[0001] L'invention concerne un casque audio comprenant un système de "contrôle actif de
bruit".
[0002] Un tel casque peut être utilisé pour l'écoute d'une source audio (musique par exemple)
provenant d'un appareil tel qu'un lecteur MP3, radio,
smart-phone, etc. auquel il est relié par une liaison filaire ou bien par une liaison sans fil,
notamment une liaison de type
Bluetooth (marque déposée du Bluetooth SIG).
[0003] S'il est pourvu d'un ensemble microphonique apte à capter la voix du porteur du casque,
il est également possible d'utiliser ce casque pour des fonctions de communication
telles que des fonctions de téléphonie "mains-libres", en complément de l'écoute de
la source audio. Le transducteur du casque reproduit alors la voix du locuteur distant
avec lequel le porteur du casque est en conversation.
[0004] Le casque comprend deux écouteurs réunis par un arceau. Chaque écouteur comprend
une coque fermée logeant un transducteur de reproduction sonore (ci-après simplement
désigné "transducteur") et destinée à être appliquée autour de l'oreille de l'utilisateur
avec interposition d'un coussinet circumaural isolant l'oreille de l'environnement
sonore extérieur. Lorsque le casque est utilisé dans un environnement bruyant (métro,
rue passante, train, avion, etc.) le porteur est partiellement protégé du bruit par
les écouteurs du casque, qui l'isolent grâce à la coque fermée et au coussinet circumaural.
[0005] Toutefois, cette protection purement passive n'est que partielle, une partie des
sons, notamment dans la partie basse du spectre de fréquences, pouvant être transmis
jusqu'à l'oreille au travers de la coque des écouteurs, ou encore via la boîte crânienne
du porteur.
[0006] C'est pour cette raison qu'ont été développés des techniques dites de "contrôle actif
de bruit" ou ANC (
Active Noise Control), dont le principe consiste à capter la composante de bruit incidente au moyens d'un
microphone placé sur la coque des écouteurs du casque et à superposer, temporellement
et spatialement, à cette composante de bruit une onde acoustique qui est idéalement
la copie inversée de l'onde de pression de la composante de bruit. Il s'agit de créer
de cette manière une interférence destructive avec la composante de bruit et réduire,
idéalement neutraliser, les variations de pression de l'onde acoustique parasite.
[0007] La mise en oeuvre de ce principe implique de résoudre un nombre important de difficultés,
ce qui a conduit à des propositions de nature très variée, que l'on peut regrouper
en deux catégories.
[0008] Une
première catégorie est celle des procédés ANC utilisant des filtres adaptatifs, c'est-à-dire des filtres
dont la fonction de transfert est modifiée dynamiquement, en continu, par un algorithme
d'analyse en temps réel du signal. Ces traitements ont pu être mis en oeuvre notamment
grâce au développement des techniques de numérisation et de traitement du signal par
des processeurs spécialisés, programmés pour mettre en oeuvre des algorithmes temps
réel.
[0010] Ces techniques peuvent être efficaces sur le plan de la réduction du bruit, mais
elles présentent l'inconvénient d'êtres nécessairement numériques et d'exiger une
puissance de calcul relativement importante, avec pour conséquence une conception
relativement complexe et un coût de réalisation assez élevé.
[0011] De plus, le traitement numérique introduit des retards non négligeables dans le signal
de compensation, et le caractère adaptatif implique un temps de convergence minimal
des algorithmes. Tout ceci nuit à la réactivité du système, notamment à l'égard des
bruits irréguliers. De ce fait, le débruitage est surtout efficace à l'encontre des
bruits essentiellement périodiques, dans des bandes étroites.
[0012] La
seconde catégorie de procédés ANC - à laquelle appartient la technique de l'invention - est celle des
systèmes à filtrage fixe, non adaptatifs, c'est-à-dire où les paramètres des divers
filtres utilisés sont prédéterminés.
[0013] Ces systèmes ANC combinent des filtrages fixes de type
feedback, en boucle fermée, et
feedforward, en boucle ouverte. La voie de filtrage
feedback se base sur un signal recueilli par un microphone disposé à l'intérieur de la cavité
acoustique (ci-après "cavité avant") délimitée par la coque de l'écouteur, le coussinet
circumaural et le transducteur. En d'autres termes, ce microphone est disposé à proximité
de l'oreille de l'utilisateur, et reçoit principalement le signal produit par le transducteur
et le signal de bruit résiduel, non neutralisé, encore perceptible dans la cavité
avant. Le signal de ce microphone, duquel est soustrait le signal audio de la source
musicale à reproduire par le transducteur, constitue un signal d'erreur pour la boucle
de rétroaction du système ANC. La voie de filtrage
feedforward, quant à elle, utilise le signal capté par le microphone externe recueillant le bruit
parasite régnant dans l'environnement immédiat du porteur du casque.
