(57) Un procédé de gestion du fonctionnement d'un camion de transport frigorifique de
produits thermosensibles, du type à injection indirecte, où le camion est muni :
- d'au moins une chambre de stockage des produits,
- d'une réserve d'un fluide cryogénique tel l'azote liquide ou le CO
2 liquide,
- d'un système d'échangeur thermique dans lequel circule le fluide cryogénique, système
d'échangeur comprenant au moins un échangeur thermique interne à ladite au moins une
chambre,
- ainsi que d'un système de circulation d'air, par exemple de type ventilateurs, apte
à mettre en contact l'air interne à la chambre avec les parois froides du ou des échangeurs
interne(s) à ladite au moins une chambre ;
se caractérisant en ce que l'on ordonne une opération de dégivrage dudit échangeur
par la prise en compte de la pente de descente de la température de reprise d'air
de l'échangeur
Tint et de l'écart de température entre la température de reprise d'air de l'échangeur
Tint et une valeur de consigne visée pour la température à l'intérieur de ladite au moins
une chambre,
Consint.
[0001] La présente invention concerne le domaine du transport et de la distribution de produits
thermosensibles, tels les produits pharmaceutiques et les denrées alimentaires. Dans
ce domaine, le froid nécessaire au maintien de la température des produits est fourni
principalement par deux technologies différentes :
- les groupes frigorifiques à compression mécanique de vapeur fonctionnant en boucle
fermée ;
- les groupes cryogéniques fonctionnant en boucle ouverte et mettant en oeuvre une injection
directe ou indirecte de fluides cryogéniques et en particulier d'azote liquide.
[0002] La présente invention s'intéresse plus particulièrement aux solutions cryogéniques
à injection indirecte. Dans de telles solutions, le fluide cryogénique est acheminé
depuis un réservoir cryogénique embarqué sur le camion frigorifique (en général en
dessous du camion) jusqu'à un ou plusieurs échangeurs thermiques situés à l'intérieur
de la ou les chambres froides du camion, échangeurs munis de moyens de circulation
d'air. Ces échangeurs permettent le refroidissement, à la température désirée, de
l'air interne de la chambre stockant les produits.
[0003] L'invention s'intéresse au problème bien connu de l'accumulation de givre sur l'échangeur.
En effet, au cours du fonctionnement du système, différents apports d'humidité peuvent
avoir lieu :
- l'humidité présente naturellement dans l'enceinte ;
- l'humidité des produits transportés ;
- l'humidité provenant de la différence d'environnement entre l'extérieur et l'intérieur
de l'enceinte lors des ouvertures des portes du camion pour la livraison des denrées.
[0004] En effet, des camions réalisent traditionnellement des tournées de livraison, au
cours desquelles les marchandises transportées sont déchargées progressivement, à
plusieurs points de livraisons successifs.
[0005] Au cours de ce déchargement, les portes du camion sont ouvertes, et la différence
de température entre l'air froid contenu dans la caisse et l'air ambiant extérieur,
conduit à une entrée d'air extérieur dans la caisse qui renouvelle l'air de la caisse
en 1 ou 2 minutes.
[0006] L'air extérieur étant humide, cette entrée d'air extérieur, lors d'une ouverture
de porte, entraine une augmentation de l'humidité à l'intérieur de la caisse, qui
à la remise en route du groupe frigorifique, se dépose sur les parties les plus froides
du système, à savoir la batterie d'échangeur.
[0007] Le givrage de la batterie s'accentue ainsi avec le nombre d'ouvertures de porte,
réduisant la capacité d'échange et donc la puissance frigorifique de l'échangeur :
- La couche supplémentaire de givre agit comme une couche d'isolant, réduisant le transfert
thermique ;
- La couche supplémentaire de givre réduit les sections de passage d'air au sein de
l'échangeur, diminuant ainsi le débit d'air.
[0008] La puissance frigorifique diminuant, le risque existe de ne plus pouvoir maintenir
la température de consigne nécessaire pour les marchandises transportées, tout particulièrement
si ce sont des marchandises surgelées et il est alors décidé, pour éviter ce risque,
de déclencher un dégivrage de la batterie de l'échangeur.
