituant la pièce en cours de fabrication de manière à combler des
vides entourant ladite pièce.
2. Procédé automatique de fabrication selon la revendication 1, caractérisé en ce que le renfort est un tissu ou une tresse.
3. Procédé automatique de fabrication selon la revendication 1, caractérisé en ce que le renfort peut être préimprégné de résine ou être une tresse ou un tissu sec associé
à un liant ('binder'), auquel cas, l'étape b) est absente.
4. Procédé automatique de fabrication selon la revendication 1, caractérisé en ce que le support (21) comporte le renfort imprégné du matériau support (9).
5. Procédé automatique de fabrication selon la revendication 1, comprenant en outre une
étape a') de découpe automatique du renfort en bandes dites 'renfort' (15) et en bandes
dites 'chutes' (16) de largeur variable selon la géométrie de la pièce à réaliser,
après l'étape a).
6. Procédé automatique de fabrication selon la revendication 5, caractérisé en ce que, parallèlement à l'étape b) mise en ouvre, les bandes 'chutes' (16) sont imprégnées
par le matériau support (9), formant ainsi le support (21) qui sera utilisé dans l'étape
e).
7. Procédé automatique de fabrication selon la revendication 1 caractérisé en ce que, dans l'étape d), la réticulation de la résine est amorcée par un rayonnement UV
ou IR (5).
8. Procédé automatique de fabrication selon la revendication 1, caractérisé en ce que, dans l'étape d), le renfort imprégné (22) est échauffé par effet Joule au moyen
d'un champ magnétique variable appliqué à la pièce en cours de réalisation.
9. Procédé automatique de fabrication selon la revendication 1 caractérisé en ce que le dépôt de matériau support (9) s'effectue par pulvérisation de fines gouttelettes
au moyen d'une tête d'injection (6), ledit matériau support (9) étant sous forme liquide
avec une viscosité appropriée pour l'injection.
10. Procédé automatique de fabrication selon la revendication 2 ou 3, comportant en outre
une étape de couture (stitching) des renforts imprégnés partiellement polymérisés
à l'étape d), ladite couture s'effectuant dans une direction perpendiculaire aux plis
de renfort enroulés.
11. Procédé automatique de fabrication selon l'une quelconque des revendications précédentes,
caractérisé en ce que la pièce finie subit un cycle de post-polymérisation.
12. Procédé automatique de fabrication selon l'une quelconque des revendications précédentes,
caractérisé en ce que la résine est une résine thermodurcissable, celle-ci étant catalysée à l'aide d'un
photoamorceur ou d'un thermoamorceur.
13. Procédé automatique de fabrication selon l'une quelconque des revendications précédentes,
caractérisé en ce que le matériau support (9) est un matériau à bas point de fusion, un matériau soluble
dans un solvant, un matériau cassable, c'est-à-dire friable après solidification ou
un matériau pulvérulent à certaines températures.
14. Procédé automatique de fabrication selon l'une quelconque des revendications précédentes,
caractérisé en ce qu'après réalisation de la pièce couche par couche, le support (21) ou le matériau support
(9) est séparé de ladite pièce et ladite pièce extraite de son mandrin.
15. Pièce composite de révolution et de section droite complexe obtenue avec le procédé
selon l'une quelconque des revendications précédentes.