[0014] Un tel système est notamment décrit par le
US 2010/0272276 A1 qui, outre les voies de filtrage
feedback et
feedforward, prévoit une troisième voie de filtrage, qui traite le signal audio issu de la source
musicale à reproduire. Les signaux de sortie des trois voies de filtrage sont combinés
et appliqués au transducteur pour reproduire le signal de la source musicale associé
à un signal de suppression du bruit environnant.
[0015] Les paramètres des divers filtres étant fixes, les techniques à filtrage fixe peuvent
être implémentées aussi bien en technologie analogique que numérique, de façon moins
exigeante en termes de ressources que pour les techniques à filtres adaptatifs.
[0016] Les procédés à filtrage fixe présentent toutefois des limitations et des inconvénients.
[0017] Un premier inconvénient est la sensibilité relativement importante aux variations
des chemins électroacoustiques entre le transducteur et le microphone d'erreur, c'est-à-dire
le microphone interne placé dans la cavité avant. La réponse électro-acoustique entre
ces deux éléments peut en effet être modifiée en raison des variations de volume de
la cavité avant et de son étanchéité par rapport à l'extérieur. Les principaux facteurs
susceptibles de faire varier cette réponse électro-acoustique sont le positionnement
du casque sur la tête, la forme de l'oreille de l'utilisateur, les serrages différents
du casque sur la tête, et la présence de cheveux à l'endroit où les coussinets circumauraux
viennent en appui. D'autres variations peuvent être dues aux composants électroniques
utilisés (résistances, condensateurs, transducteur et microphone), dont les caractéristiques
électriques sont susceptibles de fluctuer au cours du temps.
[0018] Ces variations de réponse acoustique sont susceptibles de produire un effet indésirable
appelé
waterbed effect : au-delà de la bande de fréquences principale de suppression des bruits, le bruit
va se trouver amplifié dans une bande de fréquences relativement étroite, en général
autour de 1 kHz, de façon parfaitement perceptible et bien entendu nuisible. S'il
est trop important ce phénomène peut même engendrer un effet Larsen, phénomène que
l'on peut constater pour de nombreux casques lorsque le coussinet est accidentellement
enlevé.
[0019] Un autre facteur à prendre en compte est le volume de la cavité avant, dans la mesure
où un volume avant réduit augmente la variabilité de la réponse électroacoustique
entre le transducteur et le microphone d'erreur, car dans ce cas la variation relative
du volume entre la position normale d'écoute et la position de transition où l'utilisateur
approche le casque sur sa tête sera plus importante.
[0020] Un faible volume de cavité avant est donc un facteur supplémentaire de perte de stabilité
de la boucle de rétroaction, avec les mêmes conséquences que celles exposées plus
haut. Or, en pratique il est souhaitable de réaliser des écouteurs de volume relativement
réduit, tant pour des raisons de confort que de poids, ce qui va donc à l'encontre
de l'exigence de stabilité du système ANC.
[0021] Concrètement, les réglages des diverses voies de filtrage sont ajustées de manière
à produire des performances correspondant à une réponse électroacoustique donnée,
pour des marges de gain et de phase permettant de garantir une stabilité suffisante
et des performances maximales. On estime à cet égard qu'un système à boucle fermée
doit en général présenter une marge de phase supérieure à 45° et une marge de gain
d'au moins 10 dB. Mais ces marges théoriques s'avèrent souvent insuffisantes, du fait
de la grande variabilité des réponses électroacoustiques rencontrées en pratique dans
le domaine des casques à contrôle actif de bruit.
[0022] Le problème de l'invention est, dans un tel système ANC non adaptatif, de lutter
contre les risques d'instabilité, avec des marges de gain et de phase accrues permettant,
malgré un faible volume de cavité avant, d'éviter toute apparition d'effet
waterbed ou Larsen en dépit des variations de mise en place du casque sur la tête, de serrage
des écouteurs, d'étanchéité plus ou moins bonne au niveau des coussinets circumauraux.
[0023] Cette amélioration de la stabilité devra bien entendu être obtenue sans dégradation
des performances antibruit du système ANC, c'est-à-dire que celui-ci devra conserver
toute son efficacité de neutralisation des composantes de bruit parasite, quel que
soit leur caractère plus ou moins périodique et leur spectre fréquentiel.
[0024] Bien entendu, le signal audio issu de la source musicale (ou la voix du locuteur
distant, dans une application de téléphonie) ne devra pas être distordu et son spectre
ne devra pas être amputé par le traitement ANC, bien que le signal de neutralisation
de bruit et le signal audio à reproduire soient amplifiés par le même canal et reproduits
par le même transducteur.