[0009] Rappelons que le contrôle de procédé typiquement mis en oeuvre dans de tels camions
fonctionnant en injection indirecte est le suivant :
- 1- lors de la mise en route du système frigorifique du camion (par exemple au démarrage
d'une tournée du camion ou après un arrêt prolongé du système frigorifique pour une
raison quelconque) ou encore après une ouverture de porte, on adopte un mode de descente
rapide en température (cette industrie nomme cette phase « pull down »).
- 2- Une fois la température de consigne atteinte dans la chambre de stockage des produits,
on adopte un mode de contrôle/régulation qui permet de maintenir la température de
la chambre de stockage des produits à la valeur de la consigne (phase de « maintien
»).
[0010] Les professionnels de ce secteur parlent également d'un fonctionnement en pleine
charge (phase 1) ou à charge partielle (phase 2).
[0011] La littérature fait état de différentes stratégies pour dégivrer de tels échangeurs
de groupes cryogéniques, parmi lesquelles on trouve les approches suivantes :
- la présence de résistances électriques intégrées dans le corps de l'échangeur et alimentées
par des batteries électriques : cette solution a l'avantage d'être facile à intégrer
mais son inconvénient majeur réside dans sa limitation en termes de puissance thermique,
en raison de la faible autonomie électrique disponible sur un camion.
- l'utilisation d'échangeurs aérothermiques alimentés par une chaudière à combustion
: l'air est chauffé directement ou indirectement via une boucle de fluide caloporteur.
L'avantage de ce type de solution est sa disponibilité sur le marché. En revanche,
en tant que modules séparés, l'encombrement et l'alimentation fluidique et électrique
de ces éléments peuvent engendrer des inconvénients en termes d'autonomie électrique,
de qualité de maintien de la température dans la caisse et de coût d'achat, d'installation
et de maintenance.
[0012] On notera aussi que ces modes de dégivrage requièrent un temps d'action qui peut
être pénalisant lors du fonctionnement du système car le refroidissement ne peut pas
fonctionner en même temps.
[0013] Examinons maintenant comment sont déclenchées dans ces méthodes de l'art antérieur
les actions de dégivrage :
i) elles peuvent être déclenchées selon un fonctionnement cyclique : par exemple selon
une durée du cycle qui est préfixée par le constructeur et peut être paramétrée par
l'utilisateur. L'avantage de ce système de déclenchement est que le dégivrage est
régulier, cependant, le dégivrage est réalisé indépendamment de la quantité de givre
présent sur l'échangeur, et donc de la réduction de la puissance de l'échangeur. Aussi,
selon les conditions opératoires du camion frigorifique et la masse effective du givre
accumulée sur l'échangeur, cette durée peut être sous-estimée, il en résulte alors
une dégradation prématurée de la puissance de l'échangeur, synonyme d'un non retour
à la température de consigne après ouverture de porte, d'où une dégradation de la
qualité de la chaine du froid. On peut au contraire mettre en oeuvre, par cette durée
préfixée, une durée trop conservatrice et donc une consommation énergétique inutile.
j) elles peuvent également être déclenchées manuellement par l'opérateur. L'optimisation
du dégivrage par rapport à l'encrassement de l'échangeur dépend donc seulement de
l'opérateur.
[0014] Les inconvénients de ces modes de déclenchement selon i) et j) peuvent être résumés
ainsi :
- le dégivrage est déclenché soit trop tôt soit trop tard : trop tôt, quand la puissance
nominale de l'échangeur est encore atteinte et donc le dégivrage représente une perte
de temps et une consommation énergétique excessive du système, ou bien trop tard quand
l'échangeur a déjà une puissance réduite.
- le dégivrage est déclenché de façon non optimisée, ce qui peut engendrer des variations
de température importantes :
-- > trop fréquent, l'apport de calories dû au mode de dégivrage est trop important
;
-- > trop étendu : l'échangeur n'a plus suffisamment de puissance pour permettre un
retour à la température de consigne.
k) déclenchement par relevés de température : Le givrage de la batterie est classiquement
détecté par l'augmentation du pincement de l'échangeur, soit sur le fluide frigorigène
(différence entre la température d'air de reprise et la température du fluide frigorigène
en sortie de batterie), soit sur l'air (différence entre la température d'air de reprise
et la température d'air soufflée), où :
- Tint est la température de l'air en entrée de l'échangeur ;
- Tsortie fluide : est la température des vapeurs froides sortant de l'échangeur ; et
- Tair soufflé est la température de l'air « soufflé » i.e la température de l'air, devenu froid,
après sa traversée de l'échangeur.