[0025] L'idée de base de l'invention consiste à réduire la bande passante du filtre
feedback dans le haut du spectre, c'est-à-dire dans la zone fréquentielle instable, de manière
à réduire, voire supprimer, les risques d'effet
waterbed ou Larsen. Cette limitation de la bande passante pourra procurer, comme on le verra,
une augmentation de la marge de gain d'au moins 15 dB, de préférence au moins 17 dB,
et de la marge de phase d'au moins 45°, de préférence au moins 60°.
[0026] Parallèlement, le filtre
feedforward compensera la perte en performances dans les fréquences supérieures du spectre de
bruit à éliminer (c'est-à-dire autour de 1 kHz).
[0027] Enfin, un filtre stabilisateur est disposé en parallèle du filtre
feedback. Ce filtre stabilisateur permet d'augmenter la marge de phase du filtre
feedback grâce à l'augmentation de la phase dans la zone critique de l'effet
waterbed : pour compenser la diminution de phase due à l'acoustique, en particulier du fait
du chemin de propagation du son du transducteur jusqu'au microphone d'erreur, une
résonance limitée est créée par le filtre stabilisateur afin de remonter la phase
et augmenter ainsi la marge de phase.
[0028] Ces trois voies (
feedback, feedforward et stabilisateur) sont agencées en parallèle, et les signaux délivrés en sortie des
filtres sont combinés entre eux et avec le signal audio à reproduire au moyen d'un
combineur délivrant une combinaison linéaire de ces différents signaux, pour amplification
et reproduction par le transducteur.
[0029] Plus précisément, l'invention concerne un casque comportant un système de contrôle
actif de bruit comportant, de manière en elle-même connue d'après le
US 2010/0272276 A1 précité, deux écouteurs réunis par un arceau de maintien et comportant chacun un
transducteur de reproduction sonore d'un signal audio à reproduire, transducteur logé
dans une cavité acoustique délimitée par une coque pourvue d'un coussinet circumaural.
Ce casque comporte un système de contrôle actif de bruit avec :
- une première branche feedforward en boucle ouverte, avec un premier filtre passe-bande recevant en entrée un signal
délivré par un microphone externe apte à capter un bruit acoustique régnant dans l'environnement
du casque ;
- une deuxième branche feedback en boucle fermée, avec un deuxième filtre passe-bande recevant en entrée un signal
d'erreur délivré par un microphone interne à la cavité ;
- une troisième branche avec un troisième filtre ; et
- un circuit de mixage, recevant en entrée les signaux délivrés par les premier, deuxième
et troisième filtres ainsi que le signal audio à reproduire, et délivrant en sortie
un signal apte, après amplification, à piloter le transducteur.
[0030] De façon caractéristique de l'invention :
- le contrôle actif de bruit est un contrôle non adaptatif, les paramètres des premier,
deuxième et troisième filtres étant des paramètres prédéterminés ;
- le troisième filtre est un filtre passe-bande stabilisateur agencé en parallèle de
la deuxième branche feedback, recevant en entrée le signal délivré par le microphone interne, et délivrant en sortie
un signal appliqué en entrée du circuit combineur, ce troisième filtre étant apte
à augmenter localement la phase de la fonction de transfert du deuxième filtre dans
un zone d'instabilité prédéterminée ;
- les première, deuxième et troisième branches sont agencées en parallèle, et le circuit
de mixage est un circuit sommateur délivrant en sortie une combinaison linéaire des
signaux délivrés par les premier, deuxième et troisième filtres ainsi que d'au moins
une fraction du signal audio à reproduire, avec pondération des gains respectifs appliqués
à ces signaux.
[0031] La zone d'instabilité prédéterminée en question est notamment une zone d'effet
waterbed autour d'une fréquence de 1 kHz.
[0032] La fréquence de coupure supérieure du deuxième filtre est de préférence inférieure
à 150 Hz, de préférence inférieure à 120 Hz, et sa largeur de bande inférieure à 65
Hz, de préférence inférieure à 55 Hz.
[0033] La marge de gain de la branche
feedback du contrôle actif de bruit est avantageusement d'au moins 15 dB, de préférence au
moins 17 dB, et la marge de phase d'au moins 45°, de préférence au moins 60°.
[0034] Le signal audio à reproduire est de préférence appliqué en entrée à la fois du deuxième
filtre et du circuit sommateur, le deuxième filtre recevant en entrée un signal obtenu
par combinaison dudit signal d'erreur délivré par le microphone interne avec au moins
une fraction du signal audio à reproduire, et il n'est pas appliqué au troisième filtre.
[0035] On va maintenant décrire un exemple de mise en oeuvre du dispositif de l'invention,
en référence aux dessins annexés où les mêmes références numériques désignent d'une
figure à l'autre des éléments identiques ou fonctionnellement semblables.
La Figure 1 illustre de façon générale un casque audio reposant sur la tête d'un utilisateur.
La Figure 2 est une représentation schématique montrant les différents signaux acoustiques
et électriques ainsi que les divers blocs fonctionnels impliqués dans le fonctionnement
d'un casque audio à contrôle actif de bruit.
La Figure 3 est une coupe en élévation de l'un des écouteurs du casque selon l'invention,
montrant la configuration des divers éléments mécaniques et organes électromécaniques
de celui-ci.
La Figure 4 est une vue de face de l'écouteur de la Figure 3.
La Figure 5 est une vue de dos de l'écouteur des Figures 3 et 4.
La Figure 6 est une vue de dessous de l'écouteur des Figures 3 à 5.
La Figure 7 est une vue générale, sous forme de diagramme fonctionnel, des divers
éléments du système de contrôle actif de bruit du casque de l'invention.
La Figure 8 illustre un exemple de réalisation, sous forme analogique, du filtre feedforward de la Figure 7.
La Figure 9 illustre un exemple de réalisation, sous forme analogique, du filtre feedback de la Figure 7.
La Figure 10 illustre un exemple de réalisation, sous forme analogique, du filtre
stabilisateur de la Figure 7.
La Figure 11 est une caractéristique illustrant l'atténuation introduite par la coque
de l'écouteur, rapportée à l'atténuation interne de la cavité avant de l'écouteur.
La Figure 12 représente, en amplitude et en phase, le diagramme de Bode de la fonction
de transfert du filtre feedforward du circuit de la Figure 7.
La Figure 13 représente le lieu de Black du système de contrôle actif de bruit selon
l'invention, avec et sans action du filtre stabilisateur.
La Figure 14 représente le module de la fonction de transfert du filtre feedback du circuit de la Figure 7 pour différentes configurations (avec bande passante complète,
avec bande passante réduite, avec et sans filtre stabilisateur).
La Figure 15 représente la phase de la fonction de transfert du filtre feedback du circuit de la Figure 7, également pour différentes configurations.
La Figure 16 est le tracé de Nyquist du circuit de la Figure 7, également pour différentes
configurations.
La Figure 17 représente la caractéristique d'atténuation, en boucle fermée, du circuit
de la Figure 7, également pour différentes configurations.
[0036] Sur la Figure 1, on a représenté un casque audio posé sur la tête de son utilisateur.
Ce casque comporte, de manière en elle-même classique, deux écouteurs 10, 10' réunis
par un arceau de maintien 12. Chacun des écouteurs 10 comprend une coque extérieure
14 venant s'appliquer sur le contour de l'oreille de l'utilisateur, avec interposition
entre la coque 14 et la périphérie de l'oreille d'un coussinet souple circumaural
16 destiné à assurer une étanchéité satisfaisante, du point de vue acoustique, entre
la région de l'oreille et l'environnement sonore extérieur.
[0037] La Figure 2 est une représentation schématique montrant les différents signaux acoustiques
et électriques ainsi que les divers blocs fonctionnels impliqués dans le fonctionnement
d'un casque audio à contrôle actif de bruit.
[0038] L'écouteur 10 enferme un transducteur de reproduction sonore 18, ci-après dénommé
simplement "transducteur", porté par une cloison 20 définissant deux cavités, à savoir
une cavité avant 22 du côté de l'oreille et une cavité arrière 24 du côté opposé.
[0039] La cavité avant 22 est définie par la cloison intérieure 18, la paroi 14 de l'écouteur,
le coussinet 16 et la face externe de la tête de l'utilisateur dans la région de l'oreille.
Cette cavité est une cavité fermée, à l'exception des inévitables fuites acoustiques
dans la région de contact du coussinet 16. La cavité arrière 24 est une cavité fermée,
à l'exception d'un évent acoustique 26 permettant d'obtenir un renforcement des fréquences
basses dans la cavité avant 22 de l'écouteur. Un tel renforcement acoustique est plus
avantageux qu'une amplification électrique, car il permet une amélioration de l'effet
de suppression du bruit ambiant par le système de contrôle actif, sans saturation
et avec un bruit électrique moindre.
[0040] Pour le contrôle actif du bruit, l'écouteur 10 porte un microphone externe 28 destiné
à capter le bruit environnant à l'extérieur de l'écouteur, schématisé par l'onde 30.
Le signal recueilli par ce microphone externe 28 est appliqué à un étage de filtrage
feedforward 32 du système de contrôle actif de bruit.