[0015] Le pincement de l'échangeur s'exprime alors ainsi
Tint -
Tsortie fluide, tandis que l'écart de température sur l'air s'exprime ainsi
Tint -
Tair soufflé.
[0016] Lorsque l'accumulation du givre est importante sur l'échangeur, le fluide frigorigène
ne transfère pas toute l'énergie disponible à l'air. Le fluide frigorigène à la sortie
de l'échangeur est alors plus froid que dans les conditions nominales, l'air est également
moins refroidi. La température de l'air en sortie d'échangeur est donc plus chaude.
L'écart entre la température d'air à l'entrée et la sortie de l'échangeur sera alors
plus important. Si ces deux facteurs sont observés, le dégivrage est mis en fonctionnement.
[0017] On peut signaler que ce mode de dégivrage est couramment utilisé et fonctionne de
façon satisfaisante. Cependant, il faut garder à l'esprit qu'il repose sur la présence
de plusieurs sondes de température et que si l'une d'elle est défaillante ou présente
une dérive de mesure, il en résultera alors au mieux un dégivrage non-optimisé, voire
dans le cas le plus défavorable un défaut de déclenchement du dégivrage.
[0018] Il faut aussi mentionner que l'échangeur n'étant plus en mesure de produire du froid
lors d'un dégivrage, une durée de dégivrage allongée expose au risque de ne pas pouvoir
revenir, à l'issue du dégivrage, à la température de consigne avant une nouvelle livraison.
Il est donc de ce fait important afin de maintenir la meilleure chaine du froid possible,
dans le cas d'un dégivrage électrique dont l'alimentation est réalisé au moyen de
batteries électriques, d'optimiser le critère de déclenchement du dégivrage et de
minimiser le nombre de dégivrages au cours d'une tournée.
[0019] Comme on le verra plus en détails dans ce qui suit, la présente invention propose
une solution technique aux problèmes ci-dessus évoqués, une solution que l'on peut
qualifier de « dégradée ». En effet, elle propose, afin de s'assurer que le dégivrage
d'un échangeur n'entraine pas un écart trop important de la température de l'air dans
la caisse par rapport à la température de consigne, de dégrader volontairement la
fréquence de dégivrage de la batterie de l'échangeur, en ajoutant des critères à ceux
qui sont utilisés dans les algorithmes pratiqués classiquement, à savoir le pincement
du fluide frigorifique ou le pincement air.
[0020] On propose donc de prendre en compte les critères suivants :
- la température de l'air de reprise de l'échangeur : en effet, si la température de
reprise d'air de l'échangeur est proche (par exemple avec un écart de 5 degrés ou
moins) de la température de consigne, il est judicieux d'anticiper le dégivrage de
l'échangeur, d'une durée raisonnable (par exemple environ 10 minutes) par rapport
à celui qui serait déclenché avec un algorithme classique.
[0021] En effet, lors d'un dégivrage déclenché à une température proche de la consigne,
la température dans la caisse ne s'écartera pas substantiellement de la température
de consigne, même si la production de froid est coupée et ce grâce à l'isolation thermique
de la caisse.
- la pente de descente de la température de reprise d'air, mesurée en °C/min. En effet,
même si l'échangeur est givré et que les critères de déclenchement du dégivrage des
algorithmes classiques sont atteints, la puissance frigorifique de l'échangeur, même
si elle est substantiellement inférieure à sa puissance nominale, peut être suffisante,
compte-tenu de la taille de la chambre à refroidir et de l'éventuelle présence de
marchandises qui limite le volume d'air à refroidir.
[0022] Ainsi, tant que la pente de descente en température reste supérieure ou égale à une
valeur cible, par exemple comprise entre 0,2 et 0,4 °C/min, alors que la température
de reprise d'air diffère substantiellement (de plus de 5°C par exemple) de la température
de consigne, la présente invention propose de différer le dégivrage, même si les critères
des algorithmes classiques sont atteints.