[0041] Chaque écouteur 10, 10' est muni de son propre système de contrôle actif de bruit,
les microphones externes respectifs 28, 28' (Figure 1) étant indépendants l'un de
l'autre.
[0042] Le casque peut éventuellement porter, comme illustré Figure 1, un autre microphone
externe 34 destiné à des fonctions de communication, par exemple si le casque est
pourvu de fonctions de téléphonie "mains-libres". Ce microphone externe additionnel
34 est destiné à capter la voix du porteur du casque, il n'intervient pas dans le
contrôle actif du bruit et dans la suite on ne considérera comme microphone externe
que le(s) microphone(s) 28 dédié(s) au contrôle actif du bruit.
[0043] Le casque est également pourvu d'un microphone interne 36 disposé au plus près du
conduit auditif de l'oreille, pour capter le bruit résiduel présent dans la cavité
interne 22, bruit qui sera perçu par l'utilisateur.
[0044] En faisant abstraction du signal audio de la source musicale reproduite par le transducteur
(ou de la voix du locuteur distant, dans une application de téléphonie), le signal
acoustique capté par ce microphone interne 36 est une combinaison :
- du bruit résiduel 30 provenant de la transmission du bruit externe environnant 30
au travers de la coque 14 de l'écouteur, et
- d'une onde sonore 40 générée par le transducteur 18, qui est, idéalement, la copie
inversée du bruit 38, c'est-à-dire du bruit à supprimer au point d'écoute, selon le
principe des interférences destructives.
[0045] La neutralisation du bruit par l'onde sonore 40 n'étant jamais parfaite, le microphone
interne 36 recueille un signal résiduel qui est utilisé comme signal d'erreur e appliqué
à une branche de filtrage
feedback 42 en boucle fermée et à une branche stabilisatrice 44 (spécifique à l'invention)
dont les signaux sont combinés en 46 avec le signal de la branche
feedforward en boucle ouverte 32 pour piloter le transducteur 18.
[0046] En outre, le transducteur 18 reçoit un signal audio à reproduire issu d'une source
musicale (baladeur, radio, etc.), ou bien la voix du locuteur distant, dans une application
de téléphonie. Comme ce signal subit les effets de la boucle fermée qui le distord,
il sera prétraité en amont par une égalisation dans un processeur numérique de signal,
de manière à présenter la fonction de transfert désirée, déterminée par le gain de
la boucle ouverte et la réponse cible sans contrôle actif.
[0047] Les Figures 3 à 6 illustrent, selon plusieurs angles de vue, un exemple de réalisation
des différents éléments mécaniques et électroacoustiques représentés schématiquement
sur la Figure 2, pour l'un des écouteurs 10 (l'autre écouteur 10' étant réalisé identiquement).
[0048] On y retrouve la cloison 20 divisant l'intérieur de la coque 14 en une cavité avant
22 et une cavité arrière 24 avec, montés sur cette cloison, le transducteur 18 et
le microphone interne 36 porté par une grille 48 maintenant celui-ci à proximité du
conduit auditif de l'utilisateur. Sur les Figures 5 et 6, on a également représenté
le microphone externe 28 dédié au contrôle actif de bruit et le microphone additionnel
34 pour les fonctions de communication "mains-libres", ainsi que l'évent 26, constitué
par exemple d'une série de petits trous recouverts d'une grille en matière plastique
acoustiquement résistive.
[0049] La Figure 7 illustre sous forme de schéma par blocs le circuit de contrôle actif
de bruit selon l'invention, avec les fonctions de transfert électriques et acoustiques
impliquées dans le fonctionnement de ce circuit.
[0050] Le circuit comporte essentiellement trois branches agencées en parallèle, avec un
filtre
feedforward 32, un filtre
feedback 42 et un filtre stabilisateur 44.
[0051] Le signal recueilli par le microphone externe 28 est préamplifié par un gain G1 (par
exemple G1 = +8 dB), puis est appliqué au filtre
feedforward 32.
[0052] Le signal recueilli par le microphone interne 36 est appliqué concurremment au filtre
stabilisateur 44 et au filtre
feedback 42, avec application de gains respectifs G2 (par exemple G2 = 0 dB), et G3 (par exemple
G3 = +9 dB).
[0053] Les signaux issus en parallèle des filtres 32, 44 et 42 sont combinés entre eux par
un sommateur 46 avec application de gains respectifs G5, G6 et G7 (par exemple G5
= -6 dB pour le signal issu du filtre
feedforward 32, G6 = +6 dB pour le signal issu du filtre stabilisateur 44 et G7 = 0 dB pour le
signal issu du filtre
feedback 42)
.
[0054] Le signal audio
S (signal
line-in) issu de la source musicale (baladeur MP3, radio, etc.) ou des circuits de téléphonie
fait l'objet d'un traitement numérique (décodage, égalisation, effets audio tels que
spatialisation, etc.) par un processeur numérique de signal ou DSP 50. Par ailleurs,
comme ce signal subit les effets de la boucle fermée qui le distord, il est prétraité
en amont dans le DSP 50 par une égalisation appropriée, de manière à présenter la
fonction de transfert désirée, déterminée par le gain de la boucle ouverte et la réponse
cible sans contrôle actif.
[0055] Le signal audio en sortie du DSP 50 est appliqué au circuit de contrôle actif en
deux endroits, respectivement :
- avec application d'un gain G4 (par exemple G4 = -14 dB), au filtre feedback 42, et
- avec application d'un gain G8 (par exemple G4 = -6 dB), à un sommateur 52 qui combinera
ce signal à celui capté par le microphone interne 36 après que ce dernier ait été
préamplifié du gain G3, pour l'appliquer en entrée du filtre feedback 42.
[0056] L'injection du signal audio à reproduire S en deux endroits différents du circuit
permet d'obtenir une égalisation équilibrée entre les fréquences graves et les fréquences
aiguës. En effet, la partie du signal injectée en entrée du sommateur général 46 subira
l'atténuation du contrôle actif, ce qui donnera des composantes fréquentielles aiguës
; à l'opposé, la partie du signal injectée sur le sommateur 52 en entrée du filtre
feedback 42 subira le filtrage passe-bas du circuit, donnant des composantes fréquentielles
graves. Les gains respectifs G8 et G4 appliqués à ces deux parties de signal permettent
d'équilibrer les graves et les aigus du spectre du signal à reproduire.
[0057] On notera que le signal audio à reproduire est injecté uniquement en entrée du filtre
feedback 42 (via le sommateur 52), mais ne l'est pas dans la branche du filtre stabilisateur
44, ce qui permet d'ajuster ce filtrage stabilisateur sans perturber l'égalisation
de la musique à reproduire : en effet, le filtre stabilisateur 44 ne reçoit que le
son capté par le microphone interne 36, à l'exclusion du signal audio à reproduire,
qui n'interfère donc pas sur la fonction de stabilisation.
[0058] Enfin, le signal de sortie du sommateur général 46, qui est une combinaison linéaire
des signaux issus des trois voies de filtrage
feedforward, feedback et de stabilisation ainsi que du signal audio à reproduire, est appliqué au transducteur
18 après amplification par un étage de puissance 54.
[0059] Les Figures 8, 9 et 10 illustrent des exemples de réalisation, en technologie analogique,
respectivement des filtres
feedforward 32,
feedback 42 et stabilisateur 44. Sur ces figures,
Vi et
Vo indiquent aux tensions respectivement d'entrée et de sortie des filtres, et
Vmid indique la tension milieu entre les bornes positives et négatives de l'alimentation
de l'amplificateur opérationnel utilisé par le filtre. On décrira plus en détail,
en référence aux Figures 12 à 17, les fonctions de transfert respectives de ces différents
filtres et la manière dont notamment le filtre stabilisateur 44 permet de modifier
la réponse du filtre
feedback 42 de manière à augmenter les performances globales du système de contrôle actif
de bruit.
[0060] Comme on peut le constater, ces trois filtres peuvent être réalisés avec un minimum
de composants, donc avec un coût matériel très faible.
[0061] Par ailleurs, dans les exemples illustrés, les filtres
feedforward 32 et
feedback 42 sont réalisés sous forme de filtres passe-bas d'ordre 1, mais il est possible
sans difficulté de réaliser des filtres passe-bande d'ordre 2 par modification des
éléments résistifs et capacitifs.
[0062] On va maintenant décrire le fonctionnement général du système de contrôle actif de
bruit selon l'invention, dont on vient de présenter l'architecture générale.
[0063] On utilisera les notations suivantes :
- Hc : fonction de transfert entre le signal reçu par le microphone externe 28 et le signal
reçu par le microphone interne 36, représentative de la fraction du bruit extérieur
qui a traversé la coque de l'écouteur du casque ;
- Ho : fonction de transfert entre le signal reproduit par le transducteur 18 et le signal
reçu par le microphone externe 28, représentative de la fraction de signal acoustique
qui a été transmise par la coque de l'écouteur jusqu'au microphone externe ;
- Ha : fonction de transfert entre le signal produit par le transducteur 18 et le signal
reçu par le microphone interne 36 ;
- d : signal de bruit environnant (signal de bruit à atténuer, idéalement à neutraliser
par le contrôle actif) ;
- e : signal d'erreur délivré par le microphone interne 36 (signal que l'on souhaite
minimiser),
- HFF : fonction de transfert du filtre feedforward 32 (qui est une fonction fixe, non adaptative),
- HFB : fonction de transfert du filtre feedback 42 (qui est également une fonction fixe), le cas échéant modifiée par la mise en
oeuvre du filtre stabilisateur 44.