[0023] En d'autres termes selon la présente proposition, le dégivrage ne sera déclenché
que si la pente de descente en température est inférieure à la valeur cible (consigne)
alors que la température de reprise d'air s'approche de la température de consigne,
par exemple à moins de 5°C.
[0024] La présente invention concerne alors un procédé de gestion du fonctionnement d'un
camion de transport frigorifique de produits thermosensibles, du type à injection
indirecte, où le camion est muni :
- d'au moins une chambre de stockage des produits,
- d'une réserve d'un fluide cryogénique tel l'azote liquide ou le CO2 liquide,
- d'un système d'échangeur thermique dans lequel circule le fluide cryogénique, système
d'échangeur comprenant au moins un échangeur thermique interne à ladite au moins une
chambre,
- ainsi que d'un système de circulation d'air, par exemple de type ventilateurs, apte
à mettre en contact l'air interne à la chambre avec les parois froides du ou des échangeurs
interne(s) à ladite au moins une chambre ;
se caractérisant par la mise en oeuvre des mesures suivantes :
- a) on dispose d'une sonde de température apte à mesurer la température de reprise
d'air de l'échangeur Tint i.e la température de l'air en entrée de l'échangeur ;
- b) on dispose de moyens permettant d'évaluer la pente de descente de la température
de reprise d'air Tint, mesurée en °C/min ;
- c) et l'on ordonne une opération de dégivrage dudit échangeur quand les conditions
suivantes sont atteintes :
- la pente de descente de la température de reprise d'air est inférieure à une valeur
cible ConSPenteTint;
et
- l'écart de température Tint - ConSint, est inférieure à une valeur cible Cons(Tint - Consint), où ConSint est une valeur de consigne visée pour la température à l'intérieur de ladite au moins
une chambre.
[0025] La valeur cible
Cons(Tint - Consint) est avantageusement comprise entre 3 et 6 °C, par exemple est égale à 5°C.
[0026] L'opération de dégivrage est alors arrêtée par exemple :
- quand la température de surface de la batterie atteint 5°C ; ou
- quand la durée de l'opération de dégivrage atteint une durée prédéfinie (par exemple
établie par l'expérience), par exemple située dans la gamme allant de 10 à 30 minutes.
1. Procédé de gestion du fonctionnement d'un camion de transport frigorifique de produits
thermosensibles, du type à injection indirecte, où le camion est muni :
- d'au moins une chambre de stockage des produits,
- d'une réserve d'un fluide cryogénique tel l'azote liquide ou le CO2 liquide,
- d'un système d'échangeur thermique dans lequel circule le fluide cryogénique, système
d'échangeur comprenant au moins un échangeur thermique interne à ladite au moins une
chambre,
- ainsi que d'un système de circulation d'air, par exemple de type ventilateurs, apte
à mettre en contact l'air interne à la chambre avec les parois froides du ou des échangeurs
interne(s) à ladite au moins une chambre ;
se caractérisant par la mise en oeuvre des mesures suivantes :
a) on dispose d'une sonde de température apte à mesurer la température de reprise
d'air de l'échangeur Tint i.e la température de l'air en entrée de l'échangeur ;
b) on dispose de moyens permettant d'évaluer la pente de descente de la température
de reprise d'air Tint, mesurée en °C/min ;
c) et l'on ordonne une opération de dégivrage dudit échangeur quand les conditions
suivantes sont atteintes :
- la pente de descente de la température de reprise d'air est inférieure à une valeur
cible ConsPenteTint;
et
- l'écart de température Tint - Consint, est inférieure à une valeur cible Cons(Tint - Consint), où ConSint est une valeur de consigne visée pour la température à l'intérieur de ladite au moins
une chambre.
2. Procédé selon la revendication 1, se caractérisant en ce que la consigne ConsPenteTint est comprise entre 0,2 et 0,4 °C/mn.
3. Procédé selon la revendication 1 ou 2, se caractérisant en ce que la valeur cible Cons(Tint-Consint) est comprise entre 3 et 6 °C, par exemple est égale à 5°C.