[0064] Si l'on cherche à représenter le signal d'erreur
e en fonction du signal de bruit
d, on obtient la fonction de transfert suivante du microphone externe 28 vers le microphone
interne 38 (ce microphone, situé au plus près du conduit auditif de l'utilisateur,
représentant le signal perçu au point d'écoute) :

[0065] Le terme ε représente tous les rebouclages d'ordres supérieurs ou égaux à 2 ; concrètement,
ce terme est négligeable devant les autres termes du numérateur et on en fera abstraction.
Par ailleurs |
Ho| << |
Ha|, car
Ho contient l'atténuation supplémentaire due à la coque de l'écouteur.
[0066] La Figure 8 illustre un exemple de relevé en fonction de la fréquence du module de
Ho/
Ha, qui représente donc l'atténuation de la coque de l'écouteur par rapport à l'atténuation
interne de la cavité.
[0067] Si l'on fait l'approximation |
Ho| << |
Ha|
, la fonction de transfert du bruit peut donc se simplifier pour donner :

[0068] Pour que le bruit recueilli par le microphone interne soit faible, c'est-à-dire pour
minimiser le signal d'erreur, il faut que :

[0069] Du point de vue de la stabilité, la stabilité du
feedforward HFF est supérieure à celle du
feedback HFB du fait de l'absence de boucle de rétroaction (le
feedforward opère en boucle ouverte).
[0070] En revanche, comme on l'a expliqué en introduction, le
feedforward et le
feedback ont tendance à produire un effet indésirable d'amplification du bruit dans une petite
bande de fréquences au-delà de la bande de suppression du bruit, en général autour
de 1 kHz (
"waterbed effect"). De plus, avec la rétroaction du filtre
feedback, cet effet peut rapidement s'emballer et se transformer en effet Larsen.
[0071] Or, bien que le
feedforward soit plus stable, il ne peut pas être utilisé sans
feedback, car la suppression de bruit qu'il procure seul est moins efficace. En effet, pour
avoir une suppression parfaite, il faudrait que
HFF =
Hc/
Ha, ce qui est difficile à atteindre car
Hc et
Ha sont très variables pour les raisons citées plus haut : volume avant variable et
réduit, position et serrage du casque, etc. En pratique, la suppression de bruit par
un filtre
feedforward seul est typiquement proche de 10 dB, alors qu'avec un
feedback il est possible d'atteindre 20 dB.
[0072] L'invention permet précisément de pallier les inconvénients que l'on vient d'exposer.
Essentiellement, l'invention propose :
1°) de réduire la bande de fréquences du filtre feedback, de manière à augmenter les marges de gain et de phase (typiquement à au moins 15
dB et 60°), notamment dans la zone fréquentielle où se situent les risques d'instabilité
incontrôlée ;
2°) de compenser par le filtre feedforward la baisse corrélative de performances dans les plus hautes fréquences (jusqu'à 1
kHz) ; et
3°) de réduire l'effet waterbed par un filtre stabilisateur associé au filtre feedback, ce qui permet de diminuer, voire de supprimer, les risques d'effet Larsen.
[0073] On notera que l'augmentation des marges de gain et de phase par une réduction de
la bande passante a été choisie de préférence à une réduction du gain en boucle ouverte
(qui aurait également permis d'augmenter ces marges) : une réduction du gain en boucle
ouverte présente en effet l'inconvénient de réduire les performances maximales du
contrôle actif de bruit, à l'opposé d'une réduction de la bande passante, qui ne réduit
que la bande de fréquences d'atténuation du circuit de contrôle du bruit. C'est donc
pour ne pas réduire l'atténuation maximale du bruit que la réduction de la bande passante
a été choisie de préférence à une réduction du gain en boucle ouverte du filtre
feedback.
[0074] En ce qui concerne le filtre
feedforward, celui-ci est plus stable car il opère en boucle ouverte. Il peut donc être utilisé
dans les fréquences les plus hautes (jusqu'à 1 kHz) pour compenser la perte de bande
passante du filtre
feedback. Ce filtre
feedforward présente un gain faible et un facteur de qualité faible par rapport à celui du filtre
feedback, et ses performances sont ajustées pour couvrir une large bande de fréquences.
[0075] La Figure 12 illustre le diagramme de Bode (amplitude et phase en fonction de la
fréquence) de ce filtre
feedforward 32.
[0076] En ce qui concerne le filtre stabilisateur 44, sa mise en parallèle avec le filtre
feedback 42 permet d'augmenter la marge de phase de ce dernier notamment dans la zone critique
de l'effet
waterbed. Et pour compenser la diminution de phase due à l'acoustique, en particulier du fait
du chemin acoustique de propagation du son du transducteur vers le microphone d'erreur
(fonction de transfert
Ha) le filtre stabilisateur crée une résonance locale dans cette zone permettant d'accroître
la phase et augmenter ainsi la marge de phase.
[0077] Ces différents aspects sont visibles en particulier sur les exemples de diagrammes
des Figures 13 à 17.
[0078] La Figure 13 illustre le lieu de Black du système, c'est-à-dire la représentation
cartésienne du module de la boucle ouverte (
HaHFB) en fonction de sa phase, en faisant varier la fréquence de 0 Hz à l'infini. En traçant
ce lieu de Black, on peut facilement lire les marges de gain et de phase, qui sont
données par l'intersection du lieu avec les deux axes passant par le point d'instabilité
O, situé à 0 dB et 0°.
[0079] Sur la Figure 13, on a tracé en trait interrompu le lieu de Black avec le filtre
feedback seul avant réduction de la bande passante, et en trait continu ce même filtre mais
avec la bande passante réduite (mais sans le stabilisateur). Initialement, les marges
de gain et de phase ΔM et Δφ sont respectivement de -12 dB et 25°, et l'on voit que
la réduction de la bande passante permet d'accroître ces valeurs à respectivement
+18 dB et plus de 60°.
[0080] Les Figures 14 à 17 représentent, pur le circuit de la figure 7 :
- Figure 14 : le module de la fonction de transfert du filtre feedback ;
- Figure 15 : la phase de la fonction de transfert du filtre feedback ;
- Figure 16 : le tracé de Nyquist ;
- Figure 17 : la caractéristique d'atténuation, en boucle fermée.
[0081] On a représenté sur ces figures :
- en A la caractéristique correspondant au filtre feedback originel avec sa préamplification G3, avant réduction de la bande passante ;
- en B cette même caractéristique A, mais après réduction de la bande passante ;et
- en C la caractéristique finale, c'est-à-dire la caractéristique B après adjonction
du filtre stabilisateur 44 avec sa préamplification G2.
[0082] Comme on peut le voir en comparant sur la Figure 14 les caractéristiques A et B (ou
C), la bande passante originelle du filtre qui était de 80-160 Hz, soit une largeur
de 80 Hz (caractéristique A) a été réduite à 65-115 Hz, soit une largeur de 50 Hz,
réduite (caractéristique B ou C).
[0083] Cette réduction de bande passante permet, comme on l'avait vu à l'examen de la Figure
13, d'augmenter sensiblement les marges de gain et de phase et de contribuer ainsi
à une stabilité accrue du système.
[0084] L'examen de la Figure 15 montre que l'utilisation du filtre stabilisateur 44 augmente
sensiblement, d'environ 30 à 35°, la phase dans la zone instable de l'effet
waterbed, autour de 1 kHz.
[0085] On constate sur la Figure 16 que cette augmentation de phase éloigne notablement
la boucle ouverte de la zone d'instabilité. Cette figure est un tracé de Nyquist sur
lequel on a indiqué en trait interrompu la zone N d'amplification du bruit. Comme
on peut le constater, dans aucune des trois configurations A, B ou C le système n'entoure
le point d'instabilité O : ces systèmes sont donc théoriquement tous stables. Toutefois,
la réduction de la bande passante du filtre
feedback (passage de A à B) et son association avec un filtre stabilisateur (passage de B
à C) éloigne à chaque fois le tracé du point d'instabilité, contribuant ainsi à une
meilleure stabilité globale du système.
[0086] La courbe d'atténuation théorique de la Figure 17 montre que la zone de l'effet
waterbed à 1 kHz est diminuée. On peut noter que la zone d'effet
waterbed à 6 kHz est dégradée mais ne dépasse pas 4 dB, comme celle à 1 kHz. Cette figure
illustre l'atténuation simulée de la boucle fermée, où l'on peut constater une réduction
de la profondeur de l'effet
waterbed dans la zone des 1 kHz du système A vers le système B (amélioration de 4 dB) et du
système B vers le système C (amélioration de +3 dB). La perte d'atténuation, d'environ
-5 dB, constatée dans la zone 100-800 Hz entre le système A et le système B ou C sera
compensée par le contrôle actif procuré par le filtre
feedforward fixe 